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Personnes âgées : Le défi de la prise en charge socio-médicale des seniors


Rédigé par Mina Elkhodari Lundi 3 Octobre 2022

Faute de ressources humaines et d’infrastructures, entre autres, la prise en charge socio-médicale des personnes âgées reste un chemin difficile. En attendant, un programme de formation de 10.000 assistants sociaux d’ici 2030 au profit de cette catégorie sera mis en place.



Ph: DR
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A l’occasion de la journée mondiale des personnes âgées, célébrée le 1er octobre de chaque année, le Centre social pour personnes âgées, Hay Nahda à Rabat, a organisé, samedi dernier, une journée portes ouvertes. L’occasion de découvrir les services du centre mais aussi de mettre en exergue les points problématiques quant à la prise en charge des personnes âgées au Maroc.

À l’heure où l’espérance de vie continue d’augmenter au Maroc, l’effectif des seniors devrait atteindre en 2050, selon les projections du Haut Commissariat au Plan (HCP), un total de 10 millions de personnes. Ceci dit, le poids démographique des personnes âgées serait alors de 23,2% au lieu de 12,2% actuellement. Une projection dans le futur qui met en question les conditions de vie des aînés et les mesures de prise en charge mises en place par le Royaume pour garantir le bien vieillir de ses seniors. Et ce, sans oublier l’importance d’adapter une approche de soutien visant l’amélioration des conditions de vie des personnes âgées, l’accompagnement pour une meilleure insertion et, de manière générale, la lutte contre l’exclusion.

La prise en charge médico-sociale pour un bien vieillir optimal

Réussir la prise en charge des personnes âgées ne pourra avoir lieu que par la collaboration des différents acteurs de la société qui doivent adopter une approche médico-sociale adaptée aux besoins d’une catégorie sociale fortement touchée par l’isolement et la sédentarité. Telle est la conclusion de Mouna Maâmar, professeure de Médecine Interne et de Gériatrie et présidente de l’association de gestion du Centre social pour personnes âgées Hay Nahda, relevant de la Fondation Mohammed V pour la solidarité, à l’occasion de la journée mondiale des personnes âgées.

Si certains spécialistes estiment que la discipline de la gériatrie reste le parent pauvre de la médecine au Maroc, selon professeure Maâmar, le Royaume est doté, depuis 2014, d’une formation médicale en gériatrie avec un diplôme universitaire aux Facultés de Médecine et de Pharmacie de Rabat et de Casablanca, donnant naissance à des ressources humaines en la matière.

Dans le même sens, afin de répondre aux besoins des seniors en matière de prise en charge médicale, la Société nationale marocaine de gériatrie et de gérontologie (SNMGG) procédera, ce lundi, à la signature d’une convention avec le ministère de la Santé pour assurer la formation du personnel médical et paramédical dans les différentes régions du Royaume.

D’après professeure Maâmar, il s’agit d’assurer la prise en charge de la personne aînée de manière holistique et avec une filière de soins qui lui soit spécifique en limitant les délais d’attente et la lourdeur du circuit de prise en charge habituel. Bien vieillir passera avant tout par la prévention. Il s’agit, selon professeure Maâmar, de la sensibilisation de la personne âgée et de son entourage à l’importance de rester active.

«Il faut d’abord généraliser la vaccination afin d’éviter les infections, notamment pulmonaires, l’amélioration de la nutrition des personnes âgées, l’activité physique et intellectuelle, le traitement des troubles bucco-dentaires ô combien fréquents et ignorés, et pourtant responsables de dénutrition, la prévention de la chute par le diagnostic et le traitement de la dénutrition souvent sous-estimés… », a-t-elle déploré tout en évoquant la correction des troubles auditifs et visuels qui concourent à l’isolement et donc au développement de troubles psychologiques tels que la dépression.

Pour une meilleure insertion des aînés dans le système de santé, la présidente de l’association affirme que le centre travaille en partenariat avec le ministère de la Santé pour élaborer la stratégie nationale de la santé pour personnes âgées. Les conditions de vie des aînés ne peuvent être améliorées sans étroite collaboration des acteurs médico-sociaux.

En effet, la professeure en gériatrie estime que l’intégration des personnes âgées dans le cercle social se fait d’abord par la généralisation des régimes de retraite mais aussi par la facilitation des circuits administratifs qui sont souvent lourds pour cette catégorie sociale. Ainsi, afin d’éviter l’isolement dont souffre la personne âgée au Maroc et pour un bien vieillir optimal, professeure Maâmar recommande en premier lieu la création de centres d’activités occupationnelles et cognitives adaptés aux capacités de chacun.

