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Le transfert inter-régions des patients Covid-19 : Une carte inexploitée au Maroc


Rédigé par Nabil LAAROUSSI Vendredi 28 Août 2020

Des hôpitaux surchargés, un personnel médical surmené et des régions saturées d’infections. Un contexte qui devrait inciter le gouvernement à envisager les transferts médicalisés.



Le transfert inter-régions des patients Covid-19 : Une carte inexploitée au Maroc
Face à la recrudescence des cas de contaminations, la commission des secteurs sociaux, présidée par la députée istiqlalienne Saïda Aït Bouali, a voté, lundi, à l’unanimité en faveur d’une mission d’inspection de plusieurs hôpitaux du Royaume, afin de s’enquérir de la condition du personnel médical, des équipements médicaux et de la capacité litière des unités de réanimation réservées aux patients Covid.

Le même jour, Saïd Ahmidouch, Wali de la région Casablanca-Settat et gouverneur de la préfecture de Casablanca, a effectué une visite de terrain dans plusieurs structures hospitalières de la métropole.

Ces actions surviennent dans le cadre d’une dynamique visant la mise en oeuvre des mesures d’amélioration du système de prise en charge des malades Covid-19, suite à la flambée des cas qu’ont connu plusieurs villes du Royaume.

En effet, depuis le début du mois d’août, le Maroc enregistre plus de 1000 cas d’infections par jour, en particulier à Casablanca, Marrakech et Tanger. Ces villes assistent à une surcharge des hôpitaux, dont la capacité litière, certes en augmentation, n’arrive plus à contenir les patients.

A l’exemple des hôpitaux Ibn Zohr et Ibn Tofail de Marrakech, la saturation des établissements hospitaliers a provoqué l’indignation du personnel médical de la ville, incapable de mener à bien sa mission dans les premières lignes de la lutte contre l’épidémie et déplorant l’insuffisance des ressources humaines pour prendre en charge l’affluence des cas due à cette propagation éprouvante du virus.

Saïda Aït Bouali explique que « cette indigence dans l’infrastructure sanitaire et ce grand manque du personnel médical au Maroc, est le résultat des investissements insuffisants dans les secteurs sociaux, consentis dans ce contexte de l’épidémie ». Elle ajoute que « pour arriver à trouver des solutions à cette crise, le ministère de l’Intérieur et le ministère de la Santé doivent inclure la société civile et les représentants régionaux dans les concertations, pour une prise de décisions basée sur une vision globale de la situation ».

La réaction du gouvernement

De ce fait, le ministère de la Santé a pris des dispositions visant à alléger la pression qui pèse sur ces structures, à commencer par l’appel au volontariat auprès des cadres de la Santé, des retraités et des lauréats des instituts de formation aux carrières de santé, puis, surtout, le déploiement de plusieurs hôpitaux de campagne dans l’ensemble des régions où la propagation du virus devient encombrante, pour renforcer encore plus la capacité litière du Royaume, qui était passé de 1640 à 3000 lits début avril.

A Casablanca, le centre hospitalier préfectoral de Ben M’sik assiste à la mise en place, dans son enceinte, d’un nouvel hôpital de campagne, d’une capacité totale de 40 lits pour les patients atteints du Coronavirus. Ce nouvel hôpital est le deuxième du genre à Casablanca, le premier étant l’hôpital installé en avril, à l’Office des foires et des expositions de Casablanca. Il est composé de quatre blocs comprenant plus de 700 lits et doté de tous les équipements nécessaires.

En raison d’une affluence grandissante de patients, le ministre de la Santé a annoncé, la semaine dernière, la création d’un hôpital de campagne, désormais prêt à accueillir ses premiers patients Covid-19, au sein de l’hôpital Ibn Tofail relevant du CHU Mohammed VI de Marrakech. La structure, qui compte 100 lits, comprend une partie dédiée aux soins intensifs et une autre à la pré-réanimation, dotées de tous les équipements médicaux et biomédicaux nécessaires à la prise en charge des cas critiques.

Notons bien que le ministère, à défaut d’anticipation, n’établit généralement des hôpitaux de campagne dans une ville, que lorsque le nombre de cas d’infection y explose.

D’autant plus que malgré ces édifications, le nombre de patients contaminés, ayant besoin de traitement hospitalier, dépasse toujours la capacité d’accueil de ces établissements.

Le transfert médicalisé des patients de Covid-19 : en France, ça a marché

Du 18 mars au 19 avril, la France a procédé à un transfert de 644 patients atteints du Covid-19, vers des structures moins en tension dans d’autres régions. Des opérations, qui ont donné des résultats positifs, présentées par le Premier ministre français comme « un exploit logistique remarquable, un exploit médical remarquable et un exploit humain qu’il faut souligner ».

Dans la situation actuelle du Maroc, similaire à celle que vivait la France, le Maroc pourrait songer à prendre exemple et exploiter cette solution. Ce à quoi la députée Istiqlalienne, Saïda Aït Bouali répond : « Contrairement à la France qui a des régions riches, les infrastructures hospitalières manquent d’investissement, dans la majorité des régions marocaines ».

