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Rétro-Verso : Sidi Saïd Maâchou ou le premier barrage de l’Histoire marocaine


Rédigé par Houda BELABD Mercredi 14 Février 2024

A l'heure où le gouvernement marocain ne ménage guère sa peine dans sa lutte incessante contre la sécheresse, il n'est pas inutile de remonter le temps jusqu'en 1929, date de la mise en service du premier barrage hydraulique du pays.



Le saviez-vous ? Le barrage Sidi Saïd Maâchou est le tout premier barrage réalisé sur le territoire national. Entré en service en 1929, il sert depuis 1952 de réserve d'eau pour l'alimentation de la ville de Casablanca, soit la ville la plus proche d’El Jadida où il se dresse fièrement à l’embouchure du fleuve Oum Errabiaa.

Conservées dans les Archives nationales du Royaume, des données scientifiques démontrent que la construction de ce barrage était avant-gardiste et ultramoderne pour la décennie au cours de laquelle il a été mis en chantier.

Il en ressort que si ce barrage a été échafaudé avec succès, c’est en grande partie parce qu'il est sis dans un bassincreusé naturellement, et ce, depuis bien des millénaires. Long de 7 km et large de 4 km, il est parcouru par la vallée de l'Oued Oum Errabiaa qui fournit de belles coupes naturelles pour les études techniques du bassin. Ce territoire est également doté de «sols meubles » qui ont privilégié son creusement naturel.Il s'agit donc d'un barrage-poids en béton d'une hauteur de fondation de 29 m et d'une longueur de crête de 150 m.
Depuis l'indépendance du Royaume, des équipes scientifiques marocaines ont été chargées d'effectuer des travaux géotechniques sur cet ouvrage hydraulique, en vue de le préserver au fil du temps.
 
La conjoncture hydraulique, il y a un siècle
 
Il fut un temps où la construction du premier barrage de l’Histoire hydraulique du Maroc était un rêve que d’aucuns pensaient hors d’atteinte. Ce fut il y a peu ou prou un siècle, lorsque la sécheresse touchait de plein fouet les régions du sud du Royaume mais aussi, de manière sporadique, d’autres régions marocaines.

L’on pourrait lire dans l’historiographie qu’à partir de 1920, les autorités coloniales françaises, conscientes des efforts de la Première Guerre mondiale, ont découvert au Royaume un grand réservoir pour compenser les déficits de la production agricole. Dans le cadre de la campagne du Maroc, la France a investi les grandes plaines marocaines propices à la production agricole, mission à laquelle se sont prêtés les colonisateurs stimulés par la rhétorique protectorale. Les régions concernées présentaient tous les attraits d'une agriculture porteuse d'avenir pour les investisseurs coloniaux. Le Maroc de l’époque, avec son potentiel hydrologique et ses sols fertiles, manquait d'infrastructures appropriées pour assurer l'irrigation des plaines, en particulier la plaine du Tadla, la plaine d'Abda-Doukala, la plaine de la Chaouia et les plaines atlantiques considérées comme faisant partie du Maroc utile.

La modernisation des équipements a commencé avec la réalisation des premiers grands barrages-réservoirs, dédiés à la desserte en eau potable et en eau d'irrigation, ainsi qu'à l'électricité.

Dès les années 1950, les gouvernements successifs du Maroc indépendant ont mené à bien une stratégie de construction et d'aménagement de barrages. Mais la véritable révolution a lieu sous le règne de Feu Hassan II (1961-1999). En particulier avec l'objectif fixé dès la fin des années 1960,et proclamé en 1974, soit celuid’irriguer un million d'hectares de terres avant la fin du siècle.

Cette approche s'est concrètement traduite dès le plan quinquennal 1968-1972, où le budget prévisionnel des investissements publics en irrigation représentait 41% (2,088 milliards de dirhams), avec jusqu'à 400 millions de dirhams par an affectés à la mise en œuvre de ces digues-réservoirs.

Aujourd'hui, le renforcement de l'alimentation en eau potable de la ville assure une augmentation de l'offre à la mesure de ce centre urbain qui connaît un développement urbain et touristique important.

