Matthew Rankin signe avec "Une langue universelle" une œuvre fascinante, où l'expérimentation esthétique côtoie une réflexion sur l’identité culturelle et le langage cinématographique. Ce long métrage s'impose par sa construction formelle audacieuse, sa mise en scène minutieuse, et son esthétique singulière qui défie les conventions narratives classiques.
Loin des schémas traditionnels, "Une langue universelle" tisse une intrigue éclatée, composée de destins croisés qui se répondent subtilement. La quête de deux enfants pour libérer un billet de banque prisonnier de la glace agit comme un fil rouge, mais le film se déploie également autour de plusieurs récits secondaires : un fonctionnaire taciturne en quête de réconciliation, une pleureuse professionnelle, ou encore un guide touristique maladroit. Cette fragmentation narrative, empruntée au cinéma choral, amplifie la richesse thématique de l’œuvre et brouille les frontières entre le réel et l’imaginaire.
Rankin utilise la mise en scène pour ancrer son récit dans un Winnipeg transfiguré, à la fois ancré dans le quotidien et rehaussé par des touches surréalistes. Les décors, soigneusement sélectionnés, évoquent une architecture brutaliste des années 60-70, mêlant froideur institutionnelle et étrangeté visuelle. Cette esthétique architecturale, inspirée par les bâtiments gouvernementaux de Winnipeg, crée une atmosphère qui oscille entre réalisme austère et abstraction poétique.
Chaque plan semble avoir été dessiné à l'avance, dans une recherche quasi picturale. Les compositions symétriques et les motifs récurrents, notamment les jeux d’ombre et de lumière, renforcent l’impression d’une œuvre pensée comme un tableau vivant, où chaque détail compte.
La photographie d’Isabelle Stachtchenko, en collaboration avec la direction artistique de Louisa Schabas, sublime l'univers du film. Les teintes volontairement neutres et les textures granuleuses traduisent une sobriété esthétique qui contraste avec l’étrangeté des situations. Ce choix chromatique, dominé par des beiges et des gris, évoque un monde en suspension, où passé et présent se confondent.
Les emprunts au cinéma iranien, notamment au style méta-réaliste, se font sentir dans l’usage de la symbolique et du dépouillement. Les espaces sont à la fois ancrés dans une réalité familière et sublimés par une stylisation visuelle qui confère au film une dimension intemporelle.
Loin des schémas traditionnels, "Une langue universelle" tisse une intrigue éclatée, composée de destins croisés qui se répondent subtilement. La quête de deux enfants pour libérer un billet de banque prisonnier de la glace agit comme un fil rouge, mais le film se déploie également autour de plusieurs récits secondaires : un fonctionnaire taciturne en quête de réconciliation, une pleureuse professionnelle, ou encore un guide touristique maladroit. Cette fragmentation narrative, empruntée au cinéma choral, amplifie la richesse thématique de l’œuvre et brouille les frontières entre le réel et l’imaginaire.
Rankin utilise la mise en scène pour ancrer son récit dans un Winnipeg transfiguré, à la fois ancré dans le quotidien et rehaussé par des touches surréalistes. Les décors, soigneusement sélectionnés, évoquent une architecture brutaliste des années 60-70, mêlant froideur institutionnelle et étrangeté visuelle. Cette esthétique architecturale, inspirée par les bâtiments gouvernementaux de Winnipeg, crée une atmosphère qui oscille entre réalisme austère et abstraction poétique.
Chaque plan semble avoir été dessiné à l'avance, dans une recherche quasi picturale. Les compositions symétriques et les motifs récurrents, notamment les jeux d’ombre et de lumière, renforcent l’impression d’une œuvre pensée comme un tableau vivant, où chaque détail compte.
La photographie d’Isabelle Stachtchenko, en collaboration avec la direction artistique de Louisa Schabas, sublime l'univers du film. Les teintes volontairement neutres et les textures granuleuses traduisent une sobriété esthétique qui contraste avec l’étrangeté des situations. Ce choix chromatique, dominé par des beiges et des gris, évoque un monde en suspension, où passé et présent se confondent.
