-L’Ukraine a réussi sa contre-offensive à Kharkov et Kherson, et à Lyman, la Russie a intégré, pour sa part, les régions sous son contrôle, quelle est votre lecture de l'évolution de la situation ?
- Tout d’abord, sur le plan strictement militaire, la Russie n’a pas mis assez d’hommes sur le terrain, notamment dans la région de Kharkov, pour maintenir le contrôle de la région en cas de contre-attaque. Plusieurs raisons expliquent ce que nous constatons sur le terrain, la Russie a fait le choix de ne pas décréter la mobilisation générale de sorte à ce que la vie continue son cours normal. Ceci fait que l’Armée manque de ressources humaines. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle elle a décidé de décréter la mobilisation partielle, afin de remédier à cet écueil.
Deuxièmement, en scrutant attentivement le déroulement des opérations durant l’été et jusqu’à présent, on se rend aussitôt compte que la Russie est restée très longtemps dans une logique de stabilisation de front, comme si elle entendait s’arrêter un moment dans le but de préserver les acquis réalisés jusqu’à maintenant. Autrement dit, on a l’impression que la Russie laissait entendre qu’elle avait pris les territoires qu’elle ciblait pour sécuriser la zone du Donbass et la Crimée. Cette stratégie semble avoir pris fin justement après la perte de la région de Kharkov et l’organisation des référendums dans les régions de DNR, LNR, de Kherson et de Zaporojie, qui relancent la situation et appelle une redétermination du format de l’opération militaire russe.
- Plusieurs observateurs parlent d’échec, qu’en pensez-vous ?
- Si la Russie a eu autant de mal à conquérir l’Ukraine comme elle l’entendait avant le 24 février, c’est à cause de cette sorte de stratégie de demi-mesures et de la confusion qui ont marqué son action. Souvenez- vous qu’au début du conflit, l’Armée a lancé son offensive éclair pour prendre le contrôle de Kiev, avant de ralentir son avancée en commençant à négocier. C’était une défaite politique.
À mon avis, la Russie a d’autant plus de peine qu’elle manque d’objectifs clairs, sachant qu’on parlait de démilitarisation et dénazification. Des objectifs pareils demeurent flous, sachant que Moscou a renoncé à la conquête de Kiev tout en disant qu’elle veut toujours dénazifier l’Ukraine. Comment peut-elle le faire sans changer le régime.
En définitive, j’estime que la Russie est confrontée à ses propres atermoiements et à ses hésitations. Je rappelle que dès le départ, elle ne voulait pas s’engager dans cette lutte puisqu’elle veillait à ce que les accords de Minsk soient appliqués à la lettre. Ces accords permettaient que le territoire du Donbass reste partie intégrante de l’Ukraine avec un statut d’autonomie avancée.
-Après le succès de l’Armée ukrainienne, pensez-vous que la Russie risque de perdre le contrôle des territoires dont elle a annoncé l’intégration ?
- Pour le moment, la majeure partie du territoire du Donbass est quasiment contrôlée. Ce qui pose problème pour les russes ce sont les régions de Kherson et Zaporojié reprises par les forces russes, qui contiennent des populations passives et qui ne sont pas autant engagées dans la lutte contre l’autorité de Kiev que celles de Donetsk et Lougansk. Ceci n’empêche qu’elles sont pour l’appartenance à la Russie. Avec leur intégration dans la Fédération de Russie, le conflit change de nature : tuote attaque menée par les forces ukrainiennes et de l’OTAN contre ces territoires devient une attaque contre la Russie et toute présence militaire étrangère devient une occupation du territoire national russe.
-Est ce que l’Armée russe manque de renseignements contrairement à l’Ukraine qui bénéficie de l’appui efficace de la CIA qui lui donne une visibilité en temps réel de la situation sur le front ?
