C’est surréaliste, mais récemment un mouvement d’auteurs et d’éditeurs s’est constitué pour exiger des libraires d’aménager des coins « livres Maroc », qui existent, comble de l’ironie dans toutes les libraires du Maroc, du moins, à Rabat et Casablanca. Cette campagne n’a pas été lancée par Fouad Laroui ou Tahar Ben Jelloun mais par des auteurs et éditeurs qui se publient en autoédition, en d’autres termes à compte d’auteur, avec les difficultés que cela suppose en termes de distribution et de qualité, car sans validation par un comité de lecteurs et la logistique du distributeur qui assure le lien entre l’éditeur et le libraire.
Comment transformer un acte culturel en acte économique ? La question se pose, d’abord, en amont. Une presse qui n’a pas de succès en kiosque ne peut que mourir de sa belle mort et les annonceurs ou l’Etat n’y pourront rien car ils finiront par se rendre compte que leurs investissements et leur soutien sont condamnés à une non-rentabilité creusant le déficit de bilan annuel en bilan annuel. En termes d’image pour l’Etat et les politiques publiques, financièrement pour les annonceurs qui attendent des insertions publicitaires, des retours en termes d’augmentation des ventes, en somme de recettes. Ce schéma de la presse en kiosque est frappé d’obsolescence avec le développement de son versant numérique qui impose sa double logique commerciale, au lecteur et à l’annonceur.
Jamaa el Fna et les ferrachas
Le schéma est identique pour le cinéma : un cinéaste qui fait du cinéma d’art et d’essai ne peut pas prétendre faire salle comble. C’est une loi du genre : dans un film, dans un livre il s’agit de raconter et non de convaincre, d’éduquer ou de mobiliser. Un film de fiction n’est pas un documentaire.
Les éditeurs ne publient quasiment plus de livres sans subventions. Les subventions peuvent fonctionner jusqu’à un certain point quand elles n’ont pas d’effet pervers, mais qui peut protéger l’édition de ces effets ?
La question se pose : sur le nombre d’auteurs subventionnés, y a-t-il un Tahar Ben Jelloun ou un Abdelkébir Khatibi ? Le Grand Prix Atlas des services culturels de l’Ambassade de France a-t-il fait surgir ou couronner un Abdellatif Laâbi ou un Mohammed Khaïr-Eddine ? La composition du jury du Grand Prix Atlas est une énigme à elle seule : à la différence du Goncourt qui se compose d’écrivains reconnus et de journalistes culturels, le jury du Grand Prix Atlas est même souvent présidé par des personnalités qui ne connaissent de la littérature marocaine que ce que Mr Jourdain connaissait des différences entre prose et poésie.
Les subventions du CCM depuis des décennies ont-elles donné au Maroc, un Sydney Pollack ou un Martin Scorsese ? Une visite sur YouTube est édifiante : les films les plus visionnés ne sont pas les films subventionnés par le CCM avec de supposées « avances sur recette », mais des films de parfaits inconnus du milieu cinématographique.
Du temps de l’Union soviétique les subventions étaient justifiées d’un point de vue idéologique. Cela a donné tout de même le réalisme socialiste et un grand poète comme Maiakovski.
Quel rôle pour les médias ? L’Adn de la presse est l’information et non la promotion. Les auteurs sont convaincus que la presse doit parler de chaque livre qui parait, les éditeurs se désolent que les services de presse qu’ils distribuent ne sont pas rémunérés par des articles de presse laudatifs et incitant à l’achat... ils font ainsi la confusion entre la promotion qui relève du service commercial et la rédaction qui en est séparée par une muraille éthique, une muraille qui se nourrit de déontologie pour empêcher l’information de se transformer en action de promotion et de relation publique.
Le poids du marché. Une économie n’est viable aussi que par l’importance de son marché, intérieur et extérieur. Le marché du produit culturel marocain n’est pas le marché français auquel s’ajoute celui de l’espace francophone ou britannique qui a l’avantage du marché autrement plus large, anglo-saxon.
Le marché arabe et francophone est-il ouvert aux produits marocains ? La réponse est non. Le problème est logistique : le commerce culturel se fait vers le Maroc et non du Maroc vers d’autres pays.
La concurrence déloyale existe-t-elle sur le marché de la culture ? Les ferrachas sont-ils un danger pour les libraires, la copie pour les éditeurs, la location des journaux pour les ventes de la presse, les spectacles sur les marchés hebdomadaires, les jongleurs et conteurs de Jamaa el Fna pour les festivals Mawazine, Timitar et Gnaouas, les chanteurs de rue pour les soirées musicales ?
