E-Sport : Premiers pas vers une industrie du gaming « Made in Morocco » [INTÉGRAL]

La ville de Rabat a accueilli, vendredi, la première édition du Morocco Gaming Expo. Une initiative pionnière en son genre au Maroc et en Afrique visant à promouvoir l'industrie nationale du gaming. L’occasion également de mettre en exergue les diverses composantes techniques, artistiques, créatives, éducatives et financières de ce secteur, dont le marché mondial est estimé à plus de 270 milliards USD et devrait atteindre plus de 610 milliards USD à l’horizon 2032. Et si ce secteur affiche une croissance exponentielle, le Maroc souhaite en tirer profit.
 
« Nous projetons de faire du gaming un des fleurons de nos Industries Culturelles et Créatives, lieu de convergence des capacités marocaines : la créativité de notre jeunesse, la richesse de notre patrimoine, et l’excellence de nos industries", a indiqué dans ce sens le ministre de la Jeunesse, de la Culture et de la Communication, Mohamed Mehdi Bensaïd. L’ambition est d’aller au-delà de la logique de « consommation passive » et d’établir une stratégie en bonne et due forme de sorte à passer à la phase « production ». Le ministre préconise ainsi une feuille de route sur quatre axes, à savoir : « la formation et l'attraction des talents », « le soutien aux entreprises locales et internationales », « la création d'infrastructures et de clusters d'innovation » et « la promotion de la marque marocaine ». Un cap atteignable, selon Soufiane Filali, directeur marketing de la Fédération Royale Marocaine des Jeux Électroniques (FRMJE), qui nous affirme que le Maroc dispose de plusieurs atouts pour asseoir les bases d’une industrie du gaming, notamment une jeunesse très dynamique et passionnée.  La présence d'une communauté de joueurs actifs et la tenue régulière d'événements gaming renforcent le potentiel du Maroc pour devenir un acteur majeur dans l'industrie du gaming, ajoute-t-il.
 
Mais les jeunes ou adolescents ne sont pas les seules cibles. Les jeux vidéo commencent à attirer également une tranche d’âge bien plus large et les personnes âgées entre 35 et 54 ans consacrent plus de temps aux jeux. Selon des professionnels rencontrés lors du Salon, en 2020, une hausse de 60% a aussi été constatée chez la tranche des 45-54 ans. 44% desdits utilisateurs appartenaient à la classe moyenne élevée.
 

 
« Les institutions d'enseignement supérieur commencent à réfléchir aujourd'hui au gaming comme étant un moyen de développer de nouvelles formations spécialisées dans le développement de ce secteur », confie Filali, ajoutant que les coûts de production relativement bas par rapport à d'autres marchés font du Maroc une destination attrayante pour les investisseurs. Aux yeux de TakayaImamura, invité d'honneur du Salon et ancien concepteur artistique du géant Nintendo, le développement du jeu vidéo en Afrique exige que les développeurs de tous les pays africains laissent libre cours à leur imagination, ce qui permettra l'émergence de nombreuses idées innovantes. Il a également déclaré que les événements tels que Morocco Gaming Expo auraient des répercussions considérables à l'international et au niveau local pour le développement de cette industrie.
 
Par ailleurs, le gouvernement multiplie les partenariats pour accompagner l’essor que connaît le gaming sous nos cieux. En témoigne la convention signée entre le Maroc et la France en marge du Gaming Expo. Celle-ci vise à renforcer la coopération bilatérale dans le domaine des jeux vidéo, mettant en avant la nécessité de la formation pour établir une véritable industrie du gaming au Maroc, ainsi que l'incubation des startups et des TPME marocaines opérant dans ce domaine. L’objectif est également de créer des incubateurs capables d'aider ces startups à grandir davantage afin d'intégrer le marché mondial et à attirer des investisseurs internationaux, soulignant l'importance de ces partenariats pour les startups marocaines. Les Chinois ont également annoncé leurs projets d'investissement au Maroc dans le domaine. Sophie Zhong, vice-présidente du groupe chinois Century Huatong, a mis en exergue l’importance du Royaume pour les producteurs chinois de jeux vidéo, du moment que le pays se profile comme un « véritable » hub fiable pour l'expansion de l'industrie du gaming vers les marchés africains.

            •          Comment évaluez-vous l’essor que connaît le secteur ces dernières années ?
 
            •          Le secteur du gaming au Maroc a connu une croissance exponentielle ces dernières années. Plusieurs facteurs ont contribué à cette expansion, notamment l'augmentation de l'accessibilité à Internet haut débit, l'essor des plateformes de streaming et une communauté de joueurs de plus en plus actifs et passionnés. Les tournois de jeux électroniques attirent de plus en plus de participants et de spectateurs et les investissements dans l'infrastructure et les événements gaming se multiplient.
Cette dynamique positive est également soutenue par des initiatives gouvernementales et des partenariats avec des entreprises internationales, d'où la création justement de la Fédération Royale Marocaine des Jeux Electroniques pour bâtir un écosystème de jeux électroniques au Maroc.
 
