Aujourd’hui, la prise de conscience de la gravité du stress hydrique qui menace le Royaume est générale. Dans un contexte aussi critique, la communication devient un enjeu majeur pour le ministre de l’Equipement et de l’Eau, Nizar Baraka, qui multiplie les prises de parole afin de tenir l’opinion publique au courant de l’exécution du programme d’urgence qui montre à quel point les gouvernements précédents n’ont pas anticipé la gravité de la situation. Celle-ci aurait pu être meilleure si les mesures préventives avaient été prises dès le début de ces dix dernières années. Actuellement, la priorité est de garantir un approvisionnement régulier dans les régions les plus touchées par le stress hydrique, surtout Casablanca et les régions avoisinantes.
Sortir Casablanca de la zone rouge le plutôt possible
“Nous faisons une course contre le temps”, a indiqué Nizar Baraka lors d’une conférence-débat organisée par l'Alliance des Ingénieurs Istiqlaliens (AII) en coopération avec la Fondation Konrad-Adenauer au Maroc sous le thème "La guerre de l'eau : Le stress hydrique, qui gagnera ?". Le gouvernement s’est fixé des objectifs concrets à court terme. “D’ici l’été prochain, notre objectif est qu’il n’y ait plus de problèmes graves à Casablanca”, a affirmé Nizar Baraka, qui a rappelé que d’ici juillet, la zone Sud de la capitale économique, ainsi que Berrechid, Settat et Bouskoura, pourront être alimentées en eau dessalée à partir de la connexion entre la station de Jorf Lasfar à El Jadida et le barrage de Daourat.
Ceci permettra de lever durablement la menace qui pesait sur la région de Casablanca, qui a été sauvée grâce aux autoroutes de l’eau, notamment l’interconnexion entre les bassins hydrauliques de Sebou et de Bouregreg. Un projet réalisé en huit mois, selon le ministre, qui a tenu à rappeler à quel point cette connexion, qui a permis le transfert de 170 millions de mètres cubes, est vitale. “Sans le projet d'interconnexion entre les bassins de Sebou et de Bouregreg, Casablanca aurait eu des coupures d’eau conséquentes, depuis le 18 décembre dernier”, a-t-il rappelé, soulignant que c’est la logique de l’anticipation qui a permis d’être au rendez-vous avec l’Histoire. Ce projet, qui a coûté environ 6 milliards de dirhams, a permis de répondre aux besoins de 12 millions de personnes dans les régions de Rabat et Casablanca.
Autoroutes de l’eau : 1 milliard de mètres cubes à gagner
Maintenant, le cap est fixé. L’objectif est d’avancer pour aller jusqu’au barrage d’Al Massira. Ceci passe par l’interconnexion des bassins de Bouregreg, de Sebou et d’Oum-Errabia. Ensuite, il est prévu de connecter le bassin du Loukkos avec celui de Sebou. “Les études relatives au tracé sont en cours”, a précisé M. Baraka. Ceci permettra de récupérer entre 800 millions et un milliard de mètres cubes, qui allaient en mer, pour les exploiter dans l’irrigation et la consommation domestique.
Nouveaux barrages : Réduction des délais de construction
Concernant les barrages, en dépit des récentes pluies qui ont légèrement augmenté les réserves, la situation demeure difficile. Raison pour laquelle l’investissement dans de nouvelles structures est crucial. Jusqu’à cette heure, 18 nouveaux barrages sont en cours de construction. La cadence des chantiers s’est accélérée de sorte à réduire les délais. Les échéances ont été réduites de six à trois ans, selon M. Baraka, qui rappelle que ceci est rendu possible grâce à la mobilisation des ressources financières nécessaires à la réalisation des projets en cours pour aller plus vite que prévu. “Le ministère des Finances nous a accompagnés pour accélérer le paiement”, a-t-il fait savoir, précisant que le gouvernement a alloué cinq milliards de dirhams supplémentaires au titre de la Loi des Finances 2024. En plus, en partenariat avec les régions, 6 milliards de dirhams ont été mobilisés pour financer le programme d’urgence.
Désenvasement, le nouveau péril
Le ministère de tutelle parie aussi sur la lutte contre l'envasement des barrages, un fléau qui fait perdre chaque année au pays l’équivalent de 75 millions de m3 en moyenne de capacité de stockage au niveau des barrages. “Le niveau d’envasement est très important dans certains barrages”, a précisé Nizar Baraka.
