Dans une petite coopérative nichée dans les collines verdoyantes près de Berrechid, un producteur de lait contemple, impuissant, des bidons pleins de lait frais destinés à l’abandon. Ce lait, fruit de mois de labeur sous un soleil accablant et de nuits à veiller sur son troupeau, représente non seulement son effort, mais aussi son espoir de réaliser des revenus pour subvenir aux besoins de sa famille. Pourtant, malgré la qualité irréprochable de sa production, les entreprises laitières refusent une partie importante de ses livraisons, justifiant ce rejet par une supposée surabondance sur le marché. Le sentiment d'injustice grandit au sein de la communauté agricole, d’autant plus que ces refus coïncident avec des discussions en cours pour l’importation de lait pasteurisé en provenance d’Écosse. Ce paradoxe, où un surplus local est ignoré tandis qu’un produit étranger est envisagé pour répondre à une demande prétendument insatisfaite, soulève de vives interrogations.
Solution ou symptôme d’un mal plus profond ?
Face à une demande croissante et aux défis structurels du secteur laitier marocain, l’importation de lait écossais pasteurisé est présentée comme une réponse pragmatique. Pourtant, cette stratégie suscite des critiques, notamment de la part des producteurs locaux, qui voient en elle le reflet d’un manque d’ambition pour valoriser la production nationale. Entre déficits climatiques, contraintes de modernisation et choix politiques, le débat soulève des questions sur l’avenir de la filière laitière marocaine.
“Les producteurs locaux estiment que le Maroc a le potentiel d’atteindre une autosuffisance si des mesures adaptées sont mises en place pour optimiser les rendements, moderniser les équipements et structurer le réseau de collecte”, nous confie Ahmed Boukrizia, Président de la Fédération des producteurs de viandes, de lait et de produits agricoles.
Au cœur des discussions internationales, l’Écosse ambitionne de faire une entrée remarquée sur le marché marocain avec son lait frais pasteurisé. Profitant d’un régime de libre-échange favorable, exempt de droits de douane et de quotas, les responsables écossais mettent en avant une opportunité de répondre à la demande croissante en produits laitiers haut de gamme. Une stratégie renforcée par les progrès réalisés, notamment grâce à des échanges fructueux entre les deux parties.
Le président du Conseil écossais pour la croissance des produits laitiers, Paul Grant, a souligné, lors du Salon AgriScot, l’importance d’investir dans des infrastructures de pasteurisation et de concentration du lait en Écosse pour garantir la compétitivité et prolonger la durée de conservation des produits. Le lait serait transporté depuis Grangemouth et Anvers jusqu’à Casablanca, marquant ainsi un jalon pour le développement international du secteur écossais.
“Les conséquences d’une telle mesure sur les éleveurs locaux risquent d’être profondes. Depuis 2016, l’importation de lait en poudre en provenance de l’Europe a déjà eu un impact négatif sur les producteurs marocains”, nous informe Ahmed Boukrizia.
A-t-on vraiment besoin du lait écossais ?
L’annonce des négociations pour l’importation de lait pasteurisé écossais au Maroc suscite à la fois espoir et controverse. Cette mesure, présentée comme une réponse à la demande croissante en produits laitiers haut de gamme, soulève des interrogations profondes sur sa pertinence et ses conséquences pour le secteur laitier marocain, déjà sous pression.
“Cette importation pourrait être perçue comme un aveu d'échec des politiques publiques de soutien à la filière laitière nationale, qui devraient prioritairement viser à développer la production locale avant de recourir à des alternatives étrangères”, indique Ahmed Boukrizia.
Le choix de se tourner vers le lait écossais semble dicté par des considérations stratégiques. Le cadre commercial libéralisé pour le lait pasteurisé, exempt de droits de douane et de quotas, offre une opportunité aux exportateurs étrangers. De leur côté, les acteurs marocains y voient une volonté de diversifier l’offre, notamment pour satisfaire un segment de consommateurs exigeants.
Cependant, cette démarche intervient dans un contexte de crise pour le secteur laitier national. Les producteurs marocains peinent à écouler leurs surplus, malgré une qualité souvent mise en avant. Cette décision pourrait donc être perçue comme une mesure paradoxale, voire déstabilisante pour les éleveurs locaux.
Opportunité ou menace pour les producteurs locaux ?
