- Comment expliquez-vous le succès en librairie de «Passé composé», resté pendant plusieurs semaines en tête des ventes en France ? Une fidélité à vous et à l’aura de «7 sur 7» ou y a-t-il une part de voyeurisme dans cet engouement ?
- Le succès d’un livre de mémoires a généralement plusieurs raisons : l’intérêt pour le personnage qui l’écrit, l’intérêt pour la vie qui est racontée. Il est vrai que les souvenirs d’une vedette de télévision attirent ceux qui ont aimé ses programmes ou en tout cas qui sont intéressés par le monde qu’elle décrit. Par ailleurs, et je le dis moi-même dans ce livre, il y a de la curiosité (pas forcément du voyeurisme) pour la vie de la femme auteur de ce livre dont la vie a été largement médiatisée pour de bonnes ou de mauvaises raisons.
- Vos «mémoires» renvoient à une vie remplie, ample, traversée d’incertitudes et de belles réalisations. Quel est le meilleur épisode de votre vécu professionnel ?
- J’ai fait l’essentiel de ma carrière à la télévision mais mon meilleur souvenir reste celui de mes débuts à la radio. D’abord, c’était dans une radio qui, dans les années soixante-dix, restait emblématique, Europe 1. Et puis, la radio est un média que je trouve plus proche de la vie que la télévision qui reste quand même un spectacle.
- Et les souvenirs les moins agréables ?
- Mon plus mauvais souvenir reste les interviews de personnalités qui peuvent être très connues mais qui n’ont pas grand-chose à dire. Non, je ne donnerai pas de noms (rires).
- Vous avez choisi de vous raconter. Des consoeurs et confrères l’ont fait avant vous mais vous ne compreniez pas pourquoi ils s’adonnaient à cet exercice. Quel était le déclic qui vous a poussé à adopter la même approche ?
- Je trouvais en effet que les mémoires des journalistes n’étaient que de peu d’intérêt mais j’ai cédé quand-même moi aussi au narcissisme. Peut-être un effet de l’âge (sourire) mais aussi parce que la chaîne publique française LCP avait fait une émission qui recensait les meilleurs moments de 7/7. Et j’ai trouvé que, finalement, c’était intéressant comme témoignage d’une époque, d’une façon de faire de la politique, d‘un langage.
J’ai donc choisi de me lancer et de raconter ceux que j’avais côtoyé le temps d’une émission. Et comme je ne voulais pas rester dans le seul récit audiovisuel, j’ai élargi à mon enfance, à ma formation, à la maternité, bref à la vie elle-même.
- Avec votre ex-mari, Dominique Strauss-Kahn, vous avez été contrainte de traverser le scandale planétaire du Sofitel new-yorkais. Il était patron du FMI et potentiel successeur de Nicolas Sarkozy à L’Elysée. Vous l’avez pourtant épaulé «parce qu’on n’abandonne pas un homme à terre». Comment on se reconstruit après pareilles révélations lorsqu’on est Anne Sinclair ?
- Je le raconte dans un chapitre du livre mais tant pis pour les curieux, il s’agit de 40 pages sur 400. Et encore ! J’ai choisi de ne raconter que ce que les évènements ont produit sur moi. Je n’ai pas de recette de «reconstruction». On vit des épreuves, comme tout un chacun, on les surmonte et le temps fait son oeuvre… qu’on s’appelle Anne Sinclair ou qui que ce soit d’autre.
- Journaliste, vous avez touché à la presse écrite, à la radio, à la télévision, au numérique, à l’électronique (le Huffington Post), vous avez écrit des livres… Qu’est-ce qui manque à votre tableau de chasse ?
- C’est justement une façon que j’ai eue pour me «reconstruire». Faire autre chose que ce que j’avais déjà fait : quitter la télé ou n’y revenir comme je le fais qu’épisodiquement, non pas par des émissions politiques, mais avec des programmes de musique classique et d’opéra ; me lancer dans la presse écrite ; créer le Huffington Post France qui a été le premier pure player d’information français ; écrire des livres dont trois d’entre eux ont été écrits les trois dernières années.
Ce qui manque ? Je ne sais pas encore. J’aime bien me réinventer. Je laisse du temps au temps…
- Quels ont été vos modèles dans le journalisme ?
