L’un des impacts les plus tristes et les plus troublants de l’actuelle période d’état d’urgence sanitaire décrétée par les autorités en vue de réduire les risques de propagation de l’épidémie du coronavirus, concerne le rituel de l’enterrement des morts. Désormais, les cérémonies funéraires strictement codifiées par la loi positive et religieuse, sont soumises à des contraintes inédites par le passé. Nous sommes allés à la rencontre de certaines familles éplorées qui ont perdu leurs proches pendant cette période difficile, afin d’en savoir plus sur les règles aujourd’hui en vigueur en matière d’enterrement.
Sujet tabou
Le sujet est aussi tabou que ne l’est la mort en temps normal. Une sorte d’omerta spontanée semble régner le concernant parmi les responsables qui en ont habituellement la charge aussitôt qu’on leur explique l’objet de notre reportage. «Non, nous n’avons reçu aucune note de service ou de directives spéciales concernant les enterrements. Tout ce qu’il y a, c’est qu’il faut faire attention aux mesures d’hygiènes, aujourd’hui plus qu’auparavant», nous dit sur un ton embarrassé un agent d’autorité à Rabat, avant de mettre fin rapidement à la conversation qui semble l’indisposer au plus haut point.
Du côté des particuliers, en revanche, les témoignages sont légion «Nous avons été obligés d’enterrer notre maman à la va vite. Nous étions tout au plus, quatre personnes à avoir été autorisées à accompagner sa dépouille jusqu’au cimetière. Le reste de la famille a dû rester à la maison. Vous pouvez imaginer la détresse et la tristesse qu’une telle contrainte constitue», nous confie Hicham qui vient de perdre sa mère. Il ajoute éploré: «même la veillée funèbre a été réduite à son strict minimum et s’est déroulée avec très peu de proches, comme si c’était les funérailles d’un inconnu».
Au niveau du cimetière Al Ghofrane à Casablanca, et même si l’activité s’est sensiblement réduite, il reste quelques fossoyeurs et des fqihs pour assurer le service funèbre. Elément incontournable du décorum populaire de nos cimetières, les mendiants et autres arroseurs de tombes, eux, se font beaucoup plus rares qu’en temps normal. Ils ont été remplacés par les nombreux agents de voierie chargés d’en assurer la désinfection. Mercredi 25 mars, notre visite a coïncidé avec un enterrement. Les membres de la famille du défunt, plus nombreux que le maximum autorisé ont été sommés de se disperser très rapidement, après la prière de l’absent effectuée à même le tombeau.
En off, aussi, les langues se délient plus facilement. Il en est ainsi de ce médecin du service d’hygiène d’un quartier résidentiel à Rabat. «Les directives sont claires : réduire les rassemblements, le temps et les risques de contamination», nous dit-il avant d’entrer dans le détail : «Les familles sont sommées de minimiser le nombre d'accompagnateurs à une moyenne de deux à quatre personnes choisies parmi les parents de premier degré de sexe masculin. Les convois funéraires ne peuvent pas dépasser deux voitures en plus de l’ambulance chargée de transporter les personnes décédées. Et enfin, l’ensemble des participants, membres de la famille, chauffeur d’ambulance et fossoyeurs, sont tenus de porter des masques et des gants de protection. Ceux-ci sont généralement fournis par l’entreprise de transport des morts». Pour ce qui est du rite du toilettage des morts, les gens sont appelés à recourir à des proches de la famille pour s’en occuper. En cas d’impossibilité, des laveurs étrangers peuvent être impliqués sur intervention du Moqaddem. Mais là aussi, les masques et gants sont de rigueur.
Du côté des particuliers, en revanche, les témoignages sont légion «Nous avons été obligés d’enterrer notre maman à la va vite. Nous étions tout au plus, quatre personnes à avoir été autorisées à accompagner sa dépouille jusqu’au cimetière. Le reste de la famille a dû rester à la maison. Vous pouvez imaginer la détresse et la tristesse qu’une telle contrainte constitue», nous confie Hicham qui vient de perdre sa mère. Il ajoute éploré: «même la veillée funèbre a été réduite à son strict minimum et s’est déroulée avec très peu de proches, comme si c’était les funérailles d’un inconnu».
