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Etude : La Moudawana au niveau du tribunal de première instance


Rédigé par AB Jeudi 11 Juillet 2019

La Fondation Friedrich-Ebert-Sifftung(FES) a présenté, mardi 16 mai 2017 au Centre Jacques Berque(CJB), le rapport de recherche «Le droit de la famille au Maroc et son application au sein de la section des affaires familiales du tribunal de première instance de Rabat», produit en partenariat avec le Centre Jacques Berque pour les études en sciences humaines et sociales. Cette recherche rentre dans le cadre du programme du CJB : »Les parentalités en Afrique du Nord (Maroc/Algérie) et en contexte migratoire » et du projet de la FES-Maroc : « 10 ans de la Moudawana : bilan et perspectives ».



Pension alimentaire, divorces par discorde et à l’amiable, les plus enregistrés

Etude : La Moudawana au niveau du tribunal de première instance
Les auteurs : Yazid BEN HOUNET,  Nouri RUPERT, Mériam Cheikh et Laila Benchahda ont fait une analyse du fonctionnement administratif et pratique de ce tribunal crée après la réforme de la Moudawana en 2004, du type de dossiers traités ainsi que de la place des justiciables. Ils se sont intéressés en particulier aux rapports de genre dans les décisions prises par les juges, aux questions de parentalité (relation parents-enfants) et d’intérêt de l’enfant en cas de divorce, de la pension alimentaire et de leur impact sur les inégalités hommes-femmes. Le genre étant estimé selon une approche permettant d’objectiver socialement et culturellement les rôles biologiquement assignés aux hommes et aux femmes par la pratique judiciaire. Et pour ce qui est de  l’intérêt des enfants, les auteurs ont visé la coopération des parents vis-à-vis des enfants durant la durée du mariage et après le divorce, pour ce qui est du partage des responsabilités. 

Les intervenants étaient : Yazid BEN HOUNET, Chargé de recherche au CNRS, Centre Jacques Berque ; Sabrina MERVIN, Chargée de recherche au CNRS, Directrice du Centre Jacques Berque ; Nouri RUPERT, Doctorant associé au Centre Jacques Berque et Seija STURIES, Représentante résidente, Friedrich-Ebert-Sifftung au Maroc.

Cette recherche ethnographique réalisée par des anthropologues et sociologues a, en premier, fait l’état des lieux de l’existant et essayé de comprendre le sens des décisions prises par l’autorité judiciaire et d’estimer l’intérêt de l’enfant. L’enquête de terrain a pour objectif d’avoir une idée précise sur la mise en application de ce droit dans une cour de justice, particulièrement, la section des affaires familiales
Des chiffres éloquents sur la pension, le divorce et la kafala

Les statistiques relevées lors de cette étude ont mis en exergue les dossiers traités par le tribunal de 1ére instance de Rabat, en 2015, mois par mois. 792 dossiers ont trait à la pension alimentaire (239 dossiers pour les 4 premiers mois de 2016), 782 dossiers de divorce à l’amiable (294 en 2016), 1995 dossiers de divorce par discorde (chiqaq)(787 en 2016), 126 dossiers traités de kafala en 2015(71 en 2016). En plus, 55 demandes de mariages de mineures ont été enregistrées et 54 ont été résolues en 2015, pour la plupart pour des mineures de plus de 16 ans.

Focus sur les pratiques judiciaires 

Le  divorce par discorde étant le dossier le plus traité, c’est le circuit choisi en premier lieu par les auteurs. Le dépôt du dossier est régi par l’article 3 du Code de la famille. De la notification à la conciliation faite par des assistant(e)s sociaux(es), une étape obligatoire, qui a  lieu 4 à 5 semaines après le dépôt de la requête de divorce. Seulement, ces séances ne durent pas plus de 30 minutes. Ce qui est remarqué aussi, c’est que très peu de cas aboutissent à un retour à la vie conjugale pour le divorce par chiqaq. Ceci est dû au fait que l’acte de conciliation rentre dans le cadre d’une procédure judiciaire difficile à interrompre mais aussi parce que le motif du divorce est soi la violence, soi l’infidélité.

