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Culture

Magazine : Yassine Balbzioui, une solitude plurielle


Rédigé par Anis HAJJAM le Dimanche 31 Octobre 2021

L’habile plasticien investit jusqu’au 20 novembre l’espace de la galerie casablancaise Shart. Il y expose ses dernières réalisations teintées de remises en questions, parfumées d’humour. Il les nomme «Ermites» et les peint à corps perdu, privilégiant le vert… naturellement.



Une fraîcheur joyeusement sombre s’échappe des récentes toiles de l’artiste. Une sorte de manuscrit annoté à l’envi. Mieux : une prose défiant toute classification, privilégiant le phrasé chaloupé où un imaginaire intense se faufile entre les lignes d’une vie «normale» devenue caduque. Avec le scénario de la fin d’un monde et du début d’un autre, moins bruyant, plus exaltant d’incertitudes et de découvertes intérieures. Une introspection adoptant pour décors une certaine nature, le poumon en fête.

Des arbres qui foisonnent, intriguent, se tiennent à disposition, se jouent de la lumière qu’ils mettent parfois en scène, cajolent ou pourchassent l’intrus. Ici, pas de pénitence, pas d’avanie, la forêt comme seule prière. Trois personnages, séparés ou mis ensemble, vivent entre deux évènements, le premier fondateur et le second conclusif, la vie et la révérence de son rejeton. Et c’est là où l’ermite prend ses quartiers, loin de tout et proche de la félicité qu’il traque depuis sa conversion. Avec l’expectative comme croyance nodale.

Caresses à contre-poil

Les trois ermites de Yassine Balbzioui sont dans l’air du temps. Ils troquent le désert contre une existence en vert. Une écologie qui fait battre bien des coeurs à travers la planète entre militants convaincus et politiques dragueurs de voix. Entre-temps, la Terre se fait méchamment caressée à contre-poil. D’autres incongruités parsèment les actuelles oeuvres de Balbzioui, à commencer par l’intitulé de l’exposition «Ermites» : des ermites seuls mais pas esseulés.

Il leur arrive de se retrouver en triumvirat, palabrant, se poilant en convoquant les contradictions d’un monde qu’ils ont choisi de jeter aux orties. Dans leur forêt, ils sont des sous-maîtres rebelles devant l’immensité de l’espace qui les accueille, mais savent de quel bois ils doivent se chauffer. Jusqu’à l’ironie, jusqu’à la subversion.

Des branches consciencieusement chapardées pour se fabriquer un rockingchair, un arbre transformé en socle pour s’élever dessus, le transformant en podium à gagnant unique, une prédilection sur des tiges faisant continuité du corps… Et puis, il y a cet ermite (affiche de l’exposition) qui se fait attaquer par une armée de papillons, symbole de féminité au Japon.

Dans d’autres croyances, lorsqu’ils se déplacent en masse c’est, au choix, pour annoncer une visite ou la mort d’un proche. Yassine Balbzioui fait, à travers cette réalisation, une autre preuve de l’ambiguïté dans laquelle baigne un monde où la nage n’est autorisée que dans les eaux troubles. Avec sourires et congratulations.

Croisements et imprégnations

A cinquante années bientôt consommées, Balbzioui poursuit ses explorations d’un monde qu’il s’entête à comprendre. Jusqu’à ce que nirvana s’ensuive, ou pas. Il est le «plasticien victim» qui pousse sans relâche les murs pour mieux asseoir une dextérité galopante. Afin de façonner «Ermites», il choisit d’éponger en usant directement de ses doigts qu’il dédie aux nombreux détails qui lui jonchent l’esprit.

D’autres techniques ont préalablement traversé le cheminement de ce diplômé des Beaux-arts de Casablanca et de Bordeaux en France qui intègre ensuite l’Université de Berkeley en Californie aux Etats-Unis, s’inscrivant dans une formation en art et médias.

Ses réalisations sont montrées au Maroc, dans l’Hexagone, en Angleterre, en Allemagne, en Espagne, en Norvège, au Pakistan… Un parcours où se multiplient les croisements, les imprégnations. Pour le moment, c’est à Casablanca que Yassine Balbzioui continue de jouer sa symphonie drolatique, en attendant cette sculpture en bronze réputée rejoindre le deuxième volet de l’exposition. Restons groupés, faisons le lit de la déferlante des ermites !


Anis HAJJAM



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