« La France augmentera son soutien à la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO) pour restaurer la démocratie dans cette région frappée par de récents coups d'Etat », dixit Catherine Colonna. On peut paraphraser au Mali, au Burkina et au Niger. C’était lors du récent déplacement de la ministre française des Affaires étrangères à Abuja, au Nigeria, avec à la clef la restitution à ce pays des 150 millions de dollars, à peu près, qui étaient gelés en France.
Ladite déclaration remet au goût du jour le débat sur la démocratie en Afrique. Ce vocable qui est aujourd’hui mêlé à toutes les sauces sans que l’on ne sache véritablement ses tenants et ses aboutissants, sans oublier que toutes les guerres sont menées au nom de la démocratie avec des agendas cachés. Il pose également la problématique et lancinante question à savoir : peut-on importer la démocratie ou l’imposer ?
Cette interrogation est légitime quand on prend en filigrane cet autre passage : « A Abuja, Catherine Colonna a déclaré avoir discuté avec son homologue nigérian, Yusuf Tuggar, du soutien à apporter à la CEDEAO pour rétablir l'ordre constitutionnel au Mali, au Burkina Faso et au Niger ». Se fera-t-il de gré ou de force ? Dans tous les cas, le ton est déjà donné.
Comme le souligne Gilles Yabi, du think tank Wathi de l’Afrique de l’Ouest, la question des institutions politiques est fondamentale pour l’avenir de la région et du continent, et que les changements profonds qui doivent intervenir doivent être pensés à partir de l’examen des pratiques politiques réelles, elles-mêmes indissociables des pratiques économiques et des normes sociales.
Ladite déclaration remet au goût du jour le débat sur la démocratie en Afrique. Ce vocable qui est aujourd’hui mêlé à toutes les sauces sans que l’on ne sache véritablement ses tenants et ses aboutissants, sans oublier que toutes les guerres sont menées au nom de la démocratie avec des agendas cachés. Il pose également la problématique et lancinante question à savoir : peut-on importer la démocratie ou l’imposer ?
Cette interrogation est légitime quand on prend en filigrane cet autre passage : « A Abuja, Catherine Colonna a déclaré avoir discuté avec son homologue nigérian, Yusuf Tuggar, du soutien à apporter à la CEDEAO pour rétablir l'ordre constitutionnel au Mali, au Burkina Faso et au Niger ». Se fera-t-il de gré ou de force ? Dans tous les cas, le ton est déjà donné.
Comme le souligne Gilles Yabi, du think tank Wathi de l’Afrique de l’Ouest, la question des institutions politiques est fondamentale pour l’avenir de la région et du continent, et que les changements profonds qui doivent intervenir doivent être pensés à partir de l’examen des pratiques politiques réelles, elles-mêmes indissociables des pratiques économiques et des normes sociales.
Des indicateurs révélateurs
Pour l’illustration, les sondages de l’institut Afrobaromètre sont toujours très intéressants à analyser. Les données provenant de 36 pays sondés en 2021/2022 montrent que les deux tiers (66%) des Africains préfèrent la démocratie à toute autre forme de gouvernement, 78% rejettent les régimes du parti unique et 67% les régimes militaires. Près de 65% approuvent le principe du contrôle parlementaire du président, 67% la liberté des médias et 73% approuvent la limitation du nombre de mandats présidentiels.
Et ce n’est pas tout, car qu’il faut retenir, aussi, que seuls 38% des sondés se disent satisfaits du fonctionnement de la démocratie dans leur pays. Ils ne sont que 30% à penser que leur gouvernement fait un travail adéquat pour lutter contre la corruption. On ne peut s’empêcher de dire que ces données sont contrastées et établissent un parallèle entre les institutions et les systèmes de gouvernance.
La statistique, peut-être la plus importante à garder en tête, est que 53% des Africains sont disposés à approuver l’intervention des militaires, autrement dit des coups d’État, si les dirigeants élus abusent de leur pouvoir. Dans la tranche d’âge des jeunes adultes de 18 à 35 ans, ce chiffre monte à 56%, contre 48% pour les plus de 55 ans. Ce qui explique le lien direct entre la maturité politique et le niveau d’appréhension de la population sur la question démocratique.
D’ailleurs, ceux qui pensent que les transitions vers la démocratie sont bloquées au Mali et au Burkina Faso sont en porte à faux avec la réalité du terrain car ces trois régimes sont soutenus par leurs populations. En outre, au Niger, les autorités au pouvoir ont rejeté les demandes de la CEDEAO de rétablir immédiatement l'ordre constitutionnel, et insistent sur la mise en place d'une période transitoire de trois ans maximum. La CEDEAO a imposé des sanctions au Niger et a menacé d'intervenir militairement si nécessaire.
Mais depuis lors plus rien. L’option militaire n’est plus à l’ordre car le risque d’embrasement du Sahel est grand. Sans oublier qu’une intervention militaire n’a jamais instauré la paix. Les cas sont légion notamment en Libye, en Irak, en Afghanistan... Pourtant, force est de constater que ces dernières années, l’Afrique a connu aussi bien des progrès démocratiques encourageants.
Les systèmes politiques
Au nombre des signes encourageants figurent la réussite de l’élection présidentielle de 2021 en Gambie, la transition en 2021 du parti au pouvoir en Zambie et les premiers transferts de pouvoir démocratiques au Niger (2020/2021) et aux Seychelles (2020). Nous pouvons ajouter la décision prise en février 2020 par la Cour Constitutionnelle du Malawi d’annuler les résultats de l’élection présidentielle irrégulière de 2019 et d’appeler à une nouvelle élection.
Cependant, l’autre propos de Kolonna pousse à la réflexion sur les intentions réelles de la France et de la CEDEAO concernant le Niger puisque les cas burkinabé et malien sont déjà consommés. « Nous constatons que les calendriers de transition n'ont pas été respectés et que l'insécurité s'aggrave. Nous devons faire mieux et nous serons là pour soutenir les efforts de la CEDEAO. La situation ne peut pas rester en l'état sans nuire à l'avenir des populations », dit-elle.
Des indices qui ne laissent pas présager un lendemain apaisé. Car la CEDEAO, tiraillée entre l’intransigeance, les agendas cachés et les réalités du terrain, doit peser le pour et le contre avant d’intervenir militairement dans un pays de la sous-région. Il en va de la stabilité dans l’espace de la CEDEAO et le Sahel.
En effet, plutôt que de faire croire aux jeunes africains que la démocratie dans son essence est le problème, on devrait travailler avec eux à la construction de systèmes politiques démocratiques efficaces qu’exige la complexité des défis auxquels notre partie du monde est confrontée.
Wolondouka SIDIBE