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Actu Maroc

Aïd Al-Adha : Importation de 100.000 moutons australiens pour stabiliser le marché


Rédigé par Yousra Rhardoud Mardi 18 Février 2025

Face à une pénurie de cheptel aggravée par la sécheresse, le Maroc va importer 100.000 moutons d’Australie pour sécuriser l’offre en vue de l’Aïd Al-Adha.



Le Maroc s’apprête à importer 100.000 moutons par an depuis l’Australie. Une annonce qui souligne l’urgence de la situation : face à une sécheresse persistante, le pays doit sécuriser son approvisionnement en bétail, notamment à l’approche de l’Aïd Al-Adha. Cette initiative, révélée par Mark Harvey Sutton, directeur général du Conseil australien des exportateurs de moutons (ALEC), traduit un besoin pressant de combler la baisse alarmante du cheptel national.

Selon la plateforme Sheep Central, le Maroc considère cette opération comme une “priorité urgente” pour garantir l’offre sur le marché local. Une délégation marocaine de 15 personnes s’est d’ailleurs rendue en Australie pour finaliser les négociations.

Si l’attention se porte actuellement sur les moutons, l’accord sanitaire signé entre les deux pays ouvre aussi la voie à l’importation de bovins et de chèvres. Les premières livraisons devraient arriver avant l’interdiction estivale des exportations australiennes en juin, bien que des exemptions puissent être accordées pour le Maroc en fonction des évaluations de risques.
Un secteur sous pression
 
Cette importation massive reflète une situation critique. Le ministre de l’Agriculture, Ahmed El Bouari, a révélé que le cheptel national a chuté de 38 % par rapport à 2016, mettant en péril la production de viande. Le nombre d’animaux abattus annuellement est passé de 230.000 à environ 130.000 – 150.000, accentuant la dépendance aux importations.

En réponse, le gouvernement a introduit dans la loi de finances 2025 des mesures d’urgence : suspension des droits de douane, exonération de la TVA sur l’importation de bovins, moutons, chèvres et viandes rouges. L’impact est déjà visible : en janvier et février, le Maroc a importé 21.800 bovins, 124.000 moutons et 704 tonnes de viande rouge, un volume en forte hausse par rapport à l’année précédente.

Pour l’Australie, cet accord représente une opportunité. Mark Harvey Sutton y voit un “signal positif” pour les éleveurs australiens, surtout dans un contexte où le gouvernement d’Anthony Albanese prévoit d’interdire l’exportation de moutons vivants, une décision contestée par le secteur.

Si cet accord avec l’Australie permet de pallier les besoins immédiats, il accentue une dépendance structurelle aux importations. La baisse du cheptel, aggravée par la sécheresse, fragilise le modèle d’élevage marocain et réduit la capacité du pays à assurer son autosuffisance en viande.

Dans ce contexte, l’augmentation des importations devient une nécessité plutôt qu’un choix, exposant le Maroc aux fluctuations des marchés internationaux et aux aléas logistiques. La question de la viabilité d’un modèle reposant sur une telle dépendance se pose, d’autant plus que la demande intérieure continue de croître.

L’accord avec l’Australie offre une solution immédiate, mais il met en lumière les défis structurels du secteur de l’élevage marocain. L’adoption de politiques de reconstitution du cheptel, le développement de solutions d’adaptation à la sécheresse et la diversification des sources d’approvisionnement seront déterminants pour assurer une stabilité à long terme.
 
Entre nécessité économique et pression sociale
 
L’éventualité d’un changement de modèle soulève une question cruciale : quelles alternatives pour les éleveurs et les ruraux en cas de réduction ou d’annulation de l’Aïd Al-Adha ? Le secteur agricole reste le principal moteur économique de nombreuses régions, et l’absence de mesures compensatoires pourrait exacerber la précarité.

L’État se trouve face à un double défi : préserver le pouvoir d’achat des ménages tout en garantissant la viabilité économique du secteur de l’élevage. Si l’importation massive de bétail permet de contenir la crise à court terme, elle ne règle pas le problème structurel de l’élevage, fragilisé par les aléas climatiques et une production insuffisante.

L’avenir de l’Aïd Al-Adha pourrait ainsi être amené à évoluer, non plus sous l’angle religieux, mais sous la contrainte économique. L’augmentation des coûts et la raréfaction du cheptel national imposeront tôt ou tard un débat de fond sur la durabilité de cette pratique dans un pays où la sécurité alimentaire devient un enjeu de plus en plus pressant.
 








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