Au niveau du cimetière Al Ghofrane à Casablanca, et même si l’activité s’est sensiblement réduite, il reste quelques fossoyeurs et des fqihs pour assurer le service funèbre. Elément incontournable du décorum populaire de nos cimetières, les mendiants et autres arroseurs de tombes, eux, se font beaucoup plus rares qu’en temps normal. Ils ont été remplacés par les nombreux agents de voierie chargés d’en assurer la désinfection. Mercredi 25 mars, notre visite a coïncidé avec un enterrement. Les membres de la famille du défunt, plus nombreux que le maximum autorisé ont été sommés de se disperser très rapidement, après la prière de l’absent effectuée à même le tombeau.
En off, aussi, les langues se délient plus facilement. Il en est ainsi de ce médecin du service d’hygiène d’un quartier résidentiel à Rabat. «Les directives sont claires : réduire les rassemblements, le temps et les risques de contamination», nous dit-il avant d’entrer dans le détail : «Les familles sont sommées de minimiser le nombre d'accompagnateurs à une moyenne de deux à quatre personnes choisies parmi les parents de premier degré de sexe masculin. Les convois funéraires ne peuvent pas dépasser deux voitures en plus de l’ambulance chargée de transporter les personnes décédées. Et enfin, l’ensemble des participants, membres de la famille, chauffeur d’ambulance et fossoyeurs, sont tenus de porter des masques et des gants de protection. Ceux-ci sont généralement fournis par l’entreprise de transport des morts». Pour ce qui est du rite du toilettage des morts, les gens sont appelés à recourir à des proches de la famille pour s’en occuper. En cas d’impossibilité, des laveurs étrangers peuvent être impliqués sur intervention du Moqaddem. Mais là aussi, les masques et gants sont de rigueur.
Le Moqaddem, élément central
Les agents de voirie, nombreux et chargés de la désinfection des lieux, ont remplacé les mendiants (photo Kamal)
Autre aspect important évoqué par notre interlocuteur, «la rapidité du déroulement de l’enterrement est primordiale. Celui-ci ne doit pas dépasser un maximum de vingt minutes». Quid de Salate Al Janaza (prière de l’absent) autrefois effectuée au sein des mosquées, fermées depuis sur Fatwa du conseil supérieur des Ulémas quatre jours avant l’instauration de l’état d’urgence sanitaire ? Le médecin déclare à ce propos que celle-ci doit se dérouler à la porte du cimetière, en application de la loi islamique qui l’autorise. Notre interlocuteur prévient enfin que toute entorse à ces nouvelles règles peut entraîner l’intervention des forces de l’ordre qui ont reçu des directives strictes quant au maintien de la santé publique.
Enfin et pour ce qui est des formalités administratives, le plus grand changement concerne la centralisation de l’ensemble des démarches entre les mains du Moqaddem de quartier. «Le Moqaddem est maintenant l’élément central du process. Il est l’interlocuteur unique et exclusif des familles frappées par la mort. C’est lui qui délivre les autorisations d’inhumer et octroie les concessions de terrain pour les tombes dont les Wilayas s’occupaient auparavant», nous dit une source de la Wilaya de Casablanca qui nous informe qu’aucun changement n’est intervenu en ce qui concerne le prix de la concession à payer pour une place au cimetière. Celle-ci étant restée fixée au tarif habituel de 550 dirhams à verser directement au Moqaddem.
Pour ce qui est des décès consécutifs au coronavirus, le voile de mystère et de confidentialité qui les entoure est encore plus épais que pour les morts naturelles ou accidentelles. Mais on imagine bien que les restrictions les concernant doivent être autrement plus contraignantes.
Enfin et pour ce qui est des formalités administratives, le plus grand changement concerne la centralisation de l’ensemble des démarches entre les mains du Moqaddem de quartier. «Le Moqaddem est maintenant l’élément central du process. Il est l’interlocuteur unique et exclusif des familles frappées par la mort. C’est lui qui délivre les autorisations d’inhumer et octroie les concessions de terrain pour les tombes dont les Wilayas s’occupaient auparavant», nous dit une source de la Wilaya de Casablanca qui nous informe qu’aucun changement n’est intervenu en ce qui concerne le prix de la concession à payer pour une place au cimetière. Celle-ci étant restée fixée au tarif habituel de 550 dirhams à verser directement au Moqaddem.
Pour ce qui est des décès consécutifs au coronavirus, le voile de mystère et de confidentialité qui les entoure est encore plus épais que pour les morts naturelles ou accidentelles. Mais on imagine bien que les restrictions les concernant doivent être autrement plus contraignantes.