Certains acteurs du secteur dénoncent des décisions incohérentes qui fragilisent les petits producteurs et exacerbent une situation déjà tendue. Ces choix stratégiques risquent d’accentuer les défis du secteur laitier national, laissant planer une question cruciale : comment équilibrer les ambitions commerciales internationales et la préservation de la production locale ?
Face à ce conflit d'intérêt, les professionnels du lait au Maroc demandent des réponses. Comment justifier l’importation de lait étranger alors que le lait local est rejeté en masse ? Cette contradiction fragilise non seulement le secteur, mais également les efforts des agriculteurs pour répondre aux besoins du marché tout en respectant des normes de qualité élevées. “Les entreprises dénoncent un manque de qualité du lait, tout en continuant à en collecter la moitié. Si la qualité est réellement un problème, pourquoi prendre cette moitié ?”, précise notre interlocuteur.
Pour apaiser les tensions, une réflexion approfondie est nécessaire. Il s’agit de trouver un équilibre entre ouverture commerciale et préservation du tissu agricole national, en évitant que des choix politiques ne compromettent l’avenir d’un secteur essentiel pour le Maroc.
Ahmed Boukrizia a souligné que cette réflexion commence par un renforcement de la production nationale à travers des investissements ciblés. La modernisation des exploitations laitières est cruciale, notamment par le soutien à l’acquisition de vaches laitières performantes et le développement de cultures fourragères locales, comme le maïs pour l’ensilage.
Solution ou symptôme d’un mal plus profond ?
Face à une demande croissante et aux défis structurels du secteur laitier marocain, l’importation de lait écossais pasteurisé est présentée comme une réponse pragmatique. Pourtant, cette stratégie suscite des critiques, notamment de la part des producteurs locaux, qui voient en elle le reflet d’un manque d’ambition pour valoriser la production nationale. Entre déficits climatiques, contraintes de modernisation et choix politiques, le débat soulève des questions sur l’avenir de la filière laitière marocaine.
“Les producteurs locaux estiment que le Maroc a le potentiel d’atteindre une autosuffisance si des mesures adaptées sont mises en place pour optimiser les rendements, moderniser les équipements et structurer le réseau de collecte”, nous confie Ahmed Boukrizia, Président de la Fédération des producteurs de viandes, de lait et de produits agricoles.
Au cœur des discussions internationales, l’Écosse ambitionne de faire une entrée remarquée sur le marché marocain avec son lait frais pasteurisé. Profitant d’un régime de libre-échange favorable, exempt de droits de douane et de quotas, les responsables écossais mettent en avant une opportunité de répondre à la demande croissante en produits laitiers haut de gamme. Une stratégie renforcée par les progrès réalisés, notamment grâce à des échanges fructueux entre les deux parties.
Le président du Conseil écossais pour la croissance des produits laitiers, Paul Grant, a souligné, lors du Salon AgriScot, l’importance d’investir dans des infrastructures de pasteurisation et de concentration du lait en Écosse pour garantir la compétitivité et prolonger la durée de conservation des produits. Le lait serait transporté depuis Grangemouth et Anvers jusqu’à Casablanca, marquant ainsi un jalon pour le développement international du secteur écossais.
“Les conséquences d’une telle mesure sur les éleveurs locaux risquent d’être profondes. Depuis 2016, l’importation de lait en poudre en provenance de l’Europe a déjà eu un impact négatif sur les producteurs marocains”, nous informe Ahmed Boukrizia.
A-t-on vraiment besoin du lait écossais ?
L’annonce des négociations pour l’importation de lait pasteurisé écossais au Maroc suscite à la fois espoir et controverse. Cette mesure, présentée comme une réponse à la demande croissante en produits laitiers haut de gamme, soulève des interrogations profondes sur sa pertinence et ses conséquences pour le secteur laitier marocain, déjà sous pression.
“Cette importation pourrait être perçue comme un aveu d'échec des politiques publiques de soutien à la filière laitière nationale, qui devraient prioritairement viser à développer la production locale avant de recourir à des alternatives étrangères”, indique Ahmed Boukrizia.
Le choix de se tourner vers le lait écossais semble dicté par des considérations stratégiques. Le cadre commercial libéralisé pour le lait pasteurisé, exempt de droits de douane et de quotas, offre une opportunité aux exportateurs étrangers. De leur côté, les acteurs marocains y voient une volonté de diversifier l’offre, notamment pour satisfaire un segment de consommateurs exigeants.
Cependant, cette démarche intervient dans un contexte de crise pour le secteur laitier national. Les producteurs marocains peinent à écouler leurs surplus, malgré une qualité souvent mise en avant. Cette décision pourrait donc être perçue comme une mesure paradoxale, voire déstabilisante pour les éleveurs locaux.
