Réalisé en partenariat avec UNESCO Maghreb, le Moroccan Center for Innovation and Social Entrepreneuship (MCISE) vient de publier un Policy Paper sur les enjeux et perspectives de développement de l’entrepreneuriat social au Maroc, en Algérie et en Tunisie.
Intitulée «Entrepreneuriat social au Maroc, Algérie et Tunisie : challenges et perspectives post-Covid », cette publication a pour objectif d’analyser la capacité de résilience des entrepreneurs sociaux face aux défis imposés par la pandémie au Maghreb. Une crise qui a été à l’origine d’une mauvaise conjoncture qui a accentué les inégalités économiques et sociales, et a également eu un effet désastreux sur toute une série de secteurs, tel que la culture, le tourisme, l’hôtellerie, la restauration, le commerce non alimentaire et l’enseignement. Face aux nouveaux enjeux sociétaux, énergétiques et environnementaux liés à cette crise, ce Policy Paper estime que l’entrepreneuriat social se voit indispensable plus que jamais.
Chronologie
Au Maroc, d’après les auteurs de ce Policy Paper, les premières prémisses de ce secteur ont pris naissance au milieu des années 2000, notamment avec l’implémentation d’Enactus. « L’adhésion des jeunes étudiants marocains à cette ONG a éveillé la fibre entrepreneuriale chez eux, et ça a surtout confirmé leur orientation vers un secteur au service de l’intérêt général », indique le Policy Paper. Et de poursuivre que plusieurs événements notables ont marqué, à partir de 2010, la scène marocaine : implémentation de la GSVC (Global Social Venture Competition), création du MCISE et du Centre Marocain des Études et Recherches sur l’Entreprise Sociale (CMERES) en 2012, ainsi que l’organisation de la première journée d’étude sur le thème d’entrepreneuriat social au niveau national.
De même, l’année 2013 a été marquée par l’organisation des premiers colloques scientifiques internationaux traitant des questions relatives à l’entrepreneuriat social.
L’année 2014, quant à elle, a connu la réalisation de la 1ère étude à l’échelle nationale en partenariat avec le MCISE, Social Entreprise UK et la Banque Mondiale. L’année 2015 a vu aussi le lancement des incubateurs d’entreprises sociales : Dare Inc., Bidaya et Impact Lab. « La dynamique a pris de la légitimité suite au discours royal du 20 août, Sa Majesté le Roi Mohamed VI met en avant l’entreprise sociale en tant que mécanisme de création d’emploi et l’une des solutions pour remédier au phénomène de fuite des cerveaux, un fléau qui ne cesse de menacer le pays et ses jeunes en l’absence d’un climat favorable à la vie active, à la promotion professionnelle, à l’innovation et à la recherche scientifique »,relève-t-on dans ce Policy Paper.
Ensuite, le Maroc a fait en 2019 l’objet de deux projets internationaux d’études comparatives. Le premier est le projet ICSEM, section Maroc. Il s’agit du plus grand projet portant sur l’entrepreneuriat social et l’entreprise sociale dans le monde. Il consiste en une étude comparative des modèles d’entreprises sociales dans plus de 50 pays. Il s’est étalé sur la période 2013-2017, avec une extension jusqu’à 2019. Le second projet en question, lancé en 2019, est MedUp qui couvre la région MENA et qui consiste en un mapping des structures d’appui à l’entrepreneuriat social et un needs assessment (évaluation des besoins) de ces dernières et des entrepreneurs sociaux.
Les défis d’ordre légal et réglementaire
Le Policy Paper s’est penché, par la suite, sur les principaux défis auxquels l’entrepreneuriat social au Maroc est confronté. Ces enjeux sont, premièrement, d’ordre légal et réglementaire. « L’absence d’un statut juridique clair qui représente fidèlement l’entreprise sociale : une nouvelle ancienne entrave qui ne cesse de réapparaître en tête de liste des défis relevés par les acteurs de l’entrepreneuriat sociaux », déplore le Policy Paper, notant que l’entrepreneuriat social au Maroc reste dérisoirement abordé avec des textes ne reflétant pas la réalité du terrain. Et ce, malgré l’existence des lois régissant le secteur d’économie sociale et solidaire.
Autre entrave soulevée : le déphasage entre les lois et leurs applications. La problématique relative à l’application des textes de lois en matière d’entrepreneuriat de manière générale présente une réelle entrave pour les entrepreneurs sociaux plus particulièrement, estime-t-on.
Les défis d’ordre financier et d’infrastructure
De même, l’entrepreneuriat social au Maroc est confronté à des défis d’ordre financier et d’infrastructure. A ce sujet, la publication du MCISE relève quelques insuffisances qui entravent le secteur à se développer. Il s’agit, entre autres, du manque de structures d’investissement dans les secteurs vitaux, et de l’absence de mécanismes de financement en période de crise.
