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L’économie bleue : un gisement potentiel pour une relance économique post Covid


Rédigé par Oussama ABAOUSS Mercredi 10 Juin 2020

L’économie bleue peut s’avérer comme un véritable levier de relance de l’économie marocaine mise à mal par l’impact de la crise sanitaire. Zoom sur un secteur émergent très prometteur.



L’économie bleue : un gisement potentiel pour une relance économique post Covid
Pour célébrer la Journée mondiale des océans, l’Associa-tion des Enseignants des Sciences de la Vie et de la Terre (AESVT) a organisé ce lundi 8 juin -en partenariat avec la fondation Lydec et la Fondation Heinrich Böll- une visioconférence sous le thème «comment agir maintenant pour faire de l’économie bleue un pilier de croissance du nouveau modèle de développement du Maroc». Les intervenants de cette rencontre en ligne ont débattu les potentialités et contraintes de la mise en oeuvre d’une économie bleue dans le Royaume.Ce concept qui se veut inclusif et durable s’inscrit dans une perspective de valorisation des ressources et services écosystémiques qu’offre la mer. Le Conseil Economique Social et Environnemental (CESE) avait publié, par ailleurs, un rapport en décembre 2018 qui soulignait déjà tout l’intérêt et moyens qu’avait le Royaume à mettre en place une véritable économie bleue en s’appuyant sur les acquis et les atouts du pays dans ce domaine.

Volonté politique et collaboration

Pour arriver à construire une économie bleue à même d’appuyer la relance économique»il faut commencer par introduire cet objectif dans le plan de relance et dans le nouveau modèle de développement», explique Abderrahim Ksiri, président de l’AESVT. L’autre condition consiste à faire converger les efforts des nombreuses institutions concernées. «Nous avons dans notre pays une douzaine d’institutions qui interviennent dans la gestion du littoral. Dans les autres pays de la Méditerranée il y a en moyenne quatre institutions qui gèrent cet espace, avec toujours un chef de file bien désigné. Au Maroc les administrations ont tendance à vouloir «défendre» leurs prérogatives, ce qui parfois bloque certaines dynamiques de développement qui nécessitent la participation de plusieurs secteurs. Or il y a des mécanismes qui peuvent inciter à une meilleure collaboration. Dans certains pays, une fraction du budget est allouée au travail sectoriel alors que l’octroi de l’autre fraction est conditionné à la réussite du travail collaboratif», souligne Abderrahim Ksiri.

Investir dans les bons projets

Le président de l’AESVT prône également une construction de l’économie bleue au niveau des territoires :»toutes les politiques multisectorielles qui se font au niveau central ne réussiront pas s’il n’y a pas une dynamique de collaboration à l’échelle locale. En France il y a, par exemple, des forums régionaux annuels obligatoires. Tous les acteurs viennent y dire ce qu’ils ont fait et ce qu’ils comptent faire». D’un autre côté, et alors que l’État tente de sortir de la crise sanitaire en puisant dans l’argent du contribuable et en contractant des dettes, se pose la question des activités prioritaires à soutenir. «Ces fonds ne devraient pas financer des acteurs qui génèrent des revenus limités en polluant le littoral, défavorisent ainsi l’implantation d’une nouvelle économie beaucoup plus prometteuse», explique Abderrahim Ksiri qui donne l’exemple de l’aquaculture dont le gisement  très prometteur dépend de la salubrité des écosystèmes littoraux. «Il faut aussi veiller à investir dans l’ensemble des activités potentielles de l’économie bleue et non pas uniquement celles liées à la pêche», ajoute l’expert.

