Depuis son arrivée à la tête du ministère des Transports et de la Logistique, Mohamed Abdeljalil a fait de la régulation de l’activité des conducteurs de véhicules de tourisme avec chauffeur (VTC) une de ses priorités. Il y a plus d’un an, le ministre avait promis de lancer une étude sur ce nouveau mode de transport afin de définir un cadre réglementaire et des modalités de régulation pour cette activité en pleine expansion. Cependant, cette initiative tarde à se concrétiser en raison des tensions croissantes entre les chauffeurs de taxi et les conducteurs de VTC. Dans sa dernière déclaration sur ce sujet, Abdeljalil a dit clairement que la régulation implique que tous les acteurs soient engagés dans ce chantier. Mais jusque-là, le dialogue est dans l’impasse, apprend-on d’une source gouvernementale. La régulation du secteur reste donc au point mort du moment que les chauffeurs de taxis s’opposent à toute légalisation des applications mobiles.
L’incident survenu en mars dernier à Casablanca montre, d’ailleurs, à quel point le compromis est difficilement atteignable pour l’instant. En effet, une violente altercation entre un taximan et un conducteur de VTC a causé d'importants dégâts matériels des deux côtés. Cet affrontement, documenté et largement diffusé sur les réseaux sociaux, a également mis en danger une cliente qui, prise de panique, s’est mise à crier à bord du VTC en pleine scène de violence.
Ce type de conflit n'est pas isolé et reflète un climat de tension croissante entre les chauffeurs de taxi traditionnels et les conducteurs travaillant pour des plateformes de réservation de voitures, qui connaissent un succès croissant auprès des utilisateurs. Les chauffeurs de taxi, eux, s'opposent fermement à cette concurrence, estimant qu'elle menace leur profession. Toutefois, pour les professionnels, ces actes sont tout à fait légitimes. “Au moment où les chauffeurs de taxi luttent en silence contre la cherté de la vie et le coût élevé du carburant, les chauffeurs de VTC opèrent dans leur temps libre, sans obligations précises, menaçant ainsi notre gain-pain”, déplore un taximan exerçant à Rabat, sous couvert d’anonymat.
L’incident survenu en mars dernier à Casablanca montre, d’ailleurs, à quel point le compromis est difficilement atteignable pour l’instant. En effet, une violente altercation entre un taximan et un conducteur de VTC a causé d'importants dégâts matériels des deux côtés. Cet affrontement, documenté et largement diffusé sur les réseaux sociaux, a également mis en danger une cliente qui, prise de panique, s’est mise à crier à bord du VTC en pleine scène de violence.
Ce type de conflit n'est pas isolé et reflète un climat de tension croissante entre les chauffeurs de taxi traditionnels et les conducteurs travaillant pour des plateformes de réservation de voitures, qui connaissent un succès croissant auprès des utilisateurs. Les chauffeurs de taxi, eux, s'opposent fermement à cette concurrence, estimant qu'elle menace leur profession. Toutefois, pour les professionnels, ces actes sont tout à fait légitimes. “Au moment où les chauffeurs de taxi luttent en silence contre la cherté de la vie et le coût élevé du carburant, les chauffeurs de VTC opèrent dans leur temps libre, sans obligations précises, menaçant ainsi notre gain-pain”, déplore un taximan exerçant à Rabat, sous couvert d’anonymat.
Le pourquoi du “Non”
En plus de la concurrence intense, les taximen dénoncent l’illégalité de l’activité des chauffeurs de VTC. “Celle-ci reste illégale tant qu’elle n’obéit pas aux conditions en vigueur, telles que l’obtention d’un agrément ou d’une autorisation préalable, au même titre que les taxis”, déclare Abdessadek Boujaar, Secrétaire général du syndicat des taxis de Casablanca. Selon Boujaar, cela fait que les chauffeurs utilisant des applications ou des communications directes sont des “transporteurs clandestins” plutôt que des professionnels de transport.
Il estime que l’autorisation de cette activité par les Marocains risque de créer de l’anarchie dans le secteur du transport en commun, mettant en danger la sécurité publique. “Le chauffeur de VTC n’a qu’une simple attestation d’assurance, pas une assurance de transport en commun qui protège les droits des passagers en cas d’accident”, argumente-t-il, faisant valoir sa profession. Pour ces raisons et d’autres, les chauffeurs de taxi rejettent toujours l’activité des VTC et toute tentative de réglementation en ce sens.
D’ailleurs, la régulation des VTC implique impérativement une refonte des textes de loi en vigueur pour intégrer ce nouveau mode de transport, ce qui est peu probable, voire exclu, selon Boujaar.
