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Culture

Ecriture, lecture et transmission : L’édition et la presse écrite ne sont pas en crise, mais en évolution


Rédigé par Abdallah BENSMAÏN le Mercredi 8 Septembre 2021

Le livre et la presse écrite ne vont pas disparaître. C’est le support qui fait sa transformation et évolue. Si le support se transforme, la distribution et la lecture suivent également ce mouvement



Une liseuse qui tourne les pages du livre numérique
Une liseuse qui tourne les pages du livre numérique
La logique est simple : elle est darwinienne. L’édition qui a prospéré avec le support papier a ainsi le choix: se transformer, en somme évoluer, ou disparaître à plus ou moins longue échéance.

Aucun secteur n’a échappé à la transformation numérique (production, distribution, consommation, publicité, etc.) -selon quel ordre autre l’édition y échapperait-elle ? Le verdict peut paraître expéditif mais les chiffres de cette évolution sont là - et ils ne sont pas dus à la pandémie du Coronavirus ! - : la lecture digitale n’a pas seulement gagné du terrain, elle tend à s’imposer dans la presse écrite comme dans l’édition de livres, littéraires en particulier.

Depuis une décennie, la transformation digitale qui travaille le modèle de l’édition ne laisse aucune chance aux modèles traditionnels : les chaînes de télévision sont débordées par le modèle Youtube, le livre et la presse, par la lecture digitale qui offre confort et simplicité à la consultation en ligne. Qui regarde les 20 h, ces grandes messes de l’information télévisuelle, comme il y a une dizaine d’années ?

Les lecteurs comme Kindle d’Amazon ou Apple Books de la marque à la pomme semblent même dépassés par une sorte d’accès « libre livre » à la lecture sur les écrans d’ordinateurs, tablettes et autres smartphones.

La lecture sur papier, c’est une révolution qui a régné pendant 5 siècles environ, depuis Gutenberg, qui s’achève ou, plus précisément, se transforme pour continuer d’exister à travers l’écrit et la lecture. La disparition du papyrus n’avait pas fait disparaître l’écriture et moins encore la lecture qui représentent, à elles seules à côté de l’oralité, l’alpha et l’oméga de la transmission culturelle, en somme des savoirs de l’humanité.

Les transformations qui ont précédé, accompagné et suivi cette révolution, s’inscrivent dans cette sorte d’évolution des espèces sans laquelle elles seraient promises au déclin et à la disparition. La presse écrite qui semble vivre une sorte de fin « d’âge d’or » a reçu, avec internet qui semble se dresser en barrière devant son expansion, un choc autrement plus décisif pour sa survie qu’avec la radio et ensuite la télévision qui offraient – et offrent toujours ! – distraction et information.

La lecture devient numérique

Dans la presse, la disparition du plomb des linotypes n’a pas fait disparaître « la saisie » des articles et moins encore la mise en page. Les tâches manuelles ont été réduites dans le sens de la simplification, amenant des réelles améliorations graphiques, impossibles à obtenir manuellement.

Le travail des illustrations qu’autorisent les logiciels de traitement de l’image, les mises en forme que permettent des logiciels dédiés à la mise en page, sont impossibles à imaginer dans le processus manuel qui caractérisait l’édition de livres et la publication périodique, en particulier quotidienne, de la presse. Le tournant qui se négocie actuellement réside dans la juste mesure de cette évolution dont l’irréversible semble relever de l’évidence.

Dans la presse, par exemple, la mesure d’audience, pour avoir un sens et un degré de réalité non discutable, a introduit la lecture sur les supports numériques : ordinateurs, tablettes, smartphones, podcasts. Le défi pour la presse, comme pour le livre, est de trouver son modèle digital. La culture de la gratuité sur internet marquant le pas, il est possible en effet d’imaginer pour la presse des modèles « payant », à l’article ou à l’édition complète, comme cela commence à se faire à travers le monde.

Au niveau international, le New York Times qui affiche au compteur environ 7,5 millions « pur web », en 2021, est le quotidien qui aligne le plus d’abonnés, suivi par le Washington Post, 3 millions. En Europe, pour rester avec la presse généraliste, The Guardian aligne 790.000 abonnés, Bild 490.000, Corriere Della Sera, 300.000.

Pour aller vers le modèle digital, Le Monde a même augmenté de 30% les effectifs de la rédaction, une option « numérique » a contribué à l’inversion de la tendance baissière des ventes qu’enregistre la presse écrite dans son ensemble et ramène à ce quotidien emblématique de la presse française 300.000 abonnés sur internet.

Au Maroc, le rythme d’évolution, à défaut d’informations statistiques fiables, le rythme de transformation semble marqué par la lenteur. Les données de la Fondation du Roi Abdul Aziz Al-Saoud pour les études islamiques et les sciences humaines donnent les chiffres suivants : 112 revues numériques éditées au cours de l’année 2018-2019, dont 88 en langue arabe contre 24 pour le français, et 745 ebooks dont 439 en arabe et 255 en français.

« La lecture numérique » reste dans le flou et aucun chiffre n’apparaît dans les informations éparses qui circulent, ici et là, sur l’édition et la lecture en général. Autant dire que l’avenir numérique appartient à ce secteur qui crie au sinistre mais ne semble pas pressé de faire sa mutation aussi bien en termes de production (support) que de distribution (vente numérique).

Abdallah BENSMAÏN

 



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