Actuellement, le paquet est mis également sur le programme de surélévation des barrages, à l’instar des projets lancés aux barrages de Mokhtar Soussi et de Mohammed V. L’objectif est de rehausser la hauteur des infrastructures de sorte à augmenter leur capacité de retenue. Cette stratégie est d’autant plus importante que le ministère de tutelle s’est rendu compte que les chiffres relatifs aux ressources étaient généralement faussés par le niveau de l’envasement. Pour arriver à une telle conclusion, le ministère a établi un nouveau diagnostic de la situation des barrages sur la base d’une étude de bathymétrie.
Contrats de nappes : La clé pour sauver les eaux souterraines
Pour ce qui est des petits barrages, un programme a été mis en place en partenariat avec les régions. Ceux-ci permettent, en plus de fournir de l’eau aux zones rurales, d’alimenter les nappes phréatiques très affectées par la surexploitation des eaux souterraines, sachant que les besoins de l’agriculture et en eau potable sont supérieurs aux ressources renouvelables en un an. Le Maroc consomme 6 milliards de mètres cubes alors que les nappes phréatiques ne sont en mesure de reconstituer que 4 milliards de mètres cubes. Cela dit, nous vivons à crédit. “On est en train de consommer nos futures réserves d’eau, nous ne sommes pas sûrs qu’on les aura demain”. Pour optimiser la gestion des ressources souterraines, Nizar Baraka a insisté sur l’importance des “contrats de nappes” qui consistent à gérer les eaux selon une approche participative afin de responsabiliser les agriculteurs.
Jusqu’à aujourd’hui, les efforts consentis pour faire face au stress hydrique ont ciblé en grande partie l’offre, Nizar Baraka a estimé qu’il est temps d’agir également sur la demande. Sur ce point, il a indiqué que l’administration publique consomme 5% de l’eau au niveau national. “Cela montre que l’administration a une responsabilité et doit contribuer à l’effort national”, a-t-il souligné. Les efforts d'économie ciblent également les activités agricoles où il y a gaspillage de l’eau, surtout dans l’irrigation. Sur ce point, Nizar Baraka a fait savoir qu’on perd dans les canalisations 40% à 50% d’eau destinée à l’irrigation.
Par ailleurs, le Maroc s’oriente vers la fin de l’exploitation des eaux conventionnelles dans l’industrie et l’intensification de la réutilisation des eaux usées.
3 questions à Moulay Ahmed Afilal « L’objectif est de réduire de 80% les fuites d’eau »
Le vice-président de la Commune de Casablanca, Moulay Ahmed Afilal, a répondu à nos questions sur les mesures mises en place par le Conseil de la ville pour faire face au stress hydrique.
- Quels étaient les défis majeurs auxquels vous avez été confrontés dans la gestion du stress hydrique à Casablanca, et comment avez-vous réussi à les surmonter ?
Sans le projet d'interconnexion entre les bassins de Sebou et de Bouregreg, nous aurions été contraints de restreindre l'accès à l'eau potable pour les habitants de Casablanca vivant dans les zones Sud et centrales de la métropole. Heureusement, ce projet nous a permis d'éviter une situation bien difficile.
- Comment le Conseil aborde-t-il la question de la sensibilisation à la gestion de l'eau à Casablanca et quelles initiatives spécifiques sont actuellement en cours pour renforcer cette sensibilisation ?
En parallèle avec les politiques publiques, nous menons des programmes de sensibilisation dans les écoles de la ville, mettant l'accent sur la gestion des déchets et la préservation de l'eau.
En collaboration avec nos partenaires de Lydec, nous adoptons des approches novatrices pour engager directement les citoyens et leur expliquer l'urgence de la situation. De plus, une campagne de sensibilisation spécialement conçue pour Casablanca est en préparation pour mettre en lumière l'importance cruciale de cette problématique.
Nous nous engageons également à relancer les projets de construction des stations d'épuration d'eau qui n'ont pas encore été achevées malgré leur échéance initiale en 2019.
- Parmi les grands problèmes rencontrés par la ville de Casablanca, il y a la question des fuites dans les différentes voies d’eau. Que fait le Conseil de la ville pour pallier au problème ?
