- Le 23 septembre dernier, vous avez sorti un nouvel ouvrage intitulé « Paradoxes du Burnout : Mieux comprendre les dessous de sa mécanique », qui est le fruit d’une enquête menée depuis le déclenchement de la pandémie auprès d’une centaine de « burnoutés » dans différents secteurs. Quelle procédure d’enquête avez-vous engagée ?
- Au fait, plusieurs enquêtes ont été menées pour faire ce livre. Ce livre s’appuie sur une longue enquête réalisée en 2020-2021 auprès de plus de 200 professionnels de la santé, du droit, du social et de l’entreprise, répartis dans 15 pays francophones, dont le Maroc, sur 3 continents, et intervenant auprès de « burnoutés ». À cela s’ajoute une autre enquête auprès d’une centaine de « burnoutés ». Pour étudier les effets du burnout, deux autres enquêtes ont été menées auprès de plusieurs centaines de télétravailleurs en avril-mai 2020 puis en mai 2021.
- La fin de l’année 2020 a vu apparaître les premiers témoignages de la souffrance qu’a générée le télétravail. Quelles remarques en tirez-vous ?
- Sur la première enquête, au tout début de la mise en place du télétravail, trois paradoxes se sont dégagés. Les deux tiers des personnes interrogées étaient satisfaites ou très satisfaites du télétravail lors du premier confinement.
A côté de ça, il y avait un déséquilibre de la vie personnelle et professionnelle. Puis il y a eu une dégradation de l’état de santé, avec l’apparition de troubles musculo-squelettiques et une augmentation des addictions, alcool, tabac et café. Au début, les gens étaient contents de travailler de chez eux.
Puis, assez rapidement, ils se sont rendus compte que c’était difficile de couper sa journée de travail quand on est à la maison, et que le soir, après les horaires normaux de travail, ils ont tendance à allumer les ordinateurs et continuer à bosser. Le premier télétravail était particulier dans la mesure où les enfants n’allaient plus à l’école, donc les parents devaient s’occuper des enfants dans la journée. Donc, c’était différent d’un télétravail normal.
En France, au troisième confinement au printemps 2021, les gens ont pu équilibrer davantage leur temps de travail. Les addictions ont commencé à diminuer. Par contre, les troubles musculo-squelettiques ont continué d’augmenter de façon importante. Parce que les postes de travail n’étaient pas toujours adaptés. Les gens travaillaient chez eux, dans un séjour, cuisine, salon, et on n’est pas sur des positions ergonomiques.
- Comme indiqué dans le titre, vous parlez des mécanismes du burnout. Quels sont-ils ?
- Si on commence par une définition du burnout, il n’y a pas de définition médicale. La haute autorité de santé en France définit le burnout comme un épuisement émotionnel, cognitif, menant à l’effondrement de la capacité de travail, et puis un sentiment de dépersonnalisation, en prenant beaucoup de recul vis-à-vis de ce qu’on fait et d’en être totalement détaché.
Sur les mécanismes, il y a plusieurs facteurs qui sont des risques psychosociaux. Lorsqu’ils sont mal prévenus par l’entreprise ou par le salarié, ils le mettent en difficulté. Le plus fréquent risque est l’intensité et la charge de travail. Il y a aussi l’épuisement émotionnel, dont ont souffert principalement les personnes dans le domaine du soin, et qui peut conduire au burnout. Il y a aussi les conflits de valeur entre ce que la personne ressent comme étant juste pour l’entreprise et ce qu’on lui demande de faire. Ça peut également mener à un épuisement.
- Face à cette situation, quelles recommandations faites-vous ?
- Dans les recommandations, la question du management est primordiale. Il faut que les managers de proximité puissent avoir un bon contact, et qu’il y ait un climat de confiance installé pour que les salariés puissent oser parler de leurs difficultés à leurs managers.
Ces derniers sont les premiers à identifier les signaux faibles de l’épuisement. Il faut aussi que les entreprises soient particulièrement attentives aux salariés perfectionnistes, car ce sont les candidats au burnout. Il faut donc informer les salariés sur comment on peut s’épuiser, la charge de travail, le perfectionnisme, le sentiment de culpabilité… Au niveau des ressources humaines, il faut avoir des entretiens réguliers pour évaluer ça avec les salariés.
- Il s’agit bien là de mesures préventives d’ordre secondaire. Mais en cas de burnout, que faire ?
- Dans ce cas là, on est dans une prévention tertiaire. Il y a un principe général : les mêmes causes produisent les mêmes effets. Si la personne en burnout reprend le travail dans les mêmes conditions qu’avant, elle va très probablement refaire un burnout. Pour éviter cela, il faut changer les éléments du travail qui l’ont amenée au burnout. Cela doit se faire en concertation avec le salarié. Il faut également un accompagnement psychologique mené par des psychologues de travail, idéalement, pour travailler sur le rapport qu’a la personne avec le travail.
- Au fait, plusieurs enquêtes ont été menées pour faire ce livre. Ce livre s’appuie sur une longue enquête réalisée en 2020-2021 auprès de plus de 200 professionnels de la santé, du droit, du social et de l’entreprise, répartis dans 15 pays francophones, dont le Maroc, sur 3 continents, et intervenant auprès de « burnoutés ». À cela s’ajoute une autre enquête auprès d’une centaine de « burnoutés ». Pour étudier les effets du burnout, deux autres enquêtes ont été menées auprès de plusieurs centaines de télétravailleurs en avril-mai 2020 puis en mai 2021.
- La fin de l’année 2020 a vu apparaître les premiers témoignages de la souffrance qu’a générée le télétravail. Quelles remarques en tirez-vous ?
