Au-delà de ses effets psychologiques, politiques et militaires, l’opération «Déluge d’Al-Aqsa» risque de réveiller de manière violente et brutale le volcan jamais endormi du conflit israélo-arabe. Mais, paradoxalement, elle urge par la même occasion l’aboutissement à une paix durable basée sur la solution des deux États avec comme Capitale commune Al-Qods, défendue par le Maroc et par une grande partie de la communauté internationale.
Les dirigeants occidentaux ont fermement, et ce n’est pas une surprise, condamné les attaques du Hamas contre Israël.
L'Union Européenne, qui ne fait aucune allusion au blocus israélien de 17 ans contre la bande de Gaza, ni aucune référence aux sempiternelles exactions contre le peuple palestinien, a condamné "sans équivoque" les attaques du Hamas contre Israël, appelé à l'arrêt immédiat des violences et réclamé la libération de civils pris en otage en violation du droit international.
L'UE affirme "le droit d'Israël à se défendre contre de telles attaques…", a écrit la présidente de la Commission Européenne, Ursula von der Leyen.
Même son de cloche chez Charles Michel, président du Conseil européen, qui a "fermement" condamné "les attaques aveugles contre Israël et son peuple", "des attaques violentes qui sèment la terreur parmi d'innocents citoyens".
La France a elle aussi condamné les actes de la branche armée du Hamas, par la voix de son président Emmanuel Macron qui condamne fermement les attaques… qui frappent actuellement Israël. "J’exprime ma pleine solidarité avec les victimes, leurs familles et leurs proches", a-t-il déclaré.
Les Etats-Unis restent, eux, "fermement" aux côtés d'Israël et condamnent "sans équivoque" les attaques des "terroristes du Hamas" après les tirs de milliers de roquettes contre Israël, a affirmé samedi la Maison Blanche dans un communiqué.
Joe Biden a martelé, samedi, dans une très courte et solennelle allocution à la Maison Blanche, que le soutien des États-Unis à Israël était "gravé dans le marbre et inébranlable". "Aujourd'hui, le peuple d'Israël est attaqué par le Hamas (qu’il a qualifié d’organisation terroriste). En ce moment tragique, je veux lui dire, ainsi qu'au monde : les États-Unis sont aux côtés d'Israël. Jamais nous ne manquerons de les soutenir", a ajouté le président américain.
Le Pentagone a affirmé qu'il allait s'assurer qu'Israël disposait de "ce dont il a besoin pour se défendre".
Au Royaume-Uni,le chef du gouvernement Rishi Sunak s’est dit choqué "par les attaques menées ce matin par les terroristes du Hamas contre des citoyens israéliens". "Israël a le droit absolu de se défendre", a-t-il ajouté. Londres "soutiendra toujours le droit d'Israël à se défendre", a indiqué la diplomatie britannique.
Berlin, aussi, a condamné "fermement les attaques terroristes venant de Gaza contre Israël", soulignant le risque d'"escalade régionale majeure".
"La Chine est profondément préoccupée par l'escalade actuelle des tensions et de la violence entre la Palestine et Israël et appelle toutes les parties concernées à rester calmes et faire preuve de retenue, à cesser le feu immédiatement, à protéger les civils et à empêcher une nouvelle détérioration de la situation", a indiqué le ministère chinois des Affaires étrangères dans un communiqué.
Moscou s'est inquiété d'une "brusque aggravation de la situation dans la zone du conflit israélo-palestinien". "Nous appelons les parties palestinienne et israélienne à un cessez-le-feu immédiat, à renoncer à la violence et à faire preuve de la retenue nécessaire", a déclaré la porte-parole de la diplomatie russe, Maria Zakharova, dans un communiqué.
Le vice-ministre russe des Affaires étrangères et émissaire du Kremlin pour le Proche-Orient et l'Afrique, Mikhaïl Bogdanov, a déclaré être "en contact" avec toutes les parties concernées.
En guerre, elle aussi, l'Ukraine a fermement condamné cette attaque contre Israël, Volodymyr Zelensky affichant son soutien au droit d'Israël à se défendre.
En Iran, un conseiller militaire du guide suprême iranien, l'ayatollah Ali Khamenei, a, quant à lui, salué l'offensive et affirmé que Téhéran soutient "cette fière opération « Déluge d'Al-Aqsa » et nous sommes sûrs que le front de la résistance (mouvements proches de l'Iran opposés à Israël, NDLR) la soutient également", a annoncé le général des Gardiens de la Révolution, Yahya Rahim-Safavi, cité par l'agence ISNA.
