
Le récent article du Middle East Institute dresse un état des lieux préoccupant — mais partiel — de la situation hydrique du Maroc. À juste titre, il souligne la vulnérabilité du Royaume face à la variabilité climatique, l’impact des sécheresses répétées sur l’agriculture et les limites des récentes précipitations pour enrayer un cycle hydrologique profondément déséquilibré. Mais cette lecture, centrée sur les conséquences immédiates, néglige l’essentiel : la mutation stratégique opérée par le Maroc pour affronter, avec lucidité et volontarisme, un stress hydrique devenu structurel.
Depuis le déclenchement de la sécheresse historique en 2018, le Maroc n’a cessé de revoir sa politique de l’eau, passant d’une logique de gestion conjoncturelle à une approche intégrée, proactive et multisectorielle. Ce changement d’échelle se traduit aujourd’hui par des projets de très grande envergure, portés au plus haut niveau de l’État et visant à rompre avec la dépendance exclusive aux précipitations.
Depuis le déclenchement de la sécheresse historique en 2018, le Maroc n’a cessé de revoir sa politique de l’eau, passant d’une logique de gestion conjoncturelle à une approche intégrée, proactive et multisectorielle. Ce changement d’échelle se traduit aujourd’hui par des projets de très grande envergure, portés au plus haut niveau de l’État et visant à rompre avec la dépendance exclusive aux précipitations.
Les autoroutes de l’eau : un tournant territorial
Lancé officiellement en 2023, le programme des “autoroutes de l’eau” symbolise ce basculement stratégique. Il vise à interconnecter les bassins hydriques pour transférer l’eau des régions excédentaires (comme le nord) vers les zones structurellement déficitaires (comme le centre et le sud). Le premier tronçon reliant le barrage Sidi Mohammed Ben Abdellah à la région de Casablanca-Settat est déjà opérationnel, permettant de sécuriser l’alimentation en eau potable de plus de 7 millions d’habitants. D’autres chantiers sont en cours pour étendre ce réseau vital à l’échelle nationale.
Désalement : cap sur la souveraineté hydrique
Autre levier majeur : la généralisation des stations de dessalement d’eau de mer, notamment le long des côtes atlantiques et méditerranéennes. Le Maroc dispose déjà de plusieurs unités en service — à Laâyoune, Agadir, et bientôt Casablanca — avec une ambition clairement affirmée : porter la capacité de dessalement à 1 milliard de m³ par an à l’horizon 2030. Ces projets sont conçus pour répondre à la fois aux besoins en eau potable des grandes agglomérations et à l’irrigation des zones agricoles sensibles.
Recyclage et recharge : mobiliser chaque goutte
En parallèle, des programmes pilotes de réutilisation des eaux usées traitées ont été lancés, en particulier pour les espaces verts urbains, l’industrie et certaines cultures agricoles. Le Maroc mise également sur la recharge artificielle des nappes phréatiques, aujourd’hui surexploitées, afin de reconstituer des réserves naturelles durables et résilientes face aux périodes de stress prolongé.
Un effort d’accompagnement humain et institutionnel
Cette politique ne se limite pas aux infrastructures. Des campagnes d’éducation à la sobriété hydrique, menées dans les écoles, les mosquées et les médias, accompagnent chaque initiative technique. Le ministère de l’Équipement et de l’Eau, en coordination avec les collectivités territoriales, a renforcé les dispositifs de gouvernance locale, incitant les citoyens à devenir acteurs de la gestion de l’eau, et non plus simples usagers.
Vers un modèle marocain de résilience hydrique
Face à un climat de plus en plus erratique, le Maroc ne se contente pas de réagir : il planifie, investit et transforme. Ce que l’article du Middle East Institute n’a pas suffisamment souligné, c’est le changement de paradigme engagé par le Royaume, dont la politique hydrique repose désormais sur l’anticipation, la diversification des ressources et la mobilisation collective.
Oui, les pluies de 2025 ont offert un sursis. Mais l’État marocain, fidèle à la vision portée par Sa Majesté le Roi Mohammed VI, a compris que la pluie ne suffit plus. L’avenir ne se construira pas au gré des nuages, mais au fil des projets structurants, des innovations durables et d’une gouvernance responsable.
Ce modèle mérite d’être reconnu — et étudié. Car à l’heure où de nombreux pays de la région, et bien au-delà, affrontent à leur tour la crise de l’eau, le Maroc démontre qu’un pays peut transformer une vulnérabilité climatique en levier de réforme et de résilience nationale.