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RÉTRO-VERSO : Le festival des cerises de Sefrou ou l’Histoire d’une épopée centenaire


Rédigé par Houda BELABD Mercredi 5 Juin 2024

Le 6 juin, le Moussem des Cerises de Sefrou devra fêter, dans les règles de l’art, son centenaire. Zoom sur l’Histoire et les particularités de cette manifestation haute en notes et en couleurs.



Sefrou. Il suffit d’évoquer le nom de cette ville pour penser immédiatement au Moussem annuel des cerises, qui donne lieu à l’élection de Miss Cerisette et contribue largement à l’économie locale en mettant en avant les coopératives qui tirent tout leur profit des cerises et du cerisier. Instauré sous le protectorat français il y a 104 ans, soit en 1920, il a été déclaré patrimoine immatériel par l’UNESCO en 2012, soit il y a 12 ans de l’écriture de ces lignes.

Des origines jusqu’à nos jours, ce moussem est synonyme de beauté, de compétition et de festivités. Pendant trois jours en juin, la communauté locale de Sefrou met à l’honneur la beauté naturelle et culturelle de la région, représentée par la cerise et la nouvelle «Reine des cerises» choisie à l’issue d’un concours qui attire des candidates de la région et de tout le pays. Le clou de la fête est un spectacle de troupes de fantaisie, de musique rurale et urbaine, de majorettes et de fanfares, ainsi que de chars allégoriques représentant les producteurs locaux. Au cœur du cortège se trouve la « Reine des cerises », entourée de ses dauphines et parée de ses plus beaux habits, offrant des cerises aux spectateurs. 

La population dans son ensemble concourt au succès de la fête : les artisanes confectionnent les rubans de soie des vêtements traditionnels, les arboriculteurs assurent l’approvisionnement en cerises. Bref, tout le monde ramène sa fraise ou plutôt sa cerise dans l’optique de prendre part aux compétitions et d’animer les festivités avec des troupes de musique et de danse.

La fête des cerises est également une opportunité pour toute la ville de mettre en valeur ses activités et ses réalisations. La nouvelle génération est également incluse dans les activités festives afin d’en assurer la pérennité. Cette fête constitue une véritable source d’appartenance qui rehausse l’estime de la ville et de ses habitants, et apporte une contribution fondamentale à l’identité locale.

Si Tafraout a son moussem dit des amandes et Ouarzazate son moussem de roses, Sefrou est devenue indissociable de la cerise. Célébrée dans les règles de l’art pendant trois jours, au début, au milieu ou à la fin du mois de juin, à condition que ce soit un vendredi, un samedi ou un dimanche, cette fête a réussi, en moins d’un siècle, à faire résonner son nom au-delà des frontières marocaines. La preuve en est qu’elle a été inscrite par l’UNESCO au patrimoine culturel immatériel de l’humanité au même titre que la fête du Hanami au Japon qui rend également hommage au cerisier.

La période de l’année est choisie au moment de la récolte de ces cerises noires très sucrées, bien qu’acidulées.

Le moussem des cerises est aussi l’occasion d’exposer et de vendre les différentes variétés de cerises cultivées dans l’oasis de Sefrou et ses environs. 

Le Moussem des cerises de Sefrou est l’aboutissement, la quête d’une culture, la manifestation vivante et préservée d’un savoirfaire. A tous points de vue, et à plus d’un titre, il est artisanal, textuel, figuratif, allégorique, poétique, dès lors qu’il découle de la riche culture de la région.

Il fédère également les hommes et les femmes de la région autour d’un même enjeu : une fête qui fait tourner le shmilblick et fait rayonner un sous-domaine. Si l’UNESCO a décerné ce Prix au Royaume, ce fut dans l’optique de l’encourager à poursuivre et maintenir ses efforts en matière de conservation du patrimoine culturel, ce levier du développement durable qui, à son tour, participe au rayonnement économique du pays.

En effet, depuis 1999, le Royaume s’est engagé dans une politique de développement durable tout azimut, de l’énergie, à la construction, en passant par l’agriculture et le tourisme. 