Les défis d’ordre humain et culturel
Le secteur fait face également à des défis d’ordre humain et culturel. Le Policy Paper soulève quelques enjeux. Le premier est que, pour l’entrepreneur social, tenir sa mission est un vrai défi, particulièrement en présence de parties prenantes faiblement sensibles et convaincues de la possibilité de résoudre les problématiques sociétales de manière innovante et entrepreneuriale. Cette situation peut mener certains entrepreneurs à dériver de leur mission de base pour présenter des business models satisfaisant les exigences des bailleurs de fonds ou des structures d’appui en général, surtout dans un contexte de crise marqué par des restrictions budgétaires.
Le second enjeu a trait au manque des success stories et des champions nationaux. « Malgré l’existence d’entreprises sociales réussies, il s’avère qu’il manque énormément de communication là-dessus, pour mettre réellement en valeur les cas de réussite au niveau local et régional. La valorisation de ces cas permet de maintenir un bon niveau de motivation en période de crise et cultive l’espoir chez les entrepreneurs sociaux en difficultés ».
Le troisième enjeu est le manque de talents et d’expertise locale. Pour certains secteurs de pointe, le Policy Paper note qu’il s’avère difficile de trouver les bons profils et la bonne expertise locale. Ceci est généralement dû soit à la fuite de cerveaux vers des contextes plus favorables sur le plan professionnel et scientifique, soit à la lenteur du développement de ces secteurs dans les pays en question.
Pour pallier les difficultés vécues par les acteurs d’entrepreneuriat social dans les pays du Maghreb, en général, et au Maroc, en particulier, et permettre ainsi une envolée du secteur dans la région, l’étude propose de renforcer le plaidoyer pour un statut spécifique aux entreprises sociales, de promouvoir l’éducation pour l’entrepreneuriat et l’innovation sociale, et d’oeuvrer pour la démocratisation de l’accès aux financements…
Intitulée «Entrepreneuriat social au Maroc, Algérie et Tunisie : challenges et perspectives post-Covid », cette publication a pour objectif d’analyser la capacité de résilience des entrepreneurs sociaux face aux défis imposés par la pandémie au Maghreb. Une crise qui a été à l’origine d’une mauvaise conjoncture qui a accentué les inégalités économiques et sociales, et a également eu un effet désastreux sur toute une série de secteurs, tel que la culture, le tourisme, l’hôtellerie, la restauration, le commerce non alimentaire et l’enseignement. Face aux nouveaux enjeux sociétaux, énergétiques et environnementaux liés à cette crise, ce Policy Paper estime que l’entrepreneuriat social se voit indispensable plus que jamais.
Chronologie
Au Maroc, d’après les auteurs de ce Policy Paper, les premières prémisses de ce secteur ont pris naissance au milieu des années 2000, notamment avec l’implémentation d’Enactus. « L’adhésion des jeunes étudiants marocains à cette ONG a éveillé la fibre entrepreneuriale chez eux, et ça a surtout confirmé leur orientation vers un secteur au service de l’intérêt général », indique le Policy Paper. Et de poursuivre que plusieurs événements notables ont marqué, à partir de 2010, la scène marocaine : implémentation de la GSVC (Global Social Venture Competition), création du MCISE et du Centre Marocain des Études et Recherches sur l’Entreprise Sociale (CMERES) en 2012, ainsi que l’organisation de la première journée d’étude sur le thème d’entrepreneuriat social au niveau national.
De même, l’année 2013 a été marquée par l’organisation des premiers colloques scientifiques internationaux traitant des questions relatives à l’entrepreneuriat social.
L’année 2014, quant à elle, a connu la réalisation de la 1ère étude à l’échelle nationale en partenariat avec le MCISE, Social Entreprise UK et la Banque Mondiale. L’année 2015 a vu aussi le lancement des incubateurs d’entreprises sociales : Dare Inc., Bidaya et Impact Lab. « La dynamique a pris de la légitimité suite au discours royal du 20 août, Sa Majesté le Roi Mohamed VI met en avant l’entreprise sociale en tant que mécanisme de création d’emploi et l’une des solutions pour remédier au phénomène de fuite des cerveaux, un fléau qui ne cesse de menacer le pays et ses jeunes en l’absence d’un climat favorable à la vie active, à la promotion professionnelle, à l’innovation et à la recherche scientifique »,relève-t-on dans ce Policy Paper.
Ensuite, le Maroc a fait en 2019 l’objet de deux projets internationaux d’études comparatives. Le premier est le projet ICSEM, section Maroc. Il s’agit du plus grand projet portant sur l’entrepreneuriat social et l’entreprise sociale dans le monde. Il consiste en une étude comparative des modèles d’entreprises sociales dans plus de 50 pays. Il s’est étalé sur la période 2013-2017, avec une extension jusqu’à 2019. Le second projet en question, lancé en 2019, est MedUp qui couvre la région MENA et qui consiste en un mapping des structures d’appui à l’entrepreneuriat social et un needs assessment (évaluation des besoins) de ces dernières et des entrepreneurs sociaux.
