L’alerte a été donnée, dès le 2 janvier, par l’association Anafis qui, depuis plusieurs années, s’active dans la protection et la promotion des valeurs écologiques de la zone humide de Oued Sakia El Hamra dans la région de Laâyoune. Dans les publications diffusées par l’association dans les réseaux sociaux, plusieurs photos qui montrent une partie de la zone humide désormais sous les gravas. « La zone concernée est située aux abords d’un des anciens quartiers de la ville de Laâyoune. Lors de notre mission de recensement annuel des oiseaux, nous avons constaté que des travaux de terrassement ont été effectués à ce niveau », témoigne Dr Abdeljabbar Qninba, secrétaire général du Groupe de Recherche pour la Protection des Oiseaux au Maroc (GREPOM/BirdLife Maroc) qui était sur place mardi 5 décembre. Les membres de l’association Anafis, qui contribuent au recensement annuel avec le GREPOM, ont pris connaissance de ces travaux il y a quelques jours lors d’une mission de terrain qui avait pour objectif de vérifier un signalement relatif à une mortalité des poissons dans cette partie semi-urbaine de la zone humide.
Manque d’information
Classé en 2019 en tant que zone humide RAMSAR, le site dans sa globalité s’étend sur près de 25 kilomètres. « La partie qui a été terrassée a une superficie équivalente à un peu moins de 100 M² environ. Cela dit, le plus surprenant est qu’il n’y ait aucune indication sur l’objectif de ces travaux ou encore sur l’entité qui les réalise », confie pour sa part M. Salek Kharraj, secrétaire général d’Anafis. La parcelle en question est située non loin d’un pont en cours de construction. Les membres d’Anafis excluent cependant que les gravas proviennent de ce chantier qu’ils qualifient de « nécessaire et structurant ». « Selon nos sources, les matériaux utilisés pour remblayer le site proviendraient de plusieurs autres chantiers de la région », confie M. Kharraj qui tient à préciser que les gravas n’ont pas été « jetés sauvagement, mais ont été compactés et aménagés de manière à terrasser le terrain ». En l’absence d’informations suffisantes, les environnementalistes d’Anafis craignent que les travaux se prolongent jusqu’à toucher les zones de nidification des oiseaux qui sont situées à proximité.
Une zone humide précieuse
Les espaces inclus dans la délimitation du classement RAMSAR de la zone sont pourtant vitaux pour le maintien de la biodiversité. « Oued Sakia El Hamra est situé au cœur du désert. Il constitue une étape importante pour les oiseaux migrateurs, car il est situé dans le couloir atlantique que l’avifaune emprunte pour migrer », souligne Dr Imad Cherkaoui, ornithologue et enseignant chercheur à l’université Moulay Slimane de Khénifra. « Il existe sur place plusieurs espèces patrimoniales qui hivernent ou se reproduisent sur place.
Pour les migrateurs, c’est une étape incontournable, car le site est la seule zone humide d’eau douce dans un très vaste périmètre.
Les oiseaux migrateurs doivent parcourir des centaines de kilomètre vers le Nord ou vers le Sud avant de trouver un autre site où ils peuvent se reposer », explique l’ornithologue qui estime que les travaux qui ont été réalisés « peuvent constituer un préjudice pour l’avifaune alors que le Royaume s’est engagé à protéger ce site en le classant parmi les zones humides RAMSAR.
Un site déjà vulnérable
Oued Sakia El Hamra connaît par ailleurs un phénomène inquiétant depuis quelques années déjà. « Les ornithologues et la société civile active dans la région ont remarqué une mortalité importante parmi les oiseaux dans la zone humide. Le Département des Eaux et Forêts a réalisé une enquête pour chercher les explications probables de cette mortalité, mais les résultats n’ont pas encore été diffusés, ce qui fait que le phénomène inquiétant reste encore inexpliqué », confie Dr Cherkaoui. À ce stade, les scientifiques et l’association Anafis espèrent que toute la lumière sera faite sur les travaux réalisés dans la partie urbaine de l’Oued. « La protection de la biodiversité de cette zone incombe certes au Département des Eaux et Forêts, mais d’autres institutions sont également concernées, notamment le ministère de l’Aménagement du Territoire ou encore le secrétariat de l’Environnement. Les efforts doivent à cet égard être conjugués pour préserver cette zone patrimoniale, d’autant plus que son classement implique également un engagement du Royaume à l’international », résume Dr Imad Cherkaoui.