Selon le gouvernement marocain, il y a 148 grands barrages en fonctionnement au Maroc en 2011, avec une capacité totale d'environ 17,2 milliards de m3. En 2005, l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) recensait 104 grands barrages d'une capacité totale de 16,904 milliards de m3, ainsi que 17 petits et moyens barrages et 67 barrages ou lacs collinaires, d'une capacité totale de 9,9 millions de m3.
 
 

Actualité : Aménagement du programme national 2027

Afin d'améliorer la gestion de la sécheresse, SM le Roi Mohammed VI a présidé, il y a quelques mois, une séance de travail consacrée à l'examen du Programme national d'alimentation en eau potable et d'irrigation 2020-2027. En vue notamment d'accélérer et de renforcer ce chantier, une enveloppe supplémentaire de 143 milliards de dirhams lui a été allouée.
 
Cette impulsion devrait permettre de concrétiser dans les meilleurs délais la phase prioritaire de l'interconnexion des bassins de Sebou, Bouregreg et Oum Er-Rbia sur une distance de 67 km.
 
Parallèlement, de nouveaux barrages seront programmés et les coûts d'une vingtaine de barrages en projet seront réévalués. Ces mesures devront permettre un accroissement de la capacité de stockage d'eau douce de 6,6 milliards de mètres cubes, l'accélération des projets de mobilisation des eaux non conventionnelles par le biais d'usines de dessalement d'eau de mer, et le renforcement des capacités de réutilisation des eaux usées épurées.
 
L'approvisionnement en eau potable des zones rurales devra également être intensifié, grâce à l'extension de la couverture à un plus grand nombre de douars, ainsi qu'à l'amélioration de la logistique et des ressources humaines.
 
S'il est vrai que le gouvernement a tiré un bilan positif des dernières précipitations, il n'en reste pas moins que la situation actuelle de cette ressource est préoccupante, les réserves d'eau dans les barrages du pays atteignant des niveaux alarmants. Avec un déficit pluviométrique important, des chiffres récents révèlent que seuls 32,2% de la capacité totale des barrages sont actuellement remplis.

Evénements phares : Une histoire d’eaux

Parler des barrages qui composent le paysage hydraulique marocain, c’est faire inévitablement référence à leur diversité technique et à leur proximité géographique avec toutes les régions du Maroc. En tête de liste, il y a lieu de nommer le barrage d'Imfout.
 
Situé sur l'oued Oum Er-R'bia, dans le prolongement du grand barrage régulateur d'Al Massira et à 20 km du centre de Machraa Ben Abbou, sur la route Casablanca-Marrakech, ce barrage a été aménagé entre 1939 et 1944 pour détourner les eaux recueillies par le barrage d'Al Massira vers les services inférieur (61.000 ha) et supérieur (35.000 ha) de la région des Doukkala-Abda, en assurant la production d'énergie par le turbinage au fil de l'eau.
 
D'une superficie de 27.000 km2, le bassin versant du barrage est marqué par un climat continental à forte influence océanique. Il reçoit à peine plus de 350 mm de précipitations. L'écoulement annuel est en moyenne de 100 m3/s, mais il existe d'importantes variations inter-saisonnières. D’ailleurs, il contrôle ce débit depuis 1944 et alimente le canal desservant le périmètre des Doukkala par un canal d'amenée de 17 km de long.

Non loin de ce chef-d'œuvre hydraulique, le barrage de Bine el Ouidane remplit depuis 1953 une double fonction, à savoir la production d'électricité et l'irrigation. Il est réputé être le plus haut barrage-voûte d'Afrique et le plus grand du Royaume en termes de production d'énergie. Au-delà de sa capacité d'irrigation de la plaine du Tadla relevant de la plaine intérieure pré-Atlasique du Tadla (3500 km2), et étendue à la région de Marrakech-Safi par la plaine de la Sraghna, le barrage a contribué à la mise en valeur de pas moins de 69.000 hectares de terres agricoles et à la création d'emplois. Il a, d'ailleurs, permis de mettre en valeur 69.500 ha de terres fertiles sur une longueur de 125 km. La stratégie du gouvernement au début des années 1960 était d'irriguer un million d'hectares. Cependant, malgré tous ces efforts, notre pays est confronté à certains problèmes : la sécheresse et le remplissage des barrages par la boue, ce qui a une influence sur la rétention de l'eau.