- D’abord, permettez-moi de dire que l’Armée ukrainienne n’est qu’une chair à canon qui ne décide de rien, toutes les opérations, dont les contre-offensives, sont conçues et planifiées à Washington. A mon avis, le renseignement a toujours été l’un des points forts de la Russie comme au temps de l’Union soviétique. Les dysfonctionnements se situent plus dans la décision politique que dans l’information qui remonte bien évidemment en temps réel. Donc, c’est la prise de décision qui pose problème.
-Si l’Ukraine continue de mener des contre-offensives aussi fulgurantes, est ce que la Russie pourrait se résigner à négocier d’égal à égal ?
- Les dirigeants russes, dont Poutine, Medvedev, Sergei Shoigu et les autres savent très bien qu’ils ne peuvent pas reculer vu qu’ils ont une idée de ce qui leur arrivera en cas de perte de la guerre. On parle en Occident d’un procès et de jugement pour crimes de guerre et crimes d’agression, etc… Donc, il n’est pas question de faire marche arrière, d’abord par instinct de survie, en plus parce que le peuple russe ne pardonnerait jamais que la Russie sorte perdante de la guerre avec toutes les conséquences que cela entraînerait.
- Tout d’abord, sur le plan strictement militaire, la Russie n’a pas mis assez d’hommes sur le terrain, notamment dans la région de Kharkov, pour maintenir le contrôle de la région en cas de contre-attaque. Plusieurs raisons expliquent ce que nous constatons sur le terrain, la Russie a fait le choix de ne pas décréter la mobilisation générale de sorte à ce que la vie continue son cours normal. Ceci fait que l’Armée manque de ressources humaines. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle elle a décidé de décréter la mobilisation partielle, afin de remédier à cet écueil.
Deuxièmement, en scrutant attentivement le déroulement des opérations durant l’été et jusqu’à présent, on se rend aussitôt compte que la Russie est restée très longtemps dans une logique de stabilisation de front, comme si elle entendait s’arrêter un moment dans le but de préserver les acquis réalisés jusqu’à maintenant. Autrement dit, on a l’impression que la Russie laissait entendre qu’elle avait pris les territoires qu’elle ciblait pour sécuriser la zone du Donbass et la Crimée. Cette stratégie semble avoir pris fin justement après la perte de la région de Kharkov et l’organisation des référendums dans les régions de DNR, LNR, de Kherson et de Zaporojie, qui relancent la situation et appelle une redétermination du format de l’opération militaire russe.
- Plusieurs observateurs parlent d’échec, qu’en pensez-vous ?
- Si la Russie a eu autant de mal à conquérir l’Ukraine comme elle l’entendait avant le 24 février, c’est à cause de cette sorte de stratégie de demi-mesures et de la confusion qui ont marqué son action. Souvenez- vous qu’au début du conflit, l’Armée a lancé son offensive éclair pour prendre le contrôle de Kiev, avant de ralentir son avancée en commençant à négocier. C’était une défaite politique.
À mon avis, la Russie a d’autant plus de peine qu’elle manque d’objectifs clairs, sachant qu’on parlait de démilitarisation et dénazification. Des objectifs pareils demeurent flous, sachant que Moscou a renoncé à la conquête de Kiev tout en disant qu’elle veut toujours dénazifier l’Ukraine. Comment peut-elle le faire sans changer le régime.
En définitive, j’estime que la Russie est confrontée à ses propres atermoiements et à ses hésitations. Je rappelle que dès le départ, elle ne voulait pas s’engager dans cette lutte puisqu’elle veillait à ce que les accords de Minsk soient appliqués à la lettre. Ces accords permettaient que le territoire du Donbass reste partie intégrante de l’Ukraine avec un statut d’autonomie avancée.
-Après le succès de l’Armée ukrainienne, pensez-vous que la Russie risque de perdre le contrôle des territoires dont elle a annoncé l’intégration ?
