« Il y a une sorte de paradoxe que l’on n’arrive pas à comprendre : on tarde encore à saisir pleinement les opportunités qu’offre le recyclage des déchets, alors que nous en avons les capacités ». Cette déclaration d’étonnement est de Mohamed Tahiri, expert international en bioénergie, eau et environnement. A l’instar de l’ensemble des acteurs de la filière du recyclage au Maroc, il alerte sur la double perte que le Royaume est en train d’accumuler en prenant du retard sur le recyclage : pollution et manque à gagner financier. Si les impacts environnementaux des déchets inertes, domestiques et industriels ne sont plus à démontrer, on s’interroge tout de même sur le gisement d’opportunités que leur traitement offre à l’économie, mais qui demeure jusque-là presque inexploité.
60.000 emplois
« Il est aujourd’hui difficile de dégager des estimations financières sur ce que peut représenter le recyclage, mais une chose est sûre : si on y investit 1 DH, on gagne au minimum 5 DH », poursuit notre interlocuteur, également professeur à l’Université Hassan II de Casablanca. Pour sa part, Touria Sbiri, présidente de la Fédération des recycleurs, collecteurs et chineurs au Maroc (FEDERCC), est plus formelle : « On peut créer plus de 60.000 emplois avec le recyclage, à travers les 12 filières identifiées. Et ce sont des emplois qui ne nécessitent pas énormément de formation et qui peuvent avoir un impact social considérable ».
A l’heure où le recyclage permet de produire de l’électricité, mais aussi des carburants, les opérateurs de la filière en appellent à plus d’intérêt sur leur contribution pour améliorer la situation économique dans la conjoncture actuelle. « Le Maroc dispose du savoir-faire nécessaire pour faire émerger sa propre industrie dans le recyclage des déchets. Nous faisons surtout face à un problème d’investissements et, dans une certaine mesure, à des freins liés à l’application de nos politiques en la matière », note Mohamed Tahiri.
Informel
Au Maroc, tirer pleinement profit du potentiel du recyclage passe par plusieurs étapes : réussir le tri des déchets, leur traitement et leur réutilisation. A l’heure actuelle, les rares exemples à citer au niveau national sont localisés à Fès et à Oujda.
Dans cette dernière ville, un opérateur a même réussi la prouesse de transformer les déchets en électricité, qu’il revend à l’Office national de l’électricité et de l’eau potable (ONEE). Sur un autre volet, l’Etat est appelé à avancer dans le sens de la réglementation du secteur informel. « En ville, le tri existe, mais il est formel sur pratiquement tout le circuit. Ce n’est qu’au niveau du transformateur que l’on entre dans le formel », observe Touria Sbiri. D’autres actions sont également nécessaires dans l’appui à l’innovation et l’encouragement des centres de recherches et Universités pour qu’ils contribuent à la mise en oeuvre de la stratégie de valorisation des déchets.
Programme national
Ces actions pourront être de nature à augmenter considérablement le taux de collecte et de traitement des déchets. Selon les officiels, le taux de traitement des déchets industriels dépasse à peine 13%, alors que l’objectif est de porter ce niveau à 40% dans les prochaines années.
En revanche, des efforts considérables ont été faits pour atteindre une augmentation du taux de collecte professionnalisée à 90%, contre 44% en 2008, alors que la progression du taux de mise en décharges contrôlées et Centres d’enfouissement et de valorisation (CEV) est actuellement de 62,63% des déchets ménagers produits, contre 10% avant 2008.
Toujours selon les chiffres communiqués par les services de la protection de l’environnement, le nombre actuel des décharges contrôlées et de CEV est de 26, tandis que celui des décharges réhabilitées s’élève à 66. Enfin, pour sa part, le Programme National des Déchets Ménagers (PNDM) a mobilisé des investissements de près de 21 MMDH à fin 2021, alors que le volume des déchets ménagers s’élève à 6 millions de tonnes par an.
