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Interview avec Kamal Laabi : « Je ne crois pas en la cuisine revisitée »


Rédigé par Safaa KSAANI Dimanche 22 Septembre 2024

Porte-flambeau de la cuisine et de la musique marocaines, Kamal Laabi, alias Chef Kimo, n’est plus à présenter. Hyper actif sur les réseaux sociaux, où il est l’un des chefs cuisiniers marocains les plus connus, notre interlocuteur est suivi par des centaines de milliers de personnes sur la Toile. Nous l’avons rencontré dans son restaurant à Mahaj Riad, où il partage sa passion pour la gastronomie et son amour pour la musique avec sa clientèle de tous âges.



  • Vous venez d’ouvrir votre premier restaurant à Rabat. Pourquoi le choix de la capitale administrative et non pas la capitale spirituelle de Fès ? Et qu’est-ce qui distingue votre restaurant de la concurrence ?  

- Bienvenue à L’Opinion dans mon restaurant. D’abord, c’est le destin. J’ai un amour particulier pour Rabat où j’ai travaillé pendant 15 ans de ma vie. Je suis venu pour me rapprocher de ma clientèle qui se déplaçait jusqu’à Fès pour me rencontrer. J’avais un « cook'in studio » où je filmais des épisodes de recettes. Désormais, nous nous rencontrons dans un cadre professionnel. Ce qui distingue ce restaurant est la présentation de recettes authentiques « Chhiwates Lalla », qu’on ne retrouve nulle part dans les restaurants du monde entier. A l’instar du « Kebab Maghdour », « fèves à l’huile d’olives », « Kedra aux amandes », « Lemhammer », « Mrouzia »... et d’autres plats authentiques 100% marocains. La variété des plats attire une clientèle de tous horizons. 
 
  •  Vous êtes devenu célèbre grâce à votre signature « bouss lidida », racontez-nous l’histoire de ce slogan ? 

- Pour moi, embrasser la main en me recueillant sur la « mima » symbolise l’énergie positive et la bénédiction. C’est un tic familial transmis d’une génération à une autre. 
 
  • Comment définissez-vous votre cuisine : traditionnelle, beldi revisité, moderne ou fusion ? 

- Aucune d’entre elles (rires). Je fais de la cuisine marocaine, méditerranéenne mais à ma façon. Les plats préparés par ma mère durant mon enfance ont éveillé mon intérêt pour la gastronomie. Je m’inspire donc de mes racines fassies et des traditions familiales. Je ne crois pas en la cuisine revisitée. Le cœur du plat, son essence, ne doit pas être dénaturé. En tant que porte-flambeau de la cuisine marocaine, je ne m’amuse pas à “porter atteinte” à l’identité de nos plats traditionnels. 
 
  • Est-ce que vous avez un plat préféré ? 
- J’adore les fèves à la façon marocaine. C’est un plat simple mais riche en protéines et en vitamines. 
 
  •  Vous vous reconnaissez plus en Bargash ou plutôt Choumicha ? 

- De nombreuses personnes trouvent une grande ressemblance physique et comportementale avec Abderrahim Bargach, que j’ai eu la chance de rencontrer une fois avant même de me lancer dans la cuisine. Choumicha est une grande amie. 
 
  •  Musique andalouse et cuisine, un mariage réussi, selon vous ? Et quel est votre disque préféré ?
- Bien sûr ! Le proverbe marocain « Quand le ventre est plein, il demande à la tête de chanter » l’illustre bien. Mais pas n’importe quelle musique. La musique andalouse précisément, riche, sophistiquée et relaxante.  

Comme mon grand-père, Haj Abdelkrim Raïs, qui a préservé la musique arabo-andalouse, je veux sauvegarder notre cuisine marocaine traditionnelle pour les générations futures. J’aime beaucoup le morceau “Ma Abdaâ jamalak” mais j’écoute tous les types de musique : Jazz, Raï,... 
 
  • Vous comptez plus de 881k abonnés sur Instagram. Comment gérez-vous votre présence sur les réseaux sociaux ? Vous ne craignez pas que cette nouvelle aventure dans le business ne vous accapare trop ? 

- Cela vient naturellement. Depuis la création de mon compte Instagram j’essaie de partager le maximum avec mes abonnés. Et je tiens toujours à répondre à chaque message que je reçois de leur part. Le secret est de créer un lien avec eux.
 
  • Une vague food s’est abattue sur nos écrans mobiles avec des recettes relayées sur les réseaux sociaux. Une bonne chose pour le rayonnement de la cuisine marocaine à l’international ? 
     
- Absolument. Suite à la publication de mon concept sur les réseaux sociaux, de nombreuses personnes ont commencé à partager avec nous les plats préparés par leurs parents et grands-parents. Cela me fait plaisir et me rassure sur la relève. 
 
  • Quels sont les conseils que vous donneriez aux jeunes chefs qui veulent se lancer aujourd'hui ?

- Je leur passe le salut à travers votre journal et les conseille de connaître la cuisine marocaine, la base de toute autre cuisine internationale. 
 
  • Enfin, quelles sont vos ambitions ? 

- Je rêve également de créer une école où la cuisine marocaine serait enseignée et célébrée à sa juste valeur et d’ouvrir d’autres restaurants dans les quatre coins du monde. Je cuisinais dans mon foyer pour ma famille. Je n’ai jamais rêvé d’ouvrir un restaurant. L’ambition est plus grande désormais. 
 
Recueillis par Safaa KSAANI
 

Portrait : Chef Kimo, suivant les pas de ses aïeux

Il est à l’aise, Chef Kimo, dans sa zone de confort, son restaurant niché au plein cœur de Mahaj Riad à Rabat où il nous accueille. Boiseries, verrières, fond vert avec une série de photos d’artistes amis… Tout y est pour transporter le convive dès son entrée dans un univers raffiné et minimaliste. 

Plaisante, tutoie sur-le-champ, répond sans louvoyer à toutes les questions des grands et des petits. Son secret ? « Être modeste et avoir bon cœur », résume-t-il. 

Avant de devenir ce qu’il est aujourd’hui, Kimo a commencé son parcours avec les “Frères Laabi”, un groupe de musique traditionnelle qui a duré plus de vingt ans.  

La transition se fait en douceur en ouvrant un « cook’in studio » à Fès. Sa notoriété, il la doit à « Bouss Lidida ». Une phrase qu’il répète avec son accent fassi dans toutes ses vidéos. Mais pas que. 

Côté cuisine, la balade s’exécute soit à la carte ou en quatre plats autour du patrimoine marocain bien évidemment. Ici, pas de plats revisités car il n’est pas adepte de la modernisation des plats marocains. On ne peut pas le retourner comme une crêpe. « Je suis catégorique sur ce point », défend-il avec fougue au point de s’énerver.  

 









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