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Aviculture : Un remue-ménage attendu dès 2020


Jeudi 12 Décembre 2019

En aval, la mise à niveau des circuits de commercialisation et de distribution des volailles sera enclenchée dès janvier prochain. 15.000 tueries ou «riachattes» seront transformées en unités d’abattage de proximité ou en points de vente.

Le bilan est mitigé, à un an de l’arrivée à échéance du contrat-programme avicole (2011-2020). Toutefois, les clignotants sont au vert concernant l’amont (élevage et production) et l’export. « Les principaux objectifs du contrat-programme avicole à l’horizon 2020 ont atteint un niveau de réalisation élevé», a souligné Youssef Alaoui, président de la Fédération interprofessionnelle du secteur avicole (FISA).



Les productions des viandes de volailles et des œufs de consommation ont atteint respectivement 77% et 88% de l’objectif visé. Cette filière offre également un taux de couverture de 100% des besoins en viandes blanches et en œufs de consommation. Ce secteur présente, par ailleurs, un important potentiel à l’export. En 2018, le Maroc a exporté vers les pays de l’Afrique de l’Ouest 800 tonnes d’aliments composés, 44.000 poussins d’un jour de type chair et 30 millions d’œufs à couver de type chair.

Le pari de l’assainissement des circuits de commercialisation et de distribution des volailles n’est, néanmoins, pas encore gagné. Dans le cadre de la mise à niveau de toute la chaîne de valeur du secteur avicole, la tutelle travaille sur la transformation des tueries appelées «riachattes» en unités d’abattage de proximité ou en points de vente de viande de volailles provenant des abattoirs industriels destinés exclusivement aux ménages. Pour accompagner les opérateurs dans ce chantier prioritaire, une subvention de 30.000 DH par unité sera mise à leur disposition dès 2020.

Une réforme qui a tardé à venir vu les risques liés à la santé du consommateur. A maintes reprises, les professionnels ont appelé à la mise à niveau de l’existant ou la limitation des agréments délivrés au niveau local pour les unités qui ne prennent pas en charge, en termes d’exigences sanitaire ou normative, la nature de l’activité d’abattage. Objectif : améliorer les conditions sanitaires de ces unités, rehausser le standard et la qualité des viandes vendues au consommateur et améliorer l’image de marque des produits.

Autre problématique nuisant au secteur : les conditions et les circuits de transport de la volaille vivante qui représentent également un risque sanitaire et un vecteur de propagation dans le cas d’apparition de maladie avicole.

L’encadrement réglementaire et fiscal est également décrié par les aviculteurs. Depuis des années, ces derniers ont formulé plusieurs requêtes. Il s’agit notamment du classement des éleveurs de volailles dans le statut agricole. Malgré leurs doléances, le projet de loi de finances 2020 a fait l’impasse sur le changement de leur statut fiscal.

Les aviculteurs sont toujours considérés comme marchands de gros et non comme agriculteurs. Les professionnels expliquent que l’aviculture est une activité agricole au même titre que l’élevage de gros bétail, puisqu’elle est pratiquée au niveau des fermes et subit les mêmes contraintes climatiques et sanitaires au même titre que toutes les autres activités agricoles.

Les opérateurs demandent également la récupération de la TVA non apparente sur les prix des œufs de consommation ainsi que la mise en place d’une nomenclature douanière spécifique aux œufs SPF. A noter qu’actuellement, l’industrie des ovoproduits est soumise à une TVA de 20% dont une bonne partie est irrécupérable puisque les œufs à coquilles, principale matière première de cette industrie, sont hors champ de cette taxe, précise la fédération. Les trois unités de production existantes au Maroc ont du mal à se développer compte tenu du surcroît du coût de la production lié à cette taxe.

Les aviculteurs pointent également du doigt le paiement de 20% de TVA, non récupérable, sur tout le matériel et biens d’équipement des fermes d’élevage avicole alors que tous les produits avicoles sont hors champ d’application de cette taxe. Devant cette impasse, les investissements dans de nouveaux projets dans le secteur sont en déclin.
 
