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Ces associations qui font peur aux pouvoirs publics

Journée mondiale des ONG


Rédigé par Saâd JAFRI Jeudi 27 Février 2020

Le 27 février, Journée mondiale des ONG, est l’occasion de dresser un état des lieux des ONG les plus influentes.



Ces associations qui font peur aux pouvoirs publics
Depuis le début des années quatre-vingt-dix, le mouvement associatif au Maroc a connu une évolution remarquable. Le nombre d’ONG qui ont vu le jour est estimé à plus de 150.000 organisations, et leurs interventions, principalement dans le champ politique et socio-économique, se comptent par centaines de milliers. La phase actuelle de la liberté d’association est la plus institutionnelle que le Maroc ait jamais connue. L’explication est qu’il y eut une institutionnalisation plus importante de l’espace associatif, témoignant ainsi de l’élargissement de l’espace public et du débat public. Tout au long de ce parcours, certaines associations ont acquis une bonne réputation, d’autres un peu moins, il y a même certaines ONG dont les pouvoirs publics se méfient.

Prise de bec

Nombreuses sont les déclarations faites par les politiques, que ce soit au parlement ou dans les médias, qui témoignent de frictions entre les pouvoirs publics et les ONG. Ne serait-ce que la semaine dernière, les autorités marocaines ont exprimé leur rejet catégorique des allégations et des positions adoptées par Amnesty International qui, selon eux, viseraient à déprécier les efforts du Royaume en matière de consolidation des Droits de l’Homme. Quelques mois auparavant, le chef du gouvernement, Saâd Dine El Othmani, a critiqué les organisations qui font campagne pour les libertés individuelles. En 2019, le ministère de la Culture et de la Communication a fortement critiqué les allégations de l’organisation Reporters sans frontières (RSF), sur la liberté d’expression.

Les multiples critiques du gouvernement envers les ONG suscitent des interrogations. Surtout que les ONG sont une pièce maîtresse dans le bon fonctionnement des démocraties. Ils facilitent l’accès des citoyens à la gestion de leur pays, aident le public à communiquer avec les politiques et s’assurent que les gouvernements n’abusent pas de leurs pouvoirs. «Qu’il ait des commentaires ou des critiques ça peut être tout à fait normal. Sauf que ça doit être discuté sur la base d’arguments», nous déclare M. Azzedine Akesbi, membre dirigeant de Transparency Maroc, ajoutant que «souvent les critiques qui sont formulées sont faibles et limitées, c’est plutôt une attitude pour dire non ce n’est pas vrai, nous avons fait des progrès, etc.»

Forte influence

Aujourd’hui, il est clair comme l’eau de roche que les ONG ont nettement progressé en matière de plaidoyer, au point que les pouvoirs publics commencent à se méfier de certaines associations, suite à leur forte capacité d’influence. Pas du tout étonnant, dès lors que les rapports de certaines associations, comme Ox-fam, Transparency et Amnesty International sont très attendus par l’opinion publique et suscitent beaucoup de réactions. Par exemple, le dernier rapport sur les inégalités d’Oxfam, qui classe le Maroc parmi les pays les plus inégalitaires du Nord de l’Afrique, a été repris par presque tous les médias nationaux et une bonne partie des médias internationaux. Ce qui fait que les répercussions d’un tel rapport sont lourdes.

«Notre objectif n’est pas de susciter la polémique, mais plutôt de faire avancer l’état des droits humains au Maroc», sou-ligne Mme Mounia Semlali, Responsable du Programme Justice de Genre d’Oxfam au Maroc. Le rapport de Transparency Maroc fait également couler beaucoup d’encre, mais les raisons « cachées » sont évidentes : « L’effet de ce que nous publions est impor-tant, parce que c’est crédible et construit sur des données bien établies. Par exemple, les enquêtes sur le Système national d’intégrité, demande au moins 18 mois à 2 ans de travail avec différents experts», indique M. Akesbi, ajoutant que pour critiquer ce travail « il faut travailler d’abord».

Les associations sont un élément vital pour le développement démocratique, malheureusement la grande problématique qui perdure au Maroc, c’est que dans un tissu associatif relativement large, quelques-unes seulement font proprement leur travail.
 

Financement et efficacité

Malgré les progrès réalisés en faveur du secteur associatif, il reste confronté à un nombre important de contraintes, principalement liées aux difficultés d’accès aux matériaux et aux financements. Ce qui amène les ONG à avoir recours aux bénévoles, la disponibilité de ces derniers constitue un point positif, certes, mais le bon fonctionnement nécessite des ressources humaines spécialisées et qualifiées.

Le manque de financement impacte également la souveraineté des associations. Puisque les associations fonctionnent par des projets soutenus par des bailleurs de fonds, elles se retrouvent contraintes de suivre des guidelines, qui n’entrent pas en conflit avec l’intérêt de ces derniers. Les financements de ces ONG proviennent majoritairement de l’étranger, atteignant plus de 315 millions de dirhams au profit de 200 organisations en 2019.

Repères

Journée mondiale des ONG
Imaginée par un étudiant en 2009, puis reconnue par 12 pays situés autour de la Mer Baltique en 2010, la Journée mondiale des ONG prend une dimension internationale le 27 février 2014 avec sa reconnaissance par l’ONU. Elle vise à :
- Mettre en lumière les efforts et les réalisations des ONG de tous les secteurs ;
- Offrir aux citoyens la possibilité de comprendre plus clairement ce que les ONG font pour la société au niveau local, national et international ; et
- Mettre à la disposition des ONG une plate-forme sur laquelle discuter des questions qui affectent leur travail et partager leurs connaissances et leurs expériences.
Les maux de la société civile
L’«Indice de la Société Civile au Maroc», réalisé par l’Espace Associatif, souligne que si le bénévolat actif demeure un pilier fonctionnel de la société civile, il révèle en retour une faiblesse organisationnelle : le manque de professionnels salariés. Au Maroc, le constat repose sur un évident manque de moyens financiers, ce qui engendre une carence du personnel qualifié, se répercutant sur les problèmes de gestion (déséquilibre budgétaire important du secteur associatif) et de gouvernance.
 
Utilité publique
Il y a un grand manque de communication sur la taille du tissu associatif marocain, cependant, le nombre d’associations opérationnelles aujourd’hui au Maroc dépasse les 150.000. Néanmoins, seulement 231 d’entre elles sont reconnues d’utilité publique. En 2019, seulement 3 associations ont pu bénéficier de ce statut.



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