Pour une analyse approfondie des caractéristiques des jeunes chômeurs ruraux et ceux exclus de l’école et du marché du travail (NEET), l'étude s’est développée en cinq sections: les services d’intermédiation en milieu rural, les lacunes de la participation des jeunes et des femmes à l’activité économique, les jeunes Neets, les jeunes Neets en milieu rural de la province de Taounate, et enfin les services et actions en faveur de l’insertion professionnelle des jeunes ruraux.
Services d’intermédiation
Au volet des services d’intermédiation en milieu rural, le PCSN note que le manque en matière d’accès des travailleurs non diplômés résidant dans des zones rurales est, parfois, doublé par des obstacles à l’accès à d’autres services de base tels que les transports et les technologies. Ceci, d'après le think tank, les handicape vis-à-vis de l’accès aux opportunités et les empêche de tirer profit de la croissance.
"En effet, la pauvreté, le faible accès aux réseaux routiers, d’internet et de financement, l’insuffisance des investissements dans l’éducation et la formation (comme étant un facteur de conversion), et la concentration géographique des services d’intermédiation sont des facteurs qui excluent de facto certains groupes et exacerbent leur vulnérabilité sur le marché du travail", explique la même source.
Ainsi, pour combler les déficits en matière de compétence et de travail décent à même de rendre les zones rurales de véritables locomotives de croissance, le PCSN insiste sur la nécessité de développer l’intermédiation en milieu rural. « En effet, l’intermédiation est un maillon important et un complément des autres politiques de développement rural à l’image des politiques macroéconomiques et fiscales, de renforcement de la gouvernance, de la réglementation du travail, des programmes de promotion de la productivité et de l’innovation, etc. », avancent les auteurs de l’étude.
Faible niveau de qualification des jeunes ruraux
S’agissant des lacunes de la participation des jeunes et des femmes à l’activité économique, le PCSN indique que les jeunes ruraux sont généralement peu scolarisés malgré les efforts déployés, durant les deux dernières décennies, en termes de scolarisation. Chiffres à l’appui, 17% des jeunes âgés de 15-24 ans dans les zones rurales n’ont jamais accédé à l’école (2014), 66,8% ont le niveau fondamental, 13,6% ont le niveau secondaire et seuls 2,1% ont pu avoir un niveau supérieur.
Pire encore, les filles rurales enregistrent encore un retard considérable en termes de scolarisation en comparaison avec les jeunes hommes. Près d’un quart (23%) des filles âgées de 15-24 ans n’ont jamais accédé à l’école (contre 15,1% pour les jeunes hommes) et seules 1,8% ont un niveau supérieur, contre 2,4% pour les jeunes hommes.
L’accès des actifs ruraux aux diplômes demeure également un défi majeur à relever par les pouvoir publics. En 2020, 73,3% des actifs ruraux ont déclaré qu’ils n’ont aucun diplôme, 23,1% ont un diplôme de niveau moyen4 et seuls 3,5% ont un niveau de diplôme supérieur. Ces taux sont respectivement de 36%, 37,3% et 26,6% pour les actifs en milieu urbain, ce qui signifie que les jeunes citadins possèdent un niveau de qualification relativement élevé par rapport aux jeunes ruraux.
Jeunes en situation de NEET au Maroc
Citant les résultats de l’enquête nationale sur l’emploi de 2017, le PCSN fait remarquer, d’autre part, que 29,3% des jeunes âgés de 15-24 ans sont sans emploi et hors systèmes d’éducation ou de formation professionnelle au niveau national (NEET). Selon le genre, ce taux est d’environ 3,5 fois plus important chez les femmes que chez les hommes. Il s’établit à 46% chez les jeunes femmes contre seulement 13% chez les jeunes hommes.
Autre constat soulevé : les jeunes NEET sont très peu instruits, faiblement qualifiés relativement aux autres catégories de la population. En effet, plus de 18% de ces jeunes n’ont jamais fréquenté l’école, 25% sont analphabètes, et plus de la moitié (51%) n’ont aucun diplôme. Les inactifs représentent environ 80% de la population des NEET, dont plus de 70% sont des femmes au foyer. Alors que les jeunes chômeurs représentent 20%.
Jeunes Neets en milieu rural
Concernant les jeunes en situation de Neet en milieu rural, l’étude du PCSN s’est basée sur les résultats d’une enquête menée dans la province de Taounate par la FAO pour appréhender leur situation. Il en ressort que plus de 61% des jeunes ruraux sont sans emploi et hors des systèmes éducatifs ou de formation professionnelle (Neet). Ce taux est relativement plus élevé chez les jeunes femmes rurales (71%) que chez les jeunes hommes ruraux (57,8%) et chez les jeunes sans diplôme (67,2%) que chez les jeunes diplômés (47,9%). Les résultats de l’enquête ont aussi confirmé le faible niveau de qualification des jeunes Neet en milieu rural, puisque près des deux tiers (64%) ont tout au plus le niveau d’instruction collégial.