            •          Rabat est depuis quelques temps la capitale du gaming au Maroc (et aspire à devenir un hub au niveau africain). En quoi consiste le projet Rabat Gaming City ?
 
            •          Le projet Rabat Gaming City est une initiative du ministère de la Jeunesse, de la Culture et de la Communication visant à attirer des investisseurs au niveau national et international et à créer des opportunités d'emploi dans ce domaine pour les jeunes talents marocains. Ce projet inclut la création d'infrastructures modernes dédiées aux jeux électroniques telles que des studios de développement de jeux et des espaces de co-working pour les startups dans le secteur. En outre, Rabat Gaming City prévoit l'organisation régulière d'événements, de conférences et de workshops pour favoriser les échanges et la collaboration entre les professionnels du gaming.
 
            •          Que signifie le gaming pour la jeunesse marocaine, est-ce, entre autres, une discipline qui constitue une vocation pour beaucoup de jeunes ?
 
            •          Pour la jeunesse marocaine, le gaming est bien plus qu'un simple loisir, je dirais c'est une véritable passion qui permet de développer des compétences variées telles que la réflexion, la stratégie, la coordination ou la communication. Il faut savoir qu'un gamer prend une décision en moyenne toutes les dix millisecondes. Dans chaque décision qu’il prend, il a pratiquement huit options possibles. Pour beaucoup de jeux, cela représente aussi une opportunité de carrière dans différents domaines, comme le développement de jeux, l’e-Sport, le streaming, la création de contenu, le brand content et les réseaux sociaux. Les profils « gamer » sont très prisés par des entreprises aujourd'hui qui, parfois même, remplacent l'interview, l'entretien classique, par des simulations gaming, pour pouvoir juger les compétences d’un profil.
En plus, les joueurs, aujourd'hui, ont des compétences dans le domaine du digital en général, parce qu'ils utilisent la cryptomonnaie, ils sont habitués à travailler avec de l'Intelligence Artificielle, sur le Metaverse. Ils développent beaucoup d'attributs en jouant, qui font des jeunes marocains aujourd'hui un profil très recherché dans l'industrie du gaming, mais même au-delà.

- Le nombre de joueurs mondiaux atteindra 3,38 milliards, les régions émergentes étant le moteur de la croissance des joueurs ;
- Le marché mondial des jeux génère des revenus de 187,7 milliards USD ;
- Le marché mondial des jeux générera des revenus annuels de 212,4 milliards de dollars en 2026 ;
- Le cloud gaming et la réalité virtuelle (et la réalité étendue) sont en croissance mais restent des marchés de niche ;
- Les créateurs de jeux sur le marché des consoles et des PC se concentrent beaucoup sur les jeux en direct, cependant, l’afflux de contenu et le nombre limité de joueurs remettent en question la durabilité des services en direct ;
- L’IA générative fait déjà partie du développement de jeux, même si les fans se sont déjà opposés à son utilisation dans certains jeux ;
- Le genre le plus populaire sur le segment des consoles est l’aventure, qui représentera 17,1% des revenus des consoles en 2023.

Le Maroc est un "véritable" hub pour l'expansion de l'industrie du gaming vers les marchés africains, a affirmé, samedi à Rabat, Sophie Zhong, vice-présidente du groupe chinois Century Huatong.
 
Lors d'une conférence de presse organisée en marge de la première édition du "Morocco Gaming Expo 2024", Mme Zhong a souligné le rôle central du Maroc comme hub stratégique pour l'industrie des jeux électroniques en Afrique. Cette conférence a été l'occasion pour un groupe d'investisseurs chinois d'annoncer leurs projets d'investissement au Maroc dans le domaine des jeux vidéo et de discuter des moyens de développer cette industrie.
 
Soulignant le développement significatif des infrastructures au Maroc, la responsable du Century Huatong Group, spécialisé dans le développement et l'exploitation des jeux en ligne, a affirmé que ce développement "positionne le pays comme un véritable hub pour l'accès aux marchés africains".
 
Mme Zhong a également noté l'ambition du Maroc de développer l'industrie du jeu, saluant les efforts du Royaume dans ce sens et son expérience accumulée dans le domaine des Industries Culturelles et Créatives. Elle a, par ailleurs, appelé à une localisation adéquate des industries électroniques au Maroc, en particulier, et sur le continent, en général, à même de favoriser les intérêts mutuels et de promouvoir les jeux vidéo, qui connaissent un fort engouement de la part de larges segments de la population marocaine.
 
À cet égard, Mme Zhong a souligné la nécessité de tirer pleinement parti des systèmes éducatifs locaux qui utilisent les jeux vidéo à des fins pédagogiques, notant la possibilité de faire venir des enseignants chinois au Maroc à cette fin et pour aider l'industrie électronique marocaine en général.