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Interview : Les entreprises médiatiques au bord du gouffre


Rédigé par Safaa KSAANI Mardi 21 Juillet 2020

Le directeur du quotidien Al Alam, président du SNPM, Abdellah El Bakkali, et membre du CNP, nous livre sa lecture sur la situation des entreprises médiatiques, frappées de plein fouet par la crise sanitaire



Abdellah El Bakkali, directeur du quotidien Al Alam, président du SNPM et membre du CNP
Abdellah El Bakkali, directeur du quotidien Al Alam, président du SNPM et membre du CNP
- Quel bilan faites-vous aujourd’hui de l’impact de la crise sanitaire sur la presse écrite, déjà fragilisée depuis quelques années ?
- Avant la crise de la pandémie, il y avait une crise mondiale manifestée par la régression de la presse écrite au profit de la presse électronique. Au royaume, la situation était difficile parce que, jusqu’à présent, nous n’avons pas un modèle économique réussi pour l’entreprise médiatique. La crise sanitaire du Covid-19 a accentué la crise des journaux sur plusieurs niveaux. Premièrement, le produit est vendu gratuitement, via la version pdf, qui est un phénomène nouveau. Les ressources publicitaires des journaux ont été réduites à plus de 90%. Le recouvrement s’est arrêté, conduisant des entreprises médiatiques à réduire le nombre de travail des journalistes et leurs salaires pour trouver un certain équilibre. Entre journalistes, personnel administratif, employés de l’impression, de la distribution et de la vente, on parle de 30.000 employés atteints par la crise. Une crise sans précédent !

- D’autres virus peuvent ressurgir à tout moment et à tout endroit, ce qui implique la mise en place de solutions durables pour le secteur médiatique. Lesquelles préconisez-vous ?
- Plusieurs solutions sont envisageables. Il faut mettre en place toute une stratégie. Les médias doivent bénéficier d’incitations fiscales. Il est inadmissible que les professionnels du secteur médiatique payent les mêmes impôts que ceux des sociétés activant dans le secteur de l’immobilier. D’autre part, le marché de la distribution des journaux doit être réorganisé, à travers le recours aux imprimeries régionales par exemple, en vue d’élargir le lectorat. Le marché publicitaire est très important. Malgré une organisation professionnelle spécialisée de ce marché, le clientélisme et le favoritisme existent toujours.

- Les associations de défense des droits des journalistes et des éditeurs se sont multipliées ces derniers mois. Cette multiplication est-elle au service de la profession ?
- Je suis pour l’unité organisationnelle, mais, en même temps, nous ne pouvons pas interdire le droit constitutionnel du pluralisme. Nous avons donc besoin d’un moyen efficace pour mettre ce pluralisme au service de l’unité organisationnelle. Je suis pour la création d’associations d’éditeurs, et pour l’existence de la Fédération Marocaine des Editeurs de Journaux (FMEJ), mais plus pour la coordination entre eux, au service du renforcement du secteur médiatique.

Recueillis par Safaa KSAANI

Portrait

Interview : Les entreprises médiatiques au bord du gouffre
L’homme qui a fait carrière à “Al Alam”
Abdellah El Bakkali est originaire de Larache, où il est né, le 1e janvier 1961. Il est titulaire d’un Master de l’Institut de Presse et Sciences d’informations à Tunis, obtenu en 1986.

Abdellah El Bakkali a travaillé pendant deux ans au sein de l’Office du Développement de la Coopération (ODECO) à Rabat, où il était chargé de la revue de cette institution et de l’animation d’une émission radio, avant de devenir membre du Parti de l’Istiqlal. A la Jeunesse Istiqlalienne, dont il était le secrétaire général, était publié un mensuel “Al Ikhtiar al Jadid” (Le nouveau choix) depuis 1999. La publication a arrêté de paraître en 2007, car, cette année, ce militant et journaliste a attiré l’attention du Secrétaire Général du Parti de l’Istiqlal à l’époque, le défunt M’hamed Boucetta, pour intégrer le journal Al Alam. Dans le journal du Parti de l’Istiqlal, qui lui a tendu les bras, il a évolué de journaliste à secrétaire de rédaction, puis rédacteur en chef, avant d’accéder au poste de directeur de publication. “J’y ai travaillé avec des sommités comme Abdelkarim Ghellab et Abdeljebbar Shimi”, s’est-il félicité modestement.

Venu tôt à la politique, il était également député istiqlalien de Larache, entre 2011 et 2016. Actuellement, il est président du Syndicat National de la Presse Marocaine (SNPM), depuis 2014, vice-président de l’Union des Journalistes Arabes, et président de la commission de la carte professionnelle au sein du Conseil National de la Presse (CNP).

S. K.

Repères

Le CNP évalue les pertes alarmantes du secteur de la presse
Dans un rapport sur les répercussions de la pandémie du nouveau Coronavirus sur le secteur de la presse marocaine, le Conseil National de la Presse (CNP) a indiqué que les pertes du secteur de la presse marocaine ont avoisiné les 243 millions de dirhams en trois mois en raison de la suspension de l’impression des journaux. Il a fait également état de la forte chute des recettes publicitaires de 110 % entre le 18 mars et 18 mai 2020 en comparaison avec la même période de l’année précédente.
Un plan de soutien aux médias
Le ministre de la Culture, de la Jeunesse et des Sports, Othman El Ferdaous, a annoncé, vendredi 19 juin dernier, un plan de soutien aux médias pour un montant de 205 millions DH, dont 75 millions de DH seront consacrés au paiement des salaires des mois de juillet, août et septembre et 75 millions de DH serviront au paiement des fournisseurs. Le plan consacre également 15 millions de DH pour les imprimeries qui font le tirage de plus de 500.000 exemplaires de journaux par an. 15 millions DH seront consacrés au distributeur Sapress et 15 autres seront destinés aux radios privées. Une recapitalisation étatique de 10 millions de DH est prévue pour Sapress.
En Europe, l’intervention des gouvernements fut rapide
Un soutien financier direct a été accordé par des gouvernements à des entreprises médiatiques dans de nombreux pays européens, suite à la crise sanitaire. A titre d’exemple, au Danemark, on a consacré une compensation de 60% jusqu’à 80% pour la perte de revenus publicitaires. En Espagne, la TVA est réduite sur les contenus numériques de 21 à 4%. La liste reste longue. Pour sa part, l’Union Européenne est en cours d’élaboration d’un mécanisme de soutien à long terme.








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