Perçu comme une porte d’entrée en Afrique, le Maroc suscite bien évidemment la convoitise des investisseurs étrangers. Stabilité politique, dotation importante en infrastructures, main-d’oeuvre qualifiée et positionnement stratégique avec deux façades maritimes et proximité de l’Europe, autant d’atouts qui font du Royaume un partenaire crédible. Raison pour laquelle les puissances mondiales, essentiellement la Chine, l’Union Européenne et les Etats-Unis se livrent une bataille qui ne dit pas son nom pour y accroître leur influence.
“Les pays de l’Afrique, y compris le Maroc, ont choisi leur propre voie de développement, en diversifiant leurs partenariats stratégiques ces dernières années”, fait remarquer Li Changlin, Ambassadeur de la République populaire de Chine au Maroc, dans une déclaration à « L’Opinion », tout en réitérant la volonté de Pékin pour que ses nouvelles “routes de la soie” soient porteuses d’un développement sans précédent pour l’Afrique, notamment pour le Maroc.
Le Royaume, ayant adhéré à ce chantier gigantesque dès 2017, a fait preuve de volontarisme en signant, en janvier 2022, la Convention relative à la mise en oeuvre conjointe de la Ceinture et de la Route. Les retombées sont prometteuses : des investissements, dont 80 projets en cours de réalisation à cette heure-ci. On en cite le méga-projet Tanger-Tech, censé attirer 200 investisseurs industriels. Pékin veut entamer sa route de la soie au Maroc avec de grands projets d’infrastructures, en proposant ses services pour la réalisation de la Ligne à grande vitesse reliant Marrakech à Agadir. Un projet convoité également par les Français.
L’Europe propose le “green deal”
Par ailleurs, bien que le commerce ait prospéré ces cinq dernières années (6 milliards de volume en 2021 au lieu de 4 en 2016), le Maroc cherche plus d’investissements. Ce que l’Europe promet de fournir dans le cadre de son projet planétaire “Global Gateway”, qui devrait fournir 1,6 milliard d’euros d’investissements orientés prioritairement vers la transition énergétique et la digitalisation.
C’est ainsi que l’a présenté la présidente de la Commission Européenne, Ursula Von Der Leyen, lors de sa dernière visite au Maroc où elle était venue fortifier le nouveau «Partenariat euro-marocain de prospérité partagée», dans lequel Bruxelles entend appuyer les réformes menées par le Royaume pour sa modernisation. Une enveloppe de 389 millions d’euros vouée au financement des programmes de développement.
Aussi, l’Europe voit-elle dans le Maroc, pays à grand potentiel d’énergie solaire et d’hydrogène, un futur pourvoyeur d’énergie verte dans les années à venir. Une volonté explicitée aussi bien par la Commission de Bruxelles que par l’Allemagne, dont la ministre des Affaires étrangères, Annalena Baerbock, a axé la majeure partie de l’agenda de sa dernière visite au Maroc à ce sujet.
Par ailleurs, un point commun relie les nouvelles routes de la soie et le “Global Gateway”, les deux prétendent proposer un partenariat mutuellement bénéfique avec un foisonnement d’investissements non conditionnés. La Chine est connue pour avoir fondé son offensive en Afrique sur la mise en place d’infrastructures en contrepartie des matières premières tandis que l’Europe veut redorer son image et se débarrasser du passé colonial et de sa politique paternaliste.
Le Maroc face à des choix décisifs
Au milieu de cette rivalité, le Royaume, dans sa volonté d’attirer le maximum d’IDE, est susceptible de faire face à un dilemme cornélien. C’est-à-dire arriver au point culminant où il devra choisir entre les deux. Force est de rappeler qu’après la pandémie, le Maroc a été souvent présenté comme l’un des candidats sérieux pour abriter les industries européennes délocalisées en Asie. Une ambition que ne cache pas le gouvernement marocain, dont le ministre de l’Industrie et du Commerce, Ryad Mezzour.
Dans une interview accordée à « L’Opinion », le ministre a précisé que “le Maroc dispose de tout le potentiel nécessaire pour devenir une base arrière industrielle de l’Europe”. Pour leur part, les Etats-Unis s’intéressent de plus en plus au Maroc dans leur volonté d’accroître leur influence en Afrique. Profitant du statut du Royaume en tant que deuxième investisseur africain au continent, Washington a promis de mobiliser 3 milliards de dollars pour soutenir des IDE marocains.
