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Interview avec Driss Lemjaouri : L'essor des startups technologiques dynamise le marché de l'emploi


Rédigé par Mariem LEMRAJNI Mardi 25 Février 2025

À l'ère numérique, l’ingénierie et l’innovation se conjuguent pour impulser le changement au Maroc. C’est dans cette dynamique que s’inscrit la première édition de l’ENIM SUMMIT, un événement qui cherche à positionner l’ingénieur marocain comme un acteur stratégique majeur du développement technologique et économique du pays. Driss Lemjaouri, Directeur de l’entrepreneuriat digital au ministère de la Transition digitale, nous guide à travers cette vision, et explore comment l’exportation technologique devient une clé pour bâtir une industrie résolument tournée vers l’avenir.



- Au cours de la première édition de l’ENIM Summit, vous avez évoqué l'impact de la digitalisation comme levier de transformation pour le Maroc et le rôle clé des ingénieurs dans le développement de solutions technologiques. Pouvez-vous nous donner un aperçu du contexte ?

- Cet événement met en lumière le rôle central des ingénieurs dans l’innovation, la conception et le développement de solutions technologiques à forte valeur ajoutée. Nous avons abordé l’impact de la digitalisation comme levier de transformation pour divers secteurs, ainsi que son potentiel pour positionner le Maroc en tant que hub technologique régional. J’ai eu, également, l’occasion de rappeler les initiatives mises en place par le ministère de la Transition Numérique et de la Réforme de l’Administration, notamment dans le cadre de la stratégie « Digital Morocco 2030 », qui vise à structurer l’écosystème numérique national, à faciliter l’accès au financement et aux infrastructures et à soutenir l’innovation et la recherche scientifique dans le digital.

Une mention particulière a été faite à la nouvelle initiative « Jazari Institute », impulsée par Mme la ministre, Pr Amal El Fallah Seghrouchni, qui se veut un Centre d’excellence régional pour le développement technologique, la recherche et l’innovation, en mettant en réseau les différents acteurs de l’écosystème digital, scientifique et entrepreneurial.

- Afin de suivre cette dynamique, quelles sont vos initiatives pour préparer les ingénieurs marocains aux changements technologiques ? Existe-t-il des programmes de formation dédiés ?

- L'adaptation des ingénieurs aux évolutions technologiques repose sur plusieurs leviers. Tout d'abord, les programmes académiques sont réajustés, avec l'intégration croissante de modules en Intelligence Artificielle, cybersécurité, blockchain et data science dans les écoles d'ingénieurs marocaines, afin de répondre aux tendances mondiales.
Ensuite, les formations continues et les certifications jouent un rôle clé, avec divers programmes de formation professionnelle et certifications proposés en collaboration avec des partenaires internationaux tels que Microsoft, Cisco, IBM, etc., afin de renforcer les compétences en digitalisation et en nouvelles technologies.

Par ailleurs, les pôles d'innovation et de recherche, tel que l'initiative Jazari Institute, visent à rapprocher les ingénieurs de la recherche appliquée et des entreprises, en favorisant l'expérimentation et la collaboration sur des projets concrets. Enfin, les hackathons et concours technologiques se multiplient, organisés régulièrement par différents acteurs pour stimuler la créativité et l'innovation chez les ingénieurs marocains, tout en les exposant à des problématiques réelles d'entreprises et de start-ups. Ainsi, le Maroc est en train de mettre en place un véritable écosystème de formation et d'innovation, permettant aux ingénieurs de rester en phase avec les évolutions technologiques.

- Avec l'essor des technologies, de nouveaux emplois voient le jour dans l'ingénierie. Quelle est la situation dans le Royaume ?

- L’essor des technologies crée de nouvelles opportunités d’emploi, notamment dans les secteurs du numérique et de l’industrie X.0. On observe une forte demande pour les profils spécialisés en développement logiciel, Intelligence Artificielle, cybersécurité, analyse des données et gestion des infrastructures cloud. L’émergence des start-ups technologiques, soutenues par des incubateurs et des financements publics et privés, contribue également à la création d’emplois.

Par ailleurs, les grandes entreprises marocaines accélèrent leur transformation digitale, générant un besoin accru en ingénieurs qualifiés. Toutefois, le défi principal reste l’adéquation entre l’offre de formation et les besoins du marché. D’où l’importance des partenariats entre universités, entreprises et acteurs publics pour assurer une formation adaptée aux exigences des nouvelles technologies.

