Quelques semaines après le vote de la loi sur l’usage thérapeutique du cannabis, le rapport de la Commission spéciale sur le modèle de développement (CSMD) - nouveau cadre de diffusion des futures normes juridiques au Maroc – a mis en exergue l’intérêt de sa légalisation pour les usages médicaux et industriels au Maroc, afin de promouvoir la culture du cannabis dont le potentiel économique s’avère prometteur.
L’usage du cannabis à des fins médicales et industrielles aura un impact économique favorable pour le pays et pour les cultivateurs. A l’instar du marché mondial du cannabis médical qui connaît une croissance de près de 20% par an, et devrait atteindre 57 milliards de dollars en 2026, le Maroc pourrait récolter quelque 100 milliards de dirhams de revenus du cannabis thérapeutique à l’horizon 2023, selon un rapport de l’institut Prohibition Partners.
Toutefois, si la nouvelle loi a été accueillie à bras ouverts au niveau national et international par un grand nombre de spécialistes, d’autres, au contraire, s’y opposent, énumérant les dangers que pourraient engendrer les usages thérapeutiques de cette plante. C’est notamment le cas pour la dernière étude parue dans BMC Cardiovascular Disorders, associant le cannabis médical à une hausse de 44% du risque de problèmes cardiovasculaires graves.
L’étude ne permet pas d’établir de lien de cause à effet entre le cannabis médical et les problèmes cardiovasculaires, mais elle appelle à la prudence, commente Arsène Zongo, un des chercheurs qui ont élaboré cette étude, rappelant qu’il n’existe pas encore de démonstration scientifique de l’efficacité du cannabis médical pour la grande majorité des conditions pour lesquelles il est prescrit.
L’usage du cannabis médical n’est pas sans risque, c’est ce qui ressort de ladite étude. «Considérant le peu de preuves scientifiques démontrant l’efficacité du cannabis médical, il est important que les médecins évaluent bien les bénéfices et les risques avant d’en prescrire à leurs patients, souligne le professeur Zongo. Il serait hasardeux d’en prescrire à des personnes qui ont des problèmes cardiaques connus sans assurer un suivi très serré de ces patients ».
De son côté, Docteur Tayeb Hamdi, médecin, chercheur en politiques et systèmes de santé, Président du Syndicat National de Médecine Générale, Vice-Président de la Fédération Nationale de la Santé, considère que cette plante ouvre de nouvelles voies thérapeutiques innovantes dans le traitement de plusieurs pathologies. « Elle ne devrait donc pas être vue comme une menace ou une compétition, mais une piste thérapeutique à explorer», déclare-t-il, appelant à multiplier les recherches scientifiques pour comprendre davantage les tenants et les aboutissants de cette pratique florissante au Maroc.
Malgré les progrès des recherches pharmacologiques et le développement que connaît le monde des médicaments, il reste encore place pour de nouvelles substances, soit parce que certaines substances actives sont assez mal tolérées, ou, au contraire, entraînent l’accoutumance, soit à cause de l’apparition de nouveaux syndromes ou de souches microbiennes résistantes, ou encore parce que l’on est jusque-là désarmé contre un certain nombre de maladies.
«Le marché des médicaments avait besoin de nouvelles substances et de nouveaux médicaments, le cannabis pourrait ainsi apporter des solutions inédites pour compléter les produits existants, notamment pour traiter des maladies comme la sclérose en plaques, l’Alzheimer, Parkinson, l’asthme, et beaucoup d’autre pathologies », indique le chercheur.
Comprendre les défis auxquels cette industrie est confrontée pourrait aider les laboratoires marocains à déterminer où allouer et investir leur budget, quels programmes et protocoles mettre en place et qui est le meilleur moyen d’obtenir une visibilité globale sur tous les aspects de cette plante, ses bienfaits et ses dangers.
« C’est pareil pour l’opium qui est classé comme stupéfiant et son utilisation est très réglementée. C’est une plante qui produit l’héroïne qui a un usage en tant que drogue et qui est interdite, mais elle produit également la morphine qui est un médicament et un dérivé dont la découverte a permis de traiter les douleurs chroniques. Et ce sera le cas également pour le cannabis, les recherches scientifiques devraient décortiquer les composantes de cette plante pour découvrir ses bienfait sans la condamner ».
Une condamnation liée à son usage en tant que drogue pendant très longtemps, «ce qui a retardé l’exploration de son côté médical, maintenant il est temps de cadrer sa culture, sa transformation et son usage».