Vers le respect des clients !
Ce rejet catégorique intervient alors que les taxis sont toujours sous le feu de critiques du fait de la détérioration de leurs services et le comportement inacceptable de certains chauffeurs. “Certains refusent de se rendre à certaines destinations ou de transporter plus de deux personnes pour une seule course, sans parler des tentatives d’arnaque et même de harcèlement”, se plaignent certains passagers, qui préfèrent réserver une course plutôt que de prendre un taxi ordinaire.
Conscients de ces critiques, les syndicats de taxis promettent d’améliorer le service pour répondre aux nouvelles attentes des clients. En effet, certains professionnels commencent à se servir des applications de communication directe pour faciliter la vie des passagers, espérant une adoption généralisée à l’avenir. “Un effort de formation et d’auto-habilitation est également en cours pour mettre fin aux comportements non professionnels de certains chauffeurs envers les clients”, affirme Abdessadek Boujaar, soulignant que le service des taxis connaîtra une transformation majeure grâce à la technologie.
Oui, mais…
Malgré les récents efforts de modernisation des services par les chauffeurs de taxi, les défenseurs des droits des consommateurs insistent sur l'établissement d'un cadre légal pour les VTC, en tant que nouveau mode de transport. "Cette réglementation est l'un des projets les plus importants du secteur des transports que les décideurs devront aborder à l'avenir pour offrir aux passagers, qu'ils soient marocains ou étrangers, des options de transport diversifiées, fiables, sûres et de qualité", explique Ouadie Madih, président de la Fédération Marocaine des Droits du Consommateur (FMDC).
Selon lui, les taxis et les VTC s'adressent à des clientèles distinctes avec des attentes différentes, et la réglementation ne devrait pas affaiblir l'activité des taxis, qui sont un élément incontournable du paysage urbain. Pour Ouadie Madih, l'idée est simple : dans un contexte de forte demande de mobilité, il est essentiel de fournir aux consommateurs plusieurs options, leur permettant ainsi de choisir ce qui correspond le mieux à leurs besoins et à leurs moyens.
Pour ce faire, le gouvernement devrait absolument réussir à réunir les deux parties prenantes. Du côté des entreprises de VTC, elles affirment être entièrement prêtes à collaborer avec les autorités en vue de mettre en place un cadre légal adapté à cette activité, soulignant que la réglementation de ce secteur permettra de réduire les tensions entre les taximen et les chauffeurs opérant avec les entreprises de VTC et potentiellement réduire le prix du transport et augmenter les revenus des chauffeurs en permettant au marché de se développer de manière organique.
“Nous prévoyons de participer à des pourparlers pour trouver la meilleure approche qui convienne à toutes les parties prenantes : autorités, population, taxis, transports publics et transport à la demande”, souligne Max Osipov (InDrive).
Mina ELKHODARI et Yousra RHARDOUD
Trois questions à Abdessadek Boujaar “Les chauffeurs de taxi améliorent leur service en vue de répondre aux exigences des clients”
Le Secrétaire général du syndicat des taxis de Casablanca, affilié à l’UMT, a répondu à nos questions sur l’opposition catégorique des taximen à la réglementation de l’activité des chauffeurs opérant avec les VTC.
- Une réconciliation des taximen avec les chauffeurs opérant avec les VTC est-elle possible ?
Les taximen ne sont pas opposés à l'utilisation de la technologie, mais plutôt à l'exploitation illégale pratiquée par certains chauffeurs qui opèrent sans autorisation préalable. Cela démontre que les taximen ne s'opposent pas aux transporteurs agréés par les autorités et qui utilisent des applications de mise en relation dans leur activité quotidienne.
Actuellement, rien n'empêche les chauffeurs de travailler dans ce cadre, à condition d'obtenir une autorisation de la Wilaya avec des directives claires. Cependant, nous continuons à dénoncer les pratiques des "transporteurs clandestins" qui font concurrence aux chauffeurs de taxis sur le terrain. Par conséquent, je ne peux pas garantir que les deux parties puissent exercer leur activité de manière normale au Maroc. Cela est tout simplement inacceptable.
Actuellement, rien n'empêche les chauffeurs de travailler dans ce cadre, à condition d'obtenir une autorisation de la Wilaya avec des directives claires. Cependant, nous continuons à dénoncer les pratiques des "transporteurs clandestins" qui font concurrence aux chauffeurs de taxis sur le terrain. Par conséquent, je ne peux pas garantir que les deux parties puissent exercer leur activité de manière normale au Maroc. Cela est tout simplement inacceptable.
- Les taximen ont-ils peur que leur activité soit remplacée par celle des VTC ?
