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Armement au Maghreb : le duel Rabat/Alger

Global Militarisation Index


Rédigé par A. CHANNAJE Mercredi 16 Décembre 2020

Sur 151 pays, le Maroc est classé au 23ème rang mondial dans l’Indice Mondial de Militarisation 2020
(Global militarisation Index), fraîchement publié par l’Institut de recherche de Bonn sur la paix et les conflits (BICC), alors que l’Algérie décroche la 14ème place suite à sa politique d’armement excessive.



Armement au Maghreb : le duel Rabat/Alger
Alors qu’elle accumule les échecs suite à un système politique fondé sur la corruption, la rente, le népotisme et l’entretien de prébendes, l’Algérie, en crise institutionnelle interne alarmante, ne trouve aucune échappatoire à part l’attisement de la tension dans son voisinage pour distraire une population en colère. Elle jauge les «menaces» potentielles, que certains qualifieraient de «fantasmées», pour justifier son investissement excessif dans l’armement et échapper à ses responsabilités envers les Algériens qui, aujourd’hui, vivent dans le désarroi. 

En effet, l’ Algérie a importé pour plus de 10 milliards de dollars d’armement, à en croire le dernier rapport de Stockholm International Peace Research Institute, source indépendante d’information sur la sécurité mondiale. La voisine de l’Est est donc le pays africain qui a déboursé le montant le plus élevé en la matière. C’est ainsi que l’Algérie a décroché la 14ème place mondiale dans l’Indice Mondial de Militarisation 2020 (Global militarisation Index), alors que le Maroc, connu pour son dévouement à l’économie avant tout, a occupé la 23ème place.

Néanmoins, il convient de noter qu’avec un score de militarisation de 218, le Royaume est placé dans la catégorie des pays à dépenses élevées en armement. Une catégorie qui comprend la plupart des pays de la région MENA (Moyen-Orient et Afrique du Nord), en plus de certains Etats d’Europe de l’Est, la Russie, le Pakistan et les États-Unis.

Ce classement, qui, sans doute, connaîtra un rebond inédit dans les années à venir, surtout après l’accord militaire signé il y a quelques semaines entre le Maroc et les États-Unis, et qui s’étale sur une décennie. L’année 2021 devrait connaître les premiers projets, notamment dans l’aéronautique.

Par ailleurs,l’Indice Mondial de Militarisation indique quele Maroc arrive, au niveau arabe, à la 9ème position, derrière le Sultanat d’Oman (3ème mondial), Bahreïn (4ème), l’Arabie saoudite (6ème), le Koweït (9ème), la Jordanie (10ème), le Liban (11ème), l’Algérie (14ème) et l’Irak (18ème).

Son score au titre des dépenses militaires est de 1,9 et de 1 pour ce qui du personnel militaire. S’agissant de l’indice des armes lourdes, il est de 1,5. Au niveau maghrébin, le Royaume devance la Mauritanie (30ème mondial) et la Tunisie (47ème).Pour la Libye, le rapport de l’Institut de recherche de Bonn sur la paix et les conflits ne la prend pas en considération.

Au niveau mondial, Israël s’est classé premier, suivi de l’Arménie, puis du Sultanat d’Oman (3ème), Bahreïn (4ème) et Singapour (5ème).

« Dans le classement GMI de cette année, les dix pays qui ont fourni à l’armée des ressources particulièrement importantes par rapport à d’autres domaines de la société sont Israël, l’Arménie, Oman, Bahreïn, Singapour, l’Arabie saoudite, Brunei, la Russie, le Koweït et la Jordanie », soulignent les auteurs du rapport, Max Mutschler et Marius Bales.

Etats-Unis : 27ème, Russie : 8ème
Surprenant, la première puissance militaire mondiale, les Etats-Unis, n’arrive qu’à la 27ème position. Depuis 2017, la militarisation américaine a augmenté. Alors qu’en 2016, les États-Unis étaient toujours 33ème dans le GMI, en 2019, ils sont passés à la 27ème position. Pendant le mandat de quatre ans de Trump, les dépenses militaires ont augmenté de 669,4 milliards de dollars (2016) à 718,7 milliards de dollars (2019) », est-il indiqué.

En revanche, la deuxième puissance militaire, la Russie, est mieux positionnée que le pays de l’Oncle Sam, se plaçant 8ème mondial. « La Russie continue de soutenir l’une des plus grandes forces militaires du monde. Les pays européens de l’OTAN, en particulier les pays baltes et d’Europe orientale, continuent de s’armer, signalant les tensions persistantes avec la Russie. Le conflit toujours brûlant entre l’Arménie (classée 2ème) et l’Azerbaïdjan (classée 16ème) sur la région du Haut-Karabakh continue de maintenir la militarisation dans le Caucase du Sud à un niveau très élevé », est-il expliqué.

Il convient de souligner que les chiffres susmentionnés sont compilés à partir de la base de données du Stockholm Peace Research Institute (SIPRI) qui vient de publier, lui-aussi, une étude sur les dépenses militaires dans le monde.

Les entreprises américaines et chinoises dominent
Il en ressort aussi que la course au matériel de défense et d’armement ne ralentit pas dans le monde. Chiffres à l’appui, les ventes militaires des 25 plus grandes entreprises de l’industrie de l’armement ont totalisé 361 milliards de dollars américains en 2019, 8,5% de plus qu’en 2018.

