- Les enjeux de la durabilité sont cruciaux pour le secteur halieutique. Quels sont les principaux défis que vous jugez importants à relever au niveau continental ?
L’industrie est encore trop dépendante de quelques espèces phares comme la sardine et l’anchois, tandis que des produits bruts dominent encore les exportations. À l’inverse, des pays partenaires valorisent nos ressources marines pour produire une trentaine de produits, contre seulement 4 ou 5 produits au Maroc. La FENIP milite pour une approche plus diversifiée et durable, intégrant la recherche, l’innovation et la coopération régionale. L’ambition de la FENIP dépasse les frontières nationales. Conformément aux Hautes Orientations de Sa Majesté le Roi Mohammed VI que Dieu l’Assiste, elle s’engage dans une vision panafricaine, visant à renforcer les partenariats Sud-Sud et à développer une chaîne de valeur intégrée sur le continent. À cet effet, la création d’un centre africain de formation, d’excellence et de R&D à Dakhla est une priorité. Ce centre incarnera la coopération africaine en formant les talents, en promouvant l’innovation et en partageant les meilleures pratiques de gestion des ressources marines.
- Quelles recommandations pour accompagner les ambitions nationales et africaines en la matière ?
Parmi les propositions clés formulées pour relever les défis du secteur, on peut évoquer l’enjeu d’investissement dans les infrastructures. Moderniser les ports, les plateformes de débarquements, la chaîne de froid et les systèmes de traçabilité est essentiel pour garantir la qualité et la compétitivité des produits. Il est également primordial de développer une nouvelle génération de chantiers navals, puisque la modernisation de la flotte de pêche est indispensable pour améliorer les conditions de travail des pêcheurs, réduire l’impact environnemental des activités et garantir une meilleure conservation des captures. Nous préconisons aussi la création de chantiers navals de nouvelle génération, équipés pour construire et entretenir des navires répondant aux normes les plus strictes en matière de durabilité, d’efficacité énergétique et de sécurité. Ces infrastructures joueront un rôle clé dans le repositionnement stratégique de l’industrie halieutique marocaine et permettront de renforcer l’intégration locale des chaînes de valeur maritimes.
- Et pour garantir un secteur sans mauvaises pratiques ?
Il s’agit d’un enjeu crucial. Nous proposons de soutenir des initiatives telles que l’aquaculture durable, d’introduire des mécanismes de suivi rigoureux pour protéger les écosystèmes, et de renforcer les dispositifs de contrôle et de traçabilité afin d’éradiquer les pratiques informelles qui fragilisent le secteur. Concernant la création de plateformes de collaboration régionale, cela peut se faire à travers des initiatives comme la Bourse Halieutique Africaine. Notre fédération milite pour des mécanismes de coopération qui fluidifient les échanges commerciaux et renforcent les synergies entre les pays africains. La question de la digitalisation des chaînes de valeur est également primordiale à travers l’adoption d’outils numériques pour optimiser la traçabilité et la gestion des ressources, ce qui permettra non seulement de satisfaire les exigences des marchés internationaux, mais aussi d’améliorer la gestion durable des stocks. Enfin, la promotion de la «Made in Morocco» ainsi que le « Made in Africa» permettra de renforcer la visibilité des produits marocains.
- Mais il reste le problème d’accessibilité aux financements…
Effectivement. A cet effet, nous prônons la création d’un crédit maritime dédié pour accompagner la modernisation de la flotte de pêche, l’acquisition d’équipements modernes et durables, et le développement de l’innovation dans l’industrie de transformation et l’aquaculture. Ce financement ciblé renforcera la compétitivité des entreprises tout en soutenant une transition vers des pratiques plus durables et performantes. De même, nous proposons d’accélérer la diversification des produits à travers le développement des produits à forte valeur ajoutée, les compléments alimentaires d’Oméga-3 en gélules ou en sirop, les encres marines ou encore les plats cuisinés prêts à consommer. Cela permettra d’améliorer la compétitivité sur les marchés internationaux.