Que faites-vous dans le noir ? Vous vous allongez, continuez à vous allonger, restez allongés. Vous faites appel à des moments anciens ou futurs, agréables ou variablement déstabilisants. Vous les vivez « intensément » en attendant que le fil blanc se détache du fil noir. Mais vous les vivez en espérant que cela passe, que votre existence se présente autrement que ce que les doux ou amères souvenirs distillent dans vos veines et dans votre esprit. Vous espérez aussi démolir l’inassouvi, vous vautrer dans les draps de la volupté. Et puis, paradoxalement, vous vous retournez, fixez le néant et espérez que cet instant, long comme la longévité d’une rose, ne prenne jamais fin. Vous ne cauchemardez pas, vous êtes dans l’éveil d’un rêve universel, dans un présent triant le passé et appréhendant le lendemain. Vous êtes dans une situation que vous créez pour vous lamenter discrètement sur votre sort. Et vous n’êtes pas seul, si on se réfère au nombre de personnes que vous invitez dans vos élucubrations. Même si, de par votre attitude égoïste, vous êtes nombreux. Imaginez si vous choisissez de vous mettre dans le noir en pleine nuit ! Car, jusque-là, vous provoquez le noir en fermant les portes, baissant les rideaux, éteignant les lampes, stigmatisant le blanc ou le jaune qui ne sont, ni l’un ni l’autre, une source avérée de lumière. En fait, tout ceci pour vous dire que j’ai eu droit à une soirée (chez moi) dans le noir, une soirée sans lumière, des moments où le blanc faisait grise mine et que je me retrouvais hors zone. Une coupure due à une installation électrique qui m’a rappelé mon âge. Heureusement, un dévoué technicien est venu me sauver de cette sombre expérience avant le détachement du fil noir du fil blanc.