Parmi les filières les plus porteuses en termes de recrutement, on retrouve « ESO » et « ITO», deux secteurs parmi les cinq principales branches de l'outsourcing, qui embauchent massivement des ingénieurs. Ces cinq filières de l'outsourcing incluent la filière ITO (Information Technology Outsourcing), qui englobe l'externalisation des processus liés aux technologies de l'information et à la R&D. Elle couvre des activités telles que la gestion d'infrastructures, le développement et la maintenance applicative, la cybersécurité ainsi que la recherche et le développement. La filière ESO (Engineering Service Outsourcing) concerne l'externalisation des services d'ingénierie et de R&D, avec des activités liées à l'ingénierie et à la recherche et développement.

On retrouve aussi la filière CRM (Customer Relationship Management), dédiée à la gestion de la relation client, ainsi que la filière BPO (Business Process Outsourcing), qui se concentre sur l'externalisation des processus métiers. Tout comme la filière KPO (Knowledge Process Outsourcing), qui traite de l'externalisation des processus métiers stratégiques, nécessitant une expertise et des connaissances spécifiques.

- Quels leviers faut-il activer pour attirer les investisseurs étrangers et stimuler l'exportation technologique en tant que moteurs stratégiques pour le développement du Maroc ?

- L’axe Outsourcing & Digital export de la stratégie « Digital Morocco 2030 » a prévu une montée en gamme des activités et le développement du hub Outsourcing & Digital export avec un objectif de créer 130.000 nouveaux emplois et d’atteindre un revenu à l’export de 40 milliards de Dirhams d’ici 2030. Ce développement se traduit par plusieurs actions concrètes, telles que : positionner l'offre nationale sur des secteurs à forte valeur ajoutée, accroître les parts du Maroc sur le marché mondial de l'outsourcing et de l'exportation numérique. Il s’agit aussi d’attirer des géants du numérique pour développer et exporter des services numériques de haute valeur, et encourager les entreprises technologiques au Maroc à exporter leurs services digitaux.

Pour atteindre ces objectifs, la stratégie « Digital Morocco 2030 » repose sur divers leviers : développer un vivier de talents suffisant et hautement qualifié (à travers la formation initiale, la reconversion, etc.), mettre en place un cadre incitatif simple et compétitif pour l'outsourcing et l'export numérique, instaurer des primes à l'emploi.
Cela porte aussi sur la réforme des conditions d'octroi de la prime à la formation, maintenir les avantages actuels liés à l'Impôt sur le Revenu (IR) et l'Impôt sur les Sociétés (IS), tout en simplifiant et digitalisant l'offre. Il s'agit également de développer des infrastructures d'accueil en région pour favoriser un développement régional équilibré et équitable, tout en promouvant le Maroc comme destination auprès des entreprises internationales.



 

L'ENIM pave le chemin de la digitalisation au Maroc

Les défis et les opportunités liés à la digitalisation et à l’exportation technologique ont été largement abordés, lors de la première édition de l'ENIM Summit. Cet événement, porté conjointement par l'École Nationale Supérieure des Mines de Rabat et l’Association des Ingénieurs de l'ENIM, en collaboration avec plusieurs autres partenaires, a marqué une étape clé pour la communauté des ingénieurs. Cette initiative ambitieuse a vu la participation de Ryad Mezzour, ministre de l'Industrie et du Commerce, dont la vision stratégique pour le développement industriel et l’innovation technologique continue d'inspirer. À travers cette manifestation, un espace d’échange, de réflexion et de collaboration a été créé, abordant les défis et opportunités qui façonneront l'avenir du pays dans le domaine de l'innovation.

L’événement a réuni les forces vives de l’ingénierie, du digital et de l’innovation pour accompagner la transformation du Maroc à l’horizon 2030-2050. Il illustre la volonté de positionner l’ingénieur marocain comme un acteur stratégique, non seulement un exécutant, mais un pilier essentiel du développement technologique et économique du pays. En répondant aux enjeux de l’industrie 4.0, de la digitalisation, de l’Intelligence Artificielle et des infrastructures intelligentes, ces ingénieurs jouent un rôle crucial dans la modernisation du pays.