Il est facile de poser une mine mais il est beaucoup difficile de s’en débarrasser. C’est le défi de tout pays qui avance sur une terre conquise après un conflit armé. C’est le cas de l'Azerbaïdjan qui, après s'être emparé du Karabakh, suite à la guerre de 44 jours contre l’Arménie, s’est retrouvé avec un territoire ultra miné.
Un défi aux conséquences graves sur les populations civiles, dont près de 361 personnes ont péri d’explosions de mines, selon les chiffres dévoilés, le 29 mai, par le président de la République azerbaïdjanaise, Ilham Aliyev, lors d’une conférence internationale sur le thème « Atténuer l’impact environnemental des mines terrestres : mobilisation des ressources pour un avenir sûr et vert».
Le leader azerbaidjanais, fraichement réélu à la présidence de la République, a tiré la sonnette d’alarme sur les conséquences que représentent les mines sur les populations civiles tout en dévoilant leur impact au Karabakh, que son pays a repris à l’Arménie suite à la guerre éclair de 2020. “Depuis le début de la guerre, plus de 3400 de nos citoyens ont souffert des mines, dont 358 enfants et 38 femmes”, a déclaré le Chef d'État accusant l’Armée arménienne de refuser de partager la localisation des mines qu’elle a posées sur le territoire dit libéré aux autorités azerbaïdjanaises.
Le foisonnement des mines empêche l'Azerbaïdjan de rapatrier rapidement les populations civiles déplacées après la première guerre du Karabakh qui remonte aux années 90. Leur nombre est estimé à 800 000 personnes selon les chiffres du gouvernement de Bakou qui, jusqu’à cette heure, est parvenu à déminer 140 000 hectares ont été débarrassés.
Lors de son allocution, Ilham Aliyev a sollicité l’appui politique et pratique de la communauté internationale pour déminer les zones touchées, au moment où son pays supporte cette charge à ses propres frais. La solidarité internationale en matière de déminage est souvent implorée lorsqu’il s’agit de conflits aux conséquences internationales. On l’a constatée en Ukraine qui a bénéficié de l’appui de plusieurs pays pour débarrasser son sol des mines russes. Aussi plusieurs pays dont la Turquie, la Bulgarie et la Roumanie, ont-ils pris part à une collation internationale pour éliminer les mines flottantes en Mer noire, théâtre d’un conflit interrompu entre la flotte russe et les escadrons ukrainiens.
L'Azerbaïdjan compte pour sa part sur ses alliés pour soutenir son effort de déminage dans le Karabakh. Des sources azerbaïdjanaises ont manifesté leur intérêt pour l’expertise marocain en la matière. Bakou voit d’un bon œil l’expérience du Royaume dans ce domaine. Jusqu’à présent, il n’y a pas encore eu de pourparlers officiels sur ce sujet mais l’intérêt est là, nous confie une source bien informée, rappelant que Bakou et Rabat partagent la volonté de renforcer la coopération militaire à tous les niveaux, ce qui facilite un tel partenariat qui s'inscrirait dans l'engagement des peux pays au niveau des Nations Unies.
Le Maroc a réitéré à maintes reprises son attachement aux principes fondamentaux humanitaires de la Convention sur les mines anti-personnel. Un engagement partagé par l'Azerbaïdjan qui vient de lancer une initiative visant à créer un groupe de contact spécial sur le déminage humanitaire au sein du Mouvement des pays non alignés. "Il s'agit d'un cadre adéquat pour que les deux pays entament une coopération fructueuse", explique notre source.
Les Forces Armées Royales, rappelons-le, ont réussi à déminer plus de 6000 kilomètres carrés en l’espace de quinze ans (entre 2007 et 2022) au Sahara marocain. Près de 5000 mines antipersonnel et 17.000 mines anti-véhicules ont été éliminées avec 20.000 explosifs évacués, selon les données du ministère délégué chargé de l'Administration de la Défense nationale.
En plus de l’expertise acquise de l’expérience sur le terrain, les unités du Génie des FAR renforcent continuellement leurs compétences en matière de déminage lors des exercices conjoints. L’Armée royale bénéficie souvent du savoir-faire américain. L’US Army et les FAR effectuent régulièrement des exercices bilatéraux.
Une telle expertise demeure si précieuse pour toutes les armées qui, lors d’un conflit de haute intensité, ont besoin d'avancer plus rapidement dans un terrain conquis. Le déminage est considéré comme un atout et comme d'un des facteurs décisifs dans les offensives. Tous les experts s’en sont aperçus sur le front russo-ukrainien où la contre-offensive du printemps 2023 de l’Armée de Kiev a trébuché à cause des innombrables mines posées par l’Armée russe. L’Ukraine a dû faire appel à l’appui de ses alliés occidentaux pour surmonter cet obstacle sans beaucoup de succès.