Cette prise de conscience est une condition sine qua non pour tout désir de bon aloi vers la prospérité du Royaume. Pour ce faire, chaque particularité du pays doit être exploitée dans le respect de la réalité géographique, sociologique et humaine. Le moussem des cerises, ce cas d’école, n’en fait pas exception.

Civilisations : L’Histoire d’un arbre japonais adulé aux fruits acidulés

Dans la culture japonaise, le cerisier a de nombreuses significations, la première rappelle que la vie est courte et vaut la peine d’être pleinement vécue.

La raison en est que la fleur et le fruit de cet arbre sont à voir ou à consommer «dans la fleur de l’âge», surtout que les fleurs en sont éphémères: elles n’ornent les arbres que quelques semaines avant que leurs pétales ne tombent et se fanent. Les cerises, quant à elles, sont périssables et doivent être consommées tant qu’elles sont mûres et fraîches.

L’autre symbolique des sakura (fleurs de cerisier en japonais) est la renaissance après la mort et donc le renouveau: l’éclosion des fleurs de cerisier apporte un sentiment de vitalité et de dynamisme.

Aussi, leur brève existence nous rappellet-elle la fragilité et la brièveté de la vie. Un rituel japonais est également lié à cet arbre. 

Il s’agit du rituel Hanami, une cérémonie japonaise visant à célébrer la beauté éphémère des cerisiers en fleurs. Ce rituel, appelé plus communément « l’observation des fleurs », est tout simplement une pratique ancestrale qui consiste à contempler la beauté des fleurs qui ne tarderont pas à se transformer en un fruit exquis. Par ailleurs, il y a environ trois millénaires, les agriculteurs priaient, faisaient des offrandes et préparaient un festin sous les cerisiers en fleurs dans l’espoir d’une récolte abondante du fruit de la cerise. 

Aujourd’hui, Hanami est un événement annuel que tout le monde attend impatiemment. 

Au printemps, les familles et les amis se rassemblent pour des pique-niques et des festins sous les cerisiers en fleurs. Ils chantent ensemble, mangent toutes sortes de plats, surtout leur fruit fétiche qu’est la cerise.

Conjoncture météorologique : Le fruit des rois dans tous ses états

RÉTRO-VERSO : Le festival des cerises de Sefrou ou l’Histoire d’une épopée centenaire
La production de cerises dans la province de Sefrou au titre de la saison agricole actuelle s’élève à environ 2300 tonnes, soit une hausse de 85% par rapport à l’année précédente.

La présente campagne agricole, qui a démarré début mai et se poursuivra tout au long du mois de juillet, a connu une productivité moyenne de 6,5 tonnes à l’hectare, selon les statistiques de la direction provinciale de l’agriculture de Sefrou.

Cette année, les vergers de cerises de la province ont enregistré une productivité élevée de 12 tonnes à l’hectare, selon la variété, précise la même source, rappelant qu’il existe onze variétés de ce fruit dans la province, dont le cœur de pigeon, le bigarreau burlat, le bigarreau van et le napoléon.

La campagne de cueillette des cerises est l’occasion de créer quelque 21.000 journées d’emploi en milieu rural, soit un budget de 1,89 million de DH.

Le Plan Maroc Vert (PMV) a attaché une importance particulière à la filière cerise, à travers la programmation de deux projets au titre du pilier II relatif à l’agriculture solidaire, pour un investissement total estimé à 15 millions de DH.

Ces projets ont porté sur la plantation de 100 hectares de cerisiers, l’introduction de nouvelles variétés, l’entretien de 220 hectares et l’augmentation de leur productivité, la qualification des agriculteurs à travers des sessions de formation et l’appui aux organisations professionnelles en leur procurant le matériel et les équipements nécessaires, en plus de la commercialisation et du contrôle de la qualité.

Il est aussi à noter que la récolte de cerises dans certains pays européens a été à la merci de fortes pluies. Dans de nombreux cas, la production de cerises a été freinée par de mauvaises conditions météorologiques. L’Espagne a été touchée de plein fouet par de fortes précipitations et la pollinisation a été affectée par les vents d’Amérique du Nord. 