60.000 emplois
« Il est aujourd’hui difficile de dégager des estimations financières sur ce que peut représenter le recyclage, mais une chose est sûre : si on y investit 1 DH, on gagne au minimum 5 DH », poursuit notre interlocuteur, également professeur à l’Université Hassan II de Casablanca. Pour sa part, Touria Sbiri, présidente de la Fédération des recycleurs, collecteurs et chineurs au Maroc (FEDERCC), est plus formelle : « On peut créer plus de 60.000 emplois avec le recyclage, à travers les 12 filières identifiées. Et ce sont des emplois qui ne nécessitent pas énormément de formation et qui peuvent avoir un impact social considérable ».
A l’heure où le recyclage permet de produire de l’électricité, mais aussi des carburants, les opérateurs de la filière en appellent à plus d’intérêt sur leur contribution pour améliorer la situation économique dans la conjoncture actuelle. « Le Maroc dispose du savoir-faire nécessaire pour faire émerger sa propre industrie dans le recyclage des déchets. Nous faisons surtout face à un problème d’investissements et, dans une certaine mesure, à des freins liés à l’application de nos politiques en la matière », note Mohamed Tahiri.
Informel
Au Maroc, tirer pleinement profit du potentiel du recyclage passe par plusieurs étapes : réussir le tri des déchets, leur traitement et leur réutilisation. A l’heure actuelle, les rares exemples à citer au niveau national sont localisés à Fès et à Oujda.
Dans cette dernière ville, un opérateur a même réussi la prouesse de transformer les déchets en électricité, qu’il revend à l’Office national de l’électricité et de l’eau potable (ONEE). Sur un autre volet, l’Etat est appelé à avancer dans le sens de la réglementation du secteur informel. « En ville, le tri existe, mais il est formel sur pratiquement tout le circuit. Ce n’est qu’au niveau du transformateur que l’on entre dans le formel », observe Touria Sbiri. D’autres actions sont également nécessaires dans l’appui à l’innovation et l’encouragement des centres de recherches et Universités pour qu’ils contribuent à la mise en oeuvre de la stratégie de valorisation des déchets.
Programme national
Ces actions pourront être de nature à augmenter considérablement le taux de collecte et de traitement des déchets. Selon les officiels, le taux de traitement des déchets industriels dépasse à peine 13%, alors que l’objectif est de porter ce niveau à 40% dans les prochaines années.
En revanche, des efforts considérables ont été faits pour atteindre une augmentation du taux de collecte professionnalisée à 90%, contre 44% en 2008, alors que la progression du taux de mise en décharges contrôlées et Centres d’enfouissement et de valorisation (CEV) est actuellement de 62,63% des déchets ménagers produits, contre 10% avant 2008.
Toujours selon les chiffres communiqués par les services de la protection de l’environnement, le nombre actuel des décharges contrôlées et de CEV est de 26, tandis que celui des décharges réhabilitées s’élève à 66. Enfin, pour sa part, le Programme National des Déchets Ménagers (PNDM) a mobilisé des investissements de près de 21 MMDH à fin 2021, alors que le volume des déchets ménagers s’élève à 6 millions de tonnes par an.
Abdellah MOUTAWAKIL
Repères
Traitement des déchets : intégrer l’informel
S’il y a une activité où l’informel est omniprésent, c’est bien dans le tri et le traitement des déchets. C’est pour cela que la Fédération des recycleurs, collecteurs et chineurs au Maroc (FEDERCC) ambitionne de les impliquer dans le circuit formel. Une tâche qui n’est pas des plus faciles et qui requiert une action concertée avec les pouvoirs publics et les chineurs eux-mêmes. « Notre vocation est de conseiller et d’accompagner sur tout ce qui peut contribuer à protéger l’environnement, à commencer par les personnes qui y sont actives », indique la présidente de la FEDERCC, Touria Sbiri.