Opportunité ou menace pour les producteurs locaux ?
Certains acteurs du secteur dénoncent des décisions incohérentes qui fragilisent les petits producteurs et exacerbent une situation déjà tendue. Ces choix stratégiques risquent d’accentuer les défis du secteur laitier national, laissant planer une question cruciale : comment équilibrer les ambitions commerciales internationales et la préservation de la production locale ?
Face à ce conflit d'intérêt, les professionnels du lait au Maroc demandent des réponses. Comment justifier l’importation de lait étranger alors que le lait local est rejeté en masse ? Cette contradiction fragilise non seulement le secteur, mais également les efforts des agriculteurs pour répondre aux besoins du marché tout en respectant des normes de qualité élevées. “Les entreprises dénoncent un manque de qualité du lait, tout en continuant à en collecter la moitié. Si la qualité est réellement un problème, pourquoi prendre cette moitié ?”, précise notre interlocuteur.
Pour apaiser les tensions, une réflexion approfondie est nécessaire. Il s’agit de trouver un équilibre entre ouverture commerciale et préservation du tissu agricole national, en évitant que des choix politiques ne compromettent l’avenir d’un secteur essentiel pour le Maroc.
Ahmed Boukrizia a souligné que cette réflexion commence par un renforcement de la production nationale à travers des investissements ciblés. La modernisation des exploitations laitières est cruciale, notamment par le soutien à l’acquisition de vaches laitières performantes et le développement de cultures fourragères locales, comme le maïs pour l’ensilage.
3 questions à Ahmed Boukrizia : “Les producteurs locaux estiment que le Maroc a le potentiel d’atteindre son autosuffisance“
Président de la Fédération des producteurs de viandes, de lait et de produits agricoles, Ahmed Boukrizia a répndu à nos questions.
- À quel besoin spécifique le lait écossais est-il censé répondre sur le marché marocain ?
- L'importation de lait écossais est justifiée par les promoteurs comme une réponse à la demande croissante en produits laitiers, particulièrement dans les segments haut de gamme. Elle vise aussi à pallier les déficits occasionnels de la production nationale, amplifiés par les aléas climatiques et les contraintes structurelles du secteur laitier marocain. Ces contraintes incluent des sécheresses récurrentes, la hausse des coûts de production et une insuffisance dans la modernisation des infrastructures de collecte et de transformation. Cependant, ces arguments soulèvent des interrogations. Les producteurs locaux estiment que le Maroc a le potentiel d’atteindre son autosuffisance si des mesures adaptées sont mises en place pour optimiser les rendements, moderniser les équipements et structurer le réseau de collecte. Cette importation pourrait être perçue comme un aveu d'échec des politiques publiques de soutien à la filière laitière nationale, qui devraient prioritairement viser à développer la production locale avant de recourir à des alternatives étrangères.
- Quel impact cette importation pourrait-elle avoir sur les éleveurs locaux et la filière laitière nationale ?
- Les conséquences d’une telle mesure sur les éleveurs locaux risquent d’être profondes. Depuis 2016, l’importation de lait en poudre en provenance de l’Europe a déjà eu un impact négatif sur les producteurs marocains. Cette concurrence a contribué à la fermeture de plusieurs exploitations agricoles et centres de collecte, fragilisant le tissu rural et provoquant une baisse de l’activité dans certaines régions. L’introduction du lait pasteurisé écossais pourrait exacerber cette situation, en aggravant la pression sur les prix d’achat du lait cru local. Les éleveurs marocains, dont beaucoup peinent déjà à couvrir leurs coûts de production, pourraient être contraints d’abandonner cette activité. De plus, les entreprises de transformation qui ont investi dans des partenariats avec les producteurs locaux pourraient se retrouver en difficulté, affaiblissant encore davantage la chaîne de valeur du lait au Maroc. Cette situation entraînerait non seulement des pertes économiques mais aussi des tensions sociales dans les zones rurales.
- Quelles mesures préconisez-vous pour protéger les producteurs marocains tout en répondant à la demande croissante en produits laitiers ?