Toujours en 1953, le barrage d'Aït Ouarda a été construit dans la province d'Azilal (région de Tadla-Azilal). Ce fut entre 1948 et 1957, à quelques kilomètres en aval du barrage de Bin el Ouidane, principal ouvrage pour la mise en valeur de 69.500 ha de terres fertiles dans la région de Béni Moussa, faisant partie de la grande plaine du Tadla, d'une superficie de plus de 3.600 km2 et comprise entre la chaîne du Haut-Atlas et le plateau des phosphates. Le barrage Youssef Ben Tachfine est situé sur l'Oued Massa dans la province de Tiznit. Inauguré en 1972, il est destiné à l'irrigation de la plaine de Chtouka.

Au total, sur les dix-huit barrages en construction au Maroc, trois sont en voie d'achèvement cette année. Ainsi, contre vents et marées, le Royaume ne ménage aucunement ses efforts dans sa lutte acharnée contre le fléau de la sécheresse.

Grands chantiers : Ratba ou le génie de la prévoyance

Sous la houlette de Nizar Baraka, le ministère de l'Equipement et de l'Eau a mis en place des mesures extraordinaires afin de réduire autant que possible les temps de chantier et permettre la mise en service du nouveau barrage de Ratba d'ici la fin de l'année 2028.
"La construction du barrage de Ratba fait partie d'une série de projets structurants dans le bassin versant du Sebou. Sa construction s'inscrit dans le cadre du Programme national d'alimentation en eau potable et d'irrigation (2020-2027)", détaille Mouhcine Bahtat, chef du département aménagement du barrage, dans une déclaration à « L'Opinion ».
Ce vaste réservoir, qui sera le deuxième plus grand du Maroc après celui d'Al Wahda, est localisé sur l'Oued Aoulai, l'un des deux affluents de l'Ouergha. Selon notre source, "il aura pour objectif d'augmenter l'approvisionnement en eau potable et en irrigation, de produire de l'électricité et de protéger contre les inondations".
 
Avec un coût d'investissement d'environ 4 milliards de dirhams (financé par le budget général de l'Etat), le barrage de Ratba disposera d'une capacité de stockage de 1,9 milliard de mètres cubes.
 
Toujours selon le spécialiste, "le taux d'avancement du projet, qui a démarré en mars 2022, a atteint 15%". Toutefois, en raison des contraintes climatiques, le ministère de l'Equipement et de l'Eau a adopté des dispositions d'exception pour accélérer la cadence des travaux et réduire de 12 mois le délai de réalisation du projet.

Prodige hydraulique : Al Wahda, un bouclier contre l'apocalypse

Le barrage Al Wahda est sans conteste le plus grand réservoir d’eau du Royaume, et le deuxième plus grand en Afrique après le Haut Barrage d'Egypte. Il est haut de 80 mètres et long de 2600 mètres. Pour ce qui est de sa capacité, il est question de 3 milliards 800 millions de mètres cubes.
 
Sa construction a été lancée en 1997 par feu Hassan II. Situé dans la région de Ouazzane, dans un village montagneux appelé Lamjaâra, il se situe à la périphérie de la ville de Taounate.
 
Ce gigantesque barrage représente un important réservoir d'eau. En effet, à plusieurs reprises, il a contribué à réduire les inondations qui mettaient en péril l'Est du pays pendant l'hiver. Il joue un rôle crucial vis-à-vis de la population environnante, en assurant l'approvisionnement en eau potable et l'irrigation. Il est en outre capital pour la production d'énergie hydroélectrique.
 
Le barrage fournit de l'énergie électrique, couramment exploitée pour le chauffage, l'éclairage et les appareils électroménagers.
 
Cependant, il doit être entretenu pour faire face aux risques sismiques qui menacent de compromettre sa robustesse.
 
Les chiffres du gouvernement montrent qu'il est impératif d'agir face à cette crise de l'eau qui se profile à l'horizon. Le barrage d'Al Wahda, le plus grand du Maroc, fait figure d'exception par rapport aux autres barrages du pays, qui sont presque tous à sec. Avec un taux de remplissage de 56,4%, il bénéficie de réserves relativement importantes. Cette réalité ne doit cependant pas occulter la situation critique des autres barrages.








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