Trois questions à Mohamed Badine El Yattioui : “Le Maroc cherche à obtenir une position arabe commune”
- On voit clairement que ce qui se passe actuellement était préparé depuis longtemps. Hamas a montré sa capacité à se renouveler et à prendre les Israéliens de court dans une date aussi symbolique. Il est clair aussi que l’Iran est derrière l’opération du Hamas puisqu’il s’agit du seul pays pourvoyeur du soutien logistique et militaire.
Ce qui est nouveau c’est que cette attaque a eu lieu subitement à l’insu des services de renseignements israéliens qui ont échoué à l’anticiper. Je rappelle que le renseignement est l’un des points forts d’Israël du moment qu’il a toujours réussi à infiltrer le Hamas. La vraie surprise est la réussite de l’attaque simultanée sur les bases militaires et des incursions au sein des zones contrôlées par Israël. Cela remet en cause toute la culture stratégique d’Israël et notamment la coordination entre les services de renseignement, l’Armée et le gouvernement qui, je rappelle, traverse une crise politique profonde. Il s’agit également d’une humiliation pour Israël, réputé infranchissable, qui a vu plusieurs personnes prises en otage, dont des militaires.
Aujourd’hui, nous assistons à une forme de rupture sur le plan stratégique, sachant qu’il n’y a plus eu de guerre au vrai sens du terme entre une armée régulière arabe et Israël depuis celle du Kippour en 1973.
- C’est évident étant donné que la guerre actuelle change la donne sur le plan régional, surtout pour l’Arabie Saoudite qui s’apprête à normaliser ses relations avec Israël. Je dirai que l’Iran joue un rôle pervers en faisant croire aux pays arabes, et notamment aux Saoudiens, qu’il veut apaiser la tension tout en se servant, en même temps, du Hamas pour contrecarrer la volonté de normalisation de l’Arabie Saoudite. Je pense aussi qu’il s’agit d’une situation difficile pour les pays arabes qui ont une position modérée, sachant que toute position autre que le soutien direct à Israël sera difficilement acceptable pour les Occidentaux qui se disent : si vous ne soutenez pas Israël, cela veut dire que vous êtes pour les acteurs non-étatiques pro-iraniens.
- Comment évaluez-vous la réaction du Maroc ?
Propos recueillis par A. M.
Bilan provisoire : Un millier de morts et près de 4000 blessés de part et d’autre
Le ministère israélien de la Santé a pour sa part, annoncé que le nombre de personnes blessées, transférées vers les hôpitaux, s’élevait également à 2000 Israéliens, dont plus de 340 dans un état entre critique et grave. L’armée israélienne a aussi annoncé dimanche que des dizaines de civils et de soldats israéliens avaient été pris en otage par le mouvement Hamas à l’intérieur de la bande de Gaza. Par ailleurs, les médias israéliens ont annoncé qu’au moins 750 Israéliens sont portés disparus depuis que les combats ont éclaté samedi matin.
Leçon d’Histoire : Un pied-de-nez aux Renseignements israéliens
L’ensemble des défenses terrestres érigées le long de la frontière avec Gaza – la barrière électronique, le système de détection de tunnels, qui ont coûté des milliards – tout cela n’a tenu que quelques minutes. Des centaines de commandos du Hamas à moto, en 4 x 4 et à pied, ont pénétré dans les localités israéliennes avoisinantes. D’abord sans résistance. Israël fêtait Simhat Torah, le dernier jour de la semaine de Souccot, la fête des Tabernacles. De nombreux militaires étaient en permission.
Selon Amos Harel, du quotidien Haaretz, le Hamas a tiré les leçons du conflit de l’été 2014. Cette fois, les attaques ont d’abord été lancées sur les avant-postes de l’armée d’occupation, insuffisamment préparés et avec un nombre limité de soldats. Une fois ces avant-postes conquis, des unités du Hamas sont entrées dans les localités civiles où ne se trouvaient que quelques policiers, alors que dans les Kibboutzim, il n’y avait que de petites sections de volontaires. La conception israélienne de gestion du conflit avec les Palestiniens vient de s’effondrer.