OEuvrant pour la consécration des droits des aînés au Maroc, la ministre de la Solidarité, de l’Insertion sociale et de la Famille, Aawatif Hayar, a déclaré, samedi à l’occasion de la journée mondiale des personnes âgées, qu’un programme de formation de 10.000 assistants sociaux d’ici 2030 au profit des personnes âgées sera lancé prochainement dans le cadre de la réforme du système relatif aux établissements de protection sociale.

Dans le même sillage, la présidente de l’association de gestion du centre social pour personnes âgées Hay Nahda vient de signer une convention pour améliorer la qualité des prestations mises en place par le centre social mais aussi pour former des familles d’accueil réservées aux seules personnes âgées, non autonomes et n’ayant aucun tissu familial. Et ce, dans un cadre réglementaire bien défini.

Le centre social Hay Nahda, acteur parmi d’autres

Le Centre social pour personnes âgées à Hay Nahda, Rabat, fait parti d’un total de 74 centres accueillant les seniors fortement touchés par la précarité. Niché au coeur du quartier Hay Nahda de Rabat, le centre fut une première concrétisation matérielle des réflexions menées en 2005 par le Forum Associatif pour la Solidarité. Inauguré par Sa Majesté le Roi Mohammed VI en 2008, le centre héberge actuellement 38 personnes âgées avec une moyenne d’âge de 83 ans.

Il s’agit d’une population âgée est hétérogène, de personnes parfaitement autonomes, certaines fragiles au plan gériatrique du terme et d’autres totalement dépendantes. Le centre accueille ainsi les seniors sans domicile fixe, sans ressources ou sans attaches familiales. Ces derniers sont reçus selon différentes formules : activités de jour, séjour de longue durée ou hébergement temporaire. Ils bénéficient d’une attention quotidienne et de soins spécifiques, administrés pour les aider à recouvrer leur autonomie et à retisser du lien social.



Mina ELKHODARI

Trois questions à Mouna Maâmar


« La dignité de la personne doit être au coeur de la prise en charge »
 
Mouna Maâmar, Professeure de Médecine Interne et de Gériatrie et présidente de l’association de gestion du Centre social pour personnes âgées Hay Nahda relevant de la Fondation Mohammed V pour la solidarité, a répondu à nos questions sur les perspectives d’amélioration des conditions de vie des seniors au Maroc.


- En tant qu’actrice dans le domaine, quelle lecture faites-vous de la situation des personnes âgées au Maroc ?


- Notre pays connaît une transition démographique avec un vieillissement de sa population amorcé depuis déjà plusieurs années, comme en témoignent les chiffres du Haut Commissariat au Plan. Cela implique que les différents acteurs de notre société doivent adopter une approche médico-sociale adaptée aux besoins des seniors du Maroc. Et ce, afin de leur garantir un meilleur accès au service de santé et d’activités socioculturelles.


- Quelles sont vos principales recommandations pour améliorer la situation de cette catégorie et consacrer ses droits ?

- Sur le plan médical, il est nécessaire de mettre en place des services de gériatrie et de soins de suite pour assurer une meilleure prise en charge adaptée aux besoins des personnes âgées, et ce, tout en limitant les délais d’attente et la lourdeur du circuit de prise en charge, sans oublier la mise en place des unités de prise en charge des patients ayant des maladies telles que la maladie d’Alzheimer au stade avancé.

Sur le plan social, il est important d’améliorer, voire de réaménager, les lieux publics par la mise en place de toilettes publiques, la facilitation de l’accès gratuit aux loisirs tels le théâtre, les musées et la garantie de la gratuité des transports urbains, pour un vivre ensemble et un bien vieillir optimal. Ainsi, il faut promouvoir et former les aides à domicile qui doivent obéir à une réglementation afin de prévenir la perte d’autonomie et d’autres maladies. Ces aides à domicile devraient être à la charge de l’Etat. Toutes ces mesures permettront d’améliorer la qualité de vie de nos aînés mais aussi celles des familles qui se trouvent impuissantes quand elles s’occupent d’une personne âgée.


- Vous avez indiqué que les personnes âgées au Maroc ont besoin surtout de familles d’accueil que de centres sociaux, comment est-ce que cela pourrait être possible ?

- En fait, l’idée d’avoir des familles d’accueil pour les personnes âgées sans famille a été évoquée par la ministre de la Solidarité lors de sa dernière visite au centre social pour personnes âgées Hay Nahda, Rabat. Il s’agit d’une idée extrêmement importante, à mon sens, surtout pour les personnes non autonomes ou celles n’ayant aucun tissu familial. Cette idée permettra de prévenir l’isolement et d’assurer une meilleure intégration des seniors dans la vie sociale.



Recueillis par M. E.
 








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