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Culture

Archives : Appréciations d’antan


Rédigé par Anis HAJJAM le Dimanche 27 Février 2022

Dans les années 1960 et 1970, Ahmed Cherkaoui (disparu en 1967) et Hossein Tallal font partie des très rares plasticiens marocains reconnus par les critiques français. Voici deux exemples concernant le second.



Sans titre, années 1960, huile sur panneau, 77 x 56 cm.
Sans titre, années 1960, huile sur panneau, 77 x 56 cm.
Une très étrange beauté

Dimanche, l’un des meilleurs peintres marocains qui soient, Hossein Tallal, né à Chtouka voilà vingt-cinq ans, expose à la galerie La Roue ses dernières oeuvres. Elles sont à mille lieues de ce qu’on fait habituellement dans le petit monde artistique de Casablanca, Rabat ou Marrakech, elles sont par rapport aux peintures excellentes d’ailleurs, d’un Cherkaoui, le premier cri peut-être vers la liberté de l’inspiration, celle de figurer le visage de I’ homme. Ira-t-on parler devant l’art d’Hossein Tallal de l’influence expressionniste, c’est fort possible et pourtant je n’y crois pas, ce n’est pas une influence qui guide le peintre mais le besoin de briser le mur du non-humain, le besoin de pousser un cri fraternel, une plainte aussi.

Les tableaux réunis ici sont d’une très étrange beauté. Je ne sais pas pourquoi ils m’ont fait penser à William Blake, mais c’est ainsi et je n’y peux rien. Même pas une tentative d’explication.


Jean Bouret, critique d’art,
17 mai 1967, in Les Lettres Françaises.


 
L’oeuvre lui sert de miroir

Ce peintre si réservé a souvent été salué par la critique étrangère et René Huyghe le mentionne dans «Les Arts, dans le monde» (Larousse, édit. 1971), distinction assez rare pour qu’on la souligne. La peinture de Tallal est une peinture d’évasion aux frontières de l’art figuratif, une interprétation subjective de la réalité objective, et le spectateur, en abordant son oeuvre, doit savoir qu’il va vers la rencontre de cette vision. Sinon, il ne peut la comprendre.

La vie de l’artiste est un long combat, celui que tout homme doit mener pour atteindre la vérité. C’est une entreprise pénible pour chacun, mais l’artiste a l’avantage de se refléter dans son oeuvre, de se voir murir et se développer, avec un certain recul. La personnalité qu’il veut devenir, la liberté à laquelle il aspire, se matérialisent ainsi en dehors de lui-même. L’oeuvre lui sert de miroir.

Tallal fera encore probablement, bien des expériences, mais on peut assurer qu’elles seront sincères et que jamais la mode ne le guidera. Un artiste n’est pas maitre de diriger son oeuvre comme il l’entend, c’est sa souffrance qui le mène. Il ne peut que la suivre où elle l’entraîne, et c’est sa grandeur de nous la faire partager.


Denise Ex-Dyvorne, critique d’art,
années 1970, in La Vigie Marocaine



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