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Culture

« Différent » : Moulay Seddik Rabbaj dans le roman à thèse


Rédigé par Fadoua EL BABILI le Mercredi 31 Août 2022

Dans son roman « Différent », Moulay Seddik Rabbaj présente une épopée de misère, une descente et un déclin du personnage principal en chute libre dans un abîme infernal.



« Différent » : Moulay Seddik Rabbaj dans le roman à thèse
Une structure dramatique instaure une ambiguïté narrative et énonciative qui offre au récit un sentiment de labyrinthe. Les rapports entre les personnages empruntent l’effet de miroir. La polyphonie est mise en valeur par l’enjambement des narrateurs et des points de vue de leurs personnages. Tout au long du roman, l’on pourra remarquer la dominance de trois registres : le lyrique, le pathétique et le réaliste. Toutefois, le ton ironique-satirique ne peut être négligé.

Le lyrisme se manifeste aussi bien par la romance et l’amour entre Aziz et Aymane qu’à travers l’histoire d’amour dont les héros s’avèrent être le père et Manal, sa maîtresse. Quant au réalisme, il réside dans les noms des lieux qui existent réellement et balisent les itinéraires des personnages et les événements du récit, mais aussi à travers la description des us et coutumes directement inspirées par une perspective historique du Maroc. Le pathétique est présent et traverse tout le récit.

D’abord en dénonçant la vie des Chikhates, qui n’ont pas droit au rêve de fonder une famille. Un autre sujet suscitant la compassion est celui des retraités, ceux qui attendent, dans le mouroir brûlant, leur dernier souffle. Un cortège de thèmes alimente l’oeuvre et provoque l’enthousiasme du lecteur dont la fantasia et les compétitions équestres.

Cette ambiance carnavalesque, selon la théorie de Bakhtine, est exprimée à travers un voyage dans les événements familiaux, affluents de l’Histoire contemporaine marocaine que sont les fêtes et célébrations. Les sujets tabous ont la part du lion. On y trouve la structure d’un roman à thèse, un plaidoyer en faveur de « ces autres » qui n’appartiennent ni au sexe féminin ni à son homologue masculin.

L’auteur se positionne en avocat du pronom « iel » inauguré, très récemment par le dictionnaire Robert et popularisé dans le pays de Voltaire, par d’effervescents contre-verses et débats politico-médiatiques. Ces êtres humains, rappelons-le avec l’auteur, n’ont pas choisi leur destin. Ils se pourraient même qu’ils aient lutté contre cette différence, lourde à porter, en vain, et contre ce sentiment qui les envahit tel Aziz.

Le roman évoque aussi le séisme Doha, toutes ces terres déracinées en faveur du logement économique. L’oeuvre brosse le portrait de la famille du père qui a été forcée à quitter la campagne contre une somme consistante. La connotation négative est fortement accentuée par la description. L’auteur a usé d’une panoplie de procédés pour dévoiler le mal-être de Aziz.

La dualité et le dédoublement (manifeste et caché) servent à démultiplier le personnage et faire persister sa souffrance tout en esquissant une démonstration de sa sensibilité et sa fragilité mentale. Le roman emprunte la chute à la nouvelle. Aziz pourrait-il s’inter-changer avec n’importe quel autre citoyen du monde, n’importe quel autre humain, vivant la même situation, peu importe le lieu sur la Terre des hommes ?




Fadoua EL BABILI



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