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La Banque Mondiale tire la sonnette d’alarme : Au Maroc, le redressement économique sera long


Rédigé par A. CHANNAJE Mercredi 22 Juillet 2020

Le choc de la Covid-19 a entraîné l’économie marocaine dans une brusque récession, la première depuis 1995, souligne la Banque Mondiale.



La Banque Mondiale tire la sonnette d’alarme : Au Maroc, le redressement économique sera long
Dans son nouveau rapport de suivi de la situation économique au Maroc, fraîchement publié, l’institution de Bretton Woods note que l’économie nationale risque de subir le double impact des chocs économiques intérieurs et extérieurs. « Selon le scénario de base, le PIB réel diminuera de 4 % en 2020, bien loin de l’augmentation de 3,6 % prévue avant l’irruption de l’épidémie », prévoit l’institution de Bretton Woods.

Bien que peu de secteurs soient épargnés, poursuit la même source, cette contraction est notamment due à la chute de la production des biens et services, la réduction des exportations, la perturbation des chaînes de valeur mondiales ainsi qu’au déclin du tourisme sous l’effet de la fermeture des frontières et des mesures restreignant la mobilité.

La Banque Mondiale fait remarquer aussi que le marché du travail fait face à un choc aux proportions historiques, les travailleurs vulnérables, notamment ceux du secteur informel, sont particulièrement touchés.

Les entreprises, pour leur part, sont affectées essentiellement par trois facteurs : perturbations des chaînes de valeur, réduction de la mobilité des travailleurs, fermetures temporaires et ralentissement de la demande mondiale. Tous ces effets négatifs ont conduit, selon la Banque Mondiale, à des pertes d’emplois et de revenus. « Selon le HCP, l’aide gouvernementale a permis d’atténuer partiellement la perte de revenus de 19 % des ménages », estime-t-on.

La Banque Mondiale prévoit, par ailleurs, le creusement, en dépit de la baisse des importations, du déficit du compte courant pour atteindre 8,4 % en 2020, en raison du fort déclin des exportations, des recettes touristiques et des transferts de fonds.

Sur le plan budgétaire, elle note que les recettes seront plus basses que prévu en 2020 et 2021. A l’inverse, elle prévoit une hausse des dépenses, notamment celles consacrées à la santé, à la protection sociale et à d’autres mesures de riposte contre les conséquences de la Covid-19. « En conséquence, le déficit budgétaire global se creusera et atteindra 7,5 % du PIB en 2020, un pourcentage supérieur de près de quatre points aux prévisions antérieures à l’épidémie », indique la même source.

Pour les dettes publique et extérieure, elles augmenteront mais demeureront soutenables.

La réponse du Maroc à la pandémie

Dans son rapport, la Banque Mondiale estime que la réponse du Maroc à la pandémie a été, néanmoins, rapide et décisive. « Cette réaction proactive a permis au pays d’éviter une épidémie de grande ampleur et donc de sauver des vies », s’est réjouit l’institution mondiale, basée à Washington. Cette réaction proactive a trait aux mesures prises par le Maroc : fermeture rapide des frontières, renforcement du système de santé, création d’un fonds spécial afin d’atténuer les impacts économiques, indemnisation des ménages touchés par l’épidémie, y compris ceux du secteur informel, et préparation d’une loi de Finances rectificative, la première en 30 ans.

« La poursuite de mesures, allant dans ce sens, y compris l’élaboration d’une feuille de route détaillée sur la reprise des activités économiques, est essentielle pour écourter et atténuer la dépression économique, sociale et sanitaire et accélérer le redressement », recommande l’institution de Bretton Woods.

Le redressement économique sera long

Elle considère, toutefois, que le redressement économique qui suivra l’épidémie sera long, la croissance ne revenant à sa tendance antérieure à l’épidémie qu’en 2022.