Manque d’information
Classé en 2019 en tant que zone humide RAMSAR, le site dans sa globalité s’étend sur près de 25 kilomètres. « La partie qui a été terrassée a une superficie équivalente à un peu moins de 100 M² environ. Cela dit, le plus surprenant est qu’il n’y ait aucune indication sur l’objectif de ces travaux ou encore sur l’entité qui les réalise », confie pour sa part M. Salek Kharraj, secrétaire général d’Anafis. La parcelle en question est située non loin d’un pont en cours de construction. Les membres d’Anafis excluent cependant que les gravas proviennent de ce chantier qu’ils qualifient de « nécessaire et structurant ». « Selon nos sources, les matériaux utilisés pour remblayer le site proviendraient de plusieurs autres chantiers de la région », confie M. Kharraj qui tient à préciser que les gravas n’ont pas été « jetés sauvagement, mais ont été compactés et aménagés de manière à terrasser le terrain ». En l’absence d’informations suffisantes, les environnementalistes d’Anafis craignent que les travaux se prolongent jusqu’à toucher les zones de nidification des oiseaux qui sont situées à proximité.
Une zone humide précieuse
Les espaces inclus dans la délimitation du classement RAMSAR de la zone sont pourtant vitaux pour le maintien de la biodiversité. « Oued Sakia El Hamra est situé au cœur du désert. Il constitue une étape importante pour les oiseaux migrateurs, car il est situé dans le couloir atlantique que l’avifaune emprunte pour migrer », souligne Dr Imad Cherkaoui, ornithologue et enseignant chercheur à l’université Moulay Slimane de Khénifra. « Il existe sur place plusieurs espèces patrimoniales qui hivernent ou se reproduisent sur place.
Pour les migrateurs, c’est une étape incontournable, car le site est la seule zone humide d’eau douce dans un très vaste périmètre.
Les oiseaux migrateurs doivent parcourir des centaines de kilomètre vers le Nord ou vers le Sud avant de trouver un autre site où ils peuvent se reposer », explique l’ornithologue qui estime que les travaux qui ont été réalisés « peuvent constituer un préjudice pour l’avifaune alors que le Royaume s’est engagé à protéger ce site en le classant parmi les zones humides RAMSAR.
Un site déjà vulnérable
Oued Sakia El Hamra connaît par ailleurs un phénomène inquiétant depuis quelques années déjà. « Les ornithologues et la société civile active dans la région ont remarqué une mortalité importante parmi les oiseaux dans la zone humide. Le Département des Eaux et Forêts a réalisé une enquête pour chercher les explications probables de cette mortalité, mais les résultats n’ont pas encore été diffusés, ce qui fait que le phénomène inquiétant reste encore inexpliqué », confie Dr Cherkaoui. À ce stade, les scientifiques et l’association Anafis espèrent que toute la lumière sera faite sur les travaux réalisés dans la partie urbaine de l’Oued. « La protection de la biodiversité de cette zone incombe certes au Département des Eaux et Forêts, mais d’autres institutions sont également concernées, notamment le ministère de l’Aménagement du Territoire ou encore le secrétariat de l’Environnement. Les efforts doivent à cet égard être conjugués pour préserver cette zone patrimoniale, d’autant plus que son classement implique également un engagement du Royaume à l’international », résume Dr Imad Cherkaoui.
