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Interview avec Hafid Griguer : Bientôt, de nouveaux documents seront physitalisés par T3


Rédigé par Mina ELKHODARI Mardi 27 Février 2024

En décrochant le premier Prix au World Summit Awards pour sa solution d'authentification des diplômes ,T3 devient la première startup marocaine primée dans cette compétition prestigieuse. Déterminée à réussir la combinaison entre le physique et le digital, T3 explore de nouveaux horizons à travers des projets passionnants, en partenariat avec le ministère de l’Education nationale et lorgne vers le continent. Interview avec son co-fondateur, Hafid Griguer.



  • T3 (Trust, Track and Trace) a reçu le premier Prix au Global Summit awards. Que représente pour vous l’obtention de ce prix, le premier pour le Maroc ?

-T3 a été conçue par l'Université Mohamed VI Polytechnique mais sa mise en œuvre opérationnelle est assurée par la start-up SensThing, détentrice du projet. En fait, c'est une fierté pour nous de représenter le Maroc à l'échelle internationale, avec une validation par un Programme soutenu par les Nations Unies. Cette reconnaissance souligne l'impact du développement technologique au Maroc, ce qui constitue une responsabilité supplémentaire pour continuer à faire progresser la solution.
L'innovation, saluée par le jury international, réside dans le retour aux fondamentaux tout en ajoutant une dimension supérieure, permettant de conserver une preuve tangible avec une couche digitale.
 
  • Votre startup offre une solution permettant une meilleure authentification des diplômes. Comment cette approche marche-t-elle ?
 
-Cette technologie a une complexité sous-jacente, mais son utilisation demeure très simple. Nous l'avons simplifiée pour garantir son accessibilité aux utilisateurs. À l'intérieur de papiers ordinaires, une puce électronique est discrètement intégrée entre les couches, avec une antenne et un circuit embarqué. Ce circuit renferme une signature physique et digitale, assurant ainsi la sécurité du papier en empêchant toute altération. De plus, la puce agit comme une passerelle sécurisée, établissant une connexion entre le monde physique et le monde réel via un téléphone mobile. Cette innovation donne naissance à un concept appelé « Internet of Paper » (IOP), où les papiers restent physiques tout en restant connectés au cloud pour une sécurité totale.
 
  • Pourquoi avez-vous choisi de déployer cette solution dans le domaine de l’éducation, en particulier ?
 
-La solution sera étendue à divers secteurs, offrant une sécurité pour tout support papier nécessitant une protection. Notre engagement initial, dans le domaine de l'éducation, découle de notre expérience, en tant que directeur d'une école d'ingénieurs au Maroc, et de notre connaissance approfondie des défis rencontrés par les universités et les étudiants.
 
Nous avons choisi de concentrer nos efforts sur l'éducation en raison des problèmes réels limitant la mobilité internationale des étudiants brillants. Souvent, ces étudiants rencontrent des obstacles liés à l'authentification des candidatures par les grandes universités internationales. Notre objectif est de surmonter ces barrières en établissant des ponts entre le l’écosystème marocain et étranger grâce à une reconnaissance visible, simple et sécurisée des compétences des étudiants.
 
Un deuxième aspect crucial concerne l'employabilité, où en tant que professionnel des ressources humaines, je constate fréquemment que plus de 75% des informations fournies lors des entretiens sont entachées d'erreurs, notamment en ce qui concerne les diplômes, les années d'études, les filières et les universités d'origine. Notre solution vise à rectifier ces inexactitudes.
 
  • A qui profite cette nouvelle solution ?
 
-Nous avons délibérément choisi de lancer notre solution dans le domaine de l'éducation, englobant tous les niveaux, du primaire à l'enseignement supérieur, et couvrant la formation continue et exécutive. Ce secteur offre un potentiel considérable. Les avantages de notre solution s'étendent à l'ensemble de l'écosystème éducatif, englobant les universités, les écoles, les étudiants avec l'accès à des diplômes numériques, ainsi que les entités administratives et les ressources humaines. Lesquelles bénéficieront d'une simplification de leurs tâches grâce à cette solution physique et digitale.
 
  • Comment cette solution profite-t-elle aux étudiants ?

-En réalité, ce que nous sommes en train de mettre en place est ce que nous appelons le « CV phygital » (physique et digitale). Chaque fois qu'un étudiant obtient un diplôme, il peut l'ajouter au même réceptacle. Ainsi, lorsqu'il postule à des offres d'emploi, il dispose d'un profil éducatif vérifié, minimisant les risques de fausses déclarations et facilitant la vérification des diplômes. Il s'agit d'une sorte d'identité numérique sécurisée et vérifiable pour les CV des candidats.
 
  • T3 est reconnue notamment pour le déploiement du premier diplôme phygital du baccalauréat. Comment cette opération a-t-elle profité à l’écosystème ?
 
-En réalité, il s'agit d'une opération d'envergure impliquant des investissements et la collaboration de l'Université Mohammed 6 Polytechnique. Nous avons déployé des équipements capables de rendre les diplômes physiques. La production a été réalisée localement dans les douze régions du Maroc, intégrant une signature électronique pour les diplômes, habituellement signés par les directeurs des Académies régionales d’éducation et de formation. Cela concerne également les relevés de notes.
 
Le passage à une signature digitale a favorisé une transition fluide vers l'Université internationale, permettant aux candidats de postuler en temps opportun. Depuis lors, de nombreux pays amis du Maroc ont exprimé leur intérêt pour une solution pilote, cherchant à bénéficier de l'expérience marocaine en matière de phygitalisation documentaire.
 
  • Après cette expérience réussie, prévoyez-vous de nouveaux projets ?

-Absolument, dans un futur très proche, en collaboration avec le ministère de l'Éducation, nous étendrons la phygitalisation à d'autres documents, en dehors du baccalauréat. Cette annonce sera faite prochainement par le ministère et inclura des documents liés aux processus éducatifs. Nous explorons également la faisabilité de phygitaliser les attestations administratives et juridiques dans un pays de Golfe. De plus, d'autres projets passionnants sont en cours pour l'Afrique.
 
  • In fine, y a-t-il des défis spécifiques auxquels une startup opérant dans la phygitalisation dans le système éducatif est confrontée ?
 
-Actuellement, le premier obstacle est d'ordre réglementaire, nécessitant ainsi des leaders audacieux, visionnaires et avant-gardistes. Cela dépend des décideurs, et heureusement, nous sommes dans un contexte où le ministère est déterminé à influencer le parcours professionnel et académique des étudiants.

Ensuite, il y a la nécessité d'infrastructures digitales capables de supporter notre technologie basée sur l'Intelligence Artificielle et le stockage massif des données. Un cloud souverain de grande capacité est crucial pour héberger des technologies puissantes comme la nôtre.
 
Au niveau des ressources humaines, le défi réside dans la recherche de personnes compétentes dans des domaines tels que la blockchain, l'IA et les systèmes embarqués. Enfin, le financement pose également un problème, les startups ayant besoin de fonds pour démarrer, même si nous disposons des fonds, des garanties sont souvent demandées.
 








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