Comme prévu par les sondages, le président français Emmanuel Macron a pu se faire réélire. Le locataire de l’Elysée a pu s’imposer face à sa rivale du Rassemblement National (RN), Marine Le Pen, au second tour de l’élection présidentielle en obtenant 58,5% des suffrages. Le candidat de la République en Marche a pu ainsi succéder à lui-même, fait inédit depuis la fin du mandat de Jacques Chirac étant que ni Nicolas Sarkozy ni François Hollande n’ont pu faire de même. Au Maroc, pays qui abrite la plus grande communauté française en Afrique, les ressortissants français ont voté massivement pour le président sortant, en lui accordant 87,44% des voix.
En obtenant un nouveau mandat à l’Elysée, le président français est confronté à une mission de taille sur le plan diplomatique : rétablir le prestige de la France sur la scène internationale d’autant que son quinquennat précédent a été émaillé de revers, dont la crise avec le Mali et le retrait des troupes françaises de ce pays historiquement sous influence française est l’exemple le plus marquant.
Sur l’échiquier africain, le Maroc occupe une place importante aux yeux de la France qui considère le Royaume comme un « pays ami ». Une appellation qui date de l’époque de l’indépendance et qui demeure d’actualité malgré les crises qui ont pu surgir. Les spéculations abondent de toutes parts pour tenter d’entrevoir ce à quoi ressembleront les relations entre Rabat et Paris durant le second mandat d’Emmanuel Macron, surtout que les relations bilatérales n’ont pas été si prospères récemment. Les malentendus ont été nombreux.
Flashback : le président français n’a pas visité le Maroc depuis le 15 novembre 2018, date de l’inauguration du TGV Tanger-Kénitra où il a accompagné SM le Roi. Une autre visite a été prévue en juin 2019 pour l’inauguration de l’Usine PSA à Kénitra mais elle a fini par être annulée. Malgré les justifications d’agenda avancées par l’Elysée, de nombreux commentateurs ont estimé que cette annulation n’a pas été fortuite et serait due à des divergences sur plusieurs sujets dont celui de la ligne TGV Agadir-Marrakech.
Depuis lors, le dialogue entre Rabat et Paris est moins chaleureux, sachant que des visites ont été effectuées par les ministres de l’Intérieur, de la Justice et des Affaires étrangères au Maroc mais pour régler des problèmes qui persistent toujours. La question migratoire demeure l’un des points épineux, la décision de Paris de réduire de moitié les visas accordés aux Marocains a été accueillie avec agacement par les autorités marocaines qui, pourtant, coopèrent de façon proactive dans le dossier des mineurs isolés. Aussi, la crise du Covid-19, la guerre en Ukraine ont-elles éloigné les deux pays l’un de l’autre, laissant le vide s’installer entre eux.
Macron plutôt que Le Pen ?
L’élection de Macron demeure préférable aux yeux du Maroc, estime Jawad Kerdoudi, président de l’Institut marocain des Relations internationales qui estime que la candidate du RN, Marine Le Pen, aurait été plus dure sur la question migratoire si elle était élue. Notre interlocuteur juge que la France est un appui précieux du Maroc dans l’affaire du Sahara. « Dans les cinq prochaines années, le Maroc doit profiter de la présidence française de l’Union Européenne pour obtenir une position plus audacieuse de l’UE sur la question du Sahara », a-t-il précisé.
En plus de la question migratoire, l’affaire Pegasus n’a pas été de nature à réchauffer les relations. Le gouvernement français n’a pas réagi aux accusations mensongères d’espionnage émises contre le Maroc, tellement grotesques comme de hautes personnalités françaises le reconnaissent.
Pour autant, l’attitude de la Justice française, qui a jugé irrecevables les poursuites engagées par le Maroc contre les médias français ayant relayé ces accusations, a interloqué l’opinion publique marocaine. À quoi s’ajoute une question beaucoup plus complexe : l’Afrique de l’Ouest où la présence économique de plus en plus importante du Maroc est vue avec méfiance en France qui préfère ne pas avoir un concurrent supplémentaire dans sa zone d’influence traditionnelle.
La diplomatie des coulisses en ordre de bataille
En dépit de tous les soucis qui puissent subsister, les relations entre Paris et Rabat sont très enracinées. La France est le deuxième partenaire commercial et le premier investisseur étranger au Maroc avec un réseau de 1000 entreprises implantées. Raison pour laquelle les deux pays sont condamnés à coopérer.