Nabil LAAROUSSI

Encadré

Transfert des malades Covid-19, une solution en Europe

La pandémie de la Covid-19 avait envahi l’Europe bien avant d’arriver au Maroc. L’Italie, l’Espagne et la France en étaient les pays les plus touchés. Avec des bilans quotidiens effrayants, les unités hospitalières dans ces trois pays furent saturées. En Italie, pays lourdement accablé, le pays a enregistré entre mi-mars et mi-avril entre 3500 et 7000 cas par jours alors qu’en Espagne les cas positifs ont atteint jusqu’à 9159 cas en une seule journée. En France, la période allant de la fin du mois de mars au mois d’avril était éprouvante avec des bilans journaliers qui n’ont pas été en dessous de 1613 sachant qu’au 31 mars 7578 cas ont été enregistrés.

L’augmentation soudaine des nombre des cas dans ces pays a entraîné une saturation des services de réanimation, ce qui a induit les autorités locales à entreprendre des opérations de transferts de malades. En France, par exemple, 644 patients ont été transportés principalement depuis le Grand Est et l’Ile-de-France dans d’autres régions ou dans des pays voisins afin de soulager la pression sur les services de réanimation saturés. Les malades ont été transportés par l’intermédiaire du train médicalisé, par avions militaires et civils, ainsi que par des transports terrestres et par bateau.

En Espagne, face à la saturation des hôpitaux des métropoles, le ministère de la Santé avait vu en le transfert des malades gravement atteints, une solution mais qui ne fut pas mise en oeuvre.

Face à l’exacerbation de la situation en France et en Italie, l’Allemagne avait donné son coup de main en accueillant plusieurs malades au Covid-19 français et italiens sur son territoire.

3 questions à M. Allal Amraoui

Allal Amraoui
Allal Amraoui
Soigner localement avant de penser au transfert des patients

Nous avons contacté le chirurgien et député istiqlalien Allal Amraoui pour nous donner une évaluation de la gestion de la prise en charge des patients atteints du Coronavirus.

- Comment évaluez-vous la gestion actuelle de la prise en charge des patients Covid-19 ?
- Il faut dire que la période du confinement a permis aux structures sanitaires de bien se préparer et de prévoir un surplus de lits de réanimation, pour parer à l’éventualité d’une demande importante des malades Covid-19. Malgré cet effort consenti, aujourd’hui, les structures des grandes villes, où le virus circule activement, peinent à répondre à la demande et au besoin accrus de prise en charge des cas compliqués, sachant que les cas légers sont traités chez eux.

- Dans ce contexte, quelles sont les autres options à explorer?
- D’abord, on constate que l’une des défaillances les plus importantes de notre système de santé, c’est qu’il n’arrive pas à déployer en de pareilles situations les ressources humaines et matérielles du secteur privé, sachant que l’une des bases fondamentales de la refonte globale de notre système de santé, est l’intégration du secteur privé dans la politique de la santé publique.

Le deuxième point est essentiel et très important.

Aujourd’hui, l’OMS et la communauté scientifique mondiale sont unanimes et insistent sur l’intérêt et la nécessité d’augmenter le nombre de tests PCR, pour contrer la propagation du virus. D’où, encore une fois, la nécessité d’intégrer des laboratoires privés qui répondent aux normes exigées, à la réalisation des tests PCR, pour accroître l’effort à ce niveau.

Ce n’est qu’ainsi et en permettant à tous les médecins du secteur privé de participer efficacement à la riposte, qu’on arrivera à reconnaître les cas asymptomatiques et légers, les mettre en isolation, et briser la chaîne de contaminations.

- Que pensez-vous du transfert des patients vers des hôpitaux de régions moins impactées ?
- Nous ne sommes pas encore arrivés à ce stade.
Il faut d’abord exploiter tous les moyens matériels et les ressources humaines disponibles localement en impliquant le secteur privé, avant de penser à cette éventualité.

Recueillis par N. L.

Repères

Les conditions de base d’une chambre de réanimation
Il s’agit d’abord d’un lieu de surveillance visuelle rapprochée, et de surveillance des constantes vitales des patients grâce à un monitorage cardiovasculaire et respiratoire. En outre, plusieurs conditions doivent être respectées, afin de garantir le confort et le bien-être du patient, notamment un point d’eau pour assurer les soins d’hygiène du patient, un éclairage naturel, le confort acoustique avec des équipements peu bruyants et un contrôle de la température et du taux d’humidité de l’air ambiant d’un local.
Respirateurs « Made in Morocco »
Dans la lutte contre les répercussions sanitaires de la Covid-19, le Maroc a fait un pas de géant grâce à un projet réalisé par des ingénieurs multidisciplinaires qui ont développé un respirateur artificiel 100% marocain. Ces derniers, après un mois et demi de tests réalisés par deux centres techniques (CETIEV et CERIMME), ont reçu la certification « CE médical ». Pourtant, le ministère de la Santé refuse toujours de réceptionner ces respirateurs 100% marocains, faute de ne pas avoir été enregistrés en tant que dispositif médical.



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