- Pour le moment, la majeure partie du territoire du Donbass est quasiment contrôlée. Ce qui pose problème pour les russes ce sont les régions de Kherson et Zaporojié reprises par les forces russes, qui contiennent des populations passives et qui ne sont pas autant engagées dans la lutte contre l’autorité de Kiev que celles de Donetsk et Lougansk. Ceci n’empêche qu’elles sont pour l’appartenance à la Russie. Avec leur intégration dans la Fédération de Russie, le conflit change de nature : tuote attaque menée par les forces ukrainiennes et de l’OTAN contre ces territoires devient une attaque contre la Russie et toute présence militaire étrangère devient une occupation du territoire national russe.
-Est ce que l’Armée russe manque de renseignements contrairement à l’Ukraine qui bénéficie de l’appui efficace de la CIA qui lui donne une visibilité en temps réel de la situation sur le front ?
- D’abord, permettez-moi de dire que l’Armée ukrainienne n’est qu’une chair à canon qui ne décide de rien, toutes les opérations, dont les contre-offensives, sont conçues et planifiées à Washington. A mon avis, le renseignement a toujours été l’un des points forts de la Russie comme au temps de l’Union soviétique. Les dysfonctionnements se situent plus dans la décision politique que dans l’information qui remonte bien évidemment en temps réel. Donc, c’est la prise de décision qui pose problème.
-Si l’Ukraine continue de mener des contre-offensives aussi fulgurantes, est ce que la Russie pourrait se résigner à négocier d’égal à égal ?
- Les dirigeants russes, dont Poutine, Medvedev, Sergei Shoigu et les autres savent très bien qu’ils ne peuvent pas reculer vu qu’ils ont une idée de ce qui leur arrivera en cas de perte de la guerre. On parle en Occident d’un procès et de jugement pour crimes de guerre et crimes d’agression, etc… Donc, il n’est pas question de faire marche arrière, d’abord par instinct de survie, en plus parce que le peuple russe ne pardonnerait jamais que la Russie sorte perdante de la guerre avec toutes les conséquences que cela entraînerait.
Une guerre qui tient le monde en haleine
Depuis le déclenchement de la guerre en Ukraine, l’Armée russe n’a pas été autant en difficulté qu’actuellement. Après la déroute de Kiev, les Russes ont perdu plus de 6000 kilomètres de terre qu’ils contrôlaient auparavant dans les régions de Kharkov et Kherson suite à des contre-offensives ukrainiennes préparées conjointement avec les Etats-Unis.
Les russes ont subi un nouveau revers après la prise de Lyman par l’Armée de Kiev comme l’a annoncé le président Volodimir Zelensky. Pour sa part, la Russie a annoncé l’annexion de quatre régions, à savoir Lougansk, Donetsk, Zaporijia et Kherson après les référendums qu’elle avait organisés et dont les résultats n’ont pas été reconnus par la communauté internationale.
Sur le plan militaire, l’Armée russe peine à atteindre les objectifs initiaux de son “opération spéciale”, ce qui a poussé Moscou à préserver ses acquis en organisant des référendums dans les régions sous son contrôle. Beaucoup s’interrogent sur le marasme de l’héritière de la glorieuse Armée rouge dans un pays largement très inférieur en termes de rapport de force. Ces difficultés seraient d’origine plus politique que militaire, selon Karine Bechet Golovko.
Les russes ont subi un nouveau revers après la prise de Lyman par l’Armée de Kiev comme l’a annoncé le président Volodimir Zelensky. Pour sa part, la Russie a annoncé l’annexion de quatre régions, à savoir Lougansk, Donetsk, Zaporijia et Kherson après les référendums qu’elle avait organisés et dont les résultats n’ont pas été reconnus par la communauté internationale.
Sur le plan militaire, l’Armée russe peine à atteindre les objectifs initiaux de son “opération spéciale”, ce qui a poussé Moscou à préserver ses acquis en organisant des référendums dans les régions sous son contrôle. Beaucoup s’interrogent sur le marasme de l’héritière de la glorieuse Armée rouge dans un pays largement très inférieur en termes de rapport de force. Ces difficultés seraient d’origine plus politique que militaire, selon Karine Bechet Golovko.