Pour l’année 2021, la Banque s’attend à une hausse de la croissance du PIB « de 3,4 % avec une augmentation de la production agricole grâce à des conditions climatiques plus normales et un accroissement plus lent de la production non agricole, alors que l’activité économique intérieure redémarrera parallèlement au relèvement des principaux marchés d’exportation européens du Maroc ».

Elle note, cependant, que le rythme prévu du redressement est incertain, car il est étroitement lié à de nombreux facteurs, comme la découverte de traitements efficaces contre la Covid-19, les mesures futures des décideurs, ou l’évolution de l’économie mondiale. « Ce rythme dépend également et très fortement du comportement des ménages et des entreprises qui, au vu du degré d’incertitude extrême, risquent de recourir à l’épargne de précaution, ce qui pourrait être un frein considérable à la consommation et l’investissement privés », estime-t-on.

Coronavirus, une opportunité pour accélérer des réformes

La BM estime, toutefois, que la Covid-19, malgré les difficultés, représente une opportunité d’accélérer des réformes économiques engagées depuis longtemps. « Le suivi de l’épidémie et de ses effets ultérieurs sur l’économie nécessite le renforcement de la résilience de l’économie marocaine, notamment par l’élaboration de mesures d’adaptation. La reprise de l’économie dépendra de la manière dont le système de santé pourra détecter les niveaux locaux de transmission de la Covid-19 et riposter, ainsi que de la durée de l’épidémie. Néanmoins, les ripostes politiques visant à soutenir les employeurs et les travailleurs pendant la crise détermineront la rapidité avec laquelle le pays pourra se relever au lendemain de cette crise », est-il souligné.

Face au risque d’épidémie prolongée, la BM pense qu’il est essentiel de passer d’une phase d’atténuation à une phase d’adaptation pour garantir la résilience, le caractère inclusif et la croissance de l’économie marocaine. « En dépit de la probable volatilité de la phase de redressement économique, le Maroc trouve ici l’opportunité de bâtir une économie plus durable et plus résiliente en développant une stratégie d’adaptation similaire à son approche sur le front de l’environnement », note la Banque.

Côté économie mondiale, l’institution de Bretton Woods indique qu’elle connaîtra une grave récession cette année, avant de retrouver un peu de vigueur en 2021. « Dans les économies avancées, la croissance devrait se contracter de 7 % en 2020», lit-on dans le dit rapport.
A. CHANNAJE

Repères

Effets sur les finances publiques
Comme dans de nombreux pays, au Maroc, l’épidémie entraînera des pressions fiscales importantes et augmentera également la dette publique. Ces dernières années, malgré ses progrès réalisés en matière de viabilité budgétaire, le Maroc n’a pas atteint son objectif de déficit budgétaire (3 % du PIB). Il sera encore plus difficile à réaliser en raison du choc de la Covid-19 et de ses conséquences, car la diminution des recettes fiscales, due à la baisse de la croissance économique, et les dépenses supplémentaires liées à la Covid-19 réduiront la marge de manoeuvre budgétaire. Les mesures politiques pour contenir et atténuer les effets de l’épidémie impliquent des allocations sanitaires plus élevées et des mesures ciblant les ménages et les entreprises. Celles-ci seront principalement financées par le Fonds Covid-19. Le déficit budgétaire global se creusera donc sensiblement en 2020, le ratio dette publique/PIB passant au-dessus des 70 %. Les risques budgétaires sont également en hausse, car les entreprises publiques commerciales sont confrontées à d’importantes baisses de recettes et pourraient nécessiter le soutien de l’État.
Effets sur les marchés des changes
Après le début de la pandémie de Covid-19, le taux de change réel s’est apprécié d’environ 0,86% au premier trimestre 2020. Au mois de mars, BAM a élargi la bande de fluctuation du dirham à ±5 % autour d’un panier de devises inchangé comprenant l’euro (60 %) et le dollar américain (40 %) de ±2,5 % auparavant.Le dirham est resté stable dans la bande de fluctuation de ±5 après l’élargissement de la bande en mars.








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