L’usage du cannabis à des fins médicales et industrielles aura un impact économique favorable pour le pays et pour les cultivateurs. A l’instar du marché mondial du cannabis médical qui connaît une croissance de près de 20% par an, et devrait atteindre 57 milliards de dollars en 2026, le Maroc pourrait récolter quelque 100 milliards de dirhams de revenus du cannabis thérapeutique à l’horizon 2023, selon un rapport de l’institut Prohibition Partners.
Toutefois, si la nouvelle loi a été accueillie à bras ouverts au niveau national et international par un grand nombre de spécialistes, d’autres, au contraire, s’y opposent, énumérant les dangers que pourraient engendrer les usages thérapeutiques de cette plante. C’est notamment le cas pour la dernière étude parue dans BMC Cardiovascular Disorders, associant le cannabis médical à une hausse de 44% du risque de problèmes cardiovasculaires graves.
L’étude ne permet pas d’établir de lien de cause à effet entre le cannabis médical et les problèmes cardiovasculaires, mais elle appelle à la prudence, commente Arsène Zongo, un des chercheurs qui ont élaboré cette étude, rappelant qu’il n’existe pas encore de démonstration scientifique de l’efficacité du cannabis médical pour la grande majorité des conditions pour lesquelles il est prescrit.
L’usage du cannabis médical n’est pas sans risque, c’est ce qui ressort de ladite étude. «Considérant le peu de preuves scientifiques démontrant l’efficacité du cannabis médical, il est important que les médecins évaluent bien les bénéfices et les risques avant d’en prescrire à leurs patients, souligne le professeur Zongo. Il serait hasardeux d’en prescrire à des personnes qui ont des problèmes cardiaques connus sans assurer un suivi très serré de ces patients ».
De son côté, Docteur Tayeb Hamdi, médecin, chercheur en politiques et systèmes de santé, Président du Syndicat National de Médecine Générale, Vice-Président de la Fédération Nationale de la Santé, considère que cette plante ouvre de nouvelles voies thérapeutiques innovantes dans le traitement de plusieurs pathologies. « Elle ne devrait donc pas être vue comme une menace ou une compétition, mais une piste thérapeutique à explorer», déclare-t-il, appelant à multiplier les recherches scientifiques pour comprendre davantage les tenants et les aboutissants de cette pratique florissante au Maroc.
Malgré les progrès des recherches pharmacologiques et le développement que connaît le monde des médicaments, il reste encore place pour de nouvelles substances, soit parce que certaines substances actives sont assez mal tolérées, ou, au contraire, entraînent l’accoutumance, soit à cause de l’apparition de nouveaux syndromes ou de souches microbiennes résistantes, ou encore parce que l’on est jusque-là désarmé contre un certain nombre de maladies.
«Le marché des médicaments avait besoin de nouvelles substances et de nouveaux médicaments, le cannabis pourrait ainsi apporter des solutions inédites pour compléter les produits existants, notamment pour traiter des maladies comme la sclérose en plaques, l’Alzheimer, Parkinson, l’asthme, et beaucoup d’autre pathologies », indique le chercheur.
Comprendre les défis auxquels cette industrie est confrontée pourrait aider les laboratoires marocains à déterminer où allouer et investir leur budget, quels programmes et protocoles mettre en place et qui est le meilleur moyen d’obtenir une visibilité globale sur tous les aspects de cette plante, ses bienfaits et ses dangers.
« C’est pareil pour l’opium qui est classé comme stupéfiant et son utilisation est très réglementée. C’est une plante qui produit l’héroïne qui a un usage en tant que drogue et qui est interdite, mais elle produit également la morphine qui est un médicament et un dérivé dont la découverte a permis de traiter les douleurs chroniques. Et ce sera le cas également pour le cannabis, les recherches scientifiques devraient décortiquer les composantes de cette plante pour découvrir ses bienfait sans la condamner ».
Une condamnation liée à son usage en tant que drogue pendant très longtemps, «ce qui a retardé l’exploration de son côté médical, maintenant il est temps de cadrer sa culture, sa transformation et son usage».
Kawtar CHAAT
L'info...Graphie
Industrie du cannabis
Une nouvelle voie pour l’investissement
Finalement adoptée, le 11 mars dernier, la loi légalisant le cannabis « thérapeutique », tout en maintenant l’interdiction de son usage récréatif, crée une industrie légale, étroitement réglementée pour assurer à la fois la qualité des produits et les protections environnementales et sociales des producteurs de cannabis. En effet, les opportunités d’investissement restent particulièrement intéressantes dans les pays traditionnellement producteurs de cannabis, notamment le Maroc.