RWM Expo : un Salon pour encourager le recyclage
C’est une première qui a eu lieu fin juin dernier à Tanger. Il s’agit de la première édition du Salon international de recyclage et gestion des déchets «RWM Expo». Pour les professionnels, c’était une vitrine pour faire entendre leur voix et sensibiliser sur les opportunités de leur secteur. Selon son organisateur, Mohamed Moudarir, cette première expérience était d’une grande importance, non seulement pour la région du Nord, mais également au niveau national pour attirer l’attention sur l’urgence de donner un coup de pouce au recyclage.
L’info...Graphie
COVAD
Trois pistes pour la valorisation des déchets
Au lendemain de la première vague du Covid marquée par le confinement total de la population, la Coalition pour la valorisation des déchets (COVAD) a appelé l’industrie du recyclage à se repositionner à travers trois pistes.
La première est de se rendre compte de l’importance stratégique de l’industrie locale, appelée à renforcer sa compétitivité, augmenter ses investissements et créer davantage de valeur ajoutée sur le plan économique et social.
La deuxième porte sur la conversion et l’intégration du secteur informel, prédominant et compétitif au sein des industries de ce secteur.
Enfin, la troisième, selon la COVAD, « repose principalement sur cette nouvelle malléabilité du citoyen marocain ». Ce pilier important a pour finalité de « changer les habitudes des consommateurs et leur rapport aux déchets ». « La crise actuelle c’est aussi de nouvelles leçons, opportunités et facteurs de succès pour l’émergence des filières de gestion et de valorisation des déchets », croit fermement Youssef Chaqor, président de la Commission filières de valorisation au sein de la COVAD.
Recyclage
Que produit-on avec les déchets ?
Avec le développement technologique, il est désormais possible de tirer énormément de produits à travers le recyclage. D’abord, dans le secteur industriel, le recyclage des déchets dans l’aciérie offre énormément d’opportunités dans la transformation des produits. C’est également le cas avec le plastique qui permet même de créer des hydrocarbures.
A ce propos, des tentatives ont été menées au Maroc depuis plus d’une décennie, mais les expériences n’ont pas pu se concrétiser en raison de plusieurs obstacles, notamment financiers. Quant aux autres métaux, ils servent, une fois recyclés, dans la fabrication de divers appareils comme les téléphones portables entre autres outils. « Le vrai problème se trouve au niveau des déchets ménagers », note Mohamed Tahiri, expert international en bioénergie, eau et environnement. Mais là aussi, avance-t-il, plusieurs exemples de pays européens peuvent inspirer. Puisqu’avec la biomasse, rien n’est perdu dans ce sens.
D’ailleurs, au Maroc, plusieurs investisseurs, notamment allemands, ont fait de la biomasse leur cible privilégiée dans le recyclage. In fine, fait-on savoir dans l’univers du recyclage, les déchets ménagers et industriels ne doivent plus être considérés comme un poids pesant sur les budgets de l’Etat et des collectivités locales, mais plutôt comme une source de revenus et d’emplois, en tant que composante essentielle de l’économie circulaire et verte, source d’énergie.
A ce propos, des tentatives ont été menées au Maroc depuis plus d’une décennie, mais les expériences n’ont pas pu se concrétiser en raison de plusieurs obstacles, notamment financiers. Quant aux autres métaux, ils servent, une fois recyclés, dans la fabrication de divers appareils comme les téléphones portables entre autres outils. « Le vrai problème se trouve au niveau des déchets ménagers », note Mohamed Tahiri, expert international en bioénergie, eau et environnement. Mais là aussi, avance-t-il, plusieurs exemples de pays européens peuvent inspirer. Puisqu’avec la biomasse, rien n’est perdu dans ce sens.
D’ailleurs, au Maroc, plusieurs investisseurs, notamment allemands, ont fait de la biomasse leur cible privilégiée dans le recyclage. In fine, fait-on savoir dans l’univers du recyclage, les déchets ménagers et industriels ne doivent plus être considérés comme un poids pesant sur les budgets de l’Etat et des collectivités locales, mais plutôt comme une source de revenus et d’emplois, en tant que composante essentielle de l’économie circulaire et verte, source d’énergie.