- Pour éviter que cette importation ne compromette davantage la filière laitière nationale, il est essentiel de mettre en œuvre une stratégie cohérente et inclusive. Cela commence par un renforcement de la production nationale à travers des investissements ciblés. La modernisation des exploitations laitières est cruciale, notamment par le soutien à l’acquisition de vaches laitières performantes et le développement de cultures fourragères locales, comme le maïs pour l’ensilage. La réduction des coûts de production doit être prioritaire, avec des subventions pour les aliments composés et un soutien aux cultures fourragères, afin d'aider les éleveurs à maintenir leurs activités. Il est également essentiel de moderniser les infrastructures de collecte et de transformation pour garantir la compétitivité du lait local. Bien que l'importation de lait écossais réponde à des besoins immédiats, elle ne doit pas nuire aux efforts visant à renforcer la souveraineté alimentaire et soutenir l'agriculture nationale à long terme.
Paradoxe : Entre abondance locale et importations contestées…
Le Maroc s’est fixé un objectif ambitieux : porter sa production de lait de 2,5 milliards de litres en 2020 à 3,5 milliards de litres à l’horizon 2030. Ce défi repose sur un contrat-programme ambitieux signé entre le gouvernement et Maroc Lait, visant à améliorer les rendements, renforcer la collecte et valoriser les produits laitiers.
Pourtant, cette stratégie pensée pour augmenter la production locale semble aujourd’hui en décalage face à la réalité. Alors que les petits producteurs peinent à écouler leur lait, des litres étant souvent jetés faute d’acheteurs, le marché marocain s’oriente paradoxalement vers l’importation de lait pasteurisé d’Écosse.
Le contrat-programme avait pourtant pour ambition de réduire la dépendance aux importations, en misant sur des mesures comme l’intensification de l’insémination artificielle pour améliorer la génétique du cheptel, et la réduction du colportage informel du lait de 30% à 10% d’ici 2030. Des efforts sont également concentrés sur la création d’unités de séchage et de production de fromages à haute valeur ajoutée, dans le but de stabiliser le marché.
Pourtant, cette stratégie pensée pour augmenter la production locale semble aujourd’hui en décalage face à la réalité. Alors que les petits producteurs peinent à écouler leur lait, des litres étant souvent jetés faute d’acheteurs, le marché marocain s’oriente paradoxalement vers l’importation de lait pasteurisé d’Écosse.
Le contrat-programme avait pourtant pour ambition de réduire la dépendance aux importations, en misant sur des mesures comme l’intensification de l’insémination artificielle pour améliorer la génétique du cheptel, et la réduction du colportage informel du lait de 30% à 10% d’ici 2030. Des efforts sont également concentrés sur la création d’unités de séchage et de production de fromages à haute valeur ajoutée, dans le but de stabiliser le marché.
Lait écossais au Maroc : Une nouvelle concurrence ?
Depuis plus d'un an, le Scottish Dairy Growth Board, dirigé par Paul Grant, mène des négociations avancées avec les autorités marocaines pour étendre l'exportation de lait écossais vers le Maroc. Pour garantir une qualité irréprochable et répondre aux exigences strictes du marché marocain, des investissements importants seront réalisés dans des infrastructures de pasteurisation et de concentration en Écosse, prolongeant ainsi la durée de conservation du lait pendant le transport.
Un test pilote de production et d'expédition est prévu pour début 2025. Si les résultats sont concluants, un processus d'exportation régulier pourrait débuter dès 2026, avec des objectifs ambitieux à long terme : atteindre l'exportation de 150 millions de livres sterling de lait pasteurisé frais vers le Maroc chaque année d'ici 2030. Selon les responsables écossais, cette démarche n’a pas pour but de concurrencer la production laitière locale, mais plutôt de compléter l'offre en introduisant des produits laitiers haut de gamme pour satisfaire un segment de consommateurs marocains exigeants. Ainsi, l’Écosse cherche à se positionner comme un acteur clé sur le marché marocain des produits laitiers premium, tout en respectant la dynamique de la production locale.
Un test pilote de production et d'expédition est prévu pour début 2025. Si les résultats sont concluants, un processus d'exportation régulier pourrait débuter dès 2026, avec des objectifs ambitieux à long terme : atteindre l'exportation de 150 millions de livres sterling de lait pasteurisé frais vers le Maroc chaque année d'ici 2030. Selon les responsables écossais, cette démarche n’a pas pour but de concurrencer la production laitière locale, mais plutôt de compléter l'offre en introduisant des produits laitiers haut de gamme pour satisfaire un segment de consommateurs marocains exigeants. Ainsi, l’Écosse cherche à se positionner comme un acteur clé sur le marché marocain des produits laitiers premium, tout en respectant la dynamique de la production locale.