Avec des coûts de production moins élevés, des variétés de cannabis adaptées, d’éventuels débouchés à l’exportation, le Maroc assiste à une véritable « ruée vers l’or vert » des investisseurs et des entreprises spécialisées dans le cannabis à usage thérapeutique. Pour rappel, ce ne sont pas moins de 150 entreprises israéliennes qui avaient manifesté leur intérêt pour investir dans ce domaine, alors que les députés avaient à peine entamé l’examen détaillé du projet de loi relatif à la légalisation du cannabis.
La loi relative à la légalisation établit un cadre sur lequel les entreprises pourraient construire une industrie légale du cannabis. Elle fixe des règles et des lignes directrices pour l’agence nationale qui sera la plaque tournante du secteur économique le plus récent du Maroc.
Avec des coûts de production moins élevés, des variétés de cannabis adaptées, d’éventuels débouchés à l’exportation, le Maroc assiste à une véritable « ruée vers l’or vert » des investisseurs et des entreprises spécialisées dans le cannabis à usage thérapeutique. Pour rappel, ce ne sont pas moins de 150 entreprises israéliennes qui avaient manifesté leur intérêt pour investir dans ce domaine, alors que les députés avaient à peine entamé l’examen détaillé du projet de loi relatif à la légalisation du cannabis.
La loi relative à la légalisation établit un cadre sur lequel les entreprises pourraient construire une industrie légale du cannabis. Elle fixe des règles et des lignes directrices pour l’agence nationale qui sera la plaque tournante du secteur économique le plus récent du Maroc.
Production illicite
Un défi face à l’organisation du secteur du cannabis thérapeutique
Apres la légalisation du cannabis au Maroc, la police, la gendarmerie et la douane ont opéré des saisies record jamais atteintes par le passé. Ceci s’explique non seulement par la vigilance accrue de ces instances de sécurité, mais aussi par l’affolement et la panique des réseaux mafieux devant la légalisation.
Le Maroc est considéré comme étant le premier exportateur mondial du cannabis, avec une production annuelle de 700 tonnes essentiellement destinée à l’Europe, indique l’Office des Nations Unies contre la Drogue et le Crime (ONUDC) dans son rapport annuel publié en juin dernier, soulignant que les autorités marocaines «ont signalé quelque 21.000 ha de culture de cannabis en 2019 (principalement cultivés dans la région du Rif), contre 25.000 ha en 2018».
En outre, le chiffre d’affaires annuel du trafic de cette plante est estimé entre 15 et 23 milliards de dollars, ce qui représente 10 à 15 fois le chiffre d’affaires de l’industrie pharmaceutique au Maroc.
Le rapport annuel de l’ONU intervient au moment où le Maroc a légalisé la consommation du cannabis. Le 11 mars dernier, le Royaume a validé un projet de loi légalisant l’usage de cette substance «à des fins thérapeutiques». Selon une note de 2021 du ministère marocain de l’Intérieur, le marché du cannabis médical est « en croissance annuelle de 30 % au niveau mondial et de 60 % au niveau européen ». Le Maroc ambitionne en effet de reconvertir progressivement ces cultures longtemps illicites en des activités légales.
Le Maroc est considéré comme étant le premier exportateur mondial du cannabis, avec une production annuelle de 700 tonnes essentiellement destinée à l’Europe, indique l’Office des Nations Unies contre la Drogue et le Crime (ONUDC) dans son rapport annuel publié en juin dernier, soulignant que les autorités marocaines «ont signalé quelque 21.000 ha de culture de cannabis en 2019 (principalement cultivés dans la région du Rif), contre 25.000 ha en 2018».
En outre, le chiffre d’affaires annuel du trafic de cette plante est estimé entre 15 et 23 milliards de dollars, ce qui représente 10 à 15 fois le chiffre d’affaires de l’industrie pharmaceutique au Maroc.
Le rapport annuel de l’ONU intervient au moment où le Maroc a légalisé la consommation du cannabis. Le 11 mars dernier, le Royaume a validé un projet de loi légalisant l’usage de cette substance «à des fins thérapeutiques». Selon une note de 2021 du ministère marocain de l’Intérieur, le marché du cannabis médical est « en croissance annuelle de 30 % au niveau mondial et de 60 % au niveau européen ». Le Maroc ambitionne en effet de reconvertir progressivement ces cultures longtemps illicites en des activités légales.
