Quel rapport les étudiants de notre pays ont-ils au Covid-19 ? Quelles représentations se font-ils de cette crise dans sa complexité et ses différentes dimensions ? Comment envisagent-ils son dépassement ? Et de quelle façon voient-ils le développement du Maroc à la lumière de ce grand chamboulement ? Sous quelles formes et dans quelles perspectives ? Ces questions, nous les avons posées récemment aux étudiants de l’Ecole d’Architecture et du Design de l’Université Euro-Méditerranéenne de Fès. Questions d’autant plus légitimes que cette nouvelle génération, pétrie de grandes certitudes quant à la puissance du monde où elle vit, ne peut admettre (du moins facilement) qu’un « machin virus » puisse mettre en péril ses principaux fondements. A vrai dire les étudiants, dans notre université et certainement ailleurs aussi, ont l’habitude d’être associés à la réflexion sur des questions d’intérêt national et international.
Cinq recommandations pour réussir la bataille du changement
Cela a été le cas il y a quelques mois au sujet du projet, initié par Sa Majesté le Roi Mohammed VI, sur le « nouveau modèle de développement du Maroc ». Sollicitant l’avis d’un certain nombre d’entre eux, inscrits en Master Communication des Entreprises et des Institutions, j’ai été frappé par la profonde connaissance qu’ils avaient de la littérature publiée sur ce thème, plus ou moins enrichie chez quelques-uns par des ouvertures sur des modèles appliqués aussi bien en Europe qu’en Amérique du nord.
Cinq recommandations fortes revenaient comme un leitmotiv dans la discussion avec eux : 1) la moralisation de la vie politique par la mise en œuvre de l’arsenal juridique nécessaire à cet effet ; 2) l’adoption d’un dispositif financier garantissant une justice fiscale rigoureuse et transparente ; 3) la réorganisation de notre enseignement autour de pôles d’excellence régionaux en parfaite cohérence avec des pôles de productivité économiques, technologiques et industriels soucieux du développement durable dans toutes les régions du pays; 4) la consolidation d’une justice et d’un système de santé équitables vis-à-vis desquels chaque citoyen devrait se sentir respecté dans sa dignité et ses droits ; 5) la garantie de l’égalité des chances pour l’ensemble des jeunes du pays sans aucune discrimination de genre, de catégorie sociale ou d’appartenance doctrinaire.
Tous disaient presque d’une seule voix : nous voulons bâtir autour de la Monarchie une société inclusive, égalitaire, portée par les valeurs de solidarité et de progrès.
Le confinement comme opportunité, inspiratrice et stimulante
Ces mots sonnent dans ma tête aujourd’hui de façon encore plus marquante. Car qui pouvait deviner il y a quelques mois que ce sont justement ces valeurs qui sont maintenant mises en avant par tout un peuple derrière son Roi pour faire face au Code-19 ? Nos étudiants de l’Ecole d’architecture et du Design ont tenu à le souligner : parfaitement arrimé à ces valeurs, disent-ils, le Maroc n’a rien à craindre ni face aux problèmes de santé liés au traitement du virus ni face à la crise économique qu’ils génèrent. Certes, témoignent-ils, le temps n’est pas tout-à-fait à la grande sérénité, mais le sentiment d’appartenir à un pays comme le Maroc incite à l’espoir et à la confiance.
Quand j’ai soulevé avec eux la question du confinement et ses effets sur le mental, leurs réponses se sont avérées être un démenti cinglant de tous les clichés souvent répandus à tort sur notre jeunesse. Le confinement, rassurent-ils, est une opportunité inespérée pour se redécouvrir, se ressourcer dans le giron familial, replonger dans les plaisirs de la lecture et de la musique, mettre de l’ordre dans nos plannings, ajuster nos projets… L’air libre leur manque, m’ont-ils répété, mais, ajoute-t-ils, pas au point de leur donner le sentiment de l’angoisse et de la frustration, surtout que c’est une aubaine de suivre les cours à distance. Et de poursuivre, il nous faut essayer de profiter de cette crise pour mieux connaître les enjeux de société, s’approprier les codes de la discipline, l’ordre, le respect du lien social et familial. Là réside selon eux une première leçon importante à tirer du confinement. Elle est positive. Elle est inspiratrice et stimulante.