Oussama ABAOUSS
3 questions à Salek Kharraj, secrétaire général d’Anafis
Salek Kharraj
« C’est dans cette zone que sont situées les fameuses sources qui ont donné leurs noms à la ville »
Secrétaire général d’Anafis, Salek Kharraj a répondu à nos questions sur les travaux réalisés sur une parcelle de Oued Sakia El Hamra et sur l’implication de son association dans la sensibilisation.
- Que fait votre association pour sensibiliser autour des valeurs écologiques de Oued Sakia El Hamra ?
- Nous essayons avec les moyens dont nous disposons de faire de notre mieux pour sensibiliser à l’importance écologique de la zone. Nos membres font des suivis fréquents de la biodiversité et participent également au recensement national des oiseaux mené par le GREPOM. Actuellement, nous sommes en train de travailler sur un projet de guide ornithologique pour enfants afin de le diffuser dans les milieux scolaires.
- La zone spécifique qui a été remblayée est-elle fréquentée par des espèces patrimoniales ?
- Effectivement, cette zone particulière est, selon nos observations sur le terrain, fréquentée par plusieurs espèces rares dont la présence a justifié le classement du site dans son ensemble. À noter aussi que c’est également à proximité de cette zone que sont situées les fameuses sources qui ont donné leurs noms à la ville.
- Avez-vous essayé de savoir comment et pourquoi ces travaux de terrassement ont été réalisés ?
- Il y a plusieurs rumeurs en ville sur ces travaux, mais à ce jour il n’y a aucune information officielle. Si cette zone doit être aménagée pour embellir la ville d’une manière ou d’une autre, nous ne sommes pas contre. Cela dit, la moindre des choses serait de faire une étude d’impact sur l’environnement préalable et une enquête publique pour que les associations et les populations puissent donner leur avis. L’autre point surprenant, c’est que ces travaux se font dans un endroit qui, tôt ou tard, sera submergé par l’Oued. Cela a été prouvé par le passé quand des travaux faits dans des périmètres équivalents ont fini par être détruits par l’Oued.
Secrétaire général d’Anafis, Salek Kharraj a répondu à nos questions sur les travaux réalisés sur une parcelle de Oued Sakia El Hamra et sur l’implication de son association dans la sensibilisation.
- Que fait votre association pour sensibiliser autour des valeurs écologiques de Oued Sakia El Hamra ?
- Nous essayons avec les moyens dont nous disposons de faire de notre mieux pour sensibiliser à l’importance écologique de la zone. Nos membres font des suivis fréquents de la biodiversité et participent également au recensement national des oiseaux mené par le GREPOM. Actuellement, nous sommes en train de travailler sur un projet de guide ornithologique pour enfants afin de le diffuser dans les milieux scolaires.
- La zone spécifique qui a été remblayée est-elle fréquentée par des espèces patrimoniales ?
- Effectivement, cette zone particulière est, selon nos observations sur le terrain, fréquentée par plusieurs espèces rares dont la présence a justifié le classement du site dans son ensemble. À noter aussi que c’est également à proximité de cette zone que sont situées les fameuses sources qui ont donné leurs noms à la ville.
- Avez-vous essayé de savoir comment et pourquoi ces travaux de terrassement ont été réalisés ?
- Il y a plusieurs rumeurs en ville sur ces travaux, mais à ce jour il n’y a aucune information officielle. Si cette zone doit être aménagée pour embellir la ville d’une manière ou d’une autre, nous ne sommes pas contre. Cela dit, la moindre des choses serait de faire une étude d’impact sur l’environnement préalable et une enquête publique pour que les associations et les populations puissent donner leur avis. L’autre point surprenant, c’est que ces travaux se font dans un endroit qui, tôt ou tard, sera submergé par l’Oued. Cela a été prouvé par le passé quand des travaux faits dans des périmètres équivalents ont fini par être détruits par l’Oued.