3 questions au chercheur Tayeb Hamdi
« Les laboratoires ont aujourd’hui devant eux une substance dotée de propriétés hautement intéressantes »
Tayeb Hamdi, chercheur en politiques et systèmes de santé et vice-président de la Fédération nationale de la santé, a répondu à nos questions concernant les défis pharmacologiques du cannabis médical.
- Quel regard portez-vous sur l’introduction du cannabis dans l’offre pharmaceutique et sur les recherches scientifiques qui s’y rapportent ?
- Les études relatives à l’usage médical du cannabis se sont multipliées depuis les vingt dernières années. Elles ont révélé les aspects bénéfiques du cannabis, relançant l’intérêt pharmacologique des laboratoires et des chercheurs. Et dans pas longtemps, il y aura beaucoup plus d’études, ce qui ouvre une voie thérapeutique importante sur plusieurs pathologies. Ces recherches permettront ainsi de compléter le marché des produits thérapeutiques existants.
- Les rapports scientifiques pourraient-ils constituer une menace pour le business du cannabis médical ?
- Certes, le cannabis médical contient plusieurs substances, or, il n’est pas exploitable directement, ce sont les laboratoires qui vont analyser ses composantes pour produire des médicaments. Ces laboratoires ont aujourd’hui devant eux une substance dotée de propriétés hautement intéressantes. Pour produire un médicament, il faut cribler 10.000 substances, et dans le cannabis il y a des centaines de composantes, il constitue ainsi un champ d’exploration pour les chercheurs et les laboratoires afin de produire de nouveaux médicaments vu ses bénéfices pour le traitement de différentes pathologies.
- Y a-t-il véritablement des dangers liés aux usages pharmaceutiques du cannabis ?
- Il n’y a aucune substance qui n’a pas d’effets indésirables, mais cela est gérable par la législation et la pratique médicale. Cette plante sera étudiée et transformée par les laboratoires. Le problème qui se pose est le côté récréatif du cannabis qui a retardé l’exploration de cette substance prometteuse, il faut savoir cadrer sa culture pour être sûr de son utilisation dans le cadre médical.
Actuellement, nous sommes au début des essais, et les spécialistes s’accordent à confirmer que le cannabis a une place importante dans le volet des douleurs et celui neurologique.
- Quel regard portez-vous sur l’introduction du cannabis dans l’offre pharmaceutique et sur les recherches scientifiques qui s’y rapportent ?
- Les études relatives à l’usage médical du cannabis se sont multipliées depuis les vingt dernières années. Elles ont révélé les aspects bénéfiques du cannabis, relançant l’intérêt pharmacologique des laboratoires et des chercheurs. Et dans pas longtemps, il y aura beaucoup plus d’études, ce qui ouvre une voie thérapeutique importante sur plusieurs pathologies. Ces recherches permettront ainsi de compléter le marché des produits thérapeutiques existants.
- Les rapports scientifiques pourraient-ils constituer une menace pour le business du cannabis médical ?
- Certes, le cannabis médical contient plusieurs substances, or, il n’est pas exploitable directement, ce sont les laboratoires qui vont analyser ses composantes pour produire des médicaments. Ces laboratoires ont aujourd’hui devant eux une substance dotée de propriétés hautement intéressantes. Pour produire un médicament, il faut cribler 10.000 substances, et dans le cannabis il y a des centaines de composantes, il constitue ainsi un champ d’exploration pour les chercheurs et les laboratoires afin de produire de nouveaux médicaments vu ses bénéfices pour le traitement de différentes pathologies.
- Y a-t-il véritablement des dangers liés aux usages pharmaceutiques du cannabis ?
- Il n’y a aucune substance qui n’a pas d’effets indésirables, mais cela est gérable par la législation et la pratique médicale. Cette plante sera étudiée et transformée par les laboratoires. Le problème qui se pose est le côté récréatif du cannabis qui a retardé l’exploration de cette substance prometteuse, il faut savoir cadrer sa culture pour être sûr de son utilisation dans le cadre médical.
Actuellement, nous sommes au début des essais, et les spécialistes s’accordent à confirmer que le cannabis a une place importante dans le volet des douleurs et celui neurologique.
Recueillis par K. Ch.