Affirmer l’esprit de solidarité de la nation et le cap du dépassement de la crise
Dans le désordre, répètent-ils, les jeunes dilapident souvent une précieuse énergie qui peut être canalisée et investie dans le développement de diverses capacités personnelles, voire dans l’édification de nouvelles intelligences collectives. Ils estiment cependant que la grande leçon de cette crise du Covid-19 est celle d’avoir révélé pour eux le leadership singulier de notre Monarque. Il a su prendre la juste mesure de la catastrophe et anticiper les mesures à mettre en œuvre, mobiliser au moment opportun tous les départements de l’Etat, fixer sans tergiverser les priorités, affirmer de la plus belle des manières l’esprit de solidarité de la nation et le cap du dépassement de la crise.
Cela s’est traduit, reconnaissent-ils, dans un magnifique élan sur le terrain. En témoigne une adhésion totale à l’approche de gouvernance adoptée par tous les acteurs de la société : autorités publiques, habitants des villes et de la campagne, institutions publiques et privées. On comprend pourquoi les quelques rares cas de dérapages qui se sont manifestés au début dans les quartiers de quelques villes ont été vite maîtrisés. C’est que très vite, affirment nos étudiants, tout le monde s’est rendu compte que : il n’y aura pas de laissés- pour - compte, que l’engagement en faveur des plus précaires est primordial, que les secteurs vitaux de l’économie du pays ne seront pas oubliés.
Aussi souscrirais-je avec eux que dans notre pays on a effectivement rapidement pris conscience que le plus important et le plus urgent est de sauver des vies humaines, de préserver l’équilibre démographique de la société.
Mais si nos jeunes étudiants se sont montrés enthousiastes à mettre en exergue cette gestion exemplaire de la crise générée par le Covid-19, ils n’ont pour autant pas caché leur questionnement quant au jour d’après. Cette crise, si dure soit-elle, est à considérer selon eux comme un fort moment de l’histoire du pays. Et si c’était là, serais-je tenté de m’interroger dans le sens de leur réflexion, l’occasion d’un nouveau départ par un profond travail de la société sur elle-même ?
Il faut veiller à ne pas disloquer les liens restaurés
En clair, ces jeunes font preuve d’un sens du réalisme impressionnant quand ils disent que la crise actuelle n’est pas une fatalité. Car nonobstant les sacrifices consentis elle sera bientôt vaincue. Un idée forte ressort toutefois de leurs différents points de vue : ils ne veulent pas que les liens aujourd’hui restaurés soient demain disloqués par le retour en force du cynisme et de l’égoïsme, par la fausse morale et le jeu des alliances stériles.
Ce serait mal comprendre la signification historique de l’élan de l’unité nationale actuelle. Unité derrière laquelle, pensent-ils, on ne peut ne pas voir l’expression d’un profond souhait : celui de voir émerger dans un proche avenir un nouveau Maroc sous le prisme de nouvelles logiques de refondation valorisant les principes de démocratie et de cohésion sociale. Ils rappellent le souvenir dramatique des villes d’Hiroshima et de Nagasaki dont la destruction n’a pas handicapé le Japon dans sa volonté de se hisser vers des défis de développement titanesques. Au Maroc, disent-ils, les conditions sont réunies pour gagner la bataille du changement.
Mais alors qu’on a souvent tendance à considérer celui-ci dans le cadre étriqué de notre politique intérieure, les étudiants interrogés rappellent la nécessité de le penser, en encourageant la formation à la recherche par la recherche scientifique, en fonction de quelques choix stratégiques notamment :1) assurer la souveraineté du pays, particulièrement dans des domaines importants tels la santé et les nouvelles technologies ; 2) privilégier un modèle économique de développement du pays davantage tourné vers le maintien de l’équilibre tant au sein des couches sociales qu’avec les écosystèmes naturels. Car le risque, affirment la majorité des étudiants, c’est essayer de s’aligner sur un rythme de développement semblable à celui des grandes puissances, et de se trouver tributaires de leurs moyens. Ce qui aura pour double conséquence grave : d’une part une dégradation accélérée de notre environnement, et d’autre part un accroissement de la résurgence de nouvelles formes d’inégalités et de pauvreté.
