L'Opinion Maroc - Actuali
Consulter
GRATUITEMENT
notre journal
facebook
twitter
youtube
linkedin
instagram
search



Actu Maroc

Gestion de l’eau : Nizar Baraka explique comment le Maroc change de paradigme face au réchauffement climatique


Rédigé par L'Opinion Vendredi 14 Mars 2025

Face au stress hydrique structurel et la sécheresse qui dure depuis six ans, le Maroc change de paradigme en basculant vers un modèle d'approvisionnement en eau plus centré sur les ressources non-conventionnelles. Le ministre de l'Equipement et de l'Eau, Nizar Baraka, a expliqué la stratégie nationale destinée à prémunir le Royaume contre l'impact irréversible du réchauffement climatique. Détails.



Les précipitations abondantes auxquelles on assiste actuellement ont redonné espoir. Les barrages ont gagné en quelques jours de pluie ininterrompue 277 millions de mètres cubes, soit la consommation annuelle de Casablanca. Mais, les pluies de mars ne suffiront pas à venir à bout du stress hydrique, devenu un phénomène structurel. Invité d’honneur du Centre des Jeunes dirigeants lors d’un débat organisé, mercredi autour d’un ftour, le ministre de l’Equipement et de l’Eau, Nizar Baraka, a donné un aperçu exhaustif sur la situation hydrique au Royaume. Un  constat qui montre l’ampleur des dégâts subis pendant les cinq dernières années. 

Le ministre a rappelé que le Maroc traverse la plus longue sécheresse de son histoire suite à la succession de six années. Jamais la sécheresse n’a duré aussi longtemps sachant qu’elle durait auparavant trois ans au maximum. 

Cela est dû, a rappelé M. Baraka, au réchauffement climatique qui frappe de plein de fouet notre pays à tel point que la température moyenne remarquée l'année dernière a dépassé la moyenne souhaitable par l’accord de Paris (1,8 degré contre 1,5).  

Cela se répercute immanquablement sur les réserves hydriques. 1,5 millions de m3 s’évaporent chaque année. Entre-temps, les pertes sont exacerbées par le déficit pluviométrique qui s’est aggravé au point que les précipitations ont baissé de 75% par rapport à la moyenne nationale. 

La situation s’est d’autant plus compliquée que les apports en eau par an ne cessent de se raréfier. Les chiffres présentés par le ministre parlent d’eux-mêmes. Nous ne sommes aujourd’hui qu’à 5 millions de m3 alors qu’on était à 18 millions pendant les années 18 millions. 

 Alors que le ciel devient de plus en plus indigent, les réserves souterraines s’épuisent. Selon Nizar Baraka, les nappes phréatiques sont à un niveau critique. La surexploitation des ressources est telle qu’on puise dans les réserves. Force est de constater que la consommation actuelle (5 à 6 millions de m3) dépasse aujourd’hui la capacité de reconstitution des nappes qui ne dépasse pas 4 millions. Par conséquent, de vastes terres sont devenues inexploitables à cause de la salinisation des sols, notamment dans la région de Souss-Massa où ce phénomène touche 40.000 hectares. “Nous sommes dans une situation particulièrement grave”, a mis en garde Nizar Baraka. 

Aujourd'hui, la situation est tellement inquiétante que le risque de pénurie d’eau s’impose. M. Baraka a fait savoir que la part d’eau par habitant s’est amenuisée à 600 mètres cubes contre 2600 de m3 dans les années 60. L’hémorragie pourrait la réduire à 500 m3 en 2040 si la sécheresse continue à ce rythme.  

Face à un tel péril, le Maroc peut tout de même se prémunir contre les aléas du changement climatique grâce aux acquis, a rassuré M. Baraka, soulignant les 150 barrages dont dispose le Royaume en plus des 16 stations de dessalement d’eau de la mer qui fournissent 277 millions de mètres cubes. 

Ces acquis ont permis, selon le ministre, de garantir un accès à 100% à l'eau potable dans les zones urbains et à 94% dans le monde rural mais s’il y a encore des disparités en termes de branchement individuel entre les deux milieux. Idem pour l'agriculture, 2 millions d’hectares ont accès à l’irrigation. 

Maintenant, le défi est de garantir la durabilité des ressources hydriques conformément aux Orientations royales. Les objectifs sont clairs, à savoir un accès à l’eau potable en faveur de tous les Marocains où qu’ils soient. En outre, faire en sorte de subvenir à 80% des besoins d’irrigation. Cela dépend du succès de l’application du Programme national pour l’approvisionnement en eau potable 2022-2027. 

Aujourd’hui, le Maroc parie, en plus des solutions classiques, sur les eaux non conventionnelles. Cela dit, on ne compte plus exclusivement sur les nappes phréatiques et les barrages aussi vitaux soient-ils. “Nous avons une feuille de route très claire”, a expliqué M. Baraka, faisant remarquer que la priorité est accordée à la construction des barrages notamment dans les régions où il y a le plus de précipitations. A ce titre, il a déploré les inégalités de précipitations entre les régions. 7% du territoire accapare 53% des précipitations. 

A cela s'ajoute le transfert d’eau qui fait partie de la solidarité entre les régions qui demeure aujourd'hui une orientation structurelle après le succès des autoroutes de l’eau qui, rappelons-le, ont été citées en exemple par le président français Emmanuel Macron lors du Sommet One Water. Nizar Baraka a donné un exemple révélateur. L’autoroute de l’eau du nord vers le sud a permis depuis octobre 2023 de transférer 700 millions de mètres cubes. Ce qui a permis de satisfaire les besoins de Rabat, Casablanca et les villes contiguës. 

Sur ce point, Nizar Baraka a affirmé que le Maroc a changé de paradigme en faisant en sorte que les zones côtières servent les villes dites intérieures et le monde rural grâce au développement du dessalement. Avant, c’était l’inverse. 

Par ailleurs, la stratégie nationale repose fondamentalement sur le dessalement dont la capacité de production sera boostée après la mise en service des stations en cours de construction, dont la grande station de Casablanca qui devrait fournir 200 millions de mètres carrés en 2026. En parallèle, d’autres stations verront le jour à  Rabat ,Tanger, à l’Oriental et à Souss-Massa-Draa, ce qui permettra d’étoffer l’offre d’eau aussi bien pour la consommation domestique que pour l’irrigation.

Concernant les zones rurales, on parie désormais sur les stations monoblocs destinées à approvisionner les zones et les villages reculés. 200 devraient être mise en place dans les prochaines années, a annoncé M. Baraka. 

Le dessalement est d’autant plus central qu’il devrait fournir 50% des besoins en eau potable d’ici 2030. Aussi le coût de production favorise cette orientation. Le coût de production est faible grâce à l’usage des énergies renouvelables. Nizar Baraka a cité l’exemple de Casablanca où le mètre cube coûte moins que le prix de référence (4,4 dirhams contre 4,5 en moyenne).
 



Communication financière

Communication financière