Cette proportion est de 63% chez les jeunes hommes ruraux et 67% chez les jeunes femmes rurales. Les diplômés représentent près d’un quart des jeunes Neet en milieu rural (24,6%).
Insertion professionnelle des jeunes ruraux
Pour faire face à la problématique de l’emploi et du chômage au Maroc, l’étude estime que les pouvoirs publics ont mis en place une politique volontariste est basée principalement sur des programmes phares, notamment Idmaj, Tahfiz, Taehil et Auto-emploi.
D’après eux, ces programmes ont eu un impact significatif en matière d’accompagnement, d’amélioration de l’employabilité et d’insertion des jeunes sur le marché du travail. Mais, ils restent marqués par des insuffisances, notamment en termes de ciblage de certaines catégories de jeunes chômeurs et d’adaptabilité aux spécificités territoriales.
Pour conclure, l’étude souligne que la précarité dans l’emploi des jeunes ruraux constitue une forme de dysfonctionnement du marché du travail. Elle doit faire l’objet d’une attention particulière de la part des décideurs politiques, tout en tenant compte des caractéristiques spécifiques du marché du travail en milieu rural dans l’élaboration des politiques et des actions favorisant l’insertion des jeunes et des femmes dans le marché du travail.
A. CHANNAJE
Plus de 28% de la jeunesse marocaine sont des NEET
Selon une récente étude réalisée par l’Observatoire national du développement humain et l’Unicef, plus de 28% de la jeunesse marocaine sont des NEET, soit 1,7 million de jeunes de 15 à 24 ans. Parmi eux, à peine 22% sont en recherche permanente et active d’emploi. Cette situation traduit les limites des politiques publiques pour permettre une réinsertion dans le système éducatif et de formation et une amélioration généralisée de la sphère productive marocaine qui exclut de fait 75% des NEET.
L’étude fait ressortir également que les NEET sont majoritairement de jeunes femmes (76,4%), dont 36,1% vivent dans le milieu rural. Par ailleurs, l’analyse quantitative, basée sur l’enquête Panel, a identifié 5 profils de NEET qui sont les femmes au foyer rurales à responsabilité familiale qui représentent 54,3%, les jeunes citadins découragés (25%), les NEET en situation de transition (7,8%), les NEET volontaires par choix (7,5%), et ceux qui souffrent de problèmes de santé (5,1%).
Repères
Indicateur NEET
L’indicateur NEET (de l’anglais « Not in Employment, Education or Training ») indique les jeunes qui sont sans emploi et hors du système éducatif ou de formation professionnelle. Etant fortement corrélé avec le chômage de longue durée, être NEET est synonyme de baisse de l’employabilité à cause du manque de contact avec le milieu professionnel et ce qui advient en termes de développement de compétences.
Inadéquation entre emploi et formation
D’après ce Policy paper de PCNS, plus de 60% des jeunes chômeurs en milieu rural déclarent la rareté des offres d’emploi comme principale raison. Les autres raisons évoquées sont l’accès au financement (51,7%), les conditions de travail (51,5%) et l’inadéquation formation-emploi (30,1%).
Un autre constat dégagé d’une étude sur les jeunes NEET dans la province de Taounate : la majorité (83,4%) des jeunes ruraux chômeurs n’ont jamais travaillé ; et plus de la moitié (51,5%) ont déclaré que l’arrêt d’activité saisonnière est la principale circonstance suite à laquelle ils se sont trouvés en situation de chômage. Cette proportion est relativement plus élevée chez les jeunes hommes, atteignant 60% contre 32,4% chez les jeunes femmes.
31,2% des actifs occupés un diplôme de niveau moyen
Selon les récentes données du HCP, 31,2% des actifs occupés ont un diplôme de niveau moyen, tandis que 15,9% disposent d’un diplôme de niveau supérieur. Selon le secteur d’activité, la part des actifs occupés ayant un diplôme supérieur est de 27,8% dans les services, contre 16,8% dans l’industrie et seulement 6,6% dans les BTP.
Les mêmes donnée relèvent, par ailleurs, que la population en âge d’activité (15 ans et plus) compte aujourd'hui 27.127.000 personnes. Parmi elles, seules 12.280.000 sont actives (10.772.000 pourvues d’un emploi et 1.508.000 au chômage) et 14.847.000 sont en dehors du marché du travail. Dans le détail, 42,1% des actifs occupés sont des ruraux et 22,3% sont des femmes. Les jeunes âgés de 15 à 34 ans représentent 34,8%, les 15-24 ans 8,9% et les 25-34 ans 26,9%.