“Rire”. Au-delà de leur simple fonction de transport, les taxis incarnent une part essentielle du tissu urbain de chaque ville marocaine. En dépit de la multitude de solutions de mobilité urbaine disponibles, aucun mode de transport ne peut rivaliser avec le taxi. Je tiens à souligner que l'arrêt de l'activité des taxis, quelle que soit la raison invoquée, serait inacceptable pour la plupart des gens, même ceux qui optent pour les VTC.
- Le Maroc s'apprête à abriter des événements internationaux phares, tels que la Coupe du Monde de football en 2030. Comment les taximen envisagent-ils d’améliorer leur service dans ce contexte ?
Il est vrai qu'il y a une forte demande en raison de la crise du transport, des besoins croissants de mobilité et de la détérioration de la qualité des services offerts par les taxis. Il est donc normal que les citoyens cherchent de nouvelles alternatives comme les VTC, sans exiger des conditions strictes de sécurité et d’autorisations.
De ce fait, les chauffeurs de taxi ont finalement compris que la confrontation ne peut pas être une solution efficace pour contrer l’activité des chauffeurs de VTC. En revanche, l’adoption de la technologie, la formation et l’auto-habilitation sont des éléments clés de notre stratégie. Les professionnels doivent améliorer leurs services et leur comportement envers les clients. Le gouvernement soutient cette dynamique par des actions concrètes visant à accélérer son impact sur les clients.
Recueillis par Mina ELKHODARI
Trois questions à Max Osipov “InDrive a développé un système de sanctions et d'avertissements pour agir sur les potentiels comportements non éthiques des chauffeurs”
Le Directeur des Affaires pour la région MENA chez InDrive a répondu à nos questions concernant le système de sanctions et d’avertissements mis en place pour contrer les comportements non éthiques des VTC.
- Comment gérez-vous les tensions et les conflits potentiels avec les chauffeurs de taxi en raison du manque d'un cadre juridique clair pour les applications VTC ?
Tout d'abord, nous sommes une application axée sur la liberté où les chauffeurs et les passagers ont toujours le choix, ce qui est toujours plus sûr que d'être obligé de prendre une commande ou un chauffeur spécifique. Nous disposons d'un service d'assistance solide qui dispose de ressources dédiées spéciales pour les incidents graves. Dans de tels cas, nous sommes toujours en contact avec toutes les parties impliquées et prêts à aider les autorités dans tout cas nécessaire sur demande écrite. De plus, nous avons développé un système de sanctions et d'avertissements qui indiquera si quelqu'un agit de manière non éthique et enfreint les règles de sécurité.
- Comment pensez-vous que la réglementation des VTC pourrait-elle influencer vos activités ?
Il faut savoir que le marché du VTC est très injuste : des commissions élevées, des algorithmes incompréhensibles, etc. Il est temps de changer la situation. Nous fournissons toujours des conditions transparentes et les commissions les plus basses possibles. Cette approche convient parfaitement aux conditions des gens. Les gens reçoivent des services (comme le transport à la demande, les maîtres, etc.) à un prix qu’ils conviennent entre eux. De plus, une réglementation bien développée dans n'importe quel pays profitera à toutes les parties prenantes. Cela réduira les tensions entre l'industrie du taxi et les chauffeurs et entreprises de VTC, et pourra potentiellement réduire le prix du transport et augmenter les revenus des chauffeurs en permettant au marché de se développer de manière organique. Nous pouvons donc dire, en tant qu'entreprise, que nous bénéficierons certainement d'une telle réglementation ainsi que l'Etat et d'autres parties prenantes. Et nous avons des exemples de cela dans le réseau InDrive.
- Comment envisagez-vous de participer à l'évolution de la législation marocaine afin de garantir un cadre légal et sécurisé pour votre entreprise et ses conducteurs partenaires ?
Chez InDrive, nous travaillons toujours conformément à la loi et à la réglementation de chaque pays. Au Maroc, la réglementation sur le VTC est actuellement en cours de développement et nous sommes entièrement prêts à collaborer avec les autorités et à aider à trouver la meilleure solution pour le pays. Nous opérons dans 46 pays en tant qu'InDrive et avons une expérience de travail dans différents cadres réglementaires. De plus, nous avons une expérience très solide en relations gouvernementales, qui trouvera la meilleure approche qui conviendra à toutes les parties prenantes : autorités, population, industrie du taxi, transports publics et transport à la demande. Actuellement, nous prévoyons de participer à des discussions potentielles autour de tables rondes où nous pouvons être utiles en tant que leaders du marché.
Recueillis par Yousra RHARDOUD