« L'expérience vécue, la connaissance intellectuelle, marquent leur empreinte sur notre appareil à percevoir le monde, au point d'en bouleverser le monde perçu. Notre représentation intellectuelle du monde peut nous gouverner jusqu'à nous rendre aveugles à tout ce qui n'est pas compris dans cette représentation »
« On ne peut parler de résilience que s’il y a eu un traumatisme suivi de la reprise d’un type de développement, une déchirure raccommodée. Il ne s’agit pas du développement normal puisque le traumatisme inscrit dans la mémoire fait désormais partie de l’histoire du sujet comme un fantôme qui l’accompagne. Le blessé de l’âme pourra reprendre un développement, dorénavant infléchi par l’effraction dans sa personnalité antérieure » , Boris Cyrulnik.
En management comme en psychologie, la résilience désigne la capacité et les aptitudes d’un individu, ou d’un système, à surmonter l’adversité, autrement dit à vivre et se développer en parvenant à vaincre le risque et à surmonter chocs et traumatismes.
B. Cyrulnik définit, la résilience comme le « processus qui permet de reprendre un type de développement Le blessé de l’âme pourra reprendre un développement, dorénavant infléchi par l’effraction dans sa personnalité antérieure ».
C’est lui Boris CyrulniK qui a vulgarisé ce concept intimement lié à celui de traumatisme à la fin des années 90 du siècle dernier. Il parle de l’art de se reconstruire après un événement traumatisant.
Comment se relever après le pire ?
Je dois avouer que c’est un peu la question que je me pose dans l’état actuel des choses ; crise sanitaire, la mort, l’incertitude, la crise économique, les événements politiques…palabres infinies et parfois oiseuses.
La résilience qui m’intéresse ici est la résilience collective. Je veux parler de notre capacité en tant que communauté à continuer à vivre ensemble, fonctionner, se développer et s'épanouir après tous ces traumatismes réunis ?
Pourra-t-on s'adapter assez rapidement au changement, surmonter ces traumatismes, tout en maintenant notre cohésion nationale et nos relations ouvertes avec le reste du monde ?
Quelle serait alors la démarche de résilience ?
En premier lieu, en langage management, la résilience consiste à transformer ces nouvelles contraintes en données à traiter. Inutile de revenir sur le passé et de se perdre dans les « il aurait mieux valu, nous aurions dû, on aurait pu…, etc. »
C’est pourquoi, il me parait improductif de se lamenter sur notre sort ou de nous taxer les uns les autres… La responsabilité est une condition nécessaire pour maintenir la cohésion pour traiter ensemble les contraintes en données à gérer. Le premier pas devrait être de reconnaitre qu’on doit être ensemble et unis malgré nos différences le commun doit l’emporter. Gérer nos différences, ça ne peut se faire que dans la démocratie.
Accepter qu’on soit divers et vouloir le vivre ensemble est le préalable de la démocratie. En deuxième lieu, il faudrait imaginer et établir un futur à construire ensemble, un projet.
Maintenant que nous savons cela, qu’est-ce que nous voulons ?
En un mot c’est passer du subir au choisir. Nos réponses-choix seront différents, il y aura toujours un temps et un espace pour négocier…
J’ose espérer que les orientations de ce que l’on a appelé « le nouveau modèle de développement » feraient consensus sur ce que nous voulons, sinon il faudra trouver cet espace et ce temps.
En troisième lieu, pour se construire en pays résilient il faudrait tracer ensemble la trajectoire commune permettant de rebondir, l’idée c’est que chacun doit imaginer et trouver sa propre trajectoire dans la trajectoire commune.
Ainsi, me parait-il, nous tous, blessés de l’âme pourrions reprendre un développement, dorénavant infléchi par l’effraction dans nos personnalités antérieures. Et ce n’est que ça la résilience…
Dr Samir Belahsen