- Sur la première enquête, au tout début de la mise en place du télétravail, trois paradoxes se sont dégagés. Les deux tiers des personnes interrogées étaient satisfaites ou très satisfaites du télétravail lors du premier confinement.
A côté de ça, il y avait un déséquilibre de la vie personnelle et professionnelle. Puis il y a eu une dégradation de l’état de santé, avec l’apparition de troubles musculo-squelettiques et une augmentation des addictions, alcool, tabac et café. Au début, les gens étaient contents de travailler de chez eux.
Puis, assez rapidement, ils se sont rendus compte que c’était difficile de couper sa journée de travail quand on est à la maison, et que le soir, après les horaires normaux de travail, ils ont tendance à allumer les ordinateurs et continuer à bosser. Le premier télétravail était particulier dans la mesure où les enfants n’allaient plus à l’école, donc les parents devaient s’occuper des enfants dans la journée. Donc, c’était différent d’un télétravail normal.
En France, au troisième confinement au printemps 2021, les gens ont pu équilibrer davantage leur temps de travail. Les addictions ont commencé à diminuer. Par contre, les troubles musculo-squelettiques ont continué d’augmenter de façon importante. Parce que les postes de travail n’étaient pas toujours adaptés. Les gens travaillaient chez eux, dans un séjour, cuisine, salon, et on n’est pas sur des positions ergonomiques.
- Comme indiqué dans le titre, vous parlez des mécanismes du burnout. Quels sont-ils ?
- Si on commence par une définition du burnout, il n’y a pas de définition médicale. La haute autorité de santé en France définit le burnout comme un épuisement émotionnel, cognitif, menant à l’effondrement de la capacité de travail, et puis un sentiment de dépersonnalisation, en prenant beaucoup de recul vis-à-vis de ce qu’on fait et d’en être totalement détaché.
Sur les mécanismes, il y a plusieurs facteurs qui sont des risques psychosociaux. Lorsqu’ils sont mal prévenus par l’entreprise ou par le salarié, ils le mettent en difficulté. Le plus fréquent risque est l’intensité et la charge de travail. Il y a aussi l’épuisement émotionnel, dont ont souffert principalement les personnes dans le domaine du soin, et qui peut conduire au burnout. Il y a aussi les conflits de valeur entre ce que la personne ressent comme étant juste pour l’entreprise et ce qu’on lui demande de faire. Ça peut également mener à un épuisement.
- Face à cette situation, quelles recommandations faites-vous ?
- Dans les recommandations, la question du management est primordiale. Il faut que les managers de proximité puissent avoir un bon contact, et qu’il y ait un climat de confiance installé pour que les salariés puissent oser parler de leurs difficultés à leurs managers.
Ces derniers sont les premiers à identifier les signaux faibles de l’épuisement. Il faut aussi que les entreprises soient particulièrement attentives aux salariés perfectionnistes, car ce sont les candidats au burnout. Il faut donc informer les salariés sur comment on peut s’épuiser, la charge de travail, le perfectionnisme, le sentiment de culpabilité… Au niveau des ressources humaines, il faut avoir des entretiens réguliers pour évaluer ça avec les salariés.
- Il s’agit bien là de mesures préventives d’ordre secondaire. Mais en cas de burnout, que faire ?
- Dans ce cas là, on est dans une prévention tertiaire. Il y a un principe général : les mêmes causes produisent les mêmes effets. Si la personne en burnout reprend le travail dans les mêmes conditions qu’avant, elle va très probablement refaire un burnout. Pour éviter cela, il faut changer les éléments du travail qui l’ont amenée au burnout. Cela doit se faire en concertation avec le salarié. Il faut également un accompagnement psychologique mené par des psychologues de travail, idéalement, pour travailler sur le rapport qu’a la personne avec le travail.
Recueillis par Safaa KSAANI
Portrait
A l’écoute des salariés surmenés
Sébastien Vaumoron est consultant en risques psychosociaux et qualité de vie au travail. Il intervient auprès de PME pour des audits et des plans d’accompagnement, principalement dans le secteur médico-social et tertiaire. Il est également formateur pour les entreprises auprès des salariés (collaborateurs, cadres et managers) et pour les comités de direction de PME et de grands groupes.
Par ailleurs, il anime des webinaires francophones gratuits avec des invités résidents en France, Luxembourg, Suisse, Québec et Maroc, webinaires ensuite disponibles au replay sur YouTube. Aussi, il mène des enquêtes sur les conditions de travail.
Son nouveau livre « Paradoxes du burnout - Mieux comprendre les dessous de sa mécanique » propose une réflexion sur l’épuisement professionnel à partir de centaines d’entretiens réalisés dans 15 pays francophones.
Titulaire de trois Masters : Psychanalyse, Sciences sociales et Management des équipes, Santé et Qualité de vie au travail, Sébastien Vaumoron prépare actuellement un Master en philosophie du travail. Il est également titulaire d’un Diplôme d’Université en Alcool et Société, et d’un en Droit du Travail appliqué.
Par ailleurs, il anime des webinaires francophones gratuits avec des invités résidents en France, Luxembourg, Suisse, Québec et Maroc, webinaires ensuite disponibles au replay sur YouTube. Aussi, il mène des enquêtes sur les conditions de travail.
Son nouveau livre « Paradoxes du burnout - Mieux comprendre les dessous de sa mécanique » propose une réflexion sur l’épuisement professionnel à partir de centaines d’entretiens réalisés dans 15 pays francophones.
Titulaire de trois Masters : Psychanalyse, Sciences sociales et Management des équipes, Santé et Qualité de vie au travail, Sébastien Vaumoron prépare actuellement un Master en philosophie du travail. Il est également titulaire d’un Diplôme d’Université en Alcool et Société, et d’un en Droit du Travail appliqué.