- Mes modèles sont des grands journalistes, plutôt de presse écrite : Jean Daniel qui a créé Le Nouvel Observateur et Françoise Giroud fondatrice de L’Express. Ils avaient à la fois du talent de plume et du courage pour défendre ce qu’ils croyaient juste. Ils ont marqué leur époque. A la télévision, je citerais volontiers Bernard Pivot qui, par sa gourmandise à intéresser les téléspectateurs amoureux des livres et sa modestie face à la notoriété, reste pour moi un exemple.
- Le succès d’un livre de mémoires a généralement plusieurs raisons : l’intérêt pour le personnage qui l’écrit, l’intérêt pour la vie qui est racontée. Il est vrai que les souvenirs d’une vedette de télévision attirent ceux qui ont aimé ses programmes ou en tout cas qui sont intéressés par le monde qu’elle décrit. Par ailleurs, et je le dis moi-même dans ce livre, il y a de la curiosité (pas forcément du voyeurisme) pour la vie de la femme auteur de ce livre dont la vie a été largement médiatisée pour de bonnes ou de mauvaises raisons.
- Vos «mémoires» renvoient à une vie remplie, ample, traversée d’incertitudes et de belles réalisations. Quel est le meilleur épisode de votre vécu professionnel ?
- J’ai fait l’essentiel de ma carrière à la télévision mais mon meilleur souvenir reste celui de mes débuts à la radio. D’abord, c’était dans une radio qui, dans les années soixante-dix, restait emblématique, Europe 1. Et puis, la radio est un média que je trouve plus proche de la vie que la télévision qui reste quand même un spectacle.
- Et les souvenirs les moins agréables ?
- Mon plus mauvais souvenir reste les interviews de personnalités qui peuvent être très connues mais qui n’ont pas grand-chose à dire. Non, je ne donnerai pas de noms (rires).
- Vous avez choisi de vous raconter. Des consoeurs et confrères l’ont fait avant vous mais vous ne compreniez pas pourquoi ils s’adonnaient à cet exercice. Quel était le déclic qui vous a poussé à adopter la même approche ?
- Je trouvais en effet que les mémoires des journalistes n’étaient que de peu d’intérêt mais j’ai cédé quand-même moi aussi au narcissisme. Peut-être un effet de l’âge (sourire) mais aussi parce que la chaîne publique française LCP avait fait une émission qui recensait les meilleurs moments de 7/7. Et j’ai trouvé que, finalement, c’était intéressant comme témoignage d’une époque, d’une façon de faire de la politique, d‘un langage.
J’ai donc choisi de me lancer et de raconter ceux que j’avais côtoyé le temps d’une émission. Et comme je ne voulais pas rester dans le seul récit audiovisuel, j’ai élargi à mon enfance, à ma formation, à la maternité, bref à la vie elle-même.
- Avec votre ex-mari, Dominique Strauss-Kahn, vous avez été contrainte de traverser le scandale planétaire du Sofitel new-yorkais. Il était patron du FMI et potentiel successeur de Nicolas Sarkozy à L’Elysée. Vous l’avez pourtant épaulé «parce qu’on n’abandonne pas un homme à terre». Comment on se reconstruit après pareilles révélations lorsqu’on est Anne Sinclair ?
- Je le raconte dans un chapitre du livre mais tant pis pour les curieux, il s’agit de 40 pages sur 400. Et encore ! J’ai choisi de ne raconter que ce que les évènements ont produit sur moi. Je n’ai pas de recette de «reconstruction». On vit des épreuves, comme tout un chacun, on les surmonte et le temps fait son oeuvre… qu’on s’appelle Anne Sinclair ou qui que ce soit d’autre.
- Journaliste, vous avez touché à la presse écrite, à la radio, à la télévision, au numérique, à l’électronique (le Huffington Post), vous avez écrit des livres… Qu’est-ce qui manque à votre tableau de chasse ?
- C’est justement une façon que j’ai eue pour me «reconstruire». Faire autre chose que ce que j’avais déjà fait : quitter la télé ou n’y revenir comme je le fais qu’épisodiquement, non pas par des émissions politiques, mais avec des programmes de musique classique et d’opéra ; me lancer dans la presse écrite ; créer le Huffington Post France qui a été le premier pure player d’information français ; écrire des livres dont trois d’entre eux ont été écrits les trois dernières années.
Ce qui manque ? Je ne sais pas encore. J’aime bien me réinventer. Je laisse du temps au temps…
- Quels ont été vos modèles dans le journalisme ?