Cette rivalité semble bénéfique, aux yeux de Jawad Kerdoudi, président de l’institut marocain des Relations internationales, qui estime que le Maroc pourrait, s’il le fait savamment, tirer profit des avantages de chacun. Encore faut-il ménager les trois puissances sur le plan politique en prenant des décisions équilibrées par rapport aux crises géopolitiques qui les opposent (guerre en Ukraine, crise de Taiwan, … ).
“Les pays de l’Afrique, y compris le Maroc, ont choisi leur propre voie de développement, en diversifiant leurs partenariats stratégiques ces dernières années”, fait remarquer Li Changlin, Ambassadeur de la République populaire de Chine au Maroc, dans une déclaration à « L’Opinion », tout en réitérant la volonté de Pékin pour que ses nouvelles “routes de la soie” soient porteuses d’un développement sans précédent pour l’Afrique, notamment pour le Maroc.
Le Royaume, ayant adhéré à ce chantier gigantesque dès 2017, a fait preuve de volontarisme en signant, en janvier 2022, la Convention relative à la mise en oeuvre conjointe de la Ceinture et de la Route. Les retombées sont prometteuses : des investissements, dont 80 projets en cours de réalisation à cette heure-ci. On en cite le méga-projet Tanger-Tech, censé attirer 200 investisseurs industriels. Pékin veut entamer sa route de la soie au Maroc avec de grands projets d’infrastructures, en proposant ses services pour la réalisation de la Ligne à grande vitesse reliant Marrakech à Agadir. Un projet convoité également par les Français.
L’Europe propose le “green deal”
Par ailleurs, bien que le commerce ait prospéré ces cinq dernières années (6 milliards de volume en 2021 au lieu de 4 en 2016), le Maroc cherche plus d’investissements. Ce que l’Europe promet de fournir dans le cadre de son projet planétaire “Global Gateway”, qui devrait fournir 1,6 milliard d’euros d’investissements orientés prioritairement vers la transition énergétique et la digitalisation.
C’est ainsi que l’a présenté la présidente de la Commission Européenne, Ursula Von Der Leyen, lors de sa dernière visite au Maroc où elle était venue fortifier le nouveau «Partenariat euro-marocain de prospérité partagée», dans lequel Bruxelles entend appuyer les réformes menées par le Royaume pour sa modernisation. Une enveloppe de 389 millions d’euros vouée au financement des programmes de développement.
Aussi, l’Europe voit-elle dans le Maroc, pays à grand potentiel d’énergie solaire et d’hydrogène, un futur pourvoyeur d’énergie verte dans les années à venir. Une volonté explicitée aussi bien par la Commission de Bruxelles que par l’Allemagne, dont la ministre des Affaires étrangères, Annalena Baerbock, a axé la majeure partie de l’agenda de sa dernière visite au Maroc à ce sujet.
Par ailleurs, un point commun relie les nouvelles routes de la soie et le “Global Gateway”, les deux prétendent proposer un partenariat mutuellement bénéfique avec un foisonnement d’investissements non conditionnés. La Chine est connue pour avoir fondé son offensive en Afrique sur la mise en place d’infrastructures en contrepartie des matières premières tandis que l’Europe veut redorer son image et se débarrasser du passé colonial et de sa politique paternaliste.
Le Maroc face à des choix décisifs
Au milieu de cette rivalité, le Royaume, dans sa volonté d’attirer le maximum d’IDE, est susceptible de faire face à un dilemme cornélien. C’est-à-dire arriver au point culminant où il devra choisir entre les deux. Force est de rappeler qu’après la pandémie, le Maroc a été souvent présenté comme l’un des candidats sérieux pour abriter les industries européennes délocalisées en Asie. Une ambition que ne cache pas le gouvernement marocain, dont le ministre de l’Industrie et du Commerce, Ryad Mezzour.
Dans une interview accordée à « L’Opinion », le ministre a précisé que “le Maroc dispose de tout le potentiel nécessaire pour devenir une base arrière industrielle de l’Europe”. Pour leur part, les Etats-Unis s’intéressent de plus en plus au Maroc dans leur volonté d’accroître leur influence en Afrique. Profitant du statut du Royaume en tant que deuxième investisseur africain au continent, Washington a promis de mobiliser 3 milliards de dollars pour soutenir des IDE marocains.