Comme ses anciens soutiens traditionnels au sein de la classe politique française (Jean Louis Borloo, Dominique De Villepin, Jack Lang…) ne sont plus politiquement actifs, le Maroc mise sur le réseautage pour réactiver ses réseaux à Paris. Mission qui incombe au nouvel Ambassadeur du Royaume, Mohammed Benchaâboun. Ce dernier multiplie les rencontres avec le groupe d’amitié Maroc-France au Sénat, dont le président, Christian Cambon, est l’uns des fervents défenseurs de l’amitié franco-marocaine.
En obtenant un nouveau mandat à l’Elysée, le président français est confronté à une mission de taille sur le plan diplomatique : rétablir le prestige de la France sur la scène internationale d’autant que son quinquennat précédent a été émaillé de revers, dont la crise avec le Mali et le retrait des troupes françaises de ce pays historiquement sous influence française est l’exemple le plus marquant.
Sur l’échiquier africain, le Maroc occupe une place importante aux yeux de la France qui considère le Royaume comme un « pays ami ». Une appellation qui date de l’époque de l’indépendance et qui demeure d’actualité malgré les crises qui ont pu surgir. Les spéculations abondent de toutes parts pour tenter d’entrevoir ce à quoi ressembleront les relations entre Rabat et Paris durant le second mandat d’Emmanuel Macron, surtout que les relations bilatérales n’ont pas été si prospères récemment. Les malentendus ont été nombreux.
Flashback : le président français n’a pas visité le Maroc depuis le 15 novembre 2018, date de l’inauguration du TGV Tanger-Kénitra où il a accompagné SM le Roi. Une autre visite a été prévue en juin 2019 pour l’inauguration de l’Usine PSA à Kénitra mais elle a fini par être annulée. Malgré les justifications d’agenda avancées par l’Elysée, de nombreux commentateurs ont estimé que cette annulation n’a pas été fortuite et serait due à des divergences sur plusieurs sujets dont celui de la ligne TGV Agadir-Marrakech.
Depuis lors, le dialogue entre Rabat et Paris est moins chaleureux, sachant que des visites ont été effectuées par les ministres de l’Intérieur, de la Justice et des Affaires étrangères au Maroc mais pour régler des problèmes qui persistent toujours. La question migratoire demeure l’un des points épineux, la décision de Paris de réduire de moitié les visas accordés aux Marocains a été accueillie avec agacement par les autorités marocaines qui, pourtant, coopèrent de façon proactive dans le dossier des mineurs isolés. Aussi, la crise du Covid-19, la guerre en Ukraine ont-elles éloigné les deux pays l’un de l’autre, laissant le vide s’installer entre eux.
Macron plutôt que Le Pen ?
L’élection de Macron demeure préférable aux yeux du Maroc, estime Jawad Kerdoudi, président de l’Institut marocain des Relations internationales qui estime que la candidate du RN, Marine Le Pen, aurait été plus dure sur la question migratoire si elle était élue. Notre interlocuteur juge que la France est un appui précieux du Maroc dans l’affaire du Sahara. « Dans les cinq prochaines années, le Maroc doit profiter de la présidence française de l’Union Européenne pour obtenir une position plus audacieuse de l’UE sur la question du Sahara », a-t-il précisé.
En plus de la question migratoire, l’affaire Pegasus n’a pas été de nature à réchauffer les relations. Le gouvernement français n’a pas réagi aux accusations mensongères d’espionnage émises contre le Maroc, tellement grotesques comme de hautes personnalités françaises le reconnaissent.
Pour autant, l’attitude de la Justice française, qui a jugé irrecevables les poursuites engagées par le Maroc contre les médias français ayant relayé ces accusations, a interloqué l’opinion publique marocaine. À quoi s’ajoute une question beaucoup plus complexe : l’Afrique de l’Ouest où la présence économique de plus en plus importante du Maroc est vue avec méfiance en France qui préfère ne pas avoir un concurrent supplémentaire dans sa zone d’influence traditionnelle.
La diplomatie des coulisses en ordre de bataille
En dépit de tous les soucis qui puissent subsister, les relations entre Paris et Rabat sont très enracinées. La France est le deuxième partenaire commercial et le premier investisseur étranger au Maroc avec un réseau de 1000 entreprises implantées. Raison pour laquelle les deux pays sont condamnés à coopérer.
Comme ses anciens soutiens traditionnels au sein de la classe politique française (Jean Louis Borloo, Dominique De Villepin, Jack Lang…) ne sont plus politiquement actifs, le Maroc mise sur le réseautage pour réactiver ses réseaux à Paris. Mission qui incombe au nouvel Ambassadeur du Royaume, Mohammed Benchaâboun. Ce dernier multiplie les rencontres avec le groupe d’amitié Maroc-France au Sénat, dont le président, Christian Cambon, est l’uns des fervents défenseurs de l’amitié franco-marocaine.