L’intérêt supérieur de l’enfant 

Il se matérialise par les juges de deux façons : le respect de la hiérarchie de garde (article 99 du CF) allant jusqu’à 15 ans pour les filles et 12 ans pour les garçons, l’âge où il (ou elle) peut décider de vivre avec l’un des parents. Et bien sûr, de la pension alimentaire qui varie entre 600 et 1000 dirhams par enfant. A ce niveau, l’huissier judiciaire a le pouvoir d’exiger un relevé de revenus. Le juge n’a pas de pouvoir d’enquête qui n’est octroyé que par le président du tribunal. 

L’analyse des pratiques  judiciaires

Pour ce qui est des dossiers du divorce par discorde (57 dossiers traités), 34 ont été initiés par les femmes, pour mauvais traitement, infidélité ou en cas de non prise en charge. Le délai varie de 3 à 6 mois. La pension alimentaire dans ce divorce est confrontée aux disparités économiques entre époux et aux capacités financières des époux. La réalité montre que chaque juge a un barème et se base sur les documents fournis par les conjoints. Le problème des métiers libres, faute  de preuves de salaires est également d’actualité.  
La garde des enfants est statuée par le juge en cas de litige. Lorsque les enfants sont mineurs, l’indemnité de logement accordée à l’épouse  varie de 500 à 800 dirhams par mois. Il a été également noté un déséquilibre au niveau du temps de garde des enfants. 

Conciliation et intérêt supérieur de l’enfant

La tentative de conciliation obligatoire ne constitue pas une réelle alternative au prononcé du divorce. Dans la majorité des cas de conciliation, le but n’est pas de maintenir un lien parental. L’assistant social priorise l’entente du couple avant le bien-être des enfants. Pendant les séances de conciliation, on parle plus de la famille que du couple et au moment du divorce, on ne voit plus les enfants. Ce qui est contradictoire. En plus, les assistants comme les juges insistent surtout sur la capacité du mari à répondre financièrement à la prise en charge de l’enfant. 

A propos du Centre Jacques-Berque

Fondé en 1991, le Centre Jacques-Berque pour le développement des sciences humaines et sociales au Maroc est une Unité mixte des instituts français à l’étranger (UMIFRE). Cette unité associe une structure opérationnelle du Centre national de la recherche scientifique (CNRS), et un institut français de recherche à l’étranger (IFRE) relevant de la Direction générale de la mondialisation du ministère des Affaires étrangères et du développement international, représentée localement par le Service de coopération et d’action culturelle de l’ambassade de France au Maroc. 
L’activité du CJB porte sur les sciences sociales du contemporain au Maroc et s’étend au Maghreb, avec un intérêt particulier pour la Mauritanie. Ses chercheurs conçoivent et mettent en place des programmes de recherche, organisent des séminaires, des colloques, des journées d’étude, des conférences et des ateliers de recherche. Le Centre accueille des chercheurs, des doctorants et post-doctorants de différentes nationalités. Son activité implique des partenariats forts avec des institutions marocaines qui s’inscrivent, pour les principaux, dans un cadre conventionnel. Elle implique aussi des partenariats avec des institutions d’enseignement et de recherche françaises, européennes et internationales.

A propos de la Fondation Freiedrich Ebert Stiftung

La Fondation Friedrich Ebert Stiftung (FES) est une institution politique, culturelle, privée et d’utilité publique qui souscrit aux idées et aux valeurs fondamentales de la démocratie sociale et du mouvement ouvrier. Présente au Maroc depuis 1984, la FES œuvre aux côtés de ses partenaires pour la promotion et l’enracinement de la démocratie, la consolidation de l’état de droit par la formation et l’éducation civique.

Dans ce contexte, la FES, Fondation à caractère politique,  soutient la société civile marocaine dans la création d’espaces de réflexion et de dialogue en matière d’égalité dans le domaine de la représentativité politique. Et ce, afin de contribuer à la consolidation de la démocratie par la construction d’une société inclusive respectueuse des droits humains de tous les citoyens et citoyennes.  La Fondation politique allemande souscrit fermement à la valeur universelle de l’égalité. L’égalité de tous les citoyens devant la loi, l’égalité devant le suffrage, l’égalité des chances et l’égalité entre les hommes et les femmes. L’égalité étant le principe fondamental de la parité. 

Bouteina BENNANI








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