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Les microcrédits à l’épreuve des programmes Covid


Rédigé par Chaimae BARKI Jeudi 10 Juin 2021

L’avènement de la crise Covid a complètement chamboulé le secteur du microcrédit, lequel a créé de nouvelles formules plus adaptées à la conjoncture. Parallèlement, ce dernier s’est doté d’un nouveau cadre légal devant lui permettre d’aller de l’avant.



Les microcrédits à l’épreuve des programmes Covid
Alors que le secteur de la microfinance passait par un « moment Minsky », la venue inopinée du Covid-19 et l’émergence des nouvelles formules de financements, tels que le programme « Intelaka », Damane Oxygène ou encore Damane Relance ont non seulement dévoilé les défaillances et les carences dont souffre le marché du microcrédit, mais a également créé une concurrence qui a perturbé ce dernier.

En effet , lesdits programmes nés à l’ombre du Covid, ont cannibalisé une bonne part des institutions de microcrédit. Selon les derniers chiffres officiels, durant la phase Covid, un total de 96.000 prêts ont été garantis par l’Etat pour un montant de près de 67 milliards de DH. «Intelaka » a pour sa part permis l’octroi de 15.085 crédits garantis à près de 12.500 entreprises à fin décembre de l’année écoulée. Le constat est donc sans appel.

C’est ainsi que l’Exécutif a adopté, en mai, après un long attentisme, le projet de loi n°50.20, conférant au secteur de nouvelles orientations qui viendront le dynamiser et favoriser l’inclusion financière au Royaume, dans une conjoncture où les entreprises marocaines, peinent à voir le bout du tunnel, suite aux effets ravageurs de la crise sanitaire. Car oui, la crise a certes révélé l’importance du secteur d’activité de la micro finance, mais il a également dévoilé sa vulnérabilité compte tenu de la spécificité de ses clients qui ont bénéficié d’un report massif des remboursements des microcrédits pour une durée moyenne de 3 mois sans intérêts et sans frais. Il s’agit selon le président de la Fédération nationale des associations de microcrédit (FNAM), Ahmed Ghazali de 665.000 dossiers de micro crédit représentant un encours de 6,2 milliards de dirhams (MMDH) soit 86% de l’encours global du secteur. Cette tendance, dont l’objectif était d’aider les clients en difficulté afin que les revenus et les emplois ne soient pas affectés de manière disproportionnée et éviter les cessations d’activité, a eu un impact négatif sur le produit net de Microcrédit, estimé à quelque 350 millions de dirhams de manque à gagner.

La crise bouleverse le calendrier des réformes

Les opérateurs ont longuement aspiré à une évolution rapide du cadre réglementaire de la microfinance, et ce, en vue d’assurer un environnement institutionnel, concurrentiel et réglementaire, compétitif permettant aux différents acteurs du secteur d’améliorer leurs performances et de contribuer efficacement à la réalisation des objectifs de la stratégie du secteur. Après plusieurs atermoiements, la très attendue loi régissant le microcrédit a été adoptée le mois dernier, fixant «le plafond des microcrédits et clarifie le système de liquidation des associations de microfinance dont l’accréditation n’a pas été encore retirée». Présentant ce projet de loi, le ministre de l’Economie et des Finances, Mohmmed Benchaâboun, a souligné que celui-ci « vise à adapter les dispositions de cette loi avec celles du droit bancaire et d’assurer une représentation unique pour les établissements du microcrédit, peu importe leur forme juridique». En réponse aux griefs des IMF le ministre a indiqué « qu’il a fallu mettre en place un cadre légal qui vise à faire connaître les établissements de la microfinance et leur activité qui comprend l’octroi des microcrédits et les opérations de la micro-assurance, selon la réglementation en vigueur». L’idée est également de faire connaitre les possibilités offertes par la loi en termes de création de ces établissements, qui peuvent opter pour deux statuts, en l’occurrence une association assimilée à un établissement de crédit ou une société par actions assimilée à un établissement de crédit.