Les défis d’ordre légal et réglementaire
Le Policy Paper s’est penché, par la suite, sur les principaux défis auxquels l’entrepreneuriat social au Maroc est confronté. Ces enjeux sont, premièrement, d’ordre légal et réglementaire. « L’absence d’un statut juridique clair qui représente fidèlement l’entreprise sociale : une nouvelle ancienne entrave qui ne cesse de réapparaître en tête de liste des défis relevés par les acteurs de l’entrepreneuriat sociaux », déplore le Policy Paper, notant que l’entrepreneuriat social au Maroc reste dérisoirement abordé avec des textes ne reflétant pas la réalité du terrain. Et ce, malgré l’existence des lois régissant le secteur d’économie sociale et solidaire.
Autre entrave soulevée : le déphasage entre les lois et leurs applications. La problématique relative à l’application des textes de lois en matière d’entrepreneuriat de manière générale présente une réelle entrave pour les entrepreneurs sociaux plus particulièrement, estime-t-on.
Les défis d’ordre financier et d’infrastructure
De même, l’entrepreneuriat social au Maroc est confronté à des défis d’ordre financier et d’infrastructure. A ce sujet, la publication du MCISE relève quelques insuffisances qui entravent le secteur à se développer. Il s’agit, entre autres, du manque de structures d’investissement dans les secteurs vitaux, et de l’absence de mécanismes de financement en période de crise.
Les défis d’ordre humain et culturel
Le secteur fait face également à des défis d’ordre humain et culturel. Le Policy Paper soulève quelques enjeux. Le premier est que, pour l’entrepreneur social, tenir sa mission est un vrai défi, particulièrement en présence de parties prenantes faiblement sensibles et convaincues de la possibilité de résoudre les problématiques sociétales de manière innovante et entrepreneuriale. Cette situation peut mener certains entrepreneurs à dériver de leur mission de base pour présenter des business models satisfaisant les exigences des bailleurs de fonds ou des structures d’appui en général, surtout dans un contexte de crise marqué par des restrictions budgétaires.
Le second enjeu a trait au manque des success stories et des champions nationaux. « Malgré l’existence d’entreprises sociales réussies, il s’avère qu’il manque énormément de communication là-dessus, pour mettre réellement en valeur les cas de réussite au niveau local et régional. La valorisation de ces cas permet de maintenir un bon niveau de motivation en période de crise et cultive l’espoir chez les entrepreneurs sociaux en difficultés ».
Le troisième enjeu est le manque de talents et d’expertise locale. Pour certains secteurs de pointe, le Policy Paper note qu’il s’avère difficile de trouver les bons profils et la bonne expertise locale. Ceci est généralement dû soit à la fuite de cerveaux vers des contextes plus favorables sur le plan professionnel et scientifique, soit à la lenteur du développement de ces secteurs dans les pays en question.
Pour pallier les difficultés vécues par les acteurs d’entrepreneuriat social dans les pays du Maghreb, en général, et au Maroc, en particulier, et permettre ainsi une envolée du secteur dans la région, l’étude propose de renforcer le plaidoyer pour un statut spécifique aux entreprises sociales, de promouvoir l’éducation pour l’entrepreneuriat et l’innovation sociale, et d’oeuvrer pour la démocratisation de l’accès aux financements…
A. CHANNAJE
Qu’est-ce que l’entrepreneuriat social ?
Parmi les nombreuses définitions, l’entrepreneuriat social est une forme d’entrepreneuriat dans le cadre duquel la recherche de bénéfice n’est plus un objectif, mais plutôt un moyen pour aboutir un projet répondant à une problématique sociétale ou d’intérêt général. Il s’écarte de la manière classique d’entreprendre car il ne vise pas la réalisation d’un profit maximal mais accorde toute son importance à la valeur sociale et/ou écologique d’une activité économique.
Les termes « entrepreneuriat social » et « entrepreneur social » ne sont apparus que récemment, vers les années 1990. Il s’agit d’un mouvement de pensée qui a inspiré le monde des affaires aux États-Unis, lorsque les entreprises oeuvrant dans le domaine social ont essayé de se rassembler. Le mouvement s’est ensuite répandu dans le monde, et a révolutionné l’économie sociale de bon nombre de pays.
Les termes « entrepreneuriat social » et « entrepreneur social » ne sont apparus que récemment, vers les années 1990. Il s’agit d’un mouvement de pensée qui a inspiré le monde des affaires aux États-Unis, lorsque les entreprises oeuvrant dans le domaine social ont essayé de se rassembler. Le mouvement s’est ensuite répandu dans le monde, et a révolutionné l’économie sociale de bon nombre de pays.