L'Opinion : Que signifiera concrètement l'entrée en vigueur de la convention BEPS pour les MRE ?
Pr. Chehibi: Il faut rappeler que la convention BEPS est un cadre multilatéral érigé par l’OCDE afin d’éviter le transfert artificiel de bénéfices vers des destinations dont la fiscalité est nulle ou peu élevée, causant un manque à gagner fiscal pour les pays où l’activité économique est effectivement établie. Ainsi, les personnes installées à l’étranger, comme les MRE, dont l’activité économique ou professionnelle est basée dans leurs pays de résidence, ne sont pas visés directement par cet instrument, car ils ne sont pas considérés comme des résidents fiscaux au Maroc.
L'Opinion : Le ministère des Finances a, dans un communiqué, démenti toute automatisation des échanges d'informations concernant les non résidents, pensez-vous que le Maroc a les moyens de s'opposer frontalement à ce type d'instruments ?
Pr. Chehibi: La convention BEPS n’apporte pas de nouveauté sur ce point. Le Maroc a déjà un certain nombre de conventions fiscales avec ses partenaires, portant par exemple sur l’élimination des doubles impositions et sur l’assistance administrative en matière fiscale. Dans ce sens, l’échange de renseignements peut être demandé, mais, comme souligné par le communiqué du ministère, cela n’est pas automatique. Chaque État est souverain dans la communication de ses renseignements. Ceci dit, les contribuables sont responsables de leurs déclarations, notamment pour les comptes bancaires tenus à l’étranger, qui, de toutes les manières, ne sont pas imposables en vertu des conventions qui empêchent la double imposition.
L'Opinion : L'entrée en vigueur de la convention BEPS peut-elle altérer les transferts de fonds des MRE et leurs investissements dans leurs villes et régions d'origine ?
Pr. Chehibi: Il faut rappeler que ces conventions ont pour vocation de protéger les contribuables des ponctions fiscales injustes, à l’image de la double imposition. Ainsi, les transferts des MRE ne sont aucunement menacés, puisqu’ils proviennent de revenus préalablement imposables dans les pays de résidence. De plus, les bénéficiaires de ces transferts sont principalement les proches de ces personnes. Concernant les investissements, les MRE sont protégés par les conventions fiscales que le Maroc a contractées avec leurs pays de résidence et doivent respecter les dispositions qui sont propres à chaque pays.
Recueillis par A. A.