Recueuillis par O. A
Encadré
Laâyoune : Les scientifiques recommandent de restituer une partie des eaux usées traitées à la zone humide
La parcelle urbaine de la zone humide de Oued Sakia El Hamra qui est concernée par les travaux de terrassement vit également une autre menace : l’assèchement. « Si le site a connu une période où la zone était en partie sèche à cause du manque de précipitations, les inondations qui ont eu lieu en 2016 ont permis à cette parcelle de la zone humide de se recharger en eau », contextualise Salek Kharraj, secrétaire général de l’association Anafis.
Depuis cet épisode, les eaux se sont maintenues dans le site et ont permis d’attirer un nombre important d’oiseaux, y compris des espèces très rares comme le tadorne Casarca ou la sarcelle marbrée. Une majeure partie de la recharge hydrique de cette zone se fait cependant par le déversement des eaux usées de la ville. « Ça peut apparaître surprenant, mais les eaux usées qui sont déversées sont, dans leur état actuel, une chose globalement positive pour l’écosystème et pour l’avifaune. Le problème, c’est que ça provoque tout de même des nuisances olfactives pour les habitants avoisinants », explique Dr Abdejabbar Qninba du Groupe de Recherche pour la Protection des Oiseaux au Maroc. « Selon nos sources, la ville va récupérer ces eaux usées pour les traiter puis pour les réutiliser dans l’arrosage des espaces verts, notamment. C’est en soit une très bonne chose, mais si une partie de ces eaux traitées n’est pas reversée dans cette parcelle urbaine de l’oued, ça risque de mettre à mal la pérennité de l’écosystème », souligne Dr Qninba.
La parcelle urbaine de la zone humide de Oued Sakia El Hamra qui est concernée par les travaux de terrassement vit également une autre menace : l’assèchement. « Si le site a connu une période où la zone était en partie sèche à cause du manque de précipitations, les inondations qui ont eu lieu en 2016 ont permis à cette parcelle de la zone humide de se recharger en eau », contextualise Salek Kharraj, secrétaire général de l’association Anafis.
Depuis cet épisode, les eaux se sont maintenues dans le site et ont permis d’attirer un nombre important d’oiseaux, y compris des espèces très rares comme le tadorne Casarca ou la sarcelle marbrée. Une majeure partie de la recharge hydrique de cette zone se fait cependant par le déversement des eaux usées de la ville. « Ça peut apparaître surprenant, mais les eaux usées qui sont déversées sont, dans leur état actuel, une chose globalement positive pour l’écosystème et pour l’avifaune. Le problème, c’est que ça provoque tout de même des nuisances olfactives pour les habitants avoisinants », explique Dr Abdejabbar Qninba du Groupe de Recherche pour la Protection des Oiseaux au Maroc. « Selon nos sources, la ville va récupérer ces eaux usées pour les traiter puis pour les réutiliser dans l’arrosage des espaces verts, notamment. C’est en soit une très bonne chose, mais si une partie de ces eaux traitées n’est pas reversée dans cette parcelle urbaine de l’oued, ça risque de mettre à mal la pérennité de l’écosystème », souligne Dr Qninba.
Repères
La menace du braconnage
Selon GREPOM/BirdLife Maroc et l’association Anafis, la partie urbaine de la zone humide de Oued Sakia El Hamra est également victime d’actes répétitifs de braconnage. « C’est surtout des jeunes qui s’introduisent dans les zones de nidification et qui capturent des oiseaux ou encore détruisent les nids », souligne M. Salek Kharraj, secrétaire général d’Anafis. Les ornithologues demandent à cet égard que les efforts de lutte et de prévention du braconnage soient renforcés au niveau de cette zone.
Absence de signalétiques
« Le site RAMSAR de Oued Sakia El Hamra ne dispose pas de signalétiques ou de panneaux d’information adaptés », confie Salek Kharraj, qui précise que son association - Anafis - a déjà écrit au Département des Eaux et Forêts afin de remédier à cette situation. « Il est nécessaire de consolider le classement de cette zone par les mesures d’informations adéquates pour que les populations et les personnes qui fréquentent la région puissent comprendre l’importance écologique de Oued Sakia El Hamra », insiste-t-il.