La question est d’ordre épistémologique : comment obtenir des réponses pertinentes, qui peuvent être déclinées en actions, quand les hypothèses sont corrompues dès lors même qu’elles sont posées ?
Comment transformer un acte culturel en acte économique ? La question se pose, d’abord, en amont. Une presse qui n’a pas de succès en kiosque ne peut que mourir de sa belle mort et les annonceurs ou l’Etat n’y pourront rien car ils finiront par se rendre compte que leurs investissements et leur soutien sont condamnés à une non-rentabilité creusant le déficit de bilan annuel en bilan annuel. En termes d’image pour l’Etat et les politiques publiques, financièrement pour les annonceurs qui attendent des insertions publicitaires, des retours en termes d’augmentation des ventes, en somme de recettes. Ce schéma de la presse en kiosque est frappé d’obsolescence avec le développement de son versant numérique qui impose sa double logique commerciale, au lecteur et à l’annonceur.
Jamaa el Fna et les ferrachas
Le schéma est identique pour le cinéma : un cinéaste qui fait du cinéma d’art et d’essai ne peut pas prétendre faire salle comble. C’est une loi du genre : dans un film, dans un livre il s’agit de raconter et non de convaincre, d’éduquer ou de mobiliser. Un film de fiction n’est pas un documentaire.
Les éditeurs ne publient quasiment plus de livres sans subventions. Les subventions peuvent fonctionner jusqu’à un certain point quand elles n’ont pas d’effet pervers, mais qui peut protéger l’édition de ces effets ?
La question se pose : sur le nombre d’auteurs subventionnés, y a-t-il un Tahar Ben Jelloun ou un Abdelkébir Khatibi ? Le Grand Prix Atlas des services culturels de l’Ambassade de France a-t-il fait surgir ou couronner un Abdellatif Laâbi ou un Mohammed Khaïr-Eddine ? La composition du jury du Grand Prix Atlas est une énigme à elle seule : à la différence du Goncourt qui se compose d’écrivains reconnus et de journalistes culturels, le jury du Grand Prix Atlas est même souvent présidé par des personnalités qui ne connaissent de la littérature marocaine que ce que Mr Jourdain connaissait des différences entre prose et poésie.
Les subventions du CCM depuis des décennies ont-elles donné au Maroc, un Sydney Pollack ou un Martin Scorsese ? Une visite sur YouTube est édifiante : les films les plus visionnés ne sont pas les films subventionnés par le CCM avec de supposées « avances sur recette », mais des films de parfaits inconnus du milieu cinématographique.
Du temps de l’Union soviétique les subventions étaient justifiées d’un point de vue idéologique. Cela a donné tout de même le réalisme socialiste et un grand poète comme Maiakovski.
Quel rôle pour les médias ? L’Adn de la presse est l’information et non la promotion. Les auteurs sont convaincus que la presse doit parler de chaque livre qui parait, les éditeurs se désolent que les services de presse qu’ils distribuent ne sont pas rémunérés par des articles de presse laudatifs et incitant à l’achat... ils font ainsi la confusion entre la promotion qui relève du service commercial et la rédaction qui en est séparée par une muraille éthique, une muraille qui se nourrit de déontologie pour empêcher l’information de se transformer en action de promotion et de relation publique.
Le poids du marché. Une économie n’est viable aussi que par l’importance de son marché, intérieur et extérieur. Le marché du produit culturel marocain n’est pas le marché français auquel s’ajoute celui de l’espace francophone ou britannique qui a l’avantage du marché autrement plus large, anglo-saxon.
Le marché arabe et francophone est-il ouvert aux produits marocains ? La réponse est non. Le problème est logistique : le commerce culturel se fait vers le Maroc et non du Maroc vers d’autres pays.
La concurrence déloyale existe-t-elle sur le marché de la culture ? Les ferrachas sont-ils un danger pour les libraires, la copie pour les éditeurs, la location des journaux pour les ventes de la presse, les spectacles sur les marchés hebdomadaires, les jongleurs et conteurs de Jamaa el Fna pour les festivals Mawazine, Timitar et Gnaouas, les chanteurs de rue pour les soirées musicales ?
La question est d’ordre épistémologique : comment obtenir des réponses pertinentes, qui peuvent être déclinées en actions, quand les hypothèses sont corrompues dès lors même qu’elles sont posées ?