Anass MACHLOUKH
3 questions à Jawad Kerdoudi
« Une visite d’Etat d’Emmanuel Macron au Maroc permettra de donner un nouvel élan aux relations bilatérales »
Jawad Kerdoudi, président de l’Institut marocain des relations internationales (IMRI), a répondu à nos questions sur le futur des relations franco-marocaines après la réélection d’Emmanuel Macron.
- Qu’aurait été l’impact de l’élection de Marine Le Pen sur les relations franco-marocaines ?
- D’abord, j’estime que la victoire de Macron est une bonne nouvelle pour le Maroc. Marine Le Pen aurait provoqué des problèmes majeurs pour la communauté marocaine en France, surtout en ce qui concerne le droit du sol et les libertés religieuses. En appliquant son programme, elle aurait créé une atmosphère délétère dans les relations avec le Maroc qui serait obligé de réagir ne serait-ce que politiquement.
- Maintenant qu’Emmanuel Macron est réélu, comment voyez-vous le futur des relations de l’axe Paris-Rabat ?
- Il faut d’abord rappeler que la France a été parmi les premiers soutiens de l’initiative d’autonomie pour le Sahara à l’ONU. Maintenant, la France est appelée à faire plus et prendre une position plus audacieuse surtout qu’elle préside actuellement l’Union Européenne. C’est une très bonne occasion pour le Maroc pour obtenir le soutien de l’UE au plan d’autonomie par l’entremise de la France. Mais, ce sera évidemment difficile de convaincre Emmanuel Macron qui demeure à mon avis soucieux de ne pas froisser l’Algérie.
La question mémorielle montre à quel point il est paralysé par le sentiment de culpabilité lié à la colonisation. Donc, il faut faire du lobbying et il est préférable d’oeuvrer à organiser une visite d’Etat d’Emmanuel Macron au Maroc, ce qui ne fut pas le cas des deux visites précédentes. J’ajoute que l’octroi du projet de TGV Agadir- Marrakech à la France permettra de renforcer la confiance et de donner un nouvel élan aux relations bilatérales.
- L’ascension économique du Maroc en Afrique risque-t-elle d’envenimer ses relations avec la France ?
- Effectivement, il existe une concurrence, bien qu’occulte, entre les deux pays sur le marché africain. Mais, il faut être subtile dans ce genre de situation pour que cela n’envenime pas les relations sur le plan politique. D’ailleurs, les solutions existent, les deux pays peuvent procéder à des investissements communs qui permettent à l’un et l’autre de trouver des débouchés sans opposition frontale.
- Qu’aurait été l’impact de l’élection de Marine Le Pen sur les relations franco-marocaines ?
- D’abord, j’estime que la victoire de Macron est une bonne nouvelle pour le Maroc. Marine Le Pen aurait provoqué des problèmes majeurs pour la communauté marocaine en France, surtout en ce qui concerne le droit du sol et les libertés religieuses. En appliquant son programme, elle aurait créé une atmosphère délétère dans les relations avec le Maroc qui serait obligé de réagir ne serait-ce que politiquement.
- Maintenant qu’Emmanuel Macron est réélu, comment voyez-vous le futur des relations de l’axe Paris-Rabat ?
- Il faut d’abord rappeler que la France a été parmi les premiers soutiens de l’initiative d’autonomie pour le Sahara à l’ONU. Maintenant, la France est appelée à faire plus et prendre une position plus audacieuse surtout qu’elle préside actuellement l’Union Européenne. C’est une très bonne occasion pour le Maroc pour obtenir le soutien de l’UE au plan d’autonomie par l’entremise de la France. Mais, ce sera évidemment difficile de convaincre Emmanuel Macron qui demeure à mon avis soucieux de ne pas froisser l’Algérie.
La question mémorielle montre à quel point il est paralysé par le sentiment de culpabilité lié à la colonisation. Donc, il faut faire du lobbying et il est préférable d’oeuvrer à organiser une visite d’Etat d’Emmanuel Macron au Maroc, ce qui ne fut pas le cas des deux visites précédentes. J’ajoute que l’octroi du projet de TGV Agadir- Marrakech à la France permettra de renforcer la confiance et de donner un nouvel élan aux relations bilatérales.
- L’ascension économique du Maroc en Afrique risque-t-elle d’envenimer ses relations avec la France ?
- Effectivement, il existe une concurrence, bien qu’occulte, entre les deux pays sur le marché africain. Mais, il faut être subtile dans ce genre de situation pour que cela n’envenime pas les relations sur le plan politique. D’ailleurs, les solutions existent, les deux pays peuvent procéder à des investissements communs qui permettent à l’un et l’autre de trouver des débouchés sans opposition frontale.
Recueillis par A. M.