Nadia DREF

Transfert du marché de gros

Le marché de gros aux volailles de Casablanca, qui était un point noir, sera, enfin, déménagé des Roches Noires vers un terrain mis à disposition par le ministère de l’Agriculture, situé à la commune Aïn Jemaa relevant de la préfecture de Nouaceur sur une superficie de 4 hectares. Le budget alloué est estimé à 10,75 millions de DH financé conjointement par la commune de Casablanca, la tutelle et la FISA. Ce nouveau marché disposera de 52 quais de déchargement des volailles, une station de lavage des camions, un incinérateur pour la destruction des déchets et une station de traitement des eaux usées. Il sera équipé de toutes les commodités : salle de prière, cafeteria, blocs sanitaires… Les travaux d’aménagement vont commencer incessamment. Le transfert devra être effectif en 2020.

Acheteurs vs éleveurs

Pour un rééquilibrage des rapports de force entre les acheteurs et les éleveurs, plusieurs pistes de réflexions ont été proposées par les professionnels du secteur avicole. Celles-ci se déclinent comme suit : assurer une animation des places de vente par des comités d’éleveurs, mettre en place un système de cotation plus efficace et plus représentatif que le marché de gros de Casablanca, devant aboutir à terme à la création d’une Bourse du poulet et de la dinde ou encore adopter un système d’accréditation des courtiers avec possibilité d’indemnisation pour service rendu.
 
Former les pays de l’Afrique de l’Ouest

La FISA vient de décrocher l’appel à proposition de projet lancé par l’US Grain Council (USGC) pour la formation en aviculture des opérateurs des pays de l’Afrique de l’Ouest. Elle était en compétition avec 3 universités nord-américaines. Ce programme est doté d'un budget de près de 9 millions de DH. Il vise à accompagner le développement et la modernisation du secteur avicole en Afrique de l’Ouest et de promouvoir les bonnes pratiques de production et de conduite des exploitations avicoles. Il sera déployé au niveau du centre de l’Avipole de Casablanca et dans les pays concernés.
 
La production d’œufs couvre 100% de la demande

Le Maroc produit annuellement 500.000 tonnes de viande de volailles et plus de 5 milliards d’œufs. La consommation de la chair s’élève à 19 kg/habitant et celle des œufs à 200/habitant. La production locale assure 100% de la demande nationale en œufs de consommation. L’excédent est exporté vers certains pays africains. Cette filière est composée de 3 couvoirs agréés de type ponte produisant 15 millions de poussins, 252 exploitations autorisées à exercer l’élevage de poules pondeuses, 5 centres agréés de conditionnement d’œufs et 3 unités de transformation d’œufs.

Trois questions à Youssef Alaoui, président de la FISA

«Les objectifs du contrat-programme sont atteints à 95%»
 
- Quelle a été la particularité de la 22ème édition de Dawajine ?

- Nous avons retenu pour la 22ème édition de Dawajine le thème: « Le secteur avicole, un levier d’emploi pour le monde rural ». Cela nous tenait à cœur. Malheureusement, notre secteur est mal connu du consommateur qui ne retient que l’œuf et le poulet. Or, il y a vraiment une grosse industrie derrière, à savoir les aliments composés, la production de poussins, de vitamines... Ce secteur réalise un chiffre d’affaires direct de 31 milliards de DH et pèse sur le PIB agricole. Il produit également la protéine la moins chère pour le consommateur.

- Où en est la mise en œuvre du contrat-programme 2011-2020 ?

- Les objectifs sont atteints à 95% et sont même dépassés en matière de capacités de production. Là où nous n’avons pas atteint les objectifs, c’est au niveau de la modernisation des circuits de commercialisation. Nous allons y arriver. Une circulaire a été signée par les ministères de l’Intérieur, l’Agriculture et l’Industrie, pour mettre à niveau les 15.000 tueries ou « riachattes ». Elle sera opérationnelle à partir de janvier 2020. Côté valorisation, il y a du retard, mais déjà il y a des laboratoires qui se sont implantés et il y a de nouveaux produits qui sont mis sur le marché : poulet fermier, etc.
Par ailleurs, le ministère prépare un nouveau Plan Maroc Vert. Nous avons exprimé nos besoins. Le prochain défi à réussir est d’encourager l’agriculture solidaire et l’emploi en milieu rural.

- Quel est le poids de l’informel dans ce secteur ?

- C’est un secteur très organisé. Sur 9.000 fermes avicoles, il y a 8.400 unités qui sont agréées et encadrées par des vétérinaires.



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