Cette rivalité semble bénéfique, aux yeux de Jawad Kerdoudi, président de l’institut marocain des Relations internationales, qui estime que le Maroc pourrait, s’il le fait savamment, tirer profit des avantages de chacun. Encore faut-il ménager les trois puissances sur le plan politique en prenant des décisions équilibrées par rapport aux crises géopolitiques qui les opposent (guerre en Ukraine, crise de Taiwan, … ).
Anass MACHLOUKH
Trois questions à Jawad Kerdoudi
« Le Maroc peut jouer sur cette compétition et obtenir le maximum d’avantages »
Président de l’Institut marocain des Relations internationales, Jawad Kerdoudi a répondu à nos questions.
- Le soutien marocain à la “Chine Unie” peut-il froisser les Américains ?
- Le soutien du Maroc à la Chine sur la crise de Taïwan est logique. Le Maroc a toujours appuyé la souveraineté nationale et l’intégrité territoriale. C’est le même problème pour nous dans la récupération de nos Provinces sahariennes. Je rappelle que le Maroc prend ses décisions en politique étrangère en toute souveraineté. Il est vrai que la position du Maroc vis-à-vis de Taïwan va déplaire aux Etats-Unis, qui soutiennent militairement le maintien du statu quo dans cette île revendiquée par la Chine. Cependant, je ne pense pas que les Etats-Unis vont changer leur position sur la marocanité du Sahara.
- Pensez-vous que cela poussera la Chine à regarder le conflit du Sahara autrement et pourquoi pas faire évoluer sa position ?
- La Chine a voté la dernière Résolution du Conseil de Sécurité de l’ONU du 31 Octobre 2021 qui était favorable au Maroc, mais avait exprimé avec le Vietnam et le Mexique « des regrets que le texte adopté n’a pas été plus équilibré et ne reflète pas mieux la situation sur le terrain». Je pense que le soutien franc du Maroc concernant Taïwan va pousser la Chine à un soutien plus fort de la position marocaine.
- Quel regard portez-vous sur la rivalité entre l’Europe, les Etats-Unis et la Chine en Afrique et notamment au Maroc ?
- Il est certain qu’il y a une compétition entre la Chine, l’Europe et les Etats-Unis pour augmenter leur influence en Afrique. Je pense que c’est une bonne chose pour les pays africains, qui vont jouer sur cette compétition et obtenir le maximum d’avantages de chaque compétiteur.
- Le soutien marocain à la “Chine Unie” peut-il froisser les Américains ?
- Le soutien du Maroc à la Chine sur la crise de Taïwan est logique. Le Maroc a toujours appuyé la souveraineté nationale et l’intégrité territoriale. C’est le même problème pour nous dans la récupération de nos Provinces sahariennes. Je rappelle que le Maroc prend ses décisions en politique étrangère en toute souveraineté. Il est vrai que la position du Maroc vis-à-vis de Taïwan va déplaire aux Etats-Unis, qui soutiennent militairement le maintien du statu quo dans cette île revendiquée par la Chine. Cependant, je ne pense pas que les Etats-Unis vont changer leur position sur la marocanité du Sahara.
- Pensez-vous que cela poussera la Chine à regarder le conflit du Sahara autrement et pourquoi pas faire évoluer sa position ?
- La Chine a voté la dernière Résolution du Conseil de Sécurité de l’ONU du 31 Octobre 2021 qui était favorable au Maroc, mais avait exprimé avec le Vietnam et le Mexique « des regrets que le texte adopté n’a pas été plus équilibré et ne reflète pas mieux la situation sur le terrain». Je pense que le soutien franc du Maroc concernant Taïwan va pousser la Chine à un soutien plus fort de la position marocaine.
- Quel regard portez-vous sur la rivalité entre l’Europe, les Etats-Unis et la Chine en Afrique et notamment au Maroc ?
- Il est certain qu’il y a une compétition entre la Chine, l’Europe et les Etats-Unis pour augmenter leur influence en Afrique. Je pense que c’est une bonne chose pour les pays africains, qui vont jouer sur cette compétition et obtenir le maximum d’avantages de chaque compétiteur.
Recueillis par A. MACHLOUKH