Capitaliser sur les expériences de la crise sanitaire

Garantir une soutenabilité et une bonne valorisation de la pêche maritime est néanmoins un préalable vital. Si les lois et les stratégies en vigueur tendent vers une exploitation durable des ressources maritimes, les infractions à la loi de la pêche ne sont pas rares dans un contexte marqué par la possibilité d’émergence de tensions sociales liées aux problématiques de surexploitation des ressources naturelles. «Il faut une stratégie efficace de communication pour démontrer à tout le monde ce qu’on gagne et ce qu’on perd en surexploitant les ressources naturelles. C’est ce qui s’est passé pour la Covid : il y a eu une forte communication de l’État, une vision claire, et même s’il y a eu des gens qui ont essayé d’aller à contre-courant, tous les citoyens ont été du côté de l’État. Il faut aussi que les gens voient que la loi est appliquée à tout le monde. À l’instar de ce qui a été fait pendant la crise sanitaire, il faut veiller également à garantir le minimum vital pour les personnes vulnérables qui n’arrivent à survivre qu’en surexploitant des ressources naturelles. Le retour sur investissement sera bien au-delà des sommes investies», conclut Abderrahim Ksiri.

Oussama ABAOUSS

3 questions à Abderrahim Ksiri président de l’AESVT

Abderrahim Ksiri
Abderrahim Ksiri
« Exploiter de manière durable mais penser également à produire ce qui n’existe pas encore »

M. Abderrahim Ksiri président de l’Association des Enseignants des Sciences de la Vie et de la Terre répond à nos questions sur les défis de mise en oeuvre d’une économie bleue au Maroc.

Peut-on parier sur l’économie bleue pour contribuer à la relance économique post Covid?
- Certainement. Une économie bleue permettra de tirer profit d’un gisement qui a été sous-exploité -parfois mal exploité- en absence d’une vision globale intégrée qui va du local au régional en passant par le national jusqu’au niveau international.

- Comment peut-on tirer profit encore plus des ressources halieutiques d’une manière soutenable ?
- De manière classique nous avons essayé d’agir sur une seule ressource : la pêche, avec 700.000 emplois, alors que la production de poissons qui est consommée à l’échelle mondiale est à plus de 65% issue directement de l’aquaculture. Ça veut tout simplement dire que notre potentiel de production peut encore être multiplié en garantissant une production d’espèces parfois à haute valeur ajoutée. Il faut absolument penser à exploiter ce qui existe de manière durable mais penser également à produire ce qui n’existe pas encore.

- La pollution des milieux côtiers des grandes métropoles ne mettra-t-elle pas en échec les projets d’aquaculture ?
- Nous avons au Maroc plus de 3500 km de côtes dont la plus grande majorité se situe dans des zones rurales. Nous ne sommes pas obligés d’installer les projets d’aquaculture près des grandes villes. Il faut cependant avoir une planification pour stopper définitivement tous les rejets polluants parce que cette pollution coûte trop cher à nos ressources. Cela dit, ce qu’on a compris avec cette crise sanitaire, c’est que l’Etat doit agir et doit intervenir car il sait changer les choses rapidement.

Propos recueillis
par O.A

Repères

Célébration onusienne de la Journée des océans
Cette année, en raison de la pandémie mondiale du Covid-19, la Conférence des Nations Unies sur les Océans, qui devait se tenir du 2 au 6 juin à Lisbonne, au Portugal, a été reportée sur décision de l’Assemblée générale. La journée a néanmoins été célébrée «en ligne», lors d’une visioconférence -organisée le 8 juin- à laquelle ont participé des leaders d’opinion venant d’horizons différents qui ont à cette occasion pu découvrir les dernières innovations du secteur notamment dans le domaine de l’économie bleue.
Plan du littoral en marche
Le Plan National du Littoral a été élaboré par le ministère de l’Énergie, des Mines et de l’Environnement à partir de 2017. Ce plan est actuellement en procédure d’approbation par décret après son approbation le 14 février 2020 par le Comité National de Suivi pour la Gestion Intégrée du Trait de Côte, composé de 54 membres représentant divers départements gouvernementaux, conseils régionaux des zones côtières, institutions publiques, instituts de recherche scientifique et associations de la société civile.









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