Le Conseil de la ville de Casablanca s'attaque activement au problème des fuites dans les canalisations d'eau en collaboration étroite avec Lydec. Nous nous sommes fixé l'objectif ambitieux de réduire les fuites de 80%, ce qui nécessite des investissements considérables dans la modernisation des infrastructures vieillissantes. Nous surveillons de près les travaux en cours et cherchons à trouver un équilibre entre les besoins de la ville et les ressources disponibles.
Puits : Vers la fin des forages aléatoires
S’agissant de la lutte contre la surexploitation des puits, le ministère de tutelle a décidé de réglementer de façon plus approfondie l’utilisation des eaux souterraines, notamment l’usage des puits. Nizar Baraka a fait savoir que son département a travaillé sur deux décrets. Le premier porte sur la réglementation du métier de foreur de puits, le texte a été adopté par le Conseil de gouvernement en décembre 2023 et définit les conditions et la procédure d’octroi d’une autorisation de forage, les modalités d’exercice du métier, le contenu de l’autorisation de démarrage des travaux de forage, ainsi que les éléments qui doivent figurer dans le rapport sanctionnant ces travaux.
En parallèle, le département de tutelle s’emploie à encadrer la régularisation des puits illégaux (80%). Une série de mesures sont envisagées. Par exemple : la régularisation est conditionnée par l’installation des compteurs. Le ministère compte également déployer des drones pour traquer les forages illégaux.
En parallèle, le département de tutelle s’emploie à encadrer la régularisation des puits illégaux (80%). Une série de mesures sont envisagées. Par exemple : la régularisation est conditionnée par l’installation des compteurs. Le ministère compte également déployer des drones pour traquer les forages illégaux.
Dessalement de l’eau de la mer : “Nous allons multiplier par dix nos capacités d’eau dessalée d’ici 2030”
Le dessalement de l’eau de mer demeure l'horizon indépassable de la politique nationale. Les objectifs fixés pour les années à venir sont ambitieux. Nizar Baraka a fait savoir que le Royaume compte produire 1,4 milliard de mètres cubes d’ici 2030. Grâce aux projets futurs, plus de 50% de l’eau potable proviendra du dessalement. Cela signifie qu’on va économiser l’eau prise des barrages pour la garder exclusivement aux villes intérieures et aux zones rurales. Les eaux des barrages seront également mobilisées plus abondamment pour l’agriculture.
L’enjeu maintenant est d’accélérer la construction des stations programmées. Nizar Baraka a annoncé durant son allocution le commencement imminent des travaux de la future station de Casablanca. Le chantier, rappelons-le, a été attribué à un consortium mené par l’entreprise espagnole Acciona. La station devrait être finalisée dès 2026, elle sera dotée d’une capacité de production de 548.000 m3 par jour. D’autres projets de grande envergure seront lancés prochainement. Nizar Baraka en a cité la station de Nador et la deuxième tranche de celle d’Agadir. Idem pour celle de Sidi Ifni.
Le pari sur le dessalement est d'autant plus avantageux que le coût de production est bas vu qu’il fonctionne par l’énergie renouvelable. Nizar Baraka a donné l’exemple de la station de Dakhla où le coût du mètre cube est estimé à 3,50 dirhams. Le coût sera optimisé dans la station de Casablanca, il ne dépassera pas 4 dirhams. Pour montrer à quel point l’usage des énergies renouvelables est décisif, M. Baraka a expliqué que
L’enjeu maintenant est d’accélérer la construction des stations programmées. Nizar Baraka a annoncé durant son allocution le commencement imminent des travaux de la future station de Casablanca. Le chantier, rappelons-le, a été attribué à un consortium mené par l’entreprise espagnole Acciona. La station devrait être finalisée dès 2026, elle sera dotée d’une capacité de production de 548.000 m3 par jour. D’autres projets de grande envergure seront lancés prochainement. Nizar Baraka en a cité la station de Nador et la deuxième tranche de celle d’Agadir. Idem pour celle de Sidi Ifni.
Le pari sur le dessalement est d'autant plus avantageux que le coût de production est bas vu qu’il fonctionne par l’énergie renouvelable. Nizar Baraka a donné l’exemple de la station de Dakhla où le coût du mètre cube est estimé à 3,50 dirhams. Le coût sera optimisé dans la station de Casablanca, il ne dépassera pas 4 dirhams. Pour montrer à quel point l’usage des énergies renouvelables est décisif, M. Baraka a expliqué que