Les emprunts au cinéma iranien, notamment au style méta-réaliste, se font sentir dans l’usage de la symbolique et du dépouillement. Les espaces sont à la fois ancrés dans une réalité familière et sublimés par une stylisation visuelle qui confère au film une dimension intemporelle.
Une esthétique sonore immersive
L’univers sonore de « Une langue universelle » complète sa richesse visuelle. La bande-son, tout en discrétion, joue sur des tonalités éthérées et des silences évocateurs, permettant aux spectateurs de s’immerger pleinement dans cet univers singulier. Les dialogues alternent entre le français et le persan, soulignant la diversité culturelle qui traverse le film.
Au-delà de son intrigue, le film questionne les moyens d'expression propres au cinéma. En s’appropriant les codes du méta-réalisme et en jouant avec des éléments autobiographiques, Rankin explore les limites entre vérité et fiction. Les influences culturelles croisées, notamment celles du cinéma iranien, enrichissent cette réflexion, en montrant comment une histoire personnelle peut s’ouvrir sur une portée universelle.
Le choix d’acteurs peu connus ou issus du cercle proche de Rankin renforce la dimension artisanale et collaborative du film. Les interprétations, pleines de fraîcheur et de sincérité, participent à l’authenticité de cette œuvre hybride et profondément humaine.
Trois questions au cinéaste canadien, Matthew Rankin
Entrelacs d'émotions et géométries visuelles
Avec Une langue universelle, Matthew Rankin explore les méandres de l'identité, de la géométrie visuelle et des émotions humaines dans un récit à la fois poétique et brut. Inspiré par des maîtres comme Jacques Tati, ce film invite à repenser les notions.
Avec Une langue universelle, Matthew Rankin explore les méandres de l'identité, de la géométrie visuelle et des émotions humaines dans un récit à la fois poétique et brut. Inspiré par des maîtres comme Jacques Tati, ce film invite à repenser les notions.
- Votre film évoque une esthétique qui rappelle celle de Wes Anderson, notamment dans l'usage des couleurs et des géométries. Y a-t-il une influence assumée ?
Ce n'est pas un choix conscient. Beaucoup de gens font ce parallèle, et cela m’a poussé à explorer quelques films de Wes Anderson. C'est un cinéaste que je connais peu, et si similarité il y a, je pense qu’elle réside dans l’usage des géométries ou des asymétries. Toutefois, l’inspiration fondamentale pour ce film vient plutôt de Jacques Tati. Tati a influencé non seulement Wes Anderson, mais aussi des réalisateurs comme Ulrich Seidel et Roy Anderson. Ce qui m’inspire chez Tati, c’est sa capacité à combiner une rigueur géométrique avec une richesse d’interactions périphériques, où chaque détail du cadre raconte une histoire.
- Votre œuvre explore les contrastes entre rigidité et fluidité, brutalité et humanité. Comment avez-vous utilisé le cadre visuel pour soutenir ces thèmes ?
Notre époque est marquée par une brutalité architecturale et sociétale : des murs, des frontières, des secteurs délimités. Mais en tant qu’êtres humains, notre expérience est infiniment plus fluide. Le film cherche à capturer ce contraste entre un univers rigide et une humanité fluide. Cela se reflète dans le cadrage, avec des plans sur des murs brutalistes qui imposent une certaine froideur, mais aussi des mouvements de caméra qui explorent les espaces, créant des moments de proximité et de distance. C’est une manière d’énergiser ces tensions et de leur donner une résonance visuelle.
- Votre film a déjà été présenté dans plusieurs festivals et semble bien accueilli. Que représente cette reconnaissance pour vous ?
Je suis profondément reconnaissant, mais je ne fais pas de la reconnaissance une quête personnelle. Nous avons fait ce film pour nous-mêmes, mes collaborateurs et moi, avec l’envie de créer quelque chose qui nous passionne. La connexion avec le public est toujours imprévisible. Quand elle se produit, c’est magnifique, mais elle reste hors de notre contrôle. Ce que j’aime avant tout, c’est l’acte de création. Les festivals et distinctions sont des indicateurs que notre travail touche les gens, et cela suffit à nous combler.