Ainsi si la crise du Covid-19 nous met face à la précarité de notre existence, elle est selon bon nombre d’étudiants une chance formidable de pouvoir croire en NOTRE MAROC.
Par Abderrahman Tenkoul
Doyen de l’EUROMED - FSHS
Cinq recommandations pour réussir la bataille du changement
Cela a été le cas il y a quelques mois au sujet du projet, initié par Sa Majesté le Roi Mohammed VI, sur le « nouveau modèle de développement du Maroc ». Sollicitant l’avis d’un certain nombre d’entre eux, inscrits en Master Communication des Entreprises et des Institutions, j’ai été frappé par la profonde connaissance qu’ils avaient de la littérature publiée sur ce thème, plus ou moins enrichie chez quelques-uns par des ouvertures sur des modèles appliqués aussi bien en Europe qu’en Amérique du nord.
Cinq recommandations fortes revenaient comme un leitmotiv dans la discussion avec eux : 1) la moralisation de la vie politique par la mise en œuvre de l’arsenal juridique nécessaire à cet effet ; 2) l’adoption d’un dispositif financier garantissant une justice fiscale rigoureuse et transparente ; 3) la réorganisation de notre enseignement autour de pôles d’excellence régionaux en parfaite cohérence avec des pôles de productivité économiques, technologiques et industriels soucieux du développement durable dans toutes les régions du pays; 4) la consolidation d’une justice et d’un système de santé équitables vis-à-vis desquels chaque citoyen devrait se sentir respecté dans sa dignité et ses droits ; 5) la garantie de l’égalité des chances pour l’ensemble des jeunes du pays sans aucune discrimination de genre, de catégorie sociale ou d’appartenance doctrinaire.
Tous disaient presque d’une seule voix : nous voulons bâtir autour de la Monarchie une société inclusive, égalitaire, portée par les valeurs de solidarité et de progrès.
Le confinement comme opportunité, inspiratrice et stimulante
Ces mots sonnent dans ma tête aujourd’hui de façon encore plus marquante. Car qui pouvait deviner il y a quelques mois que ce sont justement ces valeurs qui sont maintenant mises en avant par tout un peuple derrière son Roi pour faire face au Code-19 ? Nos étudiants de l’Ecole d’architecture et du Design ont tenu à le souligner : parfaitement arrimé à ces valeurs, disent-ils, le Maroc n’a rien à craindre ni face aux problèmes de santé liés au traitement du virus ni face à la crise économique qu’ils génèrent. Certes, témoignent-ils, le temps n’est pas tout-à-fait à la grande sérénité, mais le sentiment d’appartenir à un pays comme le Maroc incite à l’espoir et à la confiance.
Quand j’ai soulevé avec eux la question du confinement et ses effets sur le mental, leurs réponses se sont avérées être un démenti cinglant de tous les clichés souvent répandus à tort sur notre jeunesse. Le confinement, rassurent-ils, est une opportunité inespérée pour se redécouvrir, se ressourcer dans le giron familial, replonger dans les plaisirs de la lecture et de la musique, mettre de l’ordre dans nos plannings, ajuster nos projets… L’air libre leur manque, m’ont-ils répété, mais, ajoute-t-ils, pas au point de leur donner le sentiment de l’angoisse et de la frustration, surtout que c’est une aubaine de suivre les cours à distance. Et de poursuivre, il nous faut essayer de profiter de cette crise pour mieux connaître les enjeux de société, s’approprier les codes de la discipline, l’ordre, le respect du lien social et familial. Là réside selon eux une première leçon importante à tirer du confinement. Elle est positive. Elle est inspiratrice et stimulante.
