Dans la périphérie de Casablanca, une vision ambitieuse a germé il y a plus d'une décennie : l'Éco-cité Zenata. Un projet grandiose, promettant de transformer 1.860 hectares en un havre de modernité et de durabilité, capable d'accueillir 300.000 habitants et de générer 100.000 emplois. Aujourd'hui, alors que nous parcourons ce vaste chantier, force est de constater que le rêve tarde à se concrétiser.
Lancé en 2013, le projet de l'Éco-cité Zenata était porteur d'espoirs. Il incarnait la volonté du Royaume de se positionner à l'avant-garde du développement urbain durable, offrant une vitrine de ce que pourrait être la ville marocaine du futur. Les plans étaient impressionnants : des quartiers écologiques, des espaces verts abondants, des infrastructures de pointe répondant aux normes internationales les plus strictes en matière d'environnement.
Pourtant, plus d’une décennie plus tard, le tableau est bien différent de celui esquissé dans les présentations initiales. Les grues sont là, certes, mais elles semblent figées dans un temps suspendu. Les bâtiments inachevés ponctuent le paysage, témoins silencieux d'un élan brisé. Que s'est-il passé ?
Il serait trop simple d'accuser une quelconque négligence. Les grands projets urbains sont des organismes complexes, sensibles aux aléas économiques, politiques et sociaux. Ce projet de Zenata n'échappe pas à cette règle. La crise financière mondiale, les fluctuations du marché immobilier, les défis logistiques inhérents à un projet de cette envergure : autant de facteurs qui ont pu contribuer à ralentir sa progression.
Mais au-delà des explications techniques, c'est peut-être notre interprétation de la notion du temps qui est questionnée ici. Dans notre époque d'instantanéité, avons-nous perdu la patience nécessaire pour voir éclore les grands projets ? Les villes ne se construisent pas en un jour, qu’on se le dise. Pourtant, l'impatience grandit, alimentée par les promesses initiales et l'urgence des besoins.
Car derrière les chiffres et les plans, il y a des vies en attente. Des familles qui espéraient un logement, des jeunes qui comptaient sur ces 100.000 emplois promis. La frustration est palpable, et compréhensible. Chaque jour de retard est un jour où le potentiel de Zenata reste en sommeil.
Au Conseil de Casablanca, les responsables ne nous parlent ni de report sine die et encore moins de date butoir. Il serait toutefois prématuré de parler d'échec. L'histoire urbaine regorge d'exemples de projets qui ont connu des débuts difficiles avant de s'épanouir pleinement. Ce chantier de Zenata pourrait encore devenir ce modèle d'éco-cité tant espéré. Mais pour cela, une réflexion profonde s'impose.
Houda BELABD
Le jeu en vaut la chandelle
Quelles leçons pouvons-nous tirer de ces années de ralentissement vis-à-vis du chantier le plus prometteur de Zenata ? Comment ajuster nos ambitions sans les trahir ? Comment impliquer davantage les communautés locales dans la réalisation de ce projet qui les concerne au premier chef ?
L'Éco-cité Zenata reste une opportunité unique pour le Maroc de repenser son développement urbain. Plutôt que de céder au découragement, il est temps de raviver la flamme de l'innovation et de l'engagement qui a présidé à sa conception. Avec de la transparence, une planification réaliste et une volonté renouvelée, Zenata pourrait encore devenir le phare urbain qu'elle promettait d'être.
Le défi est de taille, mais il en vaut la peine. Car au-delà de Zenata, c'est l'avenir des villes marocaines qui se joue. Dans un monde confronté aux défis du changement climatique et de l'urbanisation galopante, nous avons plus que jamais besoin de modèles urbains durables et inclusifs. Zenata peut être ce modèle. À condition de transformer les obstacles d'aujourd'hui en opportunités pour demain.