3 questions à Touria Sbiri
« L’industrie du recyclage est installée »
Pour Touria Sbiri, Présidente de la Fédération des recycleurs, collecteurs et chineurs au Maroc (FEDERCC), le Royaume dispose du nécessaire pour activer une industrie du recyclage. Elle appelle à miser sur ce savoir-faire local.
- Peut-on dire que les activités de recyclage des déchets au Maroc sont vraiment existantes ?
- Sur la partie industrielle, je peux dire que l’industrie du recyclage est installée. Cela, d’autant plus que l’environnement réglementaire tend à obliger l’industriel à s’adapter. Donc, il est obligé de recycler ses déchets. Dans la ville, le tri existe, mais il est formel sur pratiquement tout le circuit. Ce n’est qu’au niveau du transformateur que l’on entre dans le formel.
- Quelles sont les opportunités économiques qu’offre le recyclage ?
- Au-delà du nombre d’emplois qu’il est possible de créer, les opportunités sont énormes. Avec le recyclage, nous pouvons désormais décarboner notre industrie de production, surtout dans le contexte de l’entrée prochaine de la taxe carbone dans l’espace européen. Cela va nous éviter d’importer certaines matières, ainsi que la pollution et le coût lié à leur transport. Le Maroc a du potentiel et il le fait valoir. Aussi bien au niveau industriel qu’en termes d’ingénierie et de créativité, le Maroc arrive à se distinguer. La preuve est qu’une Marocaine a récemment remporté un grand Prix international devant 400 autres compétiteurs !
- Quelles sont vos attentes vis-à-vis des pouvoirs publics pour mieux développer votre secteur ?
- Nous pensons qu’il faut vraiment veiller à l’application des lois, en plus d’une certaine volonté. Cela nous permettrait d’aller de l’avant. Aujourd’hui, le Maroc s’est affranchi de l’Europe sur plusieurs aspects liés à la technologie. De ce fait, il faut faire confiance à notre expertise locale. Et sur ce point, je sais que nous pouvons compter sur notre ministre de l’Industrie, qui est très conscient de ces enjeux.
- Peut-on dire que les activités de recyclage des déchets au Maroc sont vraiment existantes ?
- Sur la partie industrielle, je peux dire que l’industrie du recyclage est installée. Cela, d’autant plus que l’environnement réglementaire tend à obliger l’industriel à s’adapter. Donc, il est obligé de recycler ses déchets. Dans la ville, le tri existe, mais il est formel sur pratiquement tout le circuit. Ce n’est qu’au niveau du transformateur que l’on entre dans le formel.
- Quelles sont les opportunités économiques qu’offre le recyclage ?
- Au-delà du nombre d’emplois qu’il est possible de créer, les opportunités sont énormes. Avec le recyclage, nous pouvons désormais décarboner notre industrie de production, surtout dans le contexte de l’entrée prochaine de la taxe carbone dans l’espace européen. Cela va nous éviter d’importer certaines matières, ainsi que la pollution et le coût lié à leur transport. Le Maroc a du potentiel et il le fait valoir. Aussi bien au niveau industriel qu’en termes d’ingénierie et de créativité, le Maroc arrive à se distinguer. La preuve est qu’une Marocaine a récemment remporté un grand Prix international devant 400 autres compétiteurs !
- Quelles sont vos attentes vis-à-vis des pouvoirs publics pour mieux développer votre secteur ?
- Nous pensons qu’il faut vraiment veiller à l’application des lois, en plus d’une certaine volonté. Cela nous permettrait d’aller de l’avant. Aujourd’hui, le Maroc s’est affranchi de l’Europe sur plusieurs aspects liés à la technologie. De ce fait, il faut faire confiance à notre expertise locale. Et sur ce point, je sais que nous pouvons compter sur notre ministre de l’Industrie, qui est très conscient de ces enjeux.
Recueillis par A. M.