Les entreprises d’armement américaines et chinoises dominent le marché mondial, selon les données du SIPRI. L’année dernière, l’industrie américaine de l’armement a ainsi représenté 61 % des ventes des 25 plus gros producteurs mondiaux, devant la Chine, bien loin derrière avec 15,7 % du total.

Les cinq premières positions sont occupées par des géants américains de la défense. Avec sept autres entreprises américaines, elles représentent 61% des ventes mondiales. 

Après les États-Unis, la Chine a représenté la deuxième plus grande part des ventes d’armes en 2019 des 25 plus grandes entreprises d’armement, à 16%. Les six entreprises d’Europe occidentale représentaient ensemble 18%.

Le premier groupe européen à la 7ème place
Les dépenses des gouvernements américain et chinois ont permis de maintenir leurs champions dans le top 10. Les groupes américains Lockheed Martin, Boeing, Northrop Grumman, Raytheon et General Dynamics trustent dans cet ordre les cinq premières places mondiales. Les chinois AVIC, CETC et Norinco occupent les 6ème, 8ème et 9ème places. Seule une société européenne occupe le haut du classement, la britannique BAE Systems, à la 7ème place. Le SIPRI relève la présence du groupe français Dassault, qui bondit de la 38ème à la 17ème place - porté par ses exportations de Rafale en 2019.

Au total, les six plus grands fabricants européens représentent ensemble 18 % du négoce mondial d’armes. Le premier d’entre eux, l’allemand Rheinmetall, a vu ses ventes progresser de 4 % à 3,9 milliards de dollars l’an dernier

Une entreprise du Moyen-Orient dans le Top25
Troisième fabricant d’armes avec 3,9 % des échanges, la Russie souffre des sanctions depuis la guerre en Ukraine. Deux entreprises russes, AlmazAntey (15ème) et United Shipbuilding (25ème) figurent au classement.

Autre conclusion du rapport : pour la première fois, une entreprise du Moyen-Orient intègre le top 25. L’émiratie EDGE - issue de la fusion de 25 entités différentes - occupe la 22ème place. Le rapport 2019 met également en lumière le développement du marché en Amérique du Sud. Alors que l’investissement à l’étranger des industries chinoises est limité par la politique nationale et que la Russie reste touchée par les sanctions en réponse à la Crimée, les entreprises européennes et étasuniennes y intensifient leurs investissements à l’étranger. Quoi qu’il en soit, le BICC estime que les budgets publics de nombreux pays devraient subir, à cause de la pandémie de Covid-19, de fortes pressions dans les années à venir en raison de nouveaux emprunts. Cela peut également affecter la militarisation. Si la performance économique chutait proportionnellement plus que les dépenses militaires, cela augmenterait le niveau de militarisation. Mais il est également possible que la prévention contre les menaces futures à la sécurité sanitaire ait la priorité sur la politique de défense et que des réductions significatives des dépenses militaires soient introduites.

A. CHANNAJE

Encadré

Dépenses militaires au Maroc : 3,3% du PIB
En matière de défense, le tableau de bord stratégique, récemment dévoilé par l’Institut Royal des Etudes Stratégiques (IRES), signale que les dépenses militaires au Maroc représentent 3,3% du PIB durant la période 2012-2019. Ces dépenses sont motivées par la nécessité de moderniser et de renforcer les capacités militaires du Royaume et de défendre son intégrité territoriale. Les importations d’armes ont augmenté avec un montant qui est passé de 125 millions de dollars en 2000 à 376 millions de dollars en 2020. On note également une amélioration significative du classement international du Maroc en termes de puissance militaire. Selon l’Institut « Global Firepower», le Maroc se positionne en 2020 à la 57ème place au niveau mondial et à la 6ème au niveau africain au titre des capacités de son armée. 

Repères

La méthode du GMI 
Le GMI est divisé en trois grandes catégories : les dépenses, le personnel et les armes lourdes. Les dépenses militaires par rapport au PIB et les dépenses de santé sont les indicateurs les plus importants pour déterminer le niveau de militarisation. Les ressources financières, mises à disposition via le budget militaire par un gouvernement, sont un facteur important qui affecte les capacités et la taille des forces armées d’un État.
BICC
En tant qu’organisation indépendante à but non lucratif, le BICC (Bonn International Center for Conversion) traite un large éventail de sujets mondiaux dans le domaine de la recherche sur la paix et les conflits. Sa vision est un monde plus pacifique. Sa mission est de mener des recherches critiques, axées sur les problèmes et pertinentes pour les politiques en réponse aux problèmes posés par la violence organisée. Pour ce faire, le BICC s’engage dans des échanges actifs avec des universitaires et des politiciens ainsi qu’avec des acteurs de la pratique quotidienne et de la société civile. En tant que groupe de réflexion, le BICC cherche à engager un dialogue avec les ONG, les gouvernements, les organisations privées, les instituts de recherche et les universités ainsi qu’avec les personnes intéressées.
SIPRI
Le SIPRI est un institut d’études stratégiques fondé le 6 mai 1966 pour célébrer cent cinquante ans de paix ininterrompue en Suède. Sa tâche est d’effectuer des études scientifiques au sujet de l’importance des conflits et de la coopération pour la paix mondiale, dans le but de contribuer à la compréhension des conditions nécessaires à la résolution pacifique des conflits internationaux et à une paix durable.








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