Quels effets sur les IMF

La force du microcrédit résident dans les petites sommes mises en jeu que les banques classiques ont tendance à refuser. La somme de ces crédits a été revue à la hausse avec cette nouvelle loi. Le plafond fixé est ainsi passé de 50.000 à 150.000 dirhams selon que l’emprunteur postulant vise : à créer sa propre activité de production ou de service en vue de son insertion économique ; à acquérir, construire ou améliorer son logement, ou bien ; étant commerçant et moyennant certaines conditions, vise à créer ou développer son activité de production ou de service. On note également un élargissement certain des services prodigués aux clients. Désormais, les institutions de microfinance peuvent, selon certaines conditions et conformément à l’octroi de l’agrément de Bank Al-Maghrib recevoir des fonds du public et aussi exercer (sous réserve de l’agrément de l’ACAPS) des opérations de micro-assurances conformément à la législation en vigueur.

Parmi les nouveautés introduites par ce texte, figure également l’introduction de la possibilité de constitution des institutions de microfinance sous deux formes juridiques distinctes à savoir la forme associative en tant qu’organisme assimilé à un établissement de crédit ou la forme de société anonyme en tant qu’établissement de crédit. Sans oublier la définition de l’institution de microfinance comme toute personne morale exerçant les activités de microfinance au profit des personnes à revenus faibles en vue de la création ou du développement des activités de production ou de services et des activités génératrices de revenus et créatrices d’emploi.

En somme l’idée est de promouvoir l’accès au financement pour les ménages à faible revenu et les micros et petites entreprises à travers la promotion d’un secteur de la microfinance durable et inclusive.L’espoir est de mise.

3 questions à Abdelatif Laamrani

Ce nouveau projet de loi pourrait déroger au principe du « monopole bancaire »

Avocat aux Barreaux de Casablanca, de Paris et de Montréal, Docteur en Droit, Abdelatif Laamrani a répondu à nos questions à propos du nouveau cadre légal des Institutions de la MicroFinance.

- Selon l’article 12 de la loi 103-12 sur les organismes de crédit et les organismes assimilées, « seules » les banques classiques peuvent collecter des fonds du public, alors que dans la nouvelle loi 50-20, il est permis aux sociétés de microcrédit d’en faire autant. Ne trouvez vous pas que cette nouvelle loi déroge à celle qui la précède ?

- Cette question reste en suspens depuis l’adoption de ce nouveau projet de loi 50-20. En effet, à partir de la promulgation de ladite loi « 50-20 » les Institutions de Micro-Finance (IMF), pourraient recevoir les fonds du public mais différemment des banques classiques. Cette loi pourrait déroger à ce qu’on appelle le principe du « monopole bancaire », qui prévoit que « seules » les banques peuvent faire un certain nombre d’opérations, notamment l’octoi de crédit et surtout la récolte des fonds. Toutefois, ce qu’il faudrait savoir c’est que Bank Al Maghreb (BAM) aujourd’hui, ainsi que l’ensemble de microcosme bancaire, sont entrain de négocier, cherchant un bon arrangement qui n’entrave pas la concurrence bancaire ce qui pourrait faire perdre aux banques leurs dépôts à terme ne dépassant pas les un, deux ou 3 ans.

- Les Taux d’intérêts des établissements de la microfinance sont-ils régis par BAM ou par la loi de l’offre et de la demande ?

- Il faut savoir qu’il ya un Taux Effectif Global (TEG) qui est fixé par l’offre et la demande et un Taux Maximum des Intérêts Conventionnel (TMIC) qui se veut comme un taux fixé par la BAM. Tout établissement de crédit, y compris les IMF doivent se soumettre aux mêmes préscriptions légales, qui stipulent que les établissement de crédit doivent globalement appliquer le taux fixé par l’offre et la demande mais sans pour autant aller au delà du plafond prétabli et fixé par BAM.

- À votre avis, qu’est ce qui explique les taux d’intérêts excessivement élevés ?

- Généralement, la nature de l’activité des établissements de microcrédit est ce qui explique leur taux d’intérêts exubérants. En effet, l’une des princiaples causes sont les frais de gestion des établissements de microcrédit qui émanent d’une distribution plus étendue notamment dans les zones rurales comparativement aux banques classiques. Il y a également la cause du risque des impayés qui reste notablement plus élevé, puisque la clientèle socio-professionnelle ciblée connait une fragilité sociale qui par conséquent impacte la solvabilité.








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