Le 5 février 2016, Tayeb Saddiki fait son ultime grosse mauvaise blague. Et là, ce n’est pas une farce. Le bonhomme est sérieux, comme ça lui arrive de l’être en alignant des blagues chargées de punchlines. Il ferme la porte derrière lui, sans oublier de garder allumé ce feu éclairant depuis des décennies quelques générations formées à son inégalée efficacité. Tayeb part, l’âme en lambeaux.
Des projets en cours et des oreilles malmenées par une incompréhension cultivée à souhait s’entremêlent allégrement, laissant le maître coi. Huit ans après son évaporation aux effluves enivrantes, me viennent à l’esprit des souvenirs croustillants et débordants de perplexités que je garde de notre belle relation entamée à Rabat. Au début des années 1980, je suis jeune journaliste officiant au sein du quotidien Al Maghrib, après un apprentissage à L’Opinion et ensuite au Matin.
Un samedi, alors que je suis de permanence dans ce couloir du journal de Ahmed Ousmane, Tayeb débarque. Sans prononcer de salut, il me demande de lui indiquer le bureau de Abdelghani Dades, alors mon rédacteur en chef. Je réponds qu’il n’est pas de service et l’artiste m’intime un ordre en rebroussant chemin : « Dis-lui que je suis passé le voir, sans succès. » Moi, du haut de mon insolence démesurée, je réponds : « Je lui dis qui ? » Là, il se retourne, me fixe d’un regard violent, avant de vociférer : « Tayyyeb Sadddiki ! » Le lundi qui suit, je raconte mon déboire avec l’énorme dramaturge à Dades qui éclate de rire. Il m’invite ensuite à aller rendre visite ensemble à Tayeb le soir-même.
Arrivés chez l’artiste au regard qui tue, nous sommes conviés à prendre place dans le salon de cet appartement de la place Piétri, mythique de par les personnes qu’il contient à longueur de soirées. Rapidement, Saddiki me demande de me lever. Ce que je fais sans réfléchir. « Dis-moi, il t’arrive de te nourrir ? Tu es maigre comme un clou ! », m’assène-t-il. Mais rien sur notre entrevue du journal Al Maghrib, jamais. Pourtant, cet épisode est le début d’une longue et belle amitié. A bientôt maestro.
Des projets en cours et des oreilles malmenées par une incompréhension cultivée à souhait s’entremêlent allégrement, laissant le maître coi. Huit ans après son évaporation aux effluves enivrantes, me viennent à l’esprit des souvenirs croustillants et débordants de perplexités que je garde de notre belle relation entamée à Rabat. Au début des années 1980, je suis jeune journaliste officiant au sein du quotidien Al Maghrib, après un apprentissage à L’Opinion et ensuite au Matin.
Un samedi, alors que je suis de permanence dans ce couloir du journal de Ahmed Ousmane, Tayeb débarque. Sans prononcer de salut, il me demande de lui indiquer le bureau de Abdelghani Dades, alors mon rédacteur en chef. Je réponds qu’il n’est pas de service et l’artiste m’intime un ordre en rebroussant chemin : « Dis-lui que je suis passé le voir, sans succès. » Moi, du haut de mon insolence démesurée, je réponds : « Je lui dis qui ? » Là, il se retourne, me fixe d’un regard violent, avant de vociférer : « Tayyyeb Sadddiki ! » Le lundi qui suit, je raconte mon déboire avec l’énorme dramaturge à Dades qui éclate de rire. Il m’invite ensuite à aller rendre visite ensemble à Tayeb le soir-même.
Arrivés chez l’artiste au regard qui tue, nous sommes conviés à prendre place dans le salon de cet appartement de la place Piétri, mythique de par les personnes qu’il contient à longueur de soirées. Rapidement, Saddiki me demande de me lever. Ce que je fais sans réfléchir. « Dis-moi, il t’arrive de te nourrir ? Tu es maigre comme un clou ! », m’assène-t-il. Mais rien sur notre entrevue du journal Al Maghrib, jamais. Pourtant, cet épisode est le début d’une longue et belle amitié. A bientôt maestro.