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Violences faites aux femmes : Malgré les lois, les sévices persistent


Jeudi 12 Décembre 2019

Malgré les progrès réalisés par le mouvement des femmes au Maroc et les efforts fournis pour lutter contre les violences faites aux femmes (VFF), par les différents acteurs concernés par ce sujet, les femmes demeurent souvent victimes de violences physiques et symboliques dans l'espace public et privé. Le taux des Marocaines ayant subi au moins un acte de violence durant l’année courante est de 57%, selon une étude du Haut-Commissariat au Plan HCP publiée mardi dernier. Le même jour, Oxfam et le Rabat Social Studies Institut (RSSI) ont présenté les résultats de leur étude sur la même thématique, soulignant que les normes traditionnelles et institutionnelles peuvent justifier, encourager, voire normaliser les VFF.



Les premiers résultats de l’enquête HCP 2019 montrent que parmi 13,4 millions de femmes âgées de 15 à 74 ans, plus de 7,6 millions (57% de la population féminine) ont été victimes au moins d’un acte de violence, durant les douze mois précédant l’enquête. La prévalence de la violence faite aux femmes est plus importante en milieu urbain qu’en milieu rural, avec un taux respectivement de 58% (soit 5,1 millions de femmes) et 55% (soit 2,5 millions de femmes rurales).

Certes, nous constatons qu’il y a globalement une tendance à la baisse de la violence entre 2009 et 2019, avec une régression de 6 points de pourcentage, passant de 63% à 57%, mais cela reste relativement élevé.

Selon le Pr Saloua Zerhouni, Présidente du RSSI, « ces violences trouvent leurs origines dans certaines normes sociales et les inégalités structurelles qui existent entre les femmes et les hommes ». Des propos corroborés par l’étude menée par Oxfam et le RSSI, qui souligne que les violences basées sur le genre puisent leurs racines dans la culture patriarcale qui reproduit et légitime des imaginaires et des normes sociales machistes. Parmi les facteurs qui perpétuent la violence à l’égard des femmes et des filles au Maroc, il existe : le contrôle des hommes du corps des femmes ; l’intériorisation des femmes et des hommes que la préservation de l’honneur de la famille relève de la responsabilité des femmes. Ceci donne ainsi un sentiment d’impunité aux hommes et aux garçons qui peuvent être violents mais sans se sentir responsables de leur comportement. À titre d’exemple, l’étude démontre que « cinq hommes sur dix âgés de 18 à 35 ans interrogés, estiment que dicter à sa femme la manière dont elle doit se vêtir, est considéré comme une des responsabilités de l’homme envers son épouse. Cependant, il y a une certaine ambivalence dans les perceptions et les attitudes des jeunes ».

Le cadre institutionnel est à blâmer

Le royaume a certes amélioré le cadre institutionnel de la protection des droits fondamentaux des femmes, néanmoins, l’accès à la justice n’est pas toujours garanti. Ofxam et le RSSI notent dans leur rapport que les femmes et les hommes préfèrent ne pas avoir recours à la justice en cas de conflits d’injustice ou de violence car ils ne font pas confiance aux institutions. La corruption et le clientélisme sont les raisons majeures de cette méfiance des citoyens, 53% des jeunes interrogé(es) pensent que la corruption et le clientélisme sont des pratiques courantes du système et les envisagent comme des moyens efficaces pour accéder aux droits ou de freiner l’accès à la justice. Néanmoins, beaucoup des jeunes enquêtés croient en l’importance des voies légales de recours, d’où l’importance de consolider la réforme de la justice au Maroc.

Cyber-violence, la nouvelle bête noire

La cybersécurité est un autre point à renforcer. Suite à la démocratisation des nouvelles technologies de l'information et de la communication (NTIC) et l'expansion des réseaux sociaux, les violences via les smartphones, pc et autres, ont augmenté significativement. Selon le HCP, près de 1,5 million de femmes sont victimes de violences électroniques. Les citadines sont les plus concernées par ce type de violence avec un taux de 16%, il est également plus élevé parmi les jeunes femmes âgées de 15 à 19 ans (29%), celles ayant un niveau d'enseignement supérieur (25%), les célibataires (30%) et les élèves et étudiantes (34%).
Claire comme l’eau de roche, la lutte contre les VFF ne demande pas seulement la mise en place des lois pour la protection des droits des femmes, il faut adopter une stratégie multidimensionnelle. Un travail sérieux sur les mentalités à travers l’intégration du concept de l’égalité dans les différents niveaux scolaires et programmes du système éducatif, il faut également veiller à une meilleure applicabilité des textes juridiques afin de créer la confiance entre citoyens et institutions.

Saâd JAFRI
 




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