- Mes modèles sont des grands journalistes, plutôt de presse écrite : Jean Daniel qui a créé Le Nouvel Observateur et Françoise Giroud fondatrice de L’Express. Ils avaient à la fois du talent de plume et du courage pour défendre ce qu’ils croyaient juste. Ils ont marqué leur époque. A la télévision, je citerais volontiers Bernard Pivot qui, par sa gourmandise à intéresser les téléspectateurs amoureux des livres et sa modestie face à la notoriété, reste pour moi un exemple.
J’ai trouvé que Mohammed VI avait une bonne connaissance des défis de la modernité qui se posaient au Maroc
- Votre parcours est marqué par l’émission «7 sur7» sur TF1 qui a fait de vous la reine de l’interview «one to one». En 1993, vous l’avez délocalisée au Maroc pour un direct avec Hassan II. Quels souvenirs gardez-vous de cette rencontre que vous relatez dans «Passé composé» et où il est question de Driss Basri, puissant ministre de l’Intérieur et de l’Information de l’époque, qui a essayé de s’immiscer dans les termes de l’entretien ?
- J’ai trouvé passionnant de faire l’émission avec Hassan II. Il était fort intelligent et avait compris qu’il avait tout intérêt à faire cette émission dans les conditions dans lesquelles les hommes politiques français la faisaient chaque semaine, avec une absence totale de contrôle sur le contenu. Je lui avais dit -et il avait accepté- que je voulais montrer les avancées économiques et sociétales du Maroc sans occulter les zones plus sombres et les atteintes aux libertés qui avaient eu lieu sous son règne.
Il a parfaitement joué le jeu : il a respecté mes questions et j’ai respecté ses réponses. L’émission a eu un grand succès en France et au Maroc et je crois qu’elle lui a été très profitable. C’est toujours le cas quand un personnage puissant se trouve confronté à des questions non complaisantes et qu’il sait y répondre avec franchise.
Le ministre de l’Intérieur de l’époque, en effet, n’y était pas favorable et aurait aimé contrôler l’interview. Mais le roi a été plus intelligent et il a bien fait.
- Vous avez ensuite rencontré Mohammed VI, fraîchement intronisé, pour un entretien réalisé pour le compte de l’hebdomadaire Paris Match. Quelle image vous a-t-il renvoyé hier et vous renvoie aujourd’hui ?
- J’ai eu une excellente entrevue avec Mohammed VI. J’avais trouvé que ses réponses étaient très sages, qu’il avait une bonne connaissance des défis de la modernité qui se posaient au Maroc, qu’il avait des ambitions qu’il a montré sur les droits des femmes, sur le développement économique… Mais je ne l’ai pas revu depuis lors. Et même si je vois le Maroc bouger, je suis moins au fait qu’hier.
On vit des épreuves comme tout un chacun, on les surmonte et le temps fait son oeuvre… qu’on s’appelle Anne Sinclair ou qui que ce soit d’autre
- Finalement quels rapports avez-vous au Maroc, à Marrakech où vous êtes propriétaire d’une demeure ?
- J’aime depuis toujours le Maroc, sa population, ses habitants, son dynamisme, son artisanat, ses villes, ses couleurs… Et sa cuisine ! J’avais même entrepris d’apprendre l’arabe marocain mais je ne suis pas très douée pour les langues. J’ai arrêté quand je me suis aperçu que si je posais une question, tant bien que mal, on ne me comprenait pas et qu’en tout cas je ne saisissais rien à la réponse. Comme vous voyez, ça limite les échanges. Quant à Marrakech, c’est un trésor.
Plus sérieusement, le Maroc est un pays qui lutte pour garder l’équilibre fragile entre tradition et modernité. Le monde a été secoué par la crise du Covid et le Maroc a plutôt agi avec sagesse, en se confinant, en fermant ses frontières, en protégeant sa population, en la vaccinant le plus possible. Pourvu que nous sachions tous nous protéger des futurs variants… C’est comme partout, une course de vitesse avec la vaccination.
- Vous avez interviewé «la terre entière» et je me souviens vous avoir entendu dire que votre rêve était d’interviewer le Pape…
- Le Pape ? J’ai dû dire cela en plaisantant. Mais aussi Poutine ou le président chinois Xi Jinping. Je vais vous faire une confidence : aujourd’hui j’ai plus envie de faire jouer des musiciens que faire parler des chefs d’Etat qui dirigent la planète !
Entretien réalisé par Anis HAJJAM