En revanche, d’autres pays ont connu une production record, comme l’Afrique du Sud, qui a réalisé la plus grosse récolte de cerises de son histoire. En Australie, les exportations de cerises de Tasmanie ont grimpé de 40% cette saison.

Aux Pays-Bas, en raison du froid printanier, les prévisions concernant la récolte de cerises de cette année n’étaient pas très élevées, mais le pays devra avoir une bonne récolte. Cependant, la collecte a été considérablement retardée à cause du froid printanier de cette contrée du globe.

Aussi, de fortes pluies s’abattent-elles très souvent sur les régions espagnoles productrices de cerises. Les fortes pluies de cette année ont, donc, endommagé les vergers de cerises à El Jerte, en Estrémadure, la plus grande région productrice de cerises dans le pays ibérique. La cueillette de ces produits agricoles était à son pic au moment des pluies, de sorte que, selon la zone, l’altitude et la maturité des fruits sur les arbres, les dommages causés par la fissuration vont de 20 à 40% de la production.

Actualité : Belles comme des cerises !

Pour marquer le début des festivités commémorant la 100ème édition du Festival des cerises de Sefrou, qui se déroulera du 6 au 9 juin, pas moins de 100 cerisiers ont été plantés lors d’une cérémonie rituelle qui s’est déroulée cette année le 3 avril à Sefrou. 

Cette opération est lancée à l’initiative du Conseil de la commune de Sefrou et du ministère de la Jeunesse, de la Culture et de la Communication, avec la collaboration de plusieurs associations de la société civile, des élèves et des habitants de la ville de Sefrou.

Inscrit au patrimoine culturel immatériel de l’humanité par l’UNESCO en 2012, ce festival est une opportunité pour célébrer ce fruit si particulier et les diverses connaissances et formes festives qui lui sont liées, tout en stimulant les activités culturelles, touristiques et économiques de la ville.

Le Festival des cerises de Sefrou, qui a vu le jour en 1920 sous le Protectorat français, témoigne de la prédominance des valeurs de tolérance et du vivre-ensemble parmi les habitants de Sefrou où coexistaient les trois religions monothéistes dont les membres se rassemblaient pour élire Miss Cerisette pendant le mois de juin.

Le festival des cerises se déroule pendant quatre jours avec la pleine participation des habitants de la ville. C’est aussi l’occasion de revitaliser l’économie liée au patrimoine immatériel de la ville de Sefrou et au patrimoine culturel de toute la région, un héritage urbain ancestral empreint de pluralisme, de diversité et de richesse, avec notamment l’artisanat et les produits du terroir.

Festivités : La cerise sur le 100ème gâteau !

Il y a environ un an, le centenaire du Festival des cerises de Sefrou a été repoussé sine die. Prévue initialement en juin 2023, la tenue de la 100ème édition de cet évènement, l’un des plus vieux festivals du Maroc, n’a été confirmée qu’il y a quelques mois.

C’est grâce à un communiqué officiel signé Ahmed Cherif, président du Conseil communal de la ville de Sefrou, que « L’Opinion » a été «tenu au jus». 

Seulement voilà, les raisons de ce report ont été abordées de manière évasive. « Eu égard à une absence de temps suffisant, nous sommes dans l’incapacité d’organiser correctement l’édition de cette année qui coïncide avec son centième anniversaire nécessitant une plus forte mobilisation de ressources aussi bien techniques, humaines que financières », pourrait-on lire dans le même document.

Rappelons que c’est en 2019 que le festival de «Malikat Jamal Hab El Moulouk» s’est déroulé pour la dernière fois. En d’autres termes, en raison de l’apparition de la pandémie de Covid-19 au Maroc, la ville de Sefrou n’a pas abrité sa célèbre fête des cerises ni son concours « Miss Cerisette » depuis maintenant quatre ans.

« Ce report a été l’occasion de mieux se préparer à cette commémoration, de repenser la fête et de lui donner un nouvel élan », ce qui laisse présager un changement important dans l’organisation de la fête.

Pour en savoir davantage, « L’Opinion » a tenté de contacter le président de la commune, M. Ahmed Cherif, mais en vain...








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