Affirmer l’esprit de solidarité de la nation et le cap du dépassement de la crise
Dans le désordre, répètent-ils, les jeunes dilapident souvent une précieuse énergie qui peut être canalisée et investie dans le développement de diverses capacités personnelles, voire dans l’édification de nouvelles intelligences collectives. Ils estiment cependant que la grande leçon de cette crise du Covid-19 est celle d’avoir révélé pour eux le leadership singulier de notre Monarque. Il a su prendre la juste mesure de la catastrophe et anticiper les mesures à mettre en œuvre, mobiliser au moment opportun tous les départements de l’Etat, fixer sans tergiverser les priorités, affirmer de la plus belle des manières l’esprit de solidarité de la nation et le cap du dépassement de la crise.
Cela s’est traduit, reconnaissent-ils, dans un magnifique élan sur le terrain. En témoigne une adhésion totale à l’approche de gouvernance adoptée par tous les acteurs de la société : autorités publiques, habitants des villes et de la campagne, institutions publiques et privées. On comprend pourquoi les quelques rares cas de dérapages qui se sont manifestés au début dans les quartiers de quelques villes ont été vite maîtrisés. C’est que très vite, affirment nos étudiants, tout le monde s’est rendu compte que : il n’y aura pas de laissés- pour - compte, que l’engagement en faveur des plus précaires est primordial, que les secteurs vitaux de l’économie du pays ne seront pas oubliés.
Aussi souscrirais-je avec eux que dans notre pays on a effectivement rapidement pris conscience que le plus important et le plus urgent est de sauver des vies humaines, de préserver l’équilibre démographique de la société.
Mais si nos jeunes étudiants se sont montrés enthousiastes à mettre en exergue cette gestion exemplaire de la crise générée par le Covid-19, ils n’ont pour autant pas caché leur questionnement quant au jour d’après. Cette crise, si dure soit-elle, est à considérer selon eux comme un fort moment de l’histoire du pays. Et si c’était là, serais-je tenté de m’interroger dans le sens de leur réflexion, l’occasion d’un nouveau départ par un profond travail de la société sur elle-même ?
Il faut veiller à ne pas disloquer les liens restaurés
En clair, ces jeunes font preuve d’un sens du réalisme impressionnant quand ils disent que la crise actuelle n’est pas une fatalité. Car nonobstant les sacrifices consentis elle sera bientôt vaincue. Un idée forte ressort toutefois de leurs différents points de vue : ils ne veulent pas que les liens aujourd’hui restaurés soient demain disloqués par le retour en force du cynisme et de l’égoïsme, par la fausse morale et le jeu des alliances stériles.
Ce serait mal comprendre la signification historique de l’élan de l’unité nationale actuelle. Unité derrière laquelle, pensent-ils, on ne peut ne pas voir l’expression d’un profond souhait : celui de voir émerger dans un proche avenir un nouveau Maroc sous le prisme de nouvelles logiques de refondation valorisant les principes de démocratie et de cohésion sociale. Ils rappellent le souvenir dramatique des villes d’Hiroshima et de Nagasaki dont la destruction n’a pas handicapé le Japon dans sa volonté de se hisser vers des défis de développement titanesques. Au Maroc, disent-ils, les conditions sont réunies pour gagner la bataille du changement.
Mais alors qu’on a souvent tendance à considérer celui-ci dans le cadre étriqué de notre politique intérieure, les étudiants interrogés rappellent la nécessité de le penser, en encourageant la formation à la recherche par la recherche scientifique, en fonction de quelques choix stratégiques notamment :1) assurer la souveraineté du pays, particulièrement dans des domaines importants tels la santé et les nouvelles technologies ; 2) privilégier un modèle économique de développement du pays davantage tourné vers le maintien de l’équilibre tant au sein des couches sociales qu’avec les écosystèmes naturels. Car le risque, affirment la majorité des étudiants, c’est essayer de s’aligner sur un rythme de développement semblable à celui des grandes puissances, et de se trouver tributaires de leurs moyens. Ce qui aura pour double conséquence grave : d’une part une dégradation accélérée de notre environnement, et d’autre part un accroissement de la résurgence de nouvelles formes d’inégalités et de pauvreté.
Ainsi si la crise du Covid-19 nous met face à la précarité de notre existence, elle est selon bon nombre d’étudiants une chance formidable de pouvoir croire en NOTRE MAROC.
Par